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15/11/2010 | FRANCE | N°08MA03640

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 15 novembre 2010, 08MA03640


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 1er août 2008, sous le n° 08MA03640, présentée pour Mme Souadou A, demeurant chez Mme Konte C ..., par Me Jacquemin, avocat ;

M. Saoudou A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0803093 en date du 26 juin 2008 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 avril 2008 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande de titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français

;

2°) d'annuler ladite décision ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 1er août 2008, sous le n° 08MA03640, présentée pour Mme Souadou A, demeurant chez Mme Konte C ..., par Me Jacquemin, avocat ;

M. Saoudou A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0803093 en date du 26 juin 2008 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 avril 2008 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande de titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français ;

2°) d'annuler ladite décision ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre provisoire de séjour, sous astreinte de 10 euros par jour de retard, de réexaminer la demande de titre de séjour, dans le sens de sa régularisation au regard de la protection née de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.............

Vu le jugement attaqué et la décision attaquée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu l'arrêté du 8 juillet 1999 relatif aux conditions d'établissement des avis médicaux concernant les étrangers malades prévus à l'article 7-5 du décret no 46-1574 du 30 juin 1946 modifié ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 octobre 2010 :

- le rapport de Mme Lopa Dufrénot, rapporteur,

- et les conclusions de M. Marcovici, rapporteur public ;

Considérant que Mme A, de nationalité guinéenne, relève appel du jugement du 26 juin 2008 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté en date du 25 avril 2008 portant refus de sa demande de titre de séjour étranger malade et obligation de quitter le territoire français à destination de la Guinée ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que pour rejeter la requête, les premiers juges se sont notamment fondés sur l'avis des médecins inspecteurs de santé publique de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales des Bouches-du-Rhône émis le 19 février 2008, après avoir pris connaissance du certificat médical du 31 janvier 2008 ; qu'en se référant ainsi audit certificat établi par un praticien hospitalier sur la seule demande de Mme A qui y était tenue, dans le cadre de l'instruction de sa demande d'admission au séjour sollicitée sur le fondement de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en application des dispositions de l'arrêté du 8 juillet 1999 et transmis, sous pli confidentiel, aux médecins inspecteurs de santé publique et au vu duquel ils ont émis l'avis précité, les premiers juges, alors qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'imposait sa communication à l'intéressée, n'ont pas statué à l'issue d'une procédure irrégulière ; qu'ainsi Mme A n'est pas fondée à soutenir que le principe du contradictoire de la procédure a été méconnu ;

Sur la légalité de la décision contestée :

S'agissant de la légalité externe :

Considérant que le préfet des Bouches-du-Rhône vise dans sa décision du 18 mars 2008 attaquée les textes dont il fait application et indique l'identité, les conditions d'entrée en France et la situation familiale de Mme A ; qu'il précise que, au vu de l'avis des médecins inspecteurs de santé publique, l'état de santé de l'intéressée ne nécessite pas son maintien sur le territoire français dès lors qu'elle peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine et que le défaut de prise en charge médicale ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que la décision attaquée énonce donc, sans porter une atteinte qui serait illégale au secret médical, les considérations de fait et de droit sur lesquelles elle repose ; qu'alors même que Mme A aurait justifié sur le fond de la nécessité de son maintien en France, la décision contestée est ainsi suffisamment motivée au regard de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs ;

S'agissant de la légalité interne :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l' entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire (...). La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin inspecteur de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code en vigueur à la date de la décision litigieuse : Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin inspecteur départemental de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé et, à Paris, par le médecin, chef du service médical de la préfecture de police. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de la population et des migrations, du ministre chargé de la santé et du ministre de l'intérieur, au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. ; qu'aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 8 juillet 1999, pris pour l'application de ces dispositions : L'étranger qui a déposé une demande de délivrance ou de renouvellement de carte de séjour temporaire en application de l'article 12 bis (11°) ou qui invoque les dispositions de l'article 25 (8°) de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 est tenu de faire établir un rapport médical relatif à son état de santé par un médecin agréé ou un praticien hospitalier. ; qu'aux termes de l'article 3 du même arrêté : (...) le médecin agréé ou le praticien hospitalier établit un rapport précisant le diagnostic des pathologies en cours, le traitement suivi et sa durée prévisible ainsi que les perspectives d'évolution et, éventuellement, la possibilité de traitement dans le pays d'origine. Ce rapport médical est transmis, sous pli confidentiel, au médecin inspecteur de santé publique de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales dont relève la résidence de l'intéressé ; que l'article 4 du même arrêté prévoit que : Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin inspecteur de santé publique de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales émet un avis précisant : / - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / - si l'intéressé peut effectivement ou non bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire ; /- et la durée prévisible du traitement. / Il indique, en outre, si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers son pays de renvoi. /. Cet avis est transmis au préfet par le directeur départemental des affaires sanitaires et sociales. ; qu'enfin aux termes de l'article 6 : A Paris, le rapport médical du médecin agréé ou du praticien hospitalier est adressé sous pli confidentiel au médecin-chef du service médical de la préfecture de police. Celui-ci émet l'avis comportant les précisions exigées par l'article 4 ci-dessus et le transmet au préfet de police. ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux parlementaires qui ont précédé l'adoption de la loi du 11 mai 1998, dont sont issues les dispositions précitées de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande au titre des dispositions du 11° de l'article L. 313-11, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin mentionné à l'article R. 313-22 précité, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire ;

