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16/06/2011 | FRANCE | N°10MA02732

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 16 juin 2011, 10MA02732


Vu la requête, enregistrée le 19 juillet 2010, présentée pour la SARL JP AUTO, dont le siège social est situé 12, avenue Emile Sari à Bastia, par Me Chayvialle- Paul ;

La SARL JP AUTO demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 2 du jugement n° 0800972 en date du 15 avril 2010 par lequel le Tribunal administratif de Bastia, après avoir prononcé, par l'article 1er du même jugement, la réduction du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé au titre de la période allant du 1er janvier 1999 au 31 juillet 2005, a rejeté le surplus de ses con

clusions tendant à la décharge de cette imposition ;

2°) de prononcer la déchar...

Vu la requête, enregistrée le 19 juillet 2010, présentée pour la SARL JP AUTO, dont le siège social est situé 12, avenue Emile Sari à Bastia, par Me Chayvialle- Paul ;

La SARL JP AUTO demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 2 du jugement n° 0800972 en date du 15 avril 2010 par lequel le Tribunal administratif de Bastia, après avoir prononcé, par l'article 1er du même jugement, la réduction du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé au titre de la période allant du 1er janvier 1999 au 31 juillet 2005, a rejeté le surplus de ses conclusions tendant à la décharge de cette imposition ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

...................................................................................................

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 mai 2011 :

- le rapport de M. Bédier, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Dubois, rapporteur public ;

- et les observations de Me Berguet, substituant Me Chayvialle- Paul, pour la SARL JP AUTO ;

Considérant qu'à la suite de deux vérifications de comptabilité de son activité d'achat-revente de véhicules automobiles neufs et d'occasion, des compléments de taxe sur la valeur ajoutée ont été réclamés à la SARL JP AUTO au titre, d'une part, de la période allant du 1er janvier 1999 au 31 août 2002 et, d'autre part, de la période allant du 1er septembre 2002 au 31 juillet 2005 ; que la société demande à la Cour d'annuler l'article 2 du jugement en date du 15 avril 2010 par lequel le Tribunal administratif de Bastia, après avoir prononcé, par l'article 1er du même jugement, la réduction des compléments de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés, a rejeté le surplus de ses conclusions tendant à la décharge de ces impositions ; que le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat demande pour sa part à la Cour de réformer l'article 1er du même jugement en remettant à la charge de la société les sommes en droits de 15 532 euros au titre de l'année 2001, 19 895 euros au titre de l'année 2002 et 10 325 euros au titre de l'année 2003 ainsi que les pénalités y afférentes ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que, par décision en date du 16 mars 2011, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur du contrôle fiscal sud-est a prononcé le dégrèvement, à concurrence de la somme de 186 241 euros en droits et pénalités au titre de la période allant du 1er janvier 1999 au 31 juillet 2005 du complément de taxe sur la valeur ajoutée réclamé à la SARL JP AUTO ; que la requête de la société est, dans cette mesure, devenue sans objet ;

Sur l'appel principal de la société :

En ce qui concerne le complément de taxe sur la valeur ajoutée réclamé à la SARL JP AUTO au titre de la période allant du 1er janvier 1999 au 31 août 2002 :

