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20/04/2010 | FRANCE | N°08MA01974

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 20 avril 2010, 08MA01974


Vu la requête, enregistrée par télécopie le 11 avril 2008 et régularisée le 15 avril 2008, présentée pour M. Jean-Louis A, élisant domicile ..., par la SCP d'avocats Marijon Dillenschneider ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700227 rendu le 28 février 2008 par le tribunal administratif de Montpellier qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 12 janvier 2007 par laquelle le président de la communauté d'agglomération de Montpellier lui a infligé la sanction disciplinaire de l'exclusion temporaire de fonctions pour un

e durée de

six mois ;

2°) d'annuler ladite décision pour excès de pouvoir ;...

Vu la requête, enregistrée par télécopie le 11 avril 2008 et régularisée le 15 avril 2008, présentée pour M. Jean-Louis A, élisant domicile ..., par la SCP d'avocats Marijon Dillenschneider ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700227 rendu le 28 février 2008 par le tribunal administratif de Montpellier qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 12 janvier 2007 par laquelle le président de la communauté d'agglomération de Montpellier lui a infligé la sanction disciplinaire de l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de

six mois ;

2°) d'annuler ladite décision pour excès de pouvoir ;

3°) de condamner la communauté d'agglomération de Montpellier à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

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Vu le décret n° 89-677 du 18 septembre 1989 ;

Vu le code pénal ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat, en date du 27 janvier 2009, fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 mars 2010 :

- le rapport de Mme Fedi, rapporteur,

- les conclusions de M. Brossier, rapporteur public,

- et les observations de Me Dillenschneider, de la SCP d'avocats Marijon Dillenschneider, pour M. A, de M. A et de Me Gauer, de la SCP d'avocats Vinsonneau-Paliès Noy Gauer et associés, pour la communauté d'agglomération de Montpellier ;

Considérant que M. A, professeur de peinture à l'école des Beaux-Arts de la communauté d'agglomération de Montpellier, interjette appel du jugement rendu le 28 février 2008 par le tribunal administratif de Montpellier qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 12 janvier 2007 par laquelle le président de ladite communauté lui a infligé la sanction disciplinaire de l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de six mois ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant, d'une part, qu'il ne résulte pas de l'instruction que les premiers juges et le commissaire du gouvernement auraient été partiaux ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L.7 du code de justice administrative en vigueur à la date de l'audience : Un membre de la juridiction, chargé des fonctions de commissaire du gouvernement, expose publiquement, et en toute indépendance, son opinion sur les questions que présentent à juger les requêtes et sur les solutions qu'elles appellent. ; que, dès lors, à supposer que, comme le soutient l'appelant, le commissaire du gouvernement ait déclaré, lors de l'audience, qu'une sanction plus sévère aurait pu être prononcée à son encontre, une telle circonstance est sans effet sur la régularité du jugement ;

Sur la légalité :

Considérant, en premier lieu, que la décision litigieuse a été signée par M. Bonnal, vice-président de la communauté d'agglomération de Montpellier, qui a reçu délégation de signature par arrêté du président de cet établissement public du 18 septembre 2006, régulièrement publié le même jour ; que, par suite, le moyen tiré de ce que cet arrêté aurait été pris par une autorité incompétente doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que contrairement à ce que soutient M. A, l'avis émis par le conseil de discipline le 15 décembre 2006 est suffisamment motivé ; que la circonstance que la notion de jeunes majeurs qu'il utilise ne pourrait concerner les jeunes filles envers lesquelles il est reproché à l'appelant d'avoir adopté un comportement inadapté qui sont âgées de plus de vingt et un ans est, en tout état de cause, sans conséquence sur la légalité de cet avis ; qu'en outre, il ressort des termes même de cet avis, que le conseil de discipline a proposé que soit infligée à M. A la sanction disciplinaire de l'exclusion temporaire de fonction de six mois ; que, par suite, même si le conseil de discipline recommande, en outre, spontanément, d'assortir cette sanction d'une mutation de l'intéressé dans l'intérêt du service, l'avis ne méconnaît pas les dispositions de l'article 10 du décret n°89-677 du 18 septembre 1989 aux termes duquel : Le conseil de discipline délibère sur les suites à donner qui lui paraissent devoir être réservées à la procédure disciplinaire engagée. ;

