Vu la requête, enregistrée le 21 juillet 2008, présentée pour M. Zbigniew A, demeurant ..., par Me Delerue ;
M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0505278 en date du 2 avril 2008 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1998 ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
...................................................................................................
Vu la convention fiscale franco-polonaise du 20 juin 1975 ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 septembre 2011 :
- le rapport de M. Bédier, président-assesseur,
- et les conclusions de M. Dubois, rapporteur public,
Considérant que M. et Mme A ont été assujettis à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de l'année 1998 à la suite d'un examen contradictoire d'ensemble de leur situation fiscale personnelle et d'une vérification de comptabilité de la SA Mazurek Marines Services, dont M. A était le dirigeant et dont il détenait la majorité du capital ; que, par requête enregistrée le 21 juillet 2008, M. A a demandé à la Cour d'annuler le jugement en date du 2 avril 2008 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles son foyer fiscal a été assujetti au titre de l'année 1998 ainsi que des pénalités qui les ont assorties ; qu'à la suite du décès de M. A, survenu le 2 décembre 2008, Mme A reprend l'instance engagée par celui-ci ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R 611-1 du code de justice administrative : La requête et les mémoires, ainsi que les pièces produites par les parties, sont déposés ou adressés au greffe. La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues aux articles R. 611-3, R. 611-5 et R. 611-6. Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux ;que le mémoire de l'administration fiscale enregistré au greffe du tribunal administratif le 21 mars 2008, qui n'était pas le premier mémoire en défense de l'administration, ne comportait pas d'éléments de fait ou de droit nouveaux par rapport au précédent mémoire déposé par la même partie ; que, par suite, la circonstance que ce mémoire n'est parvenu au requérant que le jour de l'audience n'a pas porté atteinte au principe du contradictoire et n'a pas été de nature à vicier la régularité du jugement ;
Considérant, en deuxième lieu, que le moyen par lequel M. A soutenait devant les premiers juges que les impositions contestées avaient été recouvrées de façon irrégulière par le trésorier des Pennes-Mirabeau, alors qu'il était domicilié en Pologne, relatif au recouvrement desdites impositions, était inopérant au soutien d'une contestation portant sur l'assiette de l'impôt ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le tribunal aurait entaché son jugement de défaut de motivation en ne répondant pas à ce moyen ;
Considérant, en troisième lieu, que, contrairement à ce que soutient la requérante, le tribunal administratif, qui n'était pas tenu de répondre à l'ensemble des arguments invoqués par M. A à l'appui de ses moyens, a suffisamment motivé les raisons pour lesquelles il a estimé que l'intéressé devait être regardé comme ayant sa résidence fiscale en France tant au regard de l'application de la loi interne qu'au regard de la convention fiscale franco-polonaise du 20 juin 1975 ;
Sur le principe de l'assujettissement de M. A à l'impôt en France :
Considérant qu'aux termes de l'article 4 A du code général des impôts : Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus. Celles dont le domicile fiscal est situé hors de France sont passibles de cet impôt en raison de leurs seuls revenus de source française ; que l'article 4 B du même code dispose que : 1. Sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A : a. les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal (...) ; et qu'aux termes de l'article 4 de la convention conclue le 20 juin 1975 entre la France et la Pologne en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôt sur le revenu et sur la fortune : 1. Au sens de la présente convention, l'expression résident d'un Etat contractant désigne toute personne qui, en vertu de la législation dudit Etat, est assujettie à l'impôt dans cet Etat, en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction ou de tout autre critère de nature analogue, mais n'inclut pas les personnes qui ne sont imposables dans cet Etat que pour le revenu qu'elles tirent de sources situées dans ledit Etat ou pour la fortune qu'elles possèdent dans cet Etat. 2. Lorsque, selon la disposition du paragraphe 1, une personne physique est considérée comme résident de chacun des Etats contractants, sa situation est réglée de la manière suivante : a) Cette personne est considérée comme résident de l'Etat contractant où elle dispose d'un foyer d'habitation permanent. Lorsqu'elle dispose d'un foyer d'habitation permanent dans chacun des Etats contractants, elle est considérée comme résident de l'Etat contractant avec lequel ses liens personnels et économiques sont les plus étroits (centre des intérêts vitaux) ; b) Si l'Etat contractant où cette personne a le centre de ses intérêts vitaux ne peut pas être déterminé, ou si elle ne dispose d'un foyer d'habitation permanent dans aucun des Etats contractants, elle est considérée comme résident de l'Etat contractant où elle séjourne de façon habituelle ; c) Si cette personne séjourne de façon habituelle dans chacun des Etats contractants ou si elle ne séjourne de façon habituelle dans aucun d'eux, elle est considérée comme résident de l'Etat contractant dont elle possède la nationalité ; d) Si la situation de cette personne ne peut être réglée conformément aux dispositions des alinéas a), b), c) ci-dessus, les autorités compétentes des Etats contractants tranchent la question d'un commun accord (...) ;
