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11/07/2011 | FRANCE | N°09MA04525

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 11 juillet 2011, 09MA04525


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 3 décembre 2009, sous le n° 09MA04525, présentée pour M. Anatoli A, demeurant ..., par Me Molland, avocat ;

M. Anatoli A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0904993 en date du 4 novembre 2009, par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 16 juillet 2009 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11-11° du code de l'entr

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 3 décembre 2009, sous le n° 09MA04525, présentée pour M. Anatoli A, demeurant ..., par Me Molland, avocat ;

M. Anatoli A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0904993 en date du 4 novembre 2009, par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 16 juillet 2009 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et lui a fait obligation de quitter le territoire français ;

2°) d'annuler ladite décision ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer le titre de séjour sollicité et dans l'attente de lui délivrer un récépissé de demande de titre de séjour ;

.............

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'arrêté du 8 juillet 1999 relatif aux conditions d'établissement des avis médicaux concernant les étrangers malades ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 juillet 2011 :

- le rapport de Mme Markarian, rapporteur,

- les conclusions de M. Marcovici, rapporteur public,

- et les observations de Me Molland représentant M. A ;

Considérant que M. A, de nationalité russe, relève appel du jugement du 4 novembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet des Bouches-du-Rhône du 16 juillet 2009 rejetant sa demande de titre de séjour présentée sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur la légalité de la décision du 16 juillet 2009 :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire (...). La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin inspecteur de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code en vigueur à la date de la décision litigieuse : Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin inspecteur départemental de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé et, à Paris, par le médecin, chef du service médical de la préfecture de police. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de la population et des migrations, du ministre chargé de la santé et du ministre de l'intérieur, au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. ; qu'aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 8 juillet 1999, pris pour l'application de ces dispositions : L'étranger qui a déposé une demande de délivrance ou de renouvellement de carte de séjour temporaire en application de l'article 12 bis (11°) ou qui invoque les dispositions de l'article 25 (8°) de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 est tenu de faire établir un rapport médical relatif à son état de santé par un médecin agréé ou un praticien hospitalier. ; qu'aux termes de l'article 3 du même arrêté : (...) le médecin agréé ou le praticien hospitalier établit un rapport précisant le diagnostic des pathologies en cours, le traitement suivi et sa durée prévisible ainsi que les perspectives d'évolution et, éventuellement, la possibilité de traitement dans le pays d'origine. Ce rapport médical est transmis, sous pli confidentiel, au médecin inspecteur de santé publique de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales dont relève la résidence de l'intéressé ; que l'article 4 du même arrêté prévoit que : Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin inspecteur de santé publique de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales émet un avis précisant : / - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / - si l'intéressé peut effectivement ou non bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire ; /- et la durée prévisible du traitement. / Il indique, en outre, si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers son pays de renvoi. / Cet avis est transmis au préfet par le directeur départemental des affaires sanitaires et sociales. ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux parlementaires qui ont précédé l'adoption de la loi du 11 mai 1998, dont sont issues les dispositions précitées de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande au titre des dispositions du 11° de l'article L. 313-11, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin mentionné à l' article R. 313-22 précité, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire ; que lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine ; que si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les médecins inspecteurs de santé publique de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales des Bouches-du-Rhône ont estimé dans leur avis du 19 juin 2009 que le défaut de prise en charge médicale de M. A était de nature à emporter des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'il pouvait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que M. A, qui est né en 1965 au Kazakhstan, souffre de troubles durables et sévères de la personnalité liés à une névrose de guerre, le requérant ayant été militaire dans l'armée soviétique lors de la guerre d'Afghanistan ; que depuis son arrivée en 2001 en France, où il réside seul à Marseille, étant divorcé de son épouse qui réside à Kaliningrad avec ses deux enfants, l'intéressé est pris en charge en milieu psychiatrique et bénéficie de soins qui lui sont indispensables sous peine d'une dégradation de son état mental ; que les troubles dont souffre l'intéressé, indissociables de son passé, ont été stabilisés en France ; qu'un retour vers son pays d'origine compromettrait cette évolution favorable ; qu'au surplus, il n'est pas établi que le requérant, qui n'est pas de nationalité kazakhe et n'est pas originaire de Moscou, puisse effectivement bénéficier ailleurs qu'en France des soins que son état de santé nécessite ; que dans ces conditions le préfet des Bouches-du-Rhône a fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 313-11-11° précité ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt implique nécessairement, dès lors qu'il n'est pas allégué et qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'un changement de droit ou de fait y fasse obstacle, que le préfet des Bouches-du-Rhône délivre à M. A, une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale ; qu'il y a lieu d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer ce titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Marseille en date du 4 novembre 2009 et la décision en date du 16 juillet 2009 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de délivrer à M. A une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Anatoli A, au préfet des Bouches-du-Rhône et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

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N° 09MA04525


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09MA04525
Date de la décision : 11/07/2011
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. GUERRIVE
Rapporteur ?: Mme Ghislaine MARKARIAN
Rapporteur public ?: M. MARCOVICI
Avocat(s) : MOLLAND

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2011-07-11;09ma04525 ?
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