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13/04/2010 | FRANCE | N°08MA02735

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 13 avril 2010, 08MA02735


Vu la requête, enregistrée le 2 juin 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 08MA02735, présentée par la SCP d'avocats Morelli, Maurel, Santelli-Pinna, Recchi, pour Mme Sandra A, demeurant au ... à Coti-Chiavari (20138) ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0701451 du 20 mars 2008 par lequel le Tribunal administratif de Bastia l'a condamnée, d'une part, à remettre les lieux qu'elle occupait sur le domaine public maritime dans leur état naturel, dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, sous

astreinte de 100 euros par jour de retard et d'autre part, l'a condamnée...

Vu la requête, enregistrée le 2 juin 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 08MA02735, présentée par la SCP d'avocats Morelli, Maurel, Santelli-Pinna, Recchi, pour Mme Sandra A, demeurant au ... à Coti-Chiavari (20138) ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0701451 du 20 mars 2008 par lequel le Tribunal administratif de Bastia l'a condamnée, d'une part, à remettre les lieux qu'elle occupait sur le domaine public maritime dans leur état naturel, dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et d'autre part, l'a condamnée à payer à l'Etat une amende de 1 000,00 euros ;

2°) de la relaxer des poursuites de contravention de grande voirie engagées à son encontre ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..............................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu le code général de la propriété des personnes publiques ;

Vu la loi n°63-1178 du 28 novembre 1963, relative au domaine public maritime ;

Vu l'arrêté du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 mars 2010 :

- le rapport de Mme Chenal-Peter, rapporteur ;

- les conclusions de Mlle Josset, rapporteur public ;

Considérant que, par arrêté préfectoral en date du 13 avril 2007, le préfet de la Corse-du-Sud a autorisé Mme A à occuper temporairement une parcelle d'environ 384 m² du domaine public maritime sur la plage de Mare e Sole, sur le territoire de la commune de Coti Chiavari, afin d'y exploiter un établissement de restauration ; que cette autorisation a été accordée pour la période allant du 1er mai au 31 octobre 2007 ; qu'après avoir constaté que Mme A n'avait pas démonté ses installations après le 31 octobre 2007, le directeur régional et départemental de l'équipement par une lettre du 12 novembre 2007 a mis en demeure la requérante de procéder à la démolition complète de ses installations et à la remise des lieux dans leur état initial dans un délai de dix jours ; qu'un procès-verbal de contravention de grande voirie, établi le 11 décembre 2007, lui a enfin été notifié le 19 décembre 2007 ; que, par un jugement du 20 mars 2008, le Tribunal administratif de Bastia a condamné Mme A d'une part, à remettre les lieux dans leur état naturel, dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et d'autre part à payer à l'Etat une amende de 1 000 euros ; que Mme A relève appel de ce jugement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens invoqués à ce titre :

Considérant qu'il ressort de l'examen du jugement attaqué que le Tribunal administratif s'est borné à indiquer que Mme A a installé son établissement sur le domaine public maritime et que la circonstance que l'arrêté de délimitation du domaine public serait illégal est sans influence sur l'existence de l'infraction que Mme A a commise pour avoir occupé illégalement le domaine public, dont le juge administratif peut souverainement déterminer les limites ; qu'une telle motivation ne saurait être regardée comme étant suffisante dès lors qu'elle ne répond notamment pas aux arguments de Mme A tirés de ce que la parcelle litigieuse n'était pas sur les lais et relais de la mer et n'était pas touchée par la plus haute vague ; que par suite, l'intéressée est fondée à demander pour ce motif l'annulation du jugement attaqué ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la requête présentée par le préfet de la Corse-du-Sud devant le Tribunal administratif de Bastia tendant à la condamnation de Mme A à remettre les lieux dans leur état naturel, dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et à payer à l'Etat une amende de1 000 euros ;

Sur la régularité des poursuites :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 774-2 du code de justice administrative : Dans les dix jours qui suivent la rédaction d'un procès-verbal de contravention, le préfet fait faire au contrevenant notification de la copie du procès-verbal. La notification est faite dans la forme administrative, mais elle peut également être effectuée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. La notification indique à la personne poursuivie qu'elle est tenue, si elle veut fournir des défenses écrites, de les déposer dans le délai de quinzaine à partir de la notification qui lui est faite ; il est dressé acte de la notification ; cet acte doit être adressé au tribunal administratif et y être enregistré comme les requêtes introductives d'instance ;

Considérant, d'une part, que le respect du délai de dix jours n'est pas prescrit par ce texte à peine de nullité dès lors qu'il n'est pas porté atteinte aux droits de la défense ; qu'en l'espèce, l'infraction a été constatée par un agent assermenté le 26 novembre 2007, lequel a ensuite rédigé le procès-verbal de contravention de grande voirie le 11 décembre 2007, qui a été notifié à l'intéressée le 19 décembre 2007 ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que Mme A aurait été privée de la possibilité de discuter contradictoirement les faits ; qu'en outre, la requérante n'établit pas que l'administration aurait post daté le procès verbal de contravention de grande voirie ; que, dès lors, le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure de contravention de grande voirie en raison du non respect du délai de dix jours prévu à l'article L. 774-2 du code de justice administrative doit être écarté ; que d'autre part, ces dispositions, ni aucune autre disposition législative ou réglementaire n'imposent plus la formalité de la citation à comparaître, ni que ledit procès-verbal, qui fait foi jusqu'à preuve contraire, soit certifié sincère et véritable ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 2132-21 du code général de la propriété des personnes publiques : Sous réserve de dispositions législatives spécifiques, les agents de l'Etat assermentés à cet effet devant le tribunal de grande instance et les officiers de police judiciaire sont compétents pour constater les contraventions de grande voirie. ; qu'il résulte de l'instruction que le procès-verbal a été rédigé par un agent ayant le grade de contrôleur des travaux publics, commissionné et assermenté devant le Tribunal de grande instance d'Ajaccio, et expressément habilité à constater les infractions portant atteinte au domaine public maritime, ainsi que le mentionne la carte professionnelle de cet agent, produite devant les premiers juges, et dont l'authenticité n'est pas sérieusement contestée ; que les seules circonstances que la copie de cette carte n'ait pas été certifiée conforme par le tribunal de grande instance et que la date de la prestation de serment soit postérieure à la date du commissionnement, ne sont pas de nature à entacher d'irrégularité l'assermentation dont bénéficiait cet agent ; que, dès lors, et sans qu'il soit besoin d'ordonner au préfet de communiquer le procès-verbal d'assermentation du 25 juin 2002 devant le Tribunal de grande instance d'Ajaccio, Mme A n'est pas fondée à soutenir que le procès verbal a été dressé par un agent qui ne justifie pas d'une assermentation régulière ;

