Vu la requête, enregistrée le 20 juillet 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 09MA02642, présentée par le PREFET DE LA LOIRE ;
Le PREFET DE LA LOIRE demande à la Cour d'annuler le jugement n° 0900868 du 18 juin 2009 par lequel le Tribunal administratif de Nîmes a annulé son arrêté du 26 janvier 2009 refusant de délivrer à M. Aslan A un titre de séjour et a condamné l'Etat à verser ce dernier la somme de 800 euros au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu l'article 1er de l'arrêté du 27 janvier 2009 qui autorise la Cour administrative d'appel de Marseille à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret du 7 janvier 2009, situant l'intervention du rapporteur public avant les observations des parties ou de leurs mandataires ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 février 2011 :
- le rapport de M. Salvage, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme Chenal-Peter, rapporteur public ;
Après avoir pris connaissance de la note en délibéré, enregistrée le 3 février 2011 au greffe de la Cour, présentée par le PREFET DE LA LOIRE ;
Considérant que M. A, de nationalité russe, est entré en France en novembre 2007 avec son épouse aux fins de solliciter l'asile politique ; que, constatant qu'il avait fait la même demande en Pologne, le PREFET DE LA LOIRE a refusé de l'admettre au séjour par décision du 18 mars 2008 et a décidé sa remise aux autorités polonaises ; que cette décision n'ayant pu être exécutée dans le délai de six mois prescrit par la règlementation européenne, le préfet, devenu compétent, a refusé à l'intéressé son admission provisoire au séjour en tant que réfugié le 4 septembre 2008 et a parallèlement transmis sa demande à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, selon la procédure prioritaire, qui l'a rejetée le 7 octobre 2008 ; que suite à ce rejet, le PREFET DE LA LOIRE a, par l'arrêté contesté du 26 janvier 2009, refusé à l'intéressé un titre de séjour ; que par jugement en date du 18 juin 2009, le Tribunal administratif de Nîmes a annulé cette décision ; que le PREFET DE LA LOIRE interjette appel de ce jugement ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
Considérant qu'aux termes de l'article L.741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : (...) 4° La demande d'asile (...) constitue un recours abusif aux procédures d'asile (...). Constitue, en particulier, un recours abusif aux procédures d'asile la présentation frauduleuse de plusieurs demandes d'admission au séjour au titre de l'asile sous des identités différentes. Constitue également un recours abusif aux procédures d'asile la demande d'asile présentée dans une collectivité d'outre-mer s'il apparaît qu'une même demande est en cours d'instruction dans un autre Etat membre de l'Union européenne.(...) ; que selon les dispositions de l'article L.742-1 du même code : Lorsqu'il est admis à séjourner en France (...), l'étranger qui demande à bénéficier de l'asile se voit remettre un document provisoire de séjour lui permettant de déposer une demande d'asile auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides. (...) Après le dépôt de sa demande d'asile, le demandeur se voit délivrer un nouveau document provisoire de séjour. Ce document est renouvelé jusqu'à ce que l'office statue et, si un recours est formé devant la Cour nationale du droit d'asile, jusqu'à ce que la Cour statue. ; que selon l'article L.742-3 : L'étranger admis à séjourner en France bénéficie du droit de s'y maintenir jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile. (...) ; qu'aux termes des dispositions de l'article L.742-6 : L'étranger présent sur le territoire français dont la demande d'asile entre dans l'un des cas visés aux 2° à 4° de l'article L.741-4 bénéficie du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet. En conséquence, aucune mesure d'éloignement mentionnée au livre V du présent code ne peut être mise à exécution avant la décision de l'office. (...) ;
Considérant, tout d'abord, que la décision du 26 janvier 2009 refusant à M. A un titre de séjour, prise au visa notamment de l'article L.742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a notamment constaté que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté le 7 octobre 2008 la requête de l'intéressé ; que dans ses écritures en première instance et en appel, le PREFET DE LA LOIRE a défendu sa décision en précisant que M. A devait être regardé comme entrant dans le champ d'application du 4° de l'article L.741-4 sus rappelé, sa demande d'asile constituant, selon lui, un recours abusif aux procédures d'asile ;
Considérant, ensuite, que contrairement à ce que soutient le PREFET DE LA LOIRE, M. A n'a pas excipé de la supposée illégalité de la décision du 4 septembre 2008 lui refusant un document provisoire de séjour au soutien de ses conclusions dirigées contre la décision de refus de titre de séjour du 26 janvier 2009 mais a soulevé un moyen, qui est opérant, tiré de l'erreur de droit qu'aurait commise le préfet en refusant d'attendre la décision de la Cour nationale du droit d'asile avant de prendre ladite décision de refus de titre de séjour ;
Considérant, enfin, que les dispositions du règlement (CE) n°343/2003 du 18 février 2003 organisent la répartition des compétences entre les Etats membres et permettent ainsi de régler les demandes multiples de statut de réfugié ; qu'ainsi si la Pologne était initialement compétente pour se prononcer sur le cas de M. A, le dépassement du délai de six mois prévu par les dispositions de l'article 19 dudit règlement pour assurer le transfert de l'intéressé dans ce pays, en a, de droit, transféré la responsabilité à la France ; que si M. A a déposé également, avant son arrivée sur le territoire national, des demandes d'asile en Allemagne et en Belgique, il n'est pas allégué que M. A aurait présenté frauduleusement plusieurs demandes d'admission au séjour au titre de l'asile sous des identités différentes ou qu'il aurait présenté une demande d'asile dans une collectivité d'outre-mer ; qu'enfin l'ensemble de ces demandes d'asile, dont une seule en France, ne sauraient être regardées, dans les circonstances de l'espèce, comme révélant un usage anormal et immodéré de la procédure organisée ; qu'ainsi, la demande présentée par M. A ne pouvait à bon droit être qualifiée d'abusive par le PREFET DE LA LOIRE au sens des dispositions du 4°de l'article L.741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers ;
Considérant, ainsi, qu'il ressort de l'ensemble des dispositions sus mentionnées que le préfet devait délivrer un document provisoire de séjour à M. A et le renouveler jusqu'à ce que la Cour nationale du droit d'asile statue, l'étranger bénéficiant du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de ladite Cour ; que, par voie de conséquence, il ne pouvait, à la date de la décision contestée, prendre une décision portant refus de titre de séjour, la Cour nationale du droit d'asile ne s'étend prononcée que le 29 juillet 2009 ; que M. A est ainsi fondé à soutenir que le préfet a commis une erreur de droit pour ce motif ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que PREFET DE LA LOIRE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nîmes a annulé son arrêté du 26 janvier 2009 refusant de délivrer à M. Aslan A un titre de séjour et a condamné l'Etat à verser ce dernier la somme de 800 euros au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros que M. A demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête n° 09MA02642 présentée par le PREFET DE LA LOIRE est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à M. A la somme de 2 000 (deux mille) euros au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, de l'outre mer, des collectivités territoriales et de l'immigration et à M. Aslan A.
Copie en sera adressée au PREFET DE LA LOIRE.
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N° 09MA02642 2
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