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07/03/2011 | FRANCE | N°09MA01579

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 07 mars 2011, 09MA01579


Vu la requête, enregistrée le 6 mai 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 09MA01579, présentée par le PREFET DES ALPES-DE-HAUTE-PROVENCE ;

Le PREFET DES ALPES-DE-HAUTE-PROVENCE demande à la Cour d'annuler le jugement n° 0808977 du 26 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a annulé la décision en date du 2 décembre 2008 refusant à M. A un titre de séjour et lui a enjoint de délivrer à l'intéressé un titre de séjour temporaire d'un an portant la mention vie privée et familiale ;

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Vu les a

utres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de ...

Vu la requête, enregistrée le 6 mai 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 09MA01579, présentée par le PREFET DES ALPES-DE-HAUTE-PROVENCE ;

Le PREFET DES ALPES-DE-HAUTE-PROVENCE demande à la Cour d'annuler le jugement n° 0808977 du 26 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a annulé la décision en date du 2 décembre 2008 refusant à M. A un titre de séjour et lui a enjoint de délivrer à l'intéressé un titre de séjour temporaire d'un an portant la mention vie privée et familiale ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le traité instituant la Communauté économique européenne, devenue la Communauté européenne ;

Vu l'accord instituant une association entre la Communauté économique européenne et la Turquie en date du 12 septembre 1963, approuvé et confirmé par la décision 64/732/CEE du Conseil du 23 décembre 1963 ;

Vu la décision n° 1/80 du 19 septembre 1980 du conseil d'association entre la Communauté économique européenne et la Turquie ;

Vu la décision C-237/91 du 16 décembre 1992 de la Cour de justice des Communautés européennes ;

Vu la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 janvier 2011 :

- le rapport de Mme Carotenuto, rapporteur,

- et les conclusions de M. Marcovici, rapporteur public ;

Considérant que le PREFET DES ALPES-DE-HAUTE-PROVENCE relève appel du jugement du 26 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a annulé la décision en date du 2 décembre 2008 refusant à M. A, de nationalité turque, un titre de séjour et lui a enjoint de délivrer à l'intéressé un titre de séjour temporaire d'un an portant la mention vie privée et familiale ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance, 2- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sécurité publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A s'est marié le 4 septembre 2005 avec Mme Audrey Lemaire, de nationalité française ; qu'il est entré en France le 26 octobre 2005, alors qu'il était âgé de 32 ans, afin de rejoindre son épouse ; qu'il a bénéficié de titres de séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française ; que la dernière autorisation de séjour délivrée à M. A est une carte de séjour temporaire vie privée et familiale en qualité de conjoint d'une ressortissante française, valable du 13 décembre 2007 au 12 décembre 2008 ; que le Tribunal de Grande Instance de Meaux, par une ordonnance du 6 mai 2008, a constaté, notamment, la résidence séparée des époux A ; qu'ainsi, M. A est séparé de son épouse et aucun enfant n'est né de leur union ; qu'il a vécu jusqu'à l'âge de 32 ans en Turquie et il ne soutient pas ne pas y avoir d'attaches familiales ; que dans ces conditions, et alors même que M. A bénéficie d'un contrat de travail à durée indéterminée et est parfaitement intégré au sein de la société française, la décision attaquée n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressé, eu égard notamment à la durée de sa présence en France, une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ;

Considérant qu'il suit de là que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour annuler la décision du PREFET DES ALPES-DE-HAUTE-PROVENCE en date du 2 décembre 2008 ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A devant le Tribunal administratif de Marseille ;

Considérant, en premier lieu, que le refus de titre de séjour énonce, avec une précision suffisante, les considérations de fait et de droit qui le fondent ; qu'il est, par suite, suffisamment motivé ;

