Vu la requête sommaire, enregistrée par télécopie le 15 novembre 2007, régularisée le 19 novembre 2007, au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 07MA04422, et le mémoire complémentaire, enregistré par télécopie le 31 janvier 2008, régularisé le 4 février 2008, présentés pour la VILLE DE MARSEILLE, représentée par son maire en exercice, dont le siège est hôtel de ville à Marseille (13002), par Me Haas, avocat ;
La VILLE DE MARSEILLE demande à la Cour :
- d'annuler le jugement n° 9903156 en date du 6 juillet 2007 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la Société du Métro de Marseille à lui verser la somme de 7 046 400 F, de la société Gagneraud à lui verser la somme de 1 761 600 F et de la société Bachy à lui verser la somme de 2 936 000 F et a mis à sa charge les frais d'expertise liquidés et taxés à la somme de 131 829,22 euros ;
- de faire droit à ses demandes initiales ;
- de mettre à la charge de la Société du Métro de Marseille, de la société Gagneraud et de la société Soletanche Bachy une somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
..........................................................................................................
Vu le code des marchés publics ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;
Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 juin 2010 :
- le rapport de Mme Markarian, rapporteur ;
- les conclusions de M. Marcovici, rapporteur public ;
- et les observations de Me Garnier pour la Société du Métro de Marseille et Me Barnaud-Campana pour la société Soletanche Bachy ;
Considérant que l'opération de construction sur la place Jules Verne à Marseille d'un ensemble immobilier comportant un parking souterrain et des bureaux en superstructure ont nécessité au préalable des fouilles archéologiques et la mise en place d'une paroi moulée destinée par un effet de blindage à maintenir les terres pendant la période de fouilles ; que la VILLE DE MARSEILLE a confié, par un marché conclu le 21 décembre 1990, la conception et le suivi de ces travaux à la Société du Métro de Marseille et, par un marché conclu le 14 mai 1992, la réalisation des travaux de construction à la société Gagneraud, laquelle a sous-traité par contrat conclu le 25 juin 1992 lesdits travaux à la société Bachy, aux droits de laquelle vient dans la présente instance la société Solétanche-Bachy ; qu'à raison des préjudices qu'elle estimait avoir subis du fait de désordres causés à des immeubles voisins qui lui appartiennent, et au vu du rapport d'expertise remis le 5 novembre 1998, la VILLE DE MARSEILLE a recherché la responsabilité de la Société du Métro de Marseille, de la société Gagneraud et de la société Bachy ; que par un jugement en date du 6 juillet 2007, le Tribunal administratif de Marseille a refusé de faire droit à sa demande tendant à ce que la Société du Métro de Marseille soit condamnée à lui verser la somme de 7 046 400 F, la société Gagneraud à lui verser la somme de 1 761 600 F et la société Bachy à lui verser la somme de 2 936 000 F et a mis à sa charge les frais d'expertise taxés à la somme de 131 829,22 euros ; que la VILLE DE MARSEILLE relève appel de ce jugement ;
Sur les fins de non recevoir :
Considérant que l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales permet au conseil municipal de donner délégation au maire pour 16° - intenter au nom de la commune des actions en justice (...) dans les cas définis par le conseil municipal ; qu'il résulte de ces dispositions que le maire ne peut intenter une action au nom de la commune que lorsqu'il y a été autorisé par le conseil municipal qui peut légalement donner au maire une délégation générale pour ester en justice au nom de la commune pendant la durée du mandat ; que par délibération du 25 mars 2001, le conseil municipal de Marseille a donné délégation au maire en ce qui concerne les décisions relevant de l'alinéa 16 de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales, étant précisé que la délégation susvisée est une délégation générale concernant tant les décisions d'agir en justice au nom de la commune que les décisions de défendre la commune dans les actions intentées contre elle et portant sur tous les domaines et juridictions dans lesquels la commune peut être amenée en justice ; qu'en outre, la recevabilité d'une requête et notamment la qualité à agir, qui est une des conditions de cette recevabilité, doit s'apprécier au moment où ladite requête est introduite ; que la circonstance que des élections municipales ont eu lieu en 2008 n'a pas eu pour effet de supprimer rétroactivement la qualité à agir du maire de Marseille et de rendre ainsi irrecevable la requête de la VILLE DE MARSEILLE ; que la VILLE DE MARSEILLE justifie dès lors d'une délégation régulière ;
Considérant qu'il résulte des pièces du dossier de première instance que le jugement attaqué du Tribunal administratif de Marseille a été notifié à la VILLE DE MARSEILLE le 17 septembre 2007 ; que, dès lors, la requête d'appel de la VILLE DE MARSEILLE, enregistrée au greffe de la Cour par télécopie le 15 novembre 2007, avant l'expiration du délai de deux mois fixé par les dispositions de l'article R. 811-2 du code de justice administrative, n'est pas tardive ;
Considérant qu'aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : La requête (...) contient l'exposé des faits et moyens (...) L'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours ;