Considérant que le complément de taxe sur la valeur ajoutée réclamé à la SARL JP AUTO au titre de la période allant du 1er janvier 1999 au 31 août 2002 a fait l'objet de deux avis de mise en recouvrement, le premier daté du 26 août 2003 pour un montant de 127 033 euros et le second, en date du 6 juin 2005, pour un montant de 43 880 euros ; que, s'agissant de l'avis de mise en recouvrement du 26 août 2003, les premiers juges ont retenu à bon droit, en réponse à une fin de non-recevoir opposée par l'administration fiscale à la demande de la société, que les mentions portées sur l'acte n'indiquaient pas l'irrecevabilité d'une saisine directe du juge administratif et que l'absence de cette indication privait de toute portée l'indication des voies et délais de recours, en sorte que les délais prévus par les articles R. 196-1 et R. 196-3 du livre des procédures fiscales étaient inopposables au contribuable ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 256 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction alors applicable : Un avis de mise en recouvrement est adressé par le comptable public à tout redevable des sommes, droits, taxes et redevances de toute nature dont le recouvrement lui incombe lorsque le paiement n'a pas été effectué à la date d'exigibilité (...) ; qu'aux termes de l'article R. 256-1 du même livre dans sa rédaction applicable à l'avis de mise en recouvrement du 14 août 2003 : L'avis de mise en recouvrement prévu à l'article L. 256 indique pour chaque impôt ou taxe le montant global des droits, des pénalités et des intérêts de retard qui font l'objet de cet avis. Lorsque l'avis de mise en recouvrement est consécutif à une procédure de redressement contradictoire, il fait référence soit à la notification prévue à l'article L. 57 et, le cas échéant, aux différentes pièces de procédure adressées par le service informant le contribuable d'une modification des rehaussements, soit au document adressé au contribuable qui comporte l'information prévue au premier alinéa de l'article L. 48 et qu'aux termes du même article R. 256-1 dans sa rédaction applicable à l'avis de mise en recouvrement du 31 mai 2005 : L'avis de mise en recouvrement prévu à l'article L. 256 indique pour chaque impôt ou taxe le montant global des droits, des pénalités et des intérêts de retard qui font l'objet de cet avis. Lorsque l'avis de mise en recouvrement est consécutif à une procédure de rectification, il fait référence à la proposition prévue à l'article L. 57 ou à la notification prévue à l'article L. 76 et, le cas échéant, au document adressé au contribuable l'informant d'une modification des droits, taxes et pénalités résultant des rectifications (...) ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les deux avis de mise en recouvrement, émis pour un montant total de 170 913 euros se réfèrent à la notification de redressement du 18 décembre 2002 ; que le montant mis en recouvrement par ces avis est supérieur au montant de 152 583 euros mentionné dans la notification de redressement ; qu'ainsi, et nonobstant la circonstance que l'écart de 18 330 euros entre le montant total figurant sur les deux avis de mise en recouvrement et le montant indiqué sur la notification de redressement correspond à la constatation d'un trop versé indiqué sur cet acte dans les conséquences financières des redressements, les mentions des avis ne délivraient pas à la SARL JP AUTO une information cohérente et utile satisfaisant aux prescriptions des articles L. 256 et R. 256-1 du livre des procédures fiscales ; que la société requérante est ainsi fondée à demander la décharge de l'intégralité du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé au titre de la période allant du 1er janvier 1999 au 31 août 2002 ;

En ce qui concerne le complément de taxe sur la valeur ajoutée réclamé à la SARL JP AUTO au titre de la période allant du 1er septembre 2002 au 31 juillet 2005 :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ; que la demande du contribuable peut porter sur tout document utilisé par l'administration pour établir les impositions et notamment sur ceux dont elle s'est prévalue au cours de la procédure de redressement, y compris dans la réponse aux observations du contribuable ; que, toutefois, l'obligation qui pèse sur l'administration ne s'étend pas aux informations fournies annuellement par des tiers à l'administration et au contribuable conformément aux dispositions du code général des impôts ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, dans sa réponse aux observations du contribuable du 24 novembre 2006, le vérificateur a indiqué à la société requérante que les déclarations d'échanges de biens entre Etats membres de l'Union européenne qui se trouvaient en sa possession confirmaient les mentions figurant sur les factures d'achat des véhicules examinées au cours des opérations de vérification de comptabilité ; que ces déclarations d'échanges de biens constituaient des documents utilisés par l'administration pour établir les impositions ; que la société requérante soutient sans être contredite avoir demandé à quatre reprises, dès la réception de la réponse à ses observations puis le 3 octobre 2006, le 11 mai 2007 et le 16 octobre 2007, soit avant la mise en recouvrement de l'imposition intervenue le 12 novembre 2007, à l'administration communication de ces documents sans que ses demandes ne reçoivent de réponse ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que les documents en cause auraient été communiqués ultérieurement, avant la mise en recouvrement de l'imposition ; qu'en outre, les déclarations d'échanges de biens entre Etats membres de l'Union européenne ne peuvent être regardées, au vu des dispositions de l'article 5 du règlement n° 638/2004 du Parlement européen et du conseil, du 31 mars 2004 auquel renvoient les dispositions de l'article 289 C du code général des impôts, comme des informations fournies annuellement par des tiers à l'administration et au contribuable conformément aux dispositions du code général des impôts ; que, dans ces conditions, la société requérante est fondée à soutenir que l'administration a entaché d'irrégularité la procédure d'imposition en s'abstenant de lui communiquer, malgré ses demandes, les documents comportant les renseignements utilisés pour fonder l'imposition litigieuse ; que cette irrégularité justifie la décharge de la totalité du complément de taxe sur la valeur ajoutée réclamé à la SARL JP AUTO au titre de la période allant du 1er septembre 2002 au 31 juillet 2005 :

Sur l'appel incident du ministre :

