La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/03/2011 | FRANCE | N°10MA02151

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, Juge des reconduites, 15 mars 2011, 10MA02151


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 4 juin 2010, présentée par le PREFET DES ALPES-MARITIMES élisant domicile Route de Grenoble à Nice (06286) ; le PREFET DES ALPES-MARITIMES demande au président de la Cour d'annuler le jugement n°1001759 en date du 18 mai 2010 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Nice a annulé son arrêté de reconduite à la frontière en date du 12 mai 2010 pris à l'encontre de M. ;

.................................................................................

.....................

Vu la convention européenne de sauvegarde des dr...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 4 juin 2010, présentée par le PREFET DES ALPES-MARITIMES élisant domicile Route de Grenoble à Nice (06286) ; le PREFET DES ALPES-MARITIMES demande au président de la Cour d'annuler le jugement n°1001759 en date du 18 mai 2010 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Nice a annulé son arrêté de reconduite à la frontière en date du 12 mai 2010 pris à l'encontre de M. ;

......................................................................................................

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ;

Vu le code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision en date du 1er septembre 2010 par laquelle le président de la Cour a notamment désigné Mme Anne Lefebvre-Soppelsa, premier conseiller, pour statuer sur les appels formés contre les jugements statuant sur des recours en annulation d'arrêtés préfectoraux de reconduite à la frontière ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties de l'audience publique ;

Après avoir, en séance publique le 15 février 2011, présenté son rapport et entendu :

- les conclusions de M. Dubois, rapporteur public ;

- et les observations de Me Aidoudi ;

Considérant que le PREFET DES ALPES-MARITIMES demande à la Cour d'annuler le jugement n° 1001759 en date du 18 mai 2010 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Nice a annulé son arrêté de reconduite à la frontière en date du 12 mai 2010 pris à l'encontre de M. , de nationalité tunisienne ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. justifie de sa présence en France depuis 2002 ; qu'il établit, par la production de bulletins de salaire qu'il y a toujours travaillé ; qu'il s'est marié en octobre 2007 avec une compatriote avec laquelle il a un fils né le 26 août 2008 à Nice ; qu'à la date de l'arrêté attaqué son épouse était enceinte ; qu'ils ont un logement, déclarent leurs revenus et acquittent leurs obligations fiscales et locatives ; qu'ainsi, dans ces circonstances, compte tenu notamment de la durée de séjour en France de l'intéressé et alors même que le PREFET DES ALPES-MARITIMES soutient que rien ne s'oppose à ce que M. , son épouse et leurs enfants poursuivent une vie familiale normale dans leur pays d'origine commun, M. doit être regardé comme ayant établi, en France, le centre de ses intérêts personnels et familiaux ; que par suite l'arrêté par lequel le PREFET DES ALPES-MARITIMES ordonnait la reconduite à la frontière de M. portait une atteinte excessive au droit de celui-ci au respect de sa vie privée et familiale et méconnaissait, dès lors, les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il en résulte que le PREFET DES ALPES-MARITIMES n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président Tribunal administratif de Nice a annulé l'arrêté litigieux ;

Sur les conclusions incidentes à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette décision doit intervenir dans un délai déterminé ; qu'aux termes de l'article L.911-3 du même code : Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L.911-1 et L.911-2 d'une astreinte (...) ; qu'aux termes de l'article L.512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Si l'arrêté de reconduite à la frontière est annulé (...) l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas ;

Considérant que le présent arrêt confirme l'annulation pour excès de pouvoir d'un arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de M. et non pas d'une décision refusant de délivrer à celui-ci une carte de séjour temporaire ; qu'ainsi, cette annulation n'implique pas nécessairement la délivrance d'un titre de séjour ; que, dès lors, il appartient au juge administratif, lorsqu'il prononce l'annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière et qu'il est saisi de conclusions en ce sens, d'user des pouvoirs qu'il tient de l'article L.911-2 du code de justice administrative pour fixer le délai dans lequel la situation de l'intéressé doit être examinée, au vu de l'ensemble de la situation de droit et de fait existant à la date de ce réexamen ; qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de prescrire au PREFET DES ALPES-MARITIMES, d'une part, de se prononcer sur la situation de M. dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt et, d'autre part, de délivrer à l'intéressé pendant cette période, une autorisation provisoire de séjour ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette prescription d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, d'une part, M. n'allègue pas avoir exposé de frais autres que ceux pris en charge par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle totale qui lui a été allouée ; que, d'autre part, son avocat n'a pas demandé la condamnation de l'Etat à lui verser la somme correspondant aux frais exposés qu'il aurait réclamée à son client si ce dernier n'avait bénéficié d'une aide juridictionnelle totale ; que dans ces conditions, les conclusions de M. tendant à la condamnation de l'Etat sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête du PREFET DES ALPES-MARITIMES est rejetée.

Article 2 : Il est enjoint au PREFET DES ALPES-MARITIMES de délivrer une autorisation provisoire de séjour à M. et de se prononcer sur la situation de M. dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par M. est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

Copie en sera adressée au PREFET DES ALPES-MARITIMES et à Me Aidoudi.

''

''

''

''

2

N° 10MA02151


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : Juge des reconduites
Numéro d'arrêt : 10MA02151
Date de la décision : 15/03/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Anne LEFEBVRE-SOPPELSA
Rapporteur public ?: M. DUBOIS
Avocat(s) : AIDOUDI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2011-03-15;10ma02151 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award