La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/12/2010 | FRANCE | N°09MA01222

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre-formation à 3, 20 décembre 2010, 09MA01222


Vu la requête, enregistrée le 6 avril 2009, présentée pour M. Jean-Pierre A, élisant domicile ...), par Me Palandre ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0702568-0703157 en date du 12 février 2009 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision en date du 19 mars 2007 par laquelle le ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, après avoir récapitulé les retraits de points de son permis de conduire dont il avait fait l'objet antérieurement, a retiré trois po

ints de ce titre de conduite pour une infraction constatée le 22 août 2008 à M...

Vu la requête, enregistrée le 6 avril 2009, présentée pour M. Jean-Pierre A, élisant domicile ...), par Me Palandre ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0702568-0703157 en date du 12 février 2009 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision en date du 19 mars 2007 par laquelle le ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, après avoir récapitulé les retraits de points de son permis de conduire dont il avait fait l'objet antérieurement, a retiré trois points de ce titre de conduite pour une infraction constatée le 22 août 2008 à Marseille et constaté l'invalidité dudit titre de conduite, d'autre part, à l'annulation de la décision du préfet des Alpes de Haute-Provence en date du 2 avril 2007 portant injonction de restitution de son permis de conduire ;

2°) d'annuler la décision en date du 19 mars 2007 par laquelle le ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire a constaté l'invalidité de ce titre de conduite ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la route ;

Vu le code pénal et le code de procédure pénale ;

Vu le code de justice administrative et l'arrêté d'expérimentation du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 décembre 2010 :

- le rapport de M. Emmanuelli, rapporteur ;

- les conclusions de M. Guidal, rapporteur public ;

Considérant qu'il est fait grief à M. A d'avoir commis sept infractions au code de la route ; que par lettre référencée 48 SI en date du 19 mars 2007, le ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire lui a notifié l'infraction commise le 22 août 2006, emportant retrait de trois points de son permis de conduire, lui a rappelé les six autres infractions commises les 9 mars 2004 à 10 heures 55, le 16 septembre 2005 à 16 heures 08, le 1er décembre 2005 à 17 heures 33, le 26 février 2006 à 08 heures 18, le 25 mars 2006 à 16 heures 55 et le 20 avril 2006 à 10 heures emportant chacune respectivement retrait de trois points, un point, un point, un point, quatre points et trois points de ce titre de conduite ; que, par ce même courrier, le ministre a notifié également à M. A sa décision constatant l'invalidité du permis de conduire ; que M. A a demandé au Tribunal administratif de Marseille, d'une part, l'annulation de la décision du 19 mars 2007 retirant trois points de son permis de conduire et de la décision invalidant ce titre de conduite, d'autre part, qu'il soit enjoint au ministre de lui restituer les points retirés du capital de points de son permis de conduire et, enfin, l'annulation de la décision du préfet des Alpes de Haute-Provence en date du 2 avril 2007 portant injonction de restitution de son permis de conduire ; que, par jugement en date du 12 février 2009, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté ladite demande ; que M. A fait appel de ce jugement et demande l'annulation de la décision du 19 mars 2007 invalidant son titre de conduite en excipant de l'illégalité des décisions de retrait de points afférentes aux infractions des 9 mars 2004, 16 septembre 2005, 1er décembre 2005, 26 février 2006 et 25 mars 2006 ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision attaquée :

En ce qui concerne le moyen tiré du défaut de notification des décisions de retraits de points afférentes aux infractions des 16 septembre 2005, 1er décembre 2005 et 26 février 2006 :

Considérant que les conditions de la notification au conducteur des retraits de points de son permis de conduire, prévue par les dispositions de l'article L.223-3 du code de la route, ne conditionnent pas la régularité de la procédure suivie et, partant, la légalité de ces retraits ; que cette procédure a pour seul objet de rendre lesdits retraits opposables à l'intéressé et de faire courir le délai dont il dispose pour en contester la légalité devant la juridiction administrative ; que la circonstance que le ministre ne soit pas en mesure d'apporter la preuve que la notification des retraits de points afférents aux infractions des 16 septembre 2005, 1er décembre 2005 et 26 février 2006, effectuée par lettre simple, a bien été reçue par M. A ne saurait lui interdire de constater que le permis a perdu sa validité, dès lors, que, dans la décision type 48 S , notifiée par lettre recommandée avec avis de réception, procédant au retrait des derniers points, il récapitule les retraits antérieurs et les rend ainsi opposables à l'intéressé qui demeure recevable à exciper de l'illégalité de chacun de ces retraits ; que, dès lors, le moyen tiré de l'irrégularité de la notification des retraits de points doit être écarté ;