Considérant, d'une part, que suite à la demande de titre de séjour présentée, le 30 mars 2007, par Mme A, le préfet des Bouches-du-Rhône a saisi les médecins-inspecteurs de santé publique de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales des Bouches-du-Rhône, d'une demande d'avis médical, conformément aux prescriptions de l'arrêté susvisé du 8 juillet 1999 ; que lesdits médecins ont émis, le 19 février 2008, leur avis, au vu du certificat médical du médecin agréé en date du 31 janvier 2008, comme il a été dit précédemment ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les médecins inspecteurs n'auraient pas disposé de l'ensemble des informations qui leur étaient nécessaires et notamment des éléments de la base de données CIMED, au demeurant, produits aux débats, afin d'émettre leurs conclusions ; que, par suite, Mme A n'est pas fondée à soutenir que le préfet ne pouvait se fonder sur l'avis du 19 février 2008 pour refuser de délivrer le titre de séjour sollicité ;

Considérant, d'autre part, que Mme A, atteinte d'une hypertension artérielle sévère nécessitant une tri thérapie anti-hypertensive quotidienne à vie soutient que l'interruption ou l'insuffisance de son traitement et de son suivi serait de nature à entraîner de graves conséquences sur son état de santé ; que, toutefois, les certificats médicaux des 8 avril et 11 avril 2008 et ceux datés des 5 et 6 octobre 2010, produits à l'appui de ses affirmations, ne sont pas, en l'espèce, de nature à infirmer l'avis du 19 février 2008 des médecins-inspecteurs de santé publique selon lesquels le défaut de prise en charge de l'état de santé de l'intéressée ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que, dans ces conditions, les moyens qu'elle invoque et tirés de la violation des stipulations précitées de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'erreur manifeste commise par le préfet des Bouches-du-Rhône dans l'appréciation des conséquences de sa décision portant refus de titre et obligation de quitter le territoire sur sa situation personnelle et son état de santé doivent être écartés ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance./2°Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénale, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et liberté d'autrui ;

Considérant que Mme A soutient que, entrée en France le 5 mars 2002, elle ne dispose plus d'attaches dans son pays d'origine dès lors que les derniers membres de sa famille notamment son frère et sa soeur vivent à l'étranger et que des oncles et tantes, titulaires de la nationalité française résident en France ; que toutefois, l'intéressée n'établit pas sa présence habituelle sur le territoire française depuis 2002 et son insertion dans la société française ; que, nonobstant la présence de membres de sa famille de nationalité française en France, l'intéressée, célibataire et sans charge de famille, ne justifie pas être dépourvue d'attaches en Guinée qu'elle a quittée à l'âge de 38 ans après y avoir construit une partie de sa vie privée et familiale ; que, dès lors, le préfet des Bouches-du-Rhône en refusant d'admettre Mme A au séjour, n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 mars 2008 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ;

Considérant que le présent arrêt, qui rejette la requête de Mme A, n'implique aucune mesure d'exécution ; que les conclusions à fin d'injonction présentées par la requérante ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font en tout état de cause obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme A demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Souadou A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

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N° 08MA03640


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08MA03640
Date de la décision : 15/11/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. RENOUF
Rapporteur ?: Mme Micheline LOPA-DUFRENOT
Rapporteur public ?: M. MARCOVICI
Avocat(s) : JACQUEMIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2010-11-15;08ma03640 ?
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