Considérant, en deuxième lieu, comme il a été dit précédemment, que la dernière autorisation de séjour délivrée à M. A est une carte de séjour temporaire vie privée et familiale , en qualité de conjoint d'une ressortissante française, valable du 13 décembre 2007 au 12 décembre 2008 ; que le Tribunal de Grande Instance de Meaux, par ordonnance du 6 mai 2008, a constaté, notamment, la résidence séparée des époux A ; que, l'article L. 313-11-4° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précise qu'une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit à la condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage ; qu'il suit de là que le préfet a, à bon droit, refusé de renouveler à M. A la carte de séjour temporaire vie privée et familiale , en qualité de conjoint d'un ressortissant français ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de la décision du 19 septembre 1980 du conseil d'association institué par l'accord d'association conclu le 12 septembre 1963 entre la Communauté économique européenne et la République de Turquie : 1. Sous réserve des dispositions de l'article 7 relatif au libre accès à l'emploi des membres de sa famille, le travailleur turc, appartenant au marché régulier de l'emploi d'un Etat membre : / - a droit, dans cet Etat membre, après un an d'emploi régulier, au renouvellement de son permis de travail auprès du même employeur, s'il dispose d'un emploi (...) ;

Considérant qu'il résulte de l'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes C-237/91, en date du 16 décembre 1992, que l'article 6 premier paragraphe, premier tiret, de la décision du 19 septembre 1980 du conseil d'association, qui a un effet direct en droit interne, doit être interprété en ce sens que, d'une part, un ressortissant turc qui a obtenu un permis de séjour sur le territoire d'un Etat membre pour y épouser une ressortissante de cet Etat membre et y a travaillé depuis plus d'un an auprès du même employeur sous le couvert d'un permis de travail valide a droit au renouvellement de son permis de travail en vertu de cette disposition, même si, au moment où il est statué sur la demande de renouvellement, son mariage a été dissous et que, d'autre part, un travailleur turc qui remplit les conditions de l'article 6, premier paragraphe, premier tiret, de la décision susmentionnée peut obtenir, outre la prorogation du permis de travail, celle du permis de séjour, le droit de séjour étant indispensable à l'accès et à l'exercice d'une activité salariée ;

Considérant, que, conjointement à sa demande de renouvellement de titre de séjour, M. A a produit des éléments relatifs à son activité salariée sur le territoire français ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'il a été embauché, dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée, par l'entreprise de maçonnerie générale Aydin, sise à Oraison le 2 mai 2008 ; que l'intéressé ne peut donc être regardé comme satisfaisant à la condition prévue à l'article 6 de la décision du 19 septembre 1980, d'avoir travaillé en France depuis plus d'un an auprès du même employeur sous le couvert d'un permis de travail valide dès lors, qu'en l'espèce, il ne justifie à la date de l'arrêté litigieux, que d'une période de sept mois ; que, par suite, M. A n'est pas fondé à soutenir qu'en refusant de lui accorder un titre de séjour, le PREFET DES ALPES-DE-HAUTE-PROVENCE a méconnu la décision du 19 septembre 1980 sus-rappelée ;

Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour (...) ; qu'aux termes de l'article L. 312-2 de ce même code : La commission est saisie par l'autorité administrative, lorsque celle ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 (...) ; et qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code susmentionné : L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) ;

Considérant, d'une part, qu'en vertu des dispositions de l'article L. 312-2 du code l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet doit consulter la commission du titre de séjour lorsqu'il envisage de refuser la délivrance d'une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 dudit code ; que, toutefois, le préfet n'est tenu de saisir la commission que du cas des étrangers qui remplissent effectivement la condition mentionnée à l'article L. 313-11 et non du cas de tous les étrangers qui s'en prévalent ; qu'estimant à bon droit, ainsi qu'il a été précédemment exposé, que M. A n'était pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour, le PREFET DES ALPES-DE-HAUTE-PROVENCE n'était pas tenu, en application de l'article L. 312-2 du code susmentionné, de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande ; que, d'autre part, M. A n'ayant pas présenté une demande d'admission exceptionnelle au séjour, le PREFET DES ALPES-DE-HAUTE-PROVENCE n'était pas davantage tenu de saisir ladite commission à ce titre ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré du défaut de saisine de cette commission doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DES ALPES-DE-HAUTE-PROVENCE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a annulé sa décision de refus de séjour du 2 décembre 2008 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ; que ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. A demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Marseille du 26 mars 2009 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de M. A tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au PREFET DES ALPES-DE-HAUTE-PROVENCE, à M. Ismail A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

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N° 09MA01579


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09MA01579
Date de la décision : 07/03/2011
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : M. GUERRIVE
Rapporteur ?: Mme Sylvie CAROTENUTO
Rapporteur public ?: M. MARCOVICI
Avocat(s) : KISSAMBOU M'BAMBY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2011-03-07;09ma01579 ?
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