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11/10/2011 | FRANCE | N°09MA03161

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 11 octobre 2011, 09MA03161


Vu la requête, enregistrée le 14 août 2009, présentée par la SELARL Collard et Associés, pour Mme Annette A, élisant domicile ... ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700262 rendu le 25 juin 2009 par le tribunal administratif de Toulon qui a rejeté sa demande d'annulation de la décision par laquelle le Premier Ministre a refusé de lui attribuer l'aide financière instituée par le décret n° 2004-751 du 27 juillet 2004 ;

2°) d'annuler le refus précité du Premier Ministre en date du 26 septembre 2006 ;

3°) d'enjoindre au Premier Minis

tre de lui attribuer l'aide prévue par le décret du 27 juillet 2004 dans un délai de t...

Vu la requête, enregistrée le 14 août 2009, présentée par la SELARL Collard et Associés, pour Mme Annette A, élisant domicile ... ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700262 rendu le 25 juin 2009 par le tribunal administratif de Toulon qui a rejeté sa demande d'annulation de la décision par laquelle le Premier Ministre a refusé de lui attribuer l'aide financière instituée par le décret n° 2004-751 du 27 juillet 2004 ;

2°) d'annuler le refus précité du Premier Ministre en date du 26 septembre 2006 ;

3°) d'enjoindre au Premier Ministre de lui attribuer l'aide prévue par le décret du 27 juillet 2004 dans un délai de trois mois à compter de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 20 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de

l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble son premier protocole additionnel ;

Vu le décret n° 2004-751 du 27 juillet 2004 instituant une aide financière en reconnaissance des souffrances endurées par les orphelins dont les parents ont été victimes d'actes de barbarie durant la deuxième guerre mondiale ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre exceptionnel, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 septembre 2011 :

- le rapport de Mme Busidan, rapporteur,

- et les conclusions de Mme Vincent-Dominguez, rapporteur public ;

Considérant que Mme A interjette appel du jugement du 25 juin 2009 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande d'annulation de la décision en date du 26 septembre 2006 par laquelle le Premier ministre a refusé de lui attribuer l'aide financière instaurée par le décret du 27 juillet 2004 en reconnaissance des souffrances endurées par les orphelins dont les parents ont été victimes d'actes de barbarie durant la Deuxième Guerre mondiale ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 1er du décret du 27 juillet 2004 susvisé : Toute personne, dont la mère ou le père, de nationalité française ou étrangère, a été déporté, à partir du territoire national, durant l'Occupation pour les motifs et dans les conditions mentionnées aux articles L. 272 et L. 286 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, et a trouvé la mort en déportation, a droit à une mesure de réparation, conformément aux dispositions du présent décret, si elle était mineure de vingt et un ans au moment où la déportation est intervenue. Ce régime bénéficie également aux personnes, mineures de moins de vingt et un ans au moment des faits, dont le père ou la mère, de nationalité française ou étrangère, a, durant l'Occupation, été exécuté dans les circonstances définies aux articles L. 274 et L. 290 du même code ; qu'aux termes de l'article L. 290 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : Les français ou ressortissants français qui, à la suite de leur arrestation, pour tout autre motif qu'une infraction de droit commun, ont été exécutés par l'ennemi, bénéficient du statut des internés politiques, quelle que soit la durée de leur détention, a fortiori s'ils ont été exécutés sur-le-champ ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. Ange B, père de la requérante naturalisé français en 1936, qui travaillait à Marseille comme raboteur à la Société provençale de construction navale, a été arrêté sur son lieu de travail le 20 mars 1944 pour être envoyé sous contrainte travailler en Allemagne ; qu'alors qu'il s'était fait réformer et s'apprêtait à rentrer en France, il a été abattu dans la cour d'une usine le 16 août 1944 par un soldat allemand, avec lequel il s'était querellé ; que, dans ces conditions, le décès de M. B, exécuté après avoir été arrêté en France et détenu quelques mois en Allemagne, est intervenu dans les circonstances définies par les dispositions sus-rappelées de l'article L. 290 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; que, par suite, et contrairement à ce qu'a estimé le Premier Ministre dans le refus en litige, Mme A, née le 14 novembre 1943, entre dans le champ d'application des dispositions précitées de l'article 1er du décret du 27 juillet 2004 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 26 septembre 2006 par laquelle le Premier Ministre a refusé de lui attribuer l'aide financière instituée par le décret n° 2004-751 du 27 juillet 2004 ; que, par suite, elle est fondée à en obtenir l'annulation, ainsi que celle de la décision en litige ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution, par la même décision juridictionnelle ; qu'aux termes de l'article L. 911-3 du code de justice administrative : Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet ;

Considérant que la présente décision annule le refus précité du Premier Ministre au motif que Mme A remplit les conditions d'attribution de l'aide financière prévue par le décret du 27 juillet 2004 susvisé ; qu'ainsi, elle implique nécessairement que, dans le délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, le Premier Ministre lui alloue cette aide sous la forme d'une rente viagère, dès lors qu'il ressort des pièces du dossier de première instance que telle est l'option voulue par l'intéressée ; qu'il n'y a pas lieu, toutefois, d'assortir cette injonction de l'astreinte sollicitée ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. (...) ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce et en application de ces dispositions, de mettre à la charge de l'Etat (Premier Ministre) le versement à l'appelante de la somme de 1 500 euros qu'elle demande au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 0700262 rendu le 25 juin 2009 par le tribunal administratif de Toulon, et la décision du Premier Ministre en date du 26 septembre 2006 refusant d'allouer à Mme A l'aide financière instituée par le décret n° 2004-751 du 27 juillet 2004 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au Premier Ministre, dans un délai de trois mois suivant la notification du présent arrêt, d'allouer à Mme A, sous forme de rente viagère, l'aide financière instituée par le décret n° 2004-751 du 27 juillet 2004 .

Article 3 : L'État (Premier Ministre) versera à Mme A la somme de 1 500 euros

(mille cinq cents euros) en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Annette A et au Premier Ministre.

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N° 09MA03161 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09MA03161
Date de la décision : 11/10/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

69-02 Victimes civiles de la guerre. Questions propres aux différentes catégories de victimes.


Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: Mme Hélène BUSIDAN
Rapporteur public ?: Mme VINCENT-DOMINGUEZ
Avocat(s) : SELARL COLLARD et ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2011-10-11;09ma03161 ?
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