Considérant en outre que, pour l'application des dispositions du a. du 1 de l'article 4 B précité du code général des impôts, le foyer s'entend du lieu où le contribuable habite normalement et a le centre de ses intérêts familiaux, sans qu'il soit tenu compte des séjours effectués temporairement ailleurs en raison des nécessités de la profession ou de circonstances exceptionnelles ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. et Mme A ont mentionné sur leurs déclarations de revenus de l'année 1998 qu'ils étaient domiciliés à Cabriès dans le département des Bouches-du-Rhône : que les époux disposaient dans cette même localité d'une habitation ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que M. A n'aurait pas résidé de manière habituelle en 1998 dans cette localité ; que le jugement du Tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence en date du 8 décembre 2000, prononçant la séparation de corps des époux, lui-même consécutif à une ordonnance de non-conciliation en date du 29 juin 2000 portant autorisation de résidence séparée des époux ne se livre, contrairement à ce que soutient la requérante, à aucune constatation de fait quant au lieu de résidence de M. A au cours de l'année 1998 et ne comporte en toute hypothèse aucune autorité de chose jugée ; que, dans ces conditions, M. A doit être regardé comme ayant eu en France son foyer en 1998, au sens des dispositions précitées de l'article 4 B du code général des impôts et était en principe, au titre de ces mêmes années, passible de l'impôt sur le revenu en France, à moins que M. A ne puisse se voir reconnaître la qualité de résident de Pologne au sens des stipulations précitées de la convention franco-polonaise ; qu'aucun élément de fait n'est toutefois apporté qui serait de nature à faire apparaître que M. A aurait disposé d'un foyer d'habitation permanent en Pologne ; qu'il était en conséquence également imposable en France en application du a) du 2. de l'article 4 de la convention franco-polonaise susvisée ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant, en premier lieu, que la décision prise par la juridiction administrative dans un litige relatif à l'imposition d'une société à l'impôt sur les sociétés est, par elle-même, sans influence sur l'imposition du dirigeant ou de l'associé de cette société à l'impôt sur le revenu, alors même qu'il s'agirait d'un excédent de distribution révélé par un redressement des bases de l'impôt sur les sociétés que l'administration entend imposer à l'impôt sur le revenu entre les mains du bénéficiaire ; qu'il suit de là que Mme A ne peut utilement se prévaloir de ce que la procédure de vérification de comptabilité de la SA Mazurek Marines Services aurait été irrégulière pour contester la fraction des impositions procédant des revenus réputés distribués à M. A par cette société ;
Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que M. A n'aurait pas reçu la notification de redressement adressée à la SA Mazurek Marines Services demeure également sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition dès lors qu'il n'est pas contesté que l'intéressé a reçu à titre personnel une notification de redressement l'informant des rehaussements apportés aux revenus de son foyer fiscal ; qu'au surplus, le moyen manque en fait ;
Considérant, en troisième lieu, que si M. A soutient qu'il n'aurait pas eu accès directement aux documents de la société, cet accès lui étant refusé par le liquidateur de celle-ci et que, de ce fait, il n'aurait pu organiser sa défense pendant les opérations de contrôle, il résulte de l'instruction qu'il a été en mesure de répondre avec précision, par lettre du 7 juin 1999, aux notifications de redressement concernant la SA Mazurek Marines Services et qu'il disposait de toutes les informations utiles à cet effet ; qu'ainsi, le moyen ne peut qu'être écarté comme manquant en fait ;
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne le moyen tiré de l'imposition séparée des époux :
