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07/12/2010 | FRANCE | N°09MA00540

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre-formation à 3, 07 décembre 2010, 09MA00540


Vu la requête, enregistrée en télécopie le 13 février 2009, régularisée le 16 février 2009, présentée pour M. Eric A, demeurant ... par la SCP Pinet et Associés ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0603252 en date du 2 décembre 2008 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 24 avril 2006 par laquelle le ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire a retiré un point de son permis de conduire et, après avoir rappelé

les quatre retraits de points prononcés pour des infractions antérieures, a con...

Vu la requête, enregistrée en télécopie le 13 février 2009, régularisée le 16 février 2009, présentée pour M. Eric A, demeurant ... par la SCP Pinet et Associés ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0603252 en date du 2 décembre 2008 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 24 avril 2006 par laquelle le ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire a retiré un point de son permis de conduire et, après avoir rappelé les quatre retraits de points prononcés pour des infractions antérieures, a constaté l'invalidité de ce titre de conduite ainsi que des quatre autres décisions de retrait de points dont il a fait l'objet antérieurement ainsi que de la décision en date du 19 mai 2006 par laquelle le préfet de l'Aude lui a enjoint de restituer son permis de conduire ;

2°) d'annuler les décisions de retrait de points sur son permis de conduire dont il a fait l'objet, la décision en date du 24 avril 2006 par laquelle du ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire a constaté l'invalidité de ce titre de conduite et la décision du 19 mai 2006 du préfet de l'Aude lui enjoignant de restituer son permis de conduire ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Aude de lui restituer ce titre de conduite crédité des points irrégulièrement retirés ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

........................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la route ;

Vu le code pénal et le code de procédure pénale ;

Vu le code de justice administrative et l'arrêté d'expérimentation du Vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 novembre 2010,

- le rapport de Mme Fernandez, rapporteur ;

- et les conclusions de M. Guidal, rapporteur public ;

Considérant qu'il est fait grief à M. A d'avoir commis cinq infractions au code de la route ; que, par lettre référencée 48 S en date du 24 avril 2006, le ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire lui a notifié l'infraction commise le 27 février 2006 emportant retrait d'un point de son permis de conduire, lui a rappelé les quatre autres infractions relevées à son encontre les 22 juin 2003, 25 novembre 2003, 25 mai 2004 et le 27 mai 2005, emportant chacune respectivement retrait de trois points, trois points, trois points et deux points de ce titre de conduite ; que, par ce même courrier, le ministre a notifié également à M. A sa décision constatant l'invalidité de ce permis de conduire ; que, par décision du 19 mai 2006, le préfet de l'Aude a enjoint à M. A de restituer son permis de conduire ;

Sur les décisions retirant des points du permis de conduire de M. A :

En ce qui concerne le défaut de notification des décisions de retrait de points :

Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L.223-3 du code de la route : ... Le retrait de points est porté à la connaissance de l'intéressé par lettre simple quand il est effectif ;

Considérant que les conditions de la notification au conducteur des retraits de points de son permis de conduire, prévue par les dispositions précitées, ne conditionnent pas la régularité de la procédure suivie et partant, la légalité de ces retraits ; que cette procédure a pour seul objet de rendre ceux-ci opposables à l'intéressé et de faire courir le délai dont dispose ce dernier pour en contester la légalité devant la juridiction administrative ; que la circonstance que le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales ne soit pas en mesure d'apporter la preuve que la notification des retraits successifs, effectuée par lettre simple, a bien été reçue par son destinataire, ne saurait lui interdire de constater que le permis a perdu sa validité, dès lors, que dans la décision procédant au retrait des derniers points, il récapitule les retraits antérieurs et les rend ainsi opposables au conducteur qui demeure cependant recevable à exciper de l'illégalité de chacun de ces retraits ; que, par suite, M. A ne peut utilement invoquer la circonstance que les décisions de retrait de points afférents aux infractions relevées à son encontre les 22 juin 2003, 25 novembre 2003, 25 mai 2004 et 27 mai 2005 ne lui ont pas été notifiées individuellement et antérieurement à la décision du 24 avril 2006 pour en contester la légalité ;

En ce qui concerne l'obligation d'information préalable prévue par les articles L.223-3 et R.223-3 du code de la route :