Sur la contravention de grande voirie :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 2111-4 du code général de la propriété des personnes publiques : Le domaine public maritime naturel de L'Etat comprend : 1° Le sol et le sous-sol de la mer entre la limite extérieure de la mer territoriale et, côté terre, le rivage de la mer. Le rivage de la mer est constitué par tout ce qu'elle couvre et découvre jusqu'où les plus hautes mers peuvent s'étendre en l'absence de perturbations météorologiques exceptionnelles ; 2° Le sol et le sous-sol des étangs salés en communication directe, naturelle et permanente avec la mer ; 3° Les lais et relais de la mer : a) Qui faisaient partie du domaine privé de l'Etat à la date du 1er décembre 1963, sous réserve des droits des tiers ; b) Constitués à compter du 1er décembre 1963. ; qu'aux termes de l'article L. 2132-3 du même code : Nul ne peut bâtir sur le domaine public maritime ou y réaliser quelque aménagement ou quelque ouvrage que ce soit sous peine de leur démolition, de confiscation des matériaux et d'amende. Nul ne peut en outre, sur ce domaine, procéder à des dépôts ou à des extractions, ni se livrer à des dégradations. ;

Considérant qu'il ressort clairement des plans produits par le préfet de la Corse-du-Sud que la parcelle occupée par l'établissement exploitée par la requérante est située sur un lais de la mer ; que par suite, et en tout état de cause, il ne résulte pas de l'instruction qu'une délimitation de la parcelle par un géomètre ait été nécessaire avant d'établir le procès verbal adressé à la requérante ; qu' en vertu des dispositions de l'article L. 2111-4 du code général de la propriété des personnes publiques précitées, les lais et relais font automatiquement partie du domaine public maritime, quelle que soit la date à laquelle ils ont été formés et sans qu'il soit besoin de procéder à leur délimitation préalable ; que, par suite, la circonstance qu'un arrêté préfectoral en date du 3 novembre 1992, a procédé à la délimitation du domaine public maritime sur la plage de Mare e Sole et Verghia, côté terre, sans que cet arrêté n'ait été suivi d'un arrêté d'incorporation au domaine public maritime des lais et relais de la mer situés sur ladite plage n'a pas d'incidence sur l'appartenance de la parcelle occupée par Mme A au domaine public maritime ; que la requérante n'est donc pas fondée, en tout état de cause, à se prévaloir de l'irrégularité de la procédure de délimitation du domaine public et de l'irrégularité d'un précédent arrêté d'incorporation des lais et relais de mer de la plage de Mare e Sole et Verghia ; qu'en outre, la circonstance que le terrain d'assiette de son restaurant n'est pas touché par les plus hauts flots de l'année est également sans influence sur l'appartenance de ce terrain au domaine public maritime, dès lors qu'il est situé sur un lais de la mer ; qu'enfin, l'intéressée n'établit pas que son restaurant serait situé sur une parcelle appartenant à la SCI du domaine des pinèdes ; que dès lors, Mme A ne bénéficiant plus d'autorisation d'occupation temporaire et n'ayant pas procédé au démontage des structures en place, elle occupe illégalement le domaine public maritime, ce qui est de nature à fonder légalement les poursuites diligentées à son encontre ;

Considérant qu'il y a lieu de condamner Mme A à remettre dans leur état naturel les dépendances du domaine public maritime qu'elle occupe si ce n'est déjà fait et ce, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt sous peine d'une astreinte de 100 euros par jour de retard et de la condamner à payer à l'Etat une amende de 1 000 euros ; que l'administration pourra procéder d'office à la démolition des installations litigieuses aux frais de la contrevenante en cas d'inexécution ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ;

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par Mme A doivent dès lors être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 0701451 du 20 mars 2008 du Tribunal administratif de Bastia est annulé.

Article 2 : Mme A est condamnée à payer une amende de 1 000 euros.

Article 3 : Mme A devra, sous le contrôle de l'Etat, remettre, si elle ne l'a déjà fait, les lieux en l'état, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, sous peine, passé ce délai, d' une astreinte de 100,00 euros par jour de retard. L'administration pourra procéder d'office à la démolition des installations litigieuses aux frais de la contrevenante en cas d'inexécution.

Article 4: Les conclusions de Mme A tendant à la condamnation de l'Etat au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Sandra A et au ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Corse-du-Sud.

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N° 08MA02735 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08MA02735
Date de la décision : 13/04/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. FERULLA
Rapporteur ?: Mme Anne-Laure CHENAL-PETER
Rapporteur public ?: Melle JOSSET
Avocat(s) : SCP MORELLI MAUREL SANTELLI-PINNA RECCHI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2010-04-13;08ma02735 ?
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