Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 08MA02123, le 21 avril 2008, présentée pour M. Saïd A, demeurant ..., par Me Billet, avocat;
M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0800243/0800719 du 28 mars 2008 par lequel le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de la décision du préfet du Gard en date du 3 janvier 2008, en tant qu'elle refuse le renouvellement de son titre de séjour et en tant que le préfet a assorti son refus de titre de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;
3°) de lui accorder le titre de séjour sollicité ;
4°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
...................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu l'arrêté du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 juin 2010 :
- le rapport de Mme Buccafurri, rapporteur,
- les conclusions de Mlle Josset, rapporteur public,
Considérant que M. A, de nationalité marocaine, relève appel du jugement du 28 mars 2008 par lequel le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de la décision du préfet du Gard en date du 3 janvier 2008, en tant que cette autorité refuse le renouvellement de son titre de séjour et en tant que le préfet a assorti son refus de titre de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, dans sa requête introductive d'instance, déposée devant le Tribunal administratif de Nîmes, ainsi que dans son mémoire ampliatif, enregistré au greffe du tribunal le 25 mars 2008, M. A a invoqué un moyen tiré de ce que l'arrêté contesté était entaché d'un vice de légalité externe dès lors qu'il avait été signé par la secrétaire générale de la préfecture du Gard et pris également sur sa proposition ; qu'il ressort de l'examen du jugement attaqué que le Tribunal administratif n'a pas répondu à ce moyen, distinct du moyen tiré de l'incompétence de la signataire de la décision contestée, et qui ne présentait pas le caractère d'un moyen inopérant ; que, par suite, en n'y statuant pas, les premiers juges ont entaché leur jugement d'un défaut de motivation; que, dès lors, M. A est fondé à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'irrégularité et doit, pour ce motif, être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu pour la Cour d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demandé présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Nîmes ;
Sur la légalité de l'arrêté préfectoral du 3 janvier 2008 :
Considérant, en premier lieu, que, par un arrêté n° 2007-B-1/8 du 26 novembre 2007, paru le même jour au recueil des actes administratifs de la préfecture, le préfet du Gard, M. Bellion, a consenti à Mme Martine Laquièze, Secrétaire générale de la préfecture du Gard, et signataire de l'arrêté contesté, une délégation de signature aux fins notamment de signer tous arrêtés et décisions relatifs aux refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français opposés aux ressortissants étrangers dans le ressort du département du Gard ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de la signataire de l'arrêté en litige manque en fait et doit, dès lors, être écarté ;
Considérant, en deuxième lieu, que si le requérant soutient que ledit arrêté est illégal en ce qu'il a été pris sur proposition de la secrétaire générale de la préfecture et signé par elle-même, aucune disposition législative ou réglementaire, ni aucun principe général du droit, n'impose qu'une telle décision soit prise sur proposition d'une autre autorité ou après contrôle hiérarchique, celui-ci restant possible après la notification de la décision ou de l'arrêté en cause ; que, par suite, ce moyen doit être écarté ;
Considérant, en troisième lieu, que l'arrêté attaqué précise en son article 3 que M. A sera reconduit à destination du pays dont il a la nationalité ou de tout pays pour lequel il établit être légalement admissible ; que dans ses motifs, il est indiqué, d'une part, que l'intéressé est né au Maroc et, d'autre part, que M. A est un ressortissant marocain ; que la lecture combinée du dispositif et des motifs de cet arrêté permettait ainsi à M. A d'être parfaitement informé sur le pays à destination duquel il serait reconduit ; que, dès lors, le moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté attaqué doit être écarté ;
Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'enquête de communauté de vie diligentée par le préfet, qu'à la date de la décision attaquée, il n'existait plus de vie commune entre M. A et son épouse de nationalité française, laquelle avait quitté le domicile conjugal depuis le 13 octobre 2007 à la suite, selon les déclarations de cette dernière, de violences répétées de son mari ; que la légalité d'une décision administrative s'appréciant à la date à laquelle elle a été prise, la circonstance que, postérieurement à l'intervention de l'arrêté en litige, les époux A auraient repris leur vie commune, est sans influence sur sa légalité ; qu'il résulte, en outre, des pièces du dossier que si l'épouse de M. A était, à la date de la décision attaquée, enceinte de ses oeuvres, les documents versés au dossier par le requérant, et notamment le ticket d'achat de vêtement et de mobilier de puériculture en date du 6 octobre 2007, ne sont pas de nature à établir à eux seuls, en l'absence de vie commune avec son épouse, la réalité de l'investissement affectif et matériel de M. A dans l'entretien de son enfant à naître ; que si M. A a produit en première instance un document selon lequel il aurait avec son épouse, qui avait déclaré son enfant sous son nom de jeune fille, entamé conjointement devant le Tribunal de Grande Instance de Nîmes une action en rétablissement des effets de la présomption de paternité, cette saisine n'a été effectuée que le 19 mars 2008, soit postérieurement à l'intervention de l'arrêté en litige ; que, par ailleurs, s'il ressort des pièces versées au dossier que les parents de M. A résident en Espagne, et si l'intéressé soutient que deux des six enfants