La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/03/2011 | FRANCE | N°08MA01230

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre-formation à 3, 29 mars 2011, 08MA01230


Vu la requête, enregistrée le 10 mars 2008, présentée pour la SAS VILLAS TERRE DU SUD, dont le siège social est 1 rue Georges Mélies, BP 124 à Frontignan (34110), par la société d'avocats PVB consultants ; la SAS VILLAS TERRE DU SUD demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0501124 en date du 22 janvier 2008 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2000 au

31 décembre 2002 ;

2°) de prononcer la décharge des taxes contestées et des...

Vu la requête, enregistrée le 10 mars 2008, présentée pour la SAS VILLAS TERRE DU SUD, dont le siège social est 1 rue Georges Mélies, BP 124 à Frontignan (34110), par la société d'avocats PVB consultants ; la SAS VILLAS TERRE DU SUD demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0501124 en date du 22 janvier 2008 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2002 ;

2°) de prononcer la décharge des taxes contestées et des pénalités y afférentes ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 7 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient :

- qu'elle a pour objet social la construction de maisons individuelles et la vente de terrains à construire ;

- qu'elle peut être sollicitée par tout particulier qui peut souscrire une promesse d'achat d'un terrain à bâtir, solliciter un prêt bancaire, et signer un contrat de construction de maison individuelle auprès d'elle, de sa filiale, la société Sogeri, ou de tout autre constructeur ;

- qu'il est constant que la promesse d'achat ne comporte aucune obligation pour le particulier de souscrire un contrat de construction ;

- que lorsque les conditions de la réalisation de la vente d'un terrain sont réunies, un véritable contrat de cession est établi et soumis à la taxe sur la valeur ajoutée afférente à la vente de terrains à bâtir, en application des dispositions du a) du 1. du 7° de l'article 257 du code général des impôts ;

- que l'administration a considéré, à tort, être en présence d'une seule et même convention de vente de terrain à construire et a donc mis en oeuvre les dispositions du b) du 1. du 7° de l'article 257 du code général des impôts, afférentes à la production ou à la livraison d'immeubles ;

- que la procédure d'imposition est, en l'espèce, irrégulière, dès lors que l'administration a écarté les conventions comme étant fictives, sans recourir à la procédure de la répression des abus de droit prévue par l'article L.64 du livre des procédures fiscales ;

- que l'administration a estimé, à tort, ne pas être en présence de deux contrats distincts, l'un, afférent à la vente du terrain, et l'autre, afférent à la construction d'une maison d'habitation ;

- qu'elle n'apporte pas la preuve du caractère fictif des deux conventions ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 septembre 2008, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique ;

Le ministre demande à la Cour de rejeter la requête et soutient :

- que l'administration n'a pas écarté, comme étant fictifs, des actes juridiques apparents mais a constaté qu'en vendant des terrains sur lesquels elle procédait à la construction, directement ou par l'intermédiaire de sa filiale, des immeubles d'habitation, la SAS VILLAS TERRE DU SUD cédait des immeubles neufs passibles de la taxe sur la valeur ajoutée ;

- que la qualification juridique des actes litigieux n'a pas été remise en cause mais que les conséquences des liens indissociables existant entre deux contrats concourant à une seule et unique opération de vente immobilière assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée ont été mises en évidence ;

- que, dans ces conditions, à la simple lecture des actes de cession, l'administration était autorisée à considérer qu'il s'agissait d'une cession imposable à la taxe sur la valeur ajoutée, conformément aux dispositions du 7° de l'article 257 du code général des impôts, sans se référer à la procédure de la répression des abus de droit ;

- qu'au regard de la taxe sur la valeur ajoutée, les opérations réalisées s'analysent comme des ventes d'immeubles à construire ;

- que, dès lors, en vendant un terrain sur lequel elle procède à la construction, directement ou par l'intermédiaire de sa filiale, d'un immeuble d'habitation livré à l'acquéreur dudit terrain, la société cède, en fait, un immeuble neuf ;

- que, dans ces conditions, l'ensemble de l'opération doit être assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 11 décembre 2008, présenté pour la SAS VILLAS TERRE DU SUD qui persiste dans ses conclusions antérieures, par les mêmes moyens et qui soutient, en outre :

- que l'administration ne peut, sans contradiction, estimer interpréter des contrats pour échapper aux garanties procédurales offertes par la procédure de l'abus de droit, tout en dénaturant la portée et l'existence de deux actes apparents ;

- qu'en requalifiant les deux contrats en une seule et même convention, l'administration va au-delà d'une simple interprétation contractuelle ;

- qu'en procédant de la sorte, elle se place nécessairement et implicitement sur le terrain de l'abus de droit ;

Vu l'ordonnance en date du 17 janvier 2011 fixant la clôture d'instruction au 8 février 2011, en application des articles R.613-1 et R.613-3 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative et l'arrêté d'expérimentation du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 février 2011,

- le rapport de M. Emmanuelli, rapporteur ;

- et les conclusions de M. Guidal, rapporteur public ;