Considérant qu'aux termes de l'article L.223-1 du code de la route : Le permis de conduire est affecté d'un nombre de points. Celui-ci est réduit de plein droit si le titulaire du permis a commis une infraction pour laquelle cette réduction est prévue. A la date d'obtention du permis de conduire, celui-ci est affecté, pendant un délai probatoire de trois ans, de la moitié du nombre maximal de points. Ce délai probatoire est réduit à deux ans lorsque le titulaire du permis de conduire a suivi un apprentissage anticipé de la conduite. A l'issue de ce délai probatoire, le permis de conduire est affecté du nombre maximal de points, si aucune infraction ayant donné lieu au retrait de points n'a été commise. Lorsque le nombre de points est nul, le permis perd sa validité. La réalité d'une infraction entraînant retrait de points est établie par le paiement d'une amende forfaitaire ou l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée, l'exécution d'une composition pénale ou par une condamnation définitive. ; qu'aux termes de l'article L.223-3 du même code : Lorsque l'intéressé est avisé qu'une des infractions entraînant retrait de points a été relevée à son encontre, il est informé des dispositions de l'article L.223-2, de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès conformément aux articles L.225-1 à L.225-9. Lorsqu'il est fait application de la procédure de l'amende forfaitaire ou de la procédure de composition pénale, l'auteur de l'infraction est informé que le paiement de l'amende ou l'exécution de la composition pénale entraîne le retrait du nombre de points correspondant à l'infraction reprochée, dont la qualification est dûment portée à sa connaissance ; il est également informé de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès. / Le retrait de points est porté à la connaissance de l'intéressé par lettre simple quand il est effectif. ; qu'il résulte de ces dispositions que l'administration ne peut légalement prendre une décision retirant des points affectés à un permis de conduire, à la suite d'une infraction dont la réalité a été établie, que si l'auteur de l'infraction s'est vu préalablement délivrer par elle un document contenant les informations prévues aux articles L.223-3 et R.223-3 du code de la route, qui constituent une garantie essentielle lui permettant de contester la réalité de l'infraction et d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis ; qu'il appartient à l'administration d'apporter la preuve, par tous moyens, qu'elle a satisfait à cette obligation préalable d'information ; que lorsqu'il est fait application de la procédure d'amende forfaitaire ou de la procédure de composition pénale, l'information remise ou adressée par le service verbalisateur doit porter, en vertu du deuxième alinéa de l'article L.223-3 du code de la route dans sa rédaction précitée résultant de la loi du 12 juin 2003 sur la sécurité routière et de l'article R.223-3 précité du même code pris en application d'une part, sur le fait que le paiement de l'amende ou l'exécution de la composition pénale établit la réalité de l'infraction dont la qualification est précisée et entraîne un retrait de points correspondant à cette infraction et d'autre part, sur l'existence d'un traitement automatisé de points et de la possibilité d'exercer le droit d'accès ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à l'occasion des infractions relevées à l'encontre de M. A les 25 novembre 2003, 25 mai 2004 et 27 mai 2005 ayant entraîné respectivement le retrait de trois, trois et deux points du capital de points de son permis de conduire, M. A a procédé au paiement de l'amende forfaitaire entre les mains de l'agent verbalisateur au moment de la constatation des infractions ; qu'à chacune de ces occasions, il s'est vu remettre une quittance de paiement qui comportait, au recto, les éléments relatifs à la constatation de l'infraction et la qualification de celle-ci ainsi que la mention oui dans la case retrait de points et, au verso, les informations prévues par l'article L.223-3 du code de la route ; qu'il a signé chacune des quittances sous la mention précisant que le paiement entraîne reconnaissance définitive de la réalité de l'infraction et, par là même, la réduction du nombre de points correspondant de son permis de conduire ; qu'à supposer même que l'intéressé n'ait pas été informé par l'agent verbalisateur, préalablement au paiement de l'amende, des conséquences du paiement de cette dernière, il pouvait renoncer à la modalité du paiement immédiat entre les mains de cet agent en lui demandant la restitution de son paiement, avant de procéder à la signature de la quittance ou, le cas échéant, inscrire, sur la quittance, une réserve sur les modalités selon lesquelles l'information lui avait été délivrée, tirée notamment de ce qu'il n'avait eu accès aux informations en cause uniquement après avoir apposé sa signature sur la quittance ou que l'agent verbalisateur a refusé de lui restituer les numéraires ou autre mode de paiement de l'amende après qu'il ait eu effectivement accès aux informations exigées ou de ce qu'il n'a eu accès à l'ensemble des informations notamment celles au verso de la quittance qu'après qu'il ait dû apposer sa signature au recto ; qu'il pouvait également y expliquer, pour ces motifs, son refus de signer la quittance ; qu'en l'espèce , M. A n'a pas renoncé au paiement immédiat de l'amende, ni émis de réserve pour aucune des trois infractions en cause ; que, par suite, le ministre doit être regardé comme rapportant la preuve qui lui incombe du respect de l'obligation d'information préalable exigée par les dispositions du code de la route précitées ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation des quatre décisions du ministre de l'intérieur retirant respectivement trois points, trois points, trois points et deux points du capital de points de son permis de conduire en raison des infractions constatées les 22 juin 2003, 25 novembre 2003, 25 mai 2004 et 27 mai 2005 ;