Considérant qu'aux termes de l'article 6 du code général des impôts : 1. Chaque contribuable est imposable à l'impôt sur le revenu, tant en raison de ses bénéfices et revenus personnels que de ceux de ses enfants et des personnes considérées comme étant à sa charge au sens des articles 196 et 196 A bis. Sauf application des dispositions des 4 et 5, les personnes mariées sont soumises à une imposition commune pour les revenus perçus par chacune d'elles et ceux de leurs enfants et des personnes à charge mentionnés au premier alinéa ; cette imposition est établie au nom de l'époux, précédée de la mention Monsieur ou Madame (...) 4. Les époux font l'objet d'impositions distinctes : a. Lorsqu'ils sont séparés de biens et ne vivent pas sous le même toit ; b Lorsqu'étant en instance de séparation de corps ou de divorce, ils ont été autorisés à avoir des résidences séparées ; c Lorsqu'en cas d'abandon du domicile conjugal par l'un ou l'autre des époux, chacun dispose de revenus distincts (...) ;
Considérant que la requérante soutient que M. A avait quitté le domicile conjugal et disposait seul de revenus et que, par suite, ce serait à tort que les impositions ont été établies, au titre de l'année 1998, au nom du foyer fiscal qu'il formait avec son épouse ; que la requérante doit être regardée comme demandant par ce moyen l'application des dispositions du c. du 4. de l'article 6 précité du code général des impôts ;
Considérant toutefois que M. et Mme A, mariés sous le régime légal de la communauté de biens réduite aux acquêts, ont déposé, pour l'année 1998 une déclaration commune d'ensemble de leurs revenus et se sont ainsi présentés dans leurs relations avec l'administration fiscale comme étant domiciliés à la même adresse ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que M. A aurait abandonné le domicile conjugal au cours de l'année 1998 ; que, dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à soutenir que M. A et elle-même auraient dû faire l'objet d'une imposition séparée au titre de l'année 1998 ;
En ce qui concerne les revenus réputés distribués par la SA Mazurek Marine Service :
Considérant qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous le bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital (...) ; qu'aux termes de l'article 110 du même code : Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109, les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés (...) ; que le contribuable ayant, dans les délais, contesté le montant des redressements qui lui ont été notifiés en matière d'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, il appartient à l'administration d'apporter la preuve, d'une part, de l'existence et du montant des revenus distribués, et d'autre part, de leur appréhension par M. A ;
S'agissant de l'existence et du montant des revenus distribués :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le vérificateur a procédé à la rectification du chiffre d'affaires réalisé en 1998 par la SA Mazurek Marines Services en totalisant les recettes apparaissant sur les factures de ventes établies par la société au cours de l'année ; que le chiffre d'affaires hors-taxe ainsi obtenu s'est trouvé supérieur de 325 783 francs au chiffre d'affaires hors-taxe déclaré par la société ; que, pour contester cette rectification, la requérante se borne à faire état d'une réponse de la société au vérificateur en date du 20 janvier 2000 indiquant que la société aurait constaté un déficit d'un montant de 2 617 066 francs, lettre qui ne concerne pas l'année 1998, seule en litige ; que, par suite, l'administration doit être regardée comme établissant l'omission de recettes constaté à hauteur de la somme de 325 783 francs ;
S'agissant de l'appréhension par M. A des revenus distribués :
Considérant qu'il résulte de l''nstruction et notamment des constatations effectuées par le vérificateur que M. A exerçait au cours des années des impositions en litige les fonctions de président du conseil d'administration de la SA Mazurek Marine Service dont il détenait 91,3 % du capital et qu'il disposait de la signature sociale ; que la production d'un extrait K bis daté du 31 mars 2006 de la SA Mazurek Marine Service et d'attestations de salariés de la société ne sont pas de nature à infirmer ces éléments de fait et à justifier que M. A n'aurait assuré, du fait de problèmes de santé, aucune fonction de direction dans la société au cours des années en litige ; que, par suite, l'administration fiscale a pu retenir à bon droit, au vu de la détention majoritaire par le contribuable du capital de la société et des circonstances tirées du fonctionnement même de l'entreprise, que M. A s'est comporté comme le maître de l'affaire ; qu'elle doit être regardée, par suite, comme apportant la preuve qui lui incombe de l'appréhension par le contribuable des revenus distribués par la société ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de M. Zbigniew A ; que doivent être rejetées par voie de conséquence ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Joanna A et au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement.
Copie en sera adressée à Me Delerue et à la direction de contrôle fiscal Sud-Est.
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N° 08MA03422