Considérant que la SAS VILLAS TERRE DU SUD, qui a pour objet la construction de maisons individuelles et la vente de terrains, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2000 au 28 février 2003 ; qu'à la suite de ce contrôle, elle s'est vue assigner des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée, et des pénalités y afférentes, au titre de la période du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2002 ; que la société fait régulièrement appel du jugement en date du 22 janvier 2008 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes de décharge desdites impositions, en droits et pénalités ;

Sur le bien-fondé du jugement :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration a remis en cause le régime de taxation sur la marge qui avait été appliqué par la SAS VILLAS TERRE DU SUD aux opérations de ventes de terrains sur lesquels ont été bâtis des immeubles d'habitation dont la construction a été assurée par ladite société ou par sa filiale à 66,66 %, la société Sogéri ; qu'elle a assujetti l'ensemble des opérations à la taxe sur la valeur ajoutée en application des dispositions du b) du 1. du 7° de l'article 257 du code général des impôts en vertu desquelles sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les ventes d'immeubles et les cessions, sous forme de vente ou d'apport en société, de parts d'intérêt ou d'actions dont la possession assure en droit ou en fait, l'attribution en propriété ou en jouissance d'un immeuble ou d'une fraction d'immeuble ; que l'administration a, corrélativement, mis à la charge de la SAS VILLAS TERRE DU SUD des rappels de taxe sur la valeur ajoutée résultant de la différence entre la taxe calculée sur les cessions et celle qui avait été déclarée sur la marge ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.64 du livre des procédures fiscales : Ne peuvent être opposés à l'administration des impôts, les actes qui dissimulent la portée véritable d'un contrat ou d'une convention à l'aide de clauses : (...) c) (...) qui permettent d'éviter, en totalité ou en partie, le paiement des taxes sur le chiffre d'affaires correspondant aux opérations effectuées en exécution d'un contrat ou d'une convention. L'administration est en droit de restituer son véritable caractère à l'opération litigieuse. En cas de désaccord sur les redressements notifiés (...) le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité consultatif pour la répression des abus de droit (...). Si l'administration ne s'est pas conformée à l'avis du comité, elle doit apporter la preuve du bien-fondé du redressement. ;

Considérant qu'il est constant que l'administration, pour établir les redressements litigieux, n'a pas considéré que la vente des terrains et les contrats de construction de maisons sur ces terrains, que les acquéreurs concluaient avec la SAS VILLAS TERRE DU SUD ou avec la société Sogéri, avaient un caractère fictif ou étaient destinés à éluder l'impôt, mais s'est appuyée sur les conditions dans lesquelles lesdits contrats avaient été conclus pour établir l'intention des parties de réaliser une opération unique de vente d'immeuble à construire ; qu'en se bornant ainsi à requalifier les contrats en tenant compte de la commune intention des parties, révélée lors de son exécution, l'administration fiscale ne s'est nullement placée, comme le soutient la SAS VILLAS TERRE DU SUD, sur le terrain de l'abus de droit ;

Considérant, par ailleurs, que la société requérante soutient que l'administration a estimé, à tort, ne pas être en présence de deux contrats dénués de tout lien ; que l'administration a, toutefois, mis en évidence la simultanéité des promesses d'achat des terrains et des contrats de construction ou souligné que, dans certains cas, la signature de ces derniers contrats était antérieure à celle de la vente des terrains ; qu'en outre, la société requérante ou sa filiale était en relation avec les entreprises du bâtiment chargées de construire les immeubles ; qu'au surplus, l'administration soutient, sans être contredite, que la SAS VILLAS TERRE DU SUD exerçait auprès de la société Sogéri, par convention de gestion, une mission technique portant sur la conception générale des projets, le déroulement et la réception des travaux ; que, dans ces conditions, la circonstance invoquée que les promesses d'achat de terrains ne comportaient aucune obligation de souscrire un contrat de construction avec la SAS VILLAS TERRE DU SUD ou avec sa filiale est sans incidence ; que l'administration établit donc le caractère indissociable des deux contrats passés avec les acquéreurs des terrains ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SAS VILLAS TERRE DU SUD n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à la SAS VILLAS TERRE DU SUD la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SAS VILLAS TERRE DU SUD est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS VILLAS TERRE DU SUD et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.

Délibéré après l'audience du 22 février 2011, où siégeaient :

- Mme Felmy, président de chambre,

- M. Reinhorn, président assesseur,

- M. Emmanuelli, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 29 mars 2011.

Le rapporteur,

Signé

O. EMMANUELLILe président,

Signé

J. FELMY

Le greffier,

Signé

D. GIORDANO

La République mande et ordonne au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

''

''

''

''

2

N° 08MA01230


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre-formation à 3
Numéro d'arrêt : 08MA01230
Date de la décision : 29/03/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : Mme FELMY
Rapporteur ?: M. Olivier EMMANUELLI
Rapporteur public ?: M. GUIDAL
Avocat(s) : PVB - SOCIÉTÉ D'AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2011-03-29;08ma01230 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award