En ce qui concerne le moyen tiré du défaut d'information préalable prévu par les articles L.223-3 et R.223-3 du code de la route :

Considérant qu'aux termes de l'article L.223-1 du code de la route : Le permis de conduire est affecté d'un nombre de points. Celui-ci est réduit de plein droit si le titulaire a commis une infraction pour laquelle cette réduction est prévue (...)/ lorsque le nombre de points est nul, le permis perd sa validité./ La réalité d'une infraction entraînant retrait de points est établie par le paiement d'une amende forfaitaire ou l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée, l'exécution d'une composition pénale ou par une condamnation définitive ; que l'article L.223-2 du même code prévoit que I.- Pour les délits, le retrait de points est égal à la moitié du nombre maximal de points./ II.- Pour les contraventions, le retrait de points est, au plus, égal à la moitié du nombre maximal de points. / III. - Dans le cas où plusieurs infractions entraînant retrait de points sont commises simultanément, les retraits de points se cumulent dans la limite des deux tiers du nombre maximal de points. ; qu'aux termes de l'article L.223-3 du même code : Lorsque l'intéressé est avisé qu'une des infractions entraînant retrait de points a été relevée à son encontre, il est informé des dispositions de l'article L.223-2, de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès conformément aux articles L.225-1 à L.225-9. (...) ; qu'enfin, l'article R.223-3 dudit code dispose I. - Lors de la constatation d'une infraction entraînant retrait de points, l'auteur de celle-ci est informé qu'il encourt un retrait de points si la réalité de l'infraction est établie dans les conditions définies à l'article L.223-1. / II. - Il est informé également de l'existence d'un traitement automatisé des retraits et reconstitutions de points et de la possibilité pour lui d'accéder aux informations le concernant. Ces mentions figurent sur le document qui lui est remis ou adressé par le service verbalisateur. Le droit d'accès aux informations ci-dessus mentionnées s'exerce dans les conditions fixées par les articles L.225-1 à L.225-9. / III.- Lorsque le ministre de l'intérieur constate que la réalité d'une infraction entraînant retrait de points est établie dans les conditions prévues par le quatrième alinéa de l'article L.223-1, il réduit en conséquence le nombre de points affecté au permis de conduire de l'auteur de cette infraction et en informe ce dernier par lettre simple. Le ministre de l'intérieur constate et notifie à l'intéressé, dans les mêmes conditions, les restitutions de points obtenues en application des alinéas 1 et 3 de l'article L.223-6. / IV.- Lorsque le nombre de points est nul, le préfet du département (...) enjoint à l'intéressé, par lettre recommandée, de restituer son titre de conduite dans un délai d'une semaine à compter de la réception de cette lettre. ; qu'il résulte des dispositions précitées que l'administration ne peut légalement prendre une décision retirant des points affectés à un permis de conduire à la suite d'une infraction dont la réalité a été établie, que si l'auteur de l'infraction s'est vu préalablement délivrer par elle un document contenant les informations prévues par les articles précités L.223-3 et R.223-3 du code de la route, sur d'une part, l'existence d'un traitement automatisé des points et la possibilité d'exercer son droit d'accès aux informations y afférentes conformément aux articles L.225-1 à L.225-9 du code de la route et d'autre part, sur le fait que l'amende forfaitaire établit notamment la réalité de l'infraction, dont la qualification est précisée, et entraîne un retrait de points correspondant à cette infraction ; que ces informations constituent une garantie essentielle lui permettant de contester la réalité de l'infraction et d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis ; qu'il appartient à l'administration d'apporter la preuve, par tout moyen, qu'elle a satisfait à cette obligation d'information en délivrant un tel document ; que, cependant, il incombe à l'intéressé lorsqu'il entend faire valoir que les mentions figurant dans le document qui lui a été remis sont inexactes ou incomplètes, de mettre le juge en mesure de se prononcer, en produisant notamment le document dont il conteste l'exactitude ; que ni l'article L.223-3, ni l'article R.223-3 du code de la route n'exigent que le conducteur soit informé du nombre exact de points susceptibles de lui être retirés dès lors que la qualification de l'infraction qui lui est reprochée est dûment portée à sa connaissance ;

S'agissant de l'infraction du 9 mars 2004 :