Considérant que la VILLE DE MARSEILLE a présenté devant la Cour, dans le délai de recours, un mémoire d'appel qui, après avoir repris l'historique du litige et rappelé la motivation et le sens du jugement du Tribunal administratif de Marseille du 6 juillet 2007 dont elle demande la réformation, fait état de ses réserves à l'égard de ce jugement, énonce les critiques à son encontre et demande à la Cour de faire droit à l'ensemble de ses demandes présentées en première instance; que la requête qui a été suivie du mémoire complémentaire annoncé, et qui ne se borne pas à reproduire la demande formulée devant le Tribunal administratif de Marseille, répond aux conditions posées par l'article R. 411-1 précité du code de justice administrative, la VILLE DE MARSEILLE pouvant, en outre, en tout état de la procédure, invoquer la responsabilité pour dommages de travaux publics, qui est d'ordre public ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant qu'il ressort de la minute du jugement attaqué que le moyen selon lequel le jugement attaqué n'aurait pas été signé manque en fait ;
Sur la responsabilité pour dommages de travaux publics :
Considérant que la VILLE DE MARSEILLE invoque, devant la Cour, sa qualité de tiers pour se prévaloir de la responsabilité des constructeurs pour dommages de travaux publics ; que la VILLE DE MARSEILLE était toutefois maître d'ouvrage des travaux litigieux ; que les dommages causés aux bâtiments voisins, dont elle est également propriétaire, se rattachent à l'exécution du marché conclu pour la réalisation desdits travaux ; qu'il suit de là que la VILLE DE MARSEILLE ne peut utilement rechercher la responsabilité des constructeurs sur le terrain de la responsabilité pour dommages de travaux publics ;
Sur la responsabilité contractuelle :
Considérant que la réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserve et met fin aux rapports contractuels entre le maître de l'ouvrage et les constructeurs en ce qui concerne la réalisation de l'ouvrage ; qu'elle interdit par conséquent au maître de l'ouvrage d'invoquer, après qu'elle a été prononcée, et sous réserve de la garantie de parfait achèvement, des désordres apparents causés à l'ouvrage ou des désordres causés à des tiers , dont il est alors réputé avoir renoncé à demander la réparation ;
Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que les travaux litigieux ont fait l'objet d'une réception avec réserves le 2 novembre 1993 ; que les réserves ont été levées le 15 décembre 1993 ; qu'ainsi la VILLE DE MARSEILLE ne peut plus rechercher la responsabilité contractuelle de la société Gagneraud ;
Considérant, d'autre part, que la réception définitive des travaux, qui ne met fin aux rapports contractuels entre le maître de l'ouvrage et les constructeurs qu'en ce qui concerne la réalisation de l'ouvrage, ne fait pas obstacle à ce que à ce que la responsabilité contractuelle du maître d'oeuvre soit ultérieurement recherchée à raison des fautes commises dans l'exercice de sa mission de conseil lors de la réception des travaux ; qu'il ne résulte pas toutefois de l'instruction que la Société du Métro de Marseille ait commis des erreurs dans l'exercice de cette mission, le devoir de conseil de l'architecte ne concernant que l'état de l'ouvrage achevé et n'étant pas étendu aux désordres causés à des tiers lors de l'exécution du marché ; que la Société du Métro de Marseille n'a par conséquent commis aucune faute en s'abstenant d'attirer l'attention de la VILLE DE MARSEILLE sur les désordres causés aux bâtiments voisins de l'opération et de lui conseiller d'assortir la réception desdits travaux de réserves relatives à ces désordres ; que la demande dirigée contre la Société du Métro de Marseille doit par suite être rejetée ;
Sur la responsabilité quasi-délictuelle de la société Bachy : :
Considérant que la VILLE DE MARSEILLE n'est pas liée à la société Bachy, intervenue comme sous-traitante, par un contrat ; qu'il lui appartient, le cas échéant, d'émettre à l'encontre de la société Bachy un état exécutoire en vue de recouvrer la créance représentant le coût des travaux à la charge de cette dernière ; que la VILLE DE MARSEILLE n'est, par suite, pas recevable à demander à la Cour de condamner la société Bachy à lui verser la somme de 2 936 000 F à ce titre ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de qui précède que la VILLE DE MARSEILLE
n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la Société du Métro de Marseille, de la Société Gagneraud et de la société Soletanche Bachy, qui ne sont pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par la VILLE DE MARSEILLE, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, en l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la VILLE DE MARSEILLE la somme demandée par la Société du Métro de Marseille, la Société Gagneraud et la société Soletanche Bachy, au même titre ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la VILLE DE MARSEILLE est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la Société du Métro de Marseille, la Société Gagneraud et la société Soletanche Bachy sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la VILLE DE MARSEILLE, à la Société du Métro de Marseille, à la Société Gagneraud, à la société Soletanche Bachy et au ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer.
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N° 07MA04422 2
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