Considérant que le tribunal administratif a estimé, s'agissant des véhicules acquis au cours de la période allant du 1er janvier 2001 au 30 juin 2003, que certaines factures, comportant soit un montant hors-taxe soit un montant sans mention particulière du régime de taxe sur la valeur ajoutée étaient conformes aux dispositions de l'article 297 E du code général des impôts nonobstant la circonstance, invoquée par l'administration, que ces factures ne mentionnaient pas expressément qu'il était fait application de la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge ; que les premiers juges ont également retenu que l'administration n'établissait pas que la société ne pouvait ignorer que ses fournisseurs n'avaient pas la qualité d'assujettis-revendeurs et n'étaient pas autorisés à appliquer eux-mêmes le régime de taxation sur la marge ;

Considérant que s'il est exact que, comme le ministre le soutient à l'appui de son appel incident, l'absence de mention de la taxe sur la valeur ajoutée sur les factures délivrées par un vendeur établi dans un Etat membre de l'Union ne permet pas de présumer que l'opération correspondante a été effectuée sous le régime de la marge, la présentation de telles factures ne permet pas non plus d'écarter le régime sous lequel la société a entendu se placer à moins que l'administration ne fasse état de circonstances particulières de nature à établir que la société ne pouvait ignorer que ses fournisseurs n'avaient pas la qualité d'assujetti revendeur et n'étaient pas autorisés à appliquer eux-mêmes le régime de taxation sur la marge ;

Considérant que ne sauraient constituer de telles circonstances particulières le fait que certaines factures ne précisaient pas que les véhicules cédés étaient des véhicules d'occasion, dès lors, d'une part, que le ministre ne soutient pas que le régime de la marge était subordonné à une telle mention au regard de la législation des Etats membres dont proviennent les véhicules et que, d'autre part, les exemples de facturation qu'il donne en citant les fournisseurs Sarauto, Auto 95 SL, Entretenimiento, Eacas, Mavisa, Alberkran, Dioiteka et Citröen sont sans rapport aucun avec les opérations à raison desquelles le tribunal a admis le régime de la marge, qui concernent les fournisseurs GMV, Italcom, Buratti, JM Automobile et Talleres Ginestar, l'administration admettant d'ailleurs dans le dernier état de ses écritures que les véhicules livrés par ce dernier fournisseur relevaient du régime de la marge ;

Considérant, au surplus, comme il a été dit, que l'irrégularité de la procédure d'imposition tenant à l'absence de communication des documents comportant les renseignements utilisés pour fonder l'imposition litigieuse justifie la décharge de la totalité du complément de taxe sur la valeur ajoutée réclamé à la SARL JP AUTO au titre de la période allant du 1er septembre 2002 au 31 juillet 2005, seule concernée par l'appel incident du ministre ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les moyens de la société requérante relatifs à la régularité du jugement, que celle-ci est fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'article 2 du jugement attaqué, le Tribunal administratif de Bastia a rejeté le surplus de sa demande en décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période allant du 1er janvier 1999 au 31 août 2002 et au titre de la période allant du 1er septembre 2002 au 31 juillet 2005 ; qu'il y a lieu, en outre, de rejeter la demande du ministre tendant à la réformation de l'article 1er du même jugement et au rétablissement, à concurrence des sommes de 15 532 euros, 19 895 euros et 8 899 euros de droits et des pénalités correspondantes, des impositions dont le tribunal a prononcé la décharge ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la SARL JP AUTO et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : A concurrence de la somme de 186 241 euros, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la SARL JP AUTO tendant à la décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période allant du 1er janvier 1999 au 31 août 2002 et au titre de la période allant du 1er septembre 2002 au 31 juillet 2005.

Article 2 : L'article 2 du jugement en date du 15 avril 2010 du Tribunal administratif de Bastia est annulé.

Article 3 : La SARL JP AUTO est déchargée de l'intégralité des compléments de taxe sur la valeur ajoutée restant à sa charge au titre de la période allant du 1er janvier 1999 au 31 août 2002 et au titre de la période allant du 1er septembre 2002 au 31 juillet 2005.

Article 4 : Les conclusions incidentes du ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat sont rejetées.

Article 5 : L'Etat versera à la SARL JP AUTO la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL JP AUTO et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement.

Copie en sera adressée à Me Chayvialle- Paul et au directeur du contrôle fiscal sud-est.

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N° 10MA02732


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10MA02732
Date de la décision : 16/06/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-01-03-01-02-04 Contributions et taxes. Généralités. Règles générales d'établissement de l'impôt. Contrôle fiscal. Vérification de comptabilité. Procédure.


Composition du Tribunal
Président : M. BEDIER
Rapporteur ?: M. Jean-Louis BEDIER
Rapporteur public ?: M. DUBOIS
Avocat(s) : CHAYVIALLE-PAUL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2011-06-16;10ma02732 ?
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