Considérant, en troisième lieu, que l'autorité administrative n'est pas tenue de limiter les griefs qu'elle retient pour prononcer une sanction disciplinaire aux faits reconnus comme établis par le conseil de discipline ; que, par suite, la circonstance que l'avis du 15 décembre 2006 ne fasse référence qu'à des faits survenus entre 2005 et août 2006 concernant des étudiantes, n'empêchait pas le président de la communauté d'agglomération de Montpellier de retenir à l'encontre de l'appelant des faits survenus en septembre 2006 et concernant des jeunes filles ne présentant plus cette qualité, dès lors que l'ensemble desdits faits avaient été soumis à l'avis du conseil de discipline ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'il ressort des termes même de la sanction litigieuse, que la communauté d'agglomération de Montpellier reproche à M. A des sollicitations incessantes et déplacées auprès de trois étudiantes de l'école ainsi que des gestes d'attouchement à l'encontre de l'une d'entre elles ; qu'il ressort des pièces du dossier que les trois étudiantes concernées sont Mlles Cardona, Brabet et Elwert, qui n'avaient pas de relation entre elles, et se sont plaintes auprès du directeur de l'école du comportement de l'appelant ; que la circonstance que deux d'entre elles se soient manifestées auprès de la direction de l'école après qu'une réunion eut été organisée sur le thème du harcèlement n'est pas de nature à porter atteinte au caractère probant de leur témoignage ; qu'en ce qui concerne Mlle Cardona, il est établi, notamment par son témoignage en date du 16 juin 2006, que M. A a harcelé téléphoniquement son étudiante à partir du mois de janvier 2006 en se procurant son numéro dans le cadre de ses fonctions ; que ces coups de téléphone réitérés ne peuvent s'expliquer par le souci de mettre un terme aux absences de Mlle Cardona laquelle avait clairement manifesté sa volonté de ne plus être sollicitée, et compte tenu du contexte, démontrent le désir de l'appelant de chercher à s'attirer les faveurs de cette jeune femme malgré son désaccord ; qu'en ce qui concerne Mlle Brabet, son témoignage en date du 12 octobre 2006, établit qu'à l'occasion de sa visite d'une exposition publique des oeuvres de l'appelant, le 23 septembre 2006, non seulement M.A lui a tenu à plusieurs reprises, et bien qu'elle lui ai fait part de son refus d'avoir une relation personnelle avec lui, des propos vulgaires et proposé une relation de couple d'un an ou deux mais encore a saisi la jeune femme qui se débattait et a eu des gestes déplacés ; que la circonstance que les personnes qui se trouvaient à proximité n'aient rien remarqué d'anormal et qu'un témoin ait vu Mlle Brabet et M. A quitté les lieux en même temps n'est pas de nature à remettre en cause les affirmations de Mlle Brabet dont le témoignage n'est pas, contrairement à ce que soutient l'appelant, entaché d'incohérence ; qu'ultérieurement, lors de rencontres à l'école, il est établi que M. A s'est montré discourtois à son égard ; qu'en ce qui concerne Mlle Elwert, son témoignage daté du 16 octobre 2006, démontre qu'à partir de 2005, M. A lui a tenu des propos ambigus sur sa vie privée, l'a invitée à diverses sorties allant jusqu'à lui rendre visite à l'hôpital et lui a proposé de poser nue pour lui ; que la circonstance que Mlle Brabet lui ait suggéré, par lettre, de lui rendre visite lors de son hospitalisation ne saurait justifier l'attitude adoptée par M. A qui a cherché, alors qu'elle était particulièrement fragile en raison de son état de santé, à gagner sa confiance en se prévalant de sa qualité d'enseignant ; que la circonstance que, par ailleurs, Mlle Elwert ait servi de modèle à un photographe ne peut justifier le comportement de M. A ; que contrairement à ce qu'il soutient, non seulement en appel mais aussi en première instance, M. A a tenté de justifier son comportement, notamment divers coups de téléphone à Mlle Cardona et sa visite à l'hôpital à Mlle Elwert, par un souci de veiller au bon déroulement des études de ces jeunes femmes ; qu'eu égard au contexte, une telle justification ne peut être admise ; qu'il résulte de ce qui précède que la décision litigieuse ne repose pas sur des faits matériellement inexacts ; que la circonstance alléguée en appel, à la supposer établie, que les étudiantes n'aient pas porté plainte, M. A ayant au demeurant, dans une note en délibéré adressée au tribunal administratif de Montpellier affirmé que les plaintes avaient été classées sans suite, est en tout état de cause sans conséquence sur la légalité de la sanction prononcée ;

Considérant, en cinquième lieu, que les faits ci-dessus décrits qui ne concernent pas une relation de travail ne sont pas constitutifs du délit de harcèlement moral prévu à l'article 222-33-2 du code pénal ; qu'ils n'ont pas non plus la qualification de harcèlement sexuel au sens de l'article 222-33 du code pénal ; que la communauté d'agglomération de Montpellier a donc entaché sa décision d'une erreur de fait en les qualifiant ainsi ; que, toutefois, lesdits faits, en raison notamment de leur caractère répété et insistant, portent atteinte à l'honneur et à la dignité de la profession d'enseignant ; que s'il n'avait retenu que ces motifs qui justifiaient légalement la décision contestée, le président de la communauté d'agglomération de Montpellier aurait pris la même décision ; qu'il suit de là que le moyen tiré de ce qu'il n'y aurait pas eu harcèlement moral ou sexuel est inopérant ;

Considérant, enfin, que le président de la communauté d'agglomération de Montpellier n'a pas entaché sa décision d'une disproportion manifeste en infligeant à l'intéressé la sanction de l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de six mois ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ; qu'en revanche, il y a lieu, sur le fondement de ces dernières dispositions, de mettre à la charge de M. A le paiement à la communauté d'agglomération de Montpellier d'une somme de 1 500 euros au titre des frais que celle-ci a exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : M. A versera à la communauté d'agglomération de Montpellier une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Jean-Louis A, à la communauté d'agglomération de Montpellier et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.

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N° 08MA019742


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08MA01974
Date de la décision : 20/04/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: Mme Cécile FEDI
Rapporteur public ?: M. BROSSIER
Avocat(s) : SCP MARIJON DILLENSCHNEIDER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2010-04-20;08ma01974 ?
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