de la fratrie résident également en Espagne avec ses parents, il ressort, toutefois, des pièces du dossier qu' à la date de l'arrêté attaqué, les trois autres enfants de la fratrie vivaient au Maroc, et qu'il n'est pas démontré qu'ils auraient vocation à bénéficier d'une procédure de regroupement familial ; que, compte tenu de l'ensemble de ces éléments, l'arrêté attaqué pris à l'encontre de M. A, âgé à cette date de 28 ans, et intervenu à une date où la vie commune avec son épouse de nationalité française, enceinte de ses oeuvres, avait cessé et, alors que l'intéressé n'était pas isolé dans son pays d'origine, n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; que, par suite, l'arrêté attaqué ne méconnaît, ni les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 4°) A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée en France ait été régulière, que la communauté de vie n'ait pas cessé, que le conjoint ait conservé la nationalité française (...) ; qu'aux termes de l'article L. 313-12 du même code : Le renouvellement de la carte de séjour délivrée au titre du 4° de l'article L. 313-11 est subordonné au fait que la communauté de vie n'ait pas cessé. Toutefois, lorsque la communauté de vie a été rompue à l'initiative de l'étranger en raison des violences conjugales qu'il a subies de la part de son conjoint, l'autorité administrative peut accorder le renouvellement du titre ; qu'aux termes du 6°) du même article : A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée ;
Considérant, d'une part, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, qu'à la date de l'arrêté attaqué, la communauté de vie entre les époux A avait cessé ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'il pouvait se voir délivrer un titre de séjour de plein droit sur le fondement des dispositions précitées du 4°) de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Considérant, d'autre part, qu'à la date de l'arrêté attaqué, l'enfant de M. A n'était pas né ; qu'ainsi, l'intéressé ne peut pas davantage se prévaloir des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code précité ;
Considérant, en sixième lieu, que M. A a déposé une demande de renouvellement de titre de séjour sur le fondement des dispositions précitées du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'a pas, en revanche, présenté sa demande sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 de ce code ; que, par suite, et alors que le préfet n'est pas tenu d'examiner d'office les demandes de titre de séjour sur des fondements qui ne sont pas invoqués par les pétitionnaires, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué serait intervenu en violation des dispositions de l'article L. 313-14 de ce même code est inopérant et ne peut, dès lors, qu'être écarté ;
Considérant, en septième lieu, que M. A n'entrait dans aucune des catégories d'étrangers pouvant se voir délivrer un titre de séjour de plein droit sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le préfet du Gard n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour de sa situation préalablement à l'intervention de l'arrêté contesté ; que, dès lors, le moyen tiré de l'irrégularité de procédure entachant l'arrêté en litige ne peut qu'être écarté ;
Considérant, en huitième lieu, qu'aux termes de l'article L. 521-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'expulsion que si cette mesure constitue une nécessité impérieuse pour la sûreté de l'Etat ou la sécurité publique et sous réserve que les dispositions de l'article L. 521-3 n'y fassent pas obstacle : 1° L'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins un an ; /2° L'étranger marié depuis au moins trois ans avec un conjoint de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage et que le conjoint ait conservé la nationalité française. ;
Considérant que M. A fait valoir, au soutien de ses conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté en litige en tant qu'il emporte obligation de quitter le territoire français, que cet acte a été pris en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 521-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, toutefois, l'arrêté en litige n'ayant pas pour objet d'ordonner l'expulsion de l'intéressé, le moyen ainsi invoqué est inopérant et ne peut, dès lors, qu'être écarté ;
Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du même code : Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (...) 7° L'étranger marié depuis au moins trois ans avec un conjoint de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage et que le conjoint ait conservé la nationalité française ;
Considérant que, comme il a été dit ci-dessus, à la date de l'arrêté attaqué, la communauté de vie entre les époux A avait cessé ; que, par suite, M. A n'est pas fondé à soutenir qu'en tant qu'il emporte obligation de quitter le territoire français, l'arrêté en litige aurait été pris en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision du préfet du Gard en date du 3 janvier 2008, en tant qu'elle refuse le renouvellement de son titre de séjour et en tant que le préfet a assorti son refus de titre de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant que le présent arrêt rejetant les conclusions aux fins d'annulation présentées par M. A à l'encontre de l'arrêté préfectoral du 3 janvier 2008, il n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions susvisées doivent être rejetées ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à M. A une somme au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Nîmes du 28 mars 2008 est annulé.
Article 2 : Les conclusions présentées par M. A devant le Tribunal administratif de Nîmes et le surplus des conclusions de la requête d'appel sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Saïd A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.
Copie en sera adressée au préfet du Gard.
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N° 08MA02123 2
jb