En ce qui concerne la régularité du procès-verbal de l'infraction du 27 février 2006 :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant que l'avis de contravention afférent à l'infraction relevée le 27 février 2006 à l'encontre de M. A, pour un dépassement de la vitesse autorisée, est raturé à la rubrique immatriculation du véhicule et que cela rend illisible le numéro d'immatriculation du véhicule avec lequel le conducteur aurait commis l'infraction ; que, de plus, la seule mention sur celui-ci, relative à la date du dernier contrôle de l'appareil de mesure de la vitesse, ne précise pas l'année dudit contrôle ; que ces irrégularités de l'avis de contravention entachent d'irrégularité la procédure ayant conduit à la prise de la décision en date du 24 avril 2006 par laquelle le ministre de l'intérieur a retiré un point du capital de points du permis de conduire de M. A ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire retirant un point pour l'infraction relevée à son encontre le 27 février 2006 ;

Sur les autres décisions :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant que l'illégalité et l'annulation de la décision du ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire emportant retrait d'un point du permis de conduire de M. A et alors que le capital de points de ce titre de conduite n'était pas nul, entraînent, par voie de conséquence, l'illégalité et l'annulation de la décision en date du 26 avril 2006 de cette même autorité constatant l'invalidité du permis de conduire de M. A ainsi que de la décision en date du 19 mai 2006 par laquelle le préfet de l'Aude lui a enjoint de restituer son permis de conduire ;

Considérant que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux décisions ;

Sur les conclusions à fins d'injonction :

Considérant que l'exécution du présent arrêt, eu égard à ses motifs, implique nécessairement, en application des dispositions de l'article L.911-1 du code de justice administrative, que le ministre chargé de l'intérieur restitue, dans un délai d'un mois à compter du présent arrêt, à M. A son titre de conduite affecté d'un capital d'un point, qui sera rétabli dans le traitement automatisé mentionné à l'article L.223-3 du code de la route, sauf si l'intéressé a obtenu un nouveau permis de conduire et sans préjudice des décisions de retrait de points à raison d'autres infractions commises postérieurement par l'intéressé ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L.761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ;

Considérant qu'il y a lieu de condamner l'Etat à verser, dans les circonstances de l'espèce, à M. A une somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement en date du 2 décembre 2008 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Montpellier est annulé en tant qu'il a rejeté la demande de M. A tendant à l'annulation de la décision du ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire retirant un point du permis de conduire de M. A au titre de l'infraction du 27 février 2006, de la décision de la même autorité en date du 24 avril 2006 constatant l'invalidité de ce titre de conduite et de la décision en date du 19 mai 2006 du préfet de l'Aude enjoignant à M. A de restituer son permis de conduire.

Article 2 : La décision du ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire retirant un point du permis de conduire de M. A au titre de l'infraction du 27 février 2006, la décision de la même autorité en date du 24 avril 2006 constatant l'invalidité de ce titre de conduite et la décision en date du 19 mai 2006 du préfet de l'Aude enjoignant à M. A de restituer son permis de conduire sont annulées.

Article 3 : Sous réserve que l'intéressé ait obtenu un nouveau permis de conduire et sans préjudice des décisions de retrait de points à raison d'autres infractions commises postérieurement par ce dernier, il est enjoint au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales de procéder, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, à la restitution à M. A de son permis de conduire affecté d'un crédit d'un point, rétabli dans le traitement automatisé mentionné à l'article L.223-3 du code de la route.

Article 4 : L'Etat est condamné à verser à M. A une somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de M. A est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. Eric A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.

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N° 09MA00540 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre-formation à 3
Numéro d'arrêt : 09MA00540
Date de la décision : 07/12/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme FELMY
Rapporteur ?: Mme Elydia FERNANDEZ
Rapporteur public ?: M. GUIDAL
Avocat(s) : PINET et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2010-12-07;09ma00540 ?
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