Considérant que pour l'infraction du 9 mars 2004 ayant entraîné le retrait de trois points du permis de conduire de M. A, le ministre produit le procès-verbal d'audition de témoin, dressé le 24 mars 2005 par un agent de police judiciaire de la compagnie de gendarmerie nationale de Digne-les-Bains, en résidence à la brigade territoriale de Gréoux-les-Bains, et signé par le contrevenant ; que, toutefois, si ce document mentionne que M. A est susceptible de perdre trois points au capital de points affectés à son permis de conduire et informe le contrevenant des dispositions des articles L.223-2 et L.225-3 du code de la route, il ne porte pas à la connaissance de l'intéressé que le retrait de points est encouru si la réalité de l'infraction est établie dans les conditions définies à l'article L.223-1 du code de la route et, notamment, par le paiement d'une amende forfaitaire ; que, par suite, le ministre ne peut être regardé comme rapportant la preuve de ce que M. A a reçu les informations préalables exigées par les articles L.223-3 et R.223-3 du code de la route ;

S'agissant des infractions en date des 16 septembre 2005, 1er décembre 2005 et 26 février 2006 :

Considérant que les infractions susvisées ont été constatées par radar automatique et ont provoqué chacune une décision ministérielle de retrait de un point du permis de conduire de M. A ; que le ministre ne se prévaut d'aucun procès-verbal de contravention établi après interception du véhicule de l'intéressé ; qu'il ressort des pièces produites devant la Cour par le ministre que M. A n'a pas payé les amendes forfaitaires correspondant à ces infractions ; qu'ainsi, il n'est pas établi que l'intéressé a reçu les avis de contravention en cause ; que s'il ressort des pièces du dossier que, s'agissant de ces trois infractions, M. A a payé les amendes forfaitaires majorées après émission, les 26 janvier 2006 (infraction en date du 16 septembre 2005), 22 février 2006 (infraction en date du 1er décembre 2005), et 5 mai 2006 (infraction en date du 26 février 2006) de titres exécutoires, cette circonstance n'est pas de nature, à elle seule, à établir que l'intéressé, en recevant les demandes de paiement des amendes forfaitaires majorées, a reçu copie de l'avis de contravention ou tout autre document contenant les informations requises par les dispositions précitées du code de la route ; que M. A est, dès lors, fondé à soutenir que les retraits de points afférents à ces infractions sont, à défaut d'une information préalable suffisante, entachés d'irrégularité ;

S'agissant de l'infraction du 25 mars 2006 :

Considérant qu'il ne résulte d'aucun des articles précités, dans leur rédaction applicable à la date de l'infraction considérée, que le conducteur doit être informé du nombre exact de points susceptibles de lui être retirés, dès lors que la qualification de l'infraction qui lui est reprochée est dûment portée à sa connaissance ; qu'il suit de là que la mention oui figurant dans la case retrait de points du document remis au contrevenant lors de la constatation d'une infraction doit être regardée comme une information suffisante ; que la circonstance que l'avis de contravention ait été porté sur un formulaire obsolète, qui indique que le conducteur doit être informé de ce qu'il encourt le retrait d'un nombre précis de points, ne constitue pas la violation d'une formalité substantielle et n'affecte pas la substance de l'information délivrée au contrevenant ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A est fondé à exciper de l'illégalité des décisions retirant en tout six points de son permis de conduire, afférentes aux infractions constatées les 9 mars 2004, 16 septembre 2005, 1er décembre 2005 et 26 février 2006, pour demander l'annulation de la décision en date du 19 mars 2007 par laquelle le ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire a constaté l'invalidité de ce titre de conduite ; que, par suite, dès lors qu'à cette date, le capital de points de ce titre de conduite n'était pas nul, M. A est fondé à demander l'annulation de cette décision ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L.761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à M. A une somme de 1 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Marseille en date du 12 février 2009 est annulé en tant qu'il a rejeté la demande de M. Jean-Pierre A tendant à l'annulation de la décision en date du 19 mars 2007 par laquelle le ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire a constaté l'invalidité de son titre de conduite.

Article 2 : La décision en date du 19 mars 2007 par laquelle le ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire a informé M. Jean-Pierre A de la perte de validité de son permis de conduire pour solde de points nul est annulée.

Article 3 : L'Etat est condamné à verser à M. Jean-Pierre A une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de M. Jean-Pierre A est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Jean-Pierre A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

''

''

''

''

2

N° 09MA01222


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre-formation à 3
Numéro d'arrêt : 09MA01222
Date de la décision : 20/12/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. REINHORN
Rapporteur ?: M. Olivier EMMANUELLI
Rapporteur public ?: M. GUIDAL
Avocat(s) : PALANDRE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2010-12-20;09ma01222 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award