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05/05/2011 | FRANCE | N°09MA01647

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 05 mai 2011, 09MA01647


Vu la requête, enregistrée le 13 mai 2009, présentée pour M. Joffrey A, demeurant c/o ..., par la SCP d'avocats Marijon Dillenschneider ; M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°0700211 du 19 mars 2009 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant d'une part à la condamnation du département de l'Hérault à lui verser la somme de 169 200 euros assortie des intérêts de droit capitalisés, au titre du préjudice subi du fait de l'illégalité de la délibération du 19 juin 2006, par laquelle le département de l'Hérault a décid

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Vu la requête, enregistrée le 13 mai 2009, présentée pour M. Joffrey A, demeurant c/o ..., par la SCP d'avocats Marijon Dillenschneider ; M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°0700211 du 19 mars 2009 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant d'une part à la condamnation du département de l'Hérault à lui verser la somme de 169 200 euros assortie des intérêts de droit capitalisés, au titre du préjudice subi du fait de l'illégalité de la délibération du 19 juin 2006, par laquelle le département de l'Hérault a décidé d'exercer son droit de préemption sur la parcelle cadastrée AO n° 110, située sur le territoire de la commune de Villeneuve Les Maguelone, dont il était propriétaire, et d'autre part à l'annulation du refus du département de lui verser cette somme ;

2°) de condamner le département de l'Hérault à lui verser la somme de 169 200 euros assortie des intérêts de droit capitalisés à compter de janvier 2008 jusqu'au parfait paiement ;

3°) de mettre à la charge du département de l'Hérault la somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

..............................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le décret n° 95-1089 du 5 octobre 1995 modifié par le décret n° 2005-3 du 4 janvier 2005 relatif aux plans de prévention des risques naturels prévisibles ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions, et notamment son article 2 ;

Vu l'arrêté du 27 janvier 2009 pris par le vice-président du Conseil d'Etat autorisant la cour administrative d'appel de Marseille à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 avril 2011 :

- le rapport de Mme Carassic, rapporteur ;

- les conclusions de M. Bachoffer, rapporteur public ;

- les observations de Me Dillenschneider pour M. A ;

- et les observations de Me Toumi pour le département de l'Hérault ;

Considérant que M. A demande l'annulation du jugement du 19 mars 2009 du tribunal administratif de Montpellier, qui a rejeté sa demande tendant d'une part à la condamnation du département de l'Hérault à lui verser la somme de 169 200 euros au titre du préjudice subi du fait de l'illégalité de la délibération du 19 juin 2006, par laquelle le département de l'Hérault a décidé d'exercer son droit de préemption sur la parcelle cadastrée AO n° 110, située sur le territoire de la commune de Villeneuve Les Maguelone, dont il était propriétaire, et d'autre part à l'annulation du refus du département de lui verser cette somme ;

Sur la responsabilité du département :

En ce qui concerne la responsabilité du fait de l'illégalité de la décision de préemption :

Considérant que l'illégalité reconnue par l'arrêt, devenu définitif, n° 07MA01480 du 20 décembre 2007 de la cour administrative d'appel de Marseille, de la décision du 19 juin 2006 par laquelle le département de l'Hérault a préempté l'immeuble bâti dont M. A était propriétaire, est constitutive, ainsi que l'ont estimé les premiers juges, d'une faute de nature à engager la responsabilité de l'administration ;

En ce qui concerne le préjudice :

Considérant que M. A, qui n'a pu finalement vendre que le 31 mai 2008 son bien illégalement préempté, malgré le compromis de vente qu'il avait signé le 26 avril 2006 avec deux acquéreurs, a droit à la réparation des préjudices ayant un lien direct et certain avec la faute du département ;

Considérant en premier lieu que la nécessité dans laquelle M. A s'est trouvé de se loger avec sa famille dès la passation du compromis de vente du 26 avril 2006 est imputable à sa décision de vendre son bien et non à la décision du département de préempter ; que, par suite, les frais de location qu'il a engagés à compter de cette date ne présentent pas de lien de causalité avec l'illégalité de la décision de préemption ;

Considérant en deuxième lieu que le retard de la vente de sa maison, dû à l'intervention de la décision de préemption litigieuse, est sans lien direct avec l'aggravation de la situation déficitaire de son commerce et la mise en liquidation judiciaire de ce dernier, prononcée le 15 juin 2007 par le tribunal de commerce de Montpellier ; que le délai de quatre mois, fixé dans l'acte sous seing privé passé avec un repreneur, pour rembourser les dettes de son commerce, évaluées à la somme de 48 000 euros, condition suspensive pour procéder à la vente de ce commerce au prix de 170000 euros, courrait à compter du 12 janvier 2006 ; que le compromis de vente de sa maison n'ayant été signé que le 26 avril 2006, cela ne lui permettait pas de percevoir le prix de vente de son habitation avant l'expiration de ce délai de quatre mois ;

Considérant en troisième lieu qu'il résulte de l'instruction que l'impossibilité de vendre son bien compte tenu du refus des notaires de passer des actes de vente tant que la procédure contentieuse n'était pas terminée et la réduction du prix que M. A a dû consentir à ses acheteurs le 31 mai 2008 suite à une renégociation du prix de vente de sa maison, une fois connue l'estimation faite par les services des domaines le 15 juin 2006 et le prix d'acquisition par le département, fixé par un jugement du 9 janvier 2008 du juge de l'expropriation, a causé, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, un préjudice matériel à M. A ; qu'il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en allouant à M. A la somme de 20 000 euros ;

Considérant en quatrième lieu que M. A est également fondé à demander réparation du préjudice moral et du trouble dans ses conditions d'existence du fait de la décision de préemption illégale ; que le tribunal administratif a rejeté à tort ce chef de préjudice ; qu'il sera fait une juste appréciation de l'ensemble des préjudices subis par M. A en fixant son indemnisation à la somme totale à 30 000 euros, tous intérêts compris ; qu'il y a lieu, dès lors, de réformer dans cette mesure le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 19 mars 2009 ; que le surplus des conclusions indemnitaires de M. A doit être rejeté ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à ce que soit mis à la charge de M. A, qui n'est pas la partie perdante au litige, une quelconque somme au titre des dispositions de cet article ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du département de l'Hérault une somme de 1 500 euros à payer à M. A au titre des frais qu'il a exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 19 mars 2009 est annulé.

Article 2: Le département de l'Hérault est condamné à verser à M. A la somme de 30 000 (trente mille) euros tous intérêts compris.

Article 3 : Le département versera à M. A une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A et au département de l'Hérault.

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N° 09MA016472

SC


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09MA01647
Date de la décision : 05/05/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-01-04-02 Responsabilité de la puissance publique. Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité. Responsabilité et illégalité. Illégalité n'engageant pas la responsabilité de la puissance publique.


Composition du Tribunal
Président : M. LAMBERT
Rapporteur ?: Mme Marie-Claude CARASSIC
Rapporteur public ?: M. BACHOFFER
Avocat(s) : SCP MARIJON DILLENSCHNEIDER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2011-05-05;09ma01647 ?
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