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25/02/2010 | FRANCE | N°07MA01263

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 25 février 2010, 07MA01263


Vu la requête, enregistrée le 12 avril 2007, présentée pour Mme Marcelle A, demeurant ..., par Me Luherne ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0520884 du 20 février 2007 par lequel le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2000 et des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses ;

3°) de mettre à la charge de l'E

tat la somme de 8 000 euros au titre des frais exposés en application des dispositions de l'arti...

Vu la requête, enregistrée le 12 avril 2007, présentée pour Mme Marcelle A, demeurant ..., par Me Luherne ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0520884 du 20 février 2007 par lequel le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2000 et des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 8 000 euros au titre des frais exposés en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.........................................................................................................

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 janvier 2010 :

- le rapport de M. Iggert, conseiller,

- les conclusions de M. Dubois, rapporteur public ;

- et les observations de Me Luherne, pour Mme A ;

Considérant qu'à la suite de la cessation de l'activité de l'entreprise individuelle de pharmacie de Mme A, le 30 juin 2000, l'administration a remis en cause l'inscription, dans le bilan de clôture, d'une provision pour risque constituée à hauteur de deux millions de francs ; qu'elle interjette régulièrement appel du jugement en date du 20 février 2007 par lequel le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2000 et des pénalités y afférentes ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que, pour rejeter la requête de Mme A, le tribunal a considéré que la requérante ne justifiait pas du bien-fondé de la provision dont elle demandait la déduction ; qu'il ressort des pièces du dossier soumis au tribunal que l'administration n'avait jamais contesté l'existence du risque allégué et avait au contraire indiqué, notamment dans un courrier du 19 mars 2004 : Ce redressement vous a été notifié sans préjuger de la question de fait, à savoir le bien-fondé du risque vis-à-vis d'Interfimo, qui pourrait toujours faire l'objet d'un examen ultérieur ; qu'ainsi, en soulevant d'office le moyen susmentionné, le tribunal a méconnu le principe du contradictoire ; que, par suite, Mme A est fondée à demander l'annulation du jugement, sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens présentés par l'intéressée tendant à son annulation ; qu'il y a lieu pour la Cour d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme A et, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par elle tant devant le tribunal administratif qu'en appel ;

Sur la régularité de la procédure :

En ce qui concerne l'envoi d'un avis de vérification :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 47 du livre des procédure fiscales : Un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'une personne physique au regard de l'impôt sur le revenu ou une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification ;

Considérant que les redressements notifiés à Mme A du fait de l'inscription d'une provision dans son bilan de clôture ne sont pas consécutifs à une vérification de la comptabilité de son activité, mais résultent de l'examen de ses déclarations relatives à son entreprise individuelle à partir des renseignements et des documents figurant à son dossier ; que, par suite, Mme A n'est pas fondée à soutenir que les dispositions précitées de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales auraient été méconnues ;

En ce qui concerne la saisine de la commission départementale des impôts :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 59 A du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors applicable : La commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires intervient : 1° Lorsque le désaccord porte soit sur le montant du bénéfice industriel et commercial, du bénéfice non commercial, du bénéfice agricole ou du chiffre d'affaires, déterminé selon un mode réel d'imposition, soit sur la valeur vénale des immeubles, des fonds de commerce, des parts d'intérêts, des actions ou des parts de sociétés immobilières servant de base à la taxe sur la valeur ajoutée, en application de l'article 257 (6° et 7°-1) du code général des impôts ; 2° Lorsqu'il s'agit de différends portant sur l'application des articles 39 1 (1°) et 111 (d) du code général des impôts relatifs aux rémunérations non déductibles pour la détermination du bénéfice des entreprises industrielles ou commerciales, ou du 5 de l'article 39 du même code relatif aux dépenses que ces mêmes entreprises doivent mentionner sur le relevé prévu à l'article 54 quater du code précité ;

Considérant que le différend opposant Mme A et l'administration fiscale portait, non sur l'existence du risque de perte justifiant la constitution de la provision de deux millions de francs mais sur la question de savoir si une provision peut être constituée au bilan de clôture d'une entreprise individuelle qui apporte son fonds à une société commerciale alors qu'elle ne bénéficie pas des dispositions de l'article 151 octies du code général des impôts ; que le différend, qui portait sur une question de droit, ne relevait pas de la compétence de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffres d'affaires, et l'administration a pu, à bon droit, rayer la mention relative à la possibilité de saisir ladite commission sur la notification de redressement du 18 février 2004 ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : (...) 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice (...) ; qu'aux termes de l'article 201 du même code, dans sa rédaction applicable en l'espèce : 1. Dans le cas de cession ou de cessation, en totalité ou en partie, d'une entreprise industrielle, commerciale, artisanale ou minière, ou d'une exploitation agricole dont les résultats sont imposés d'après le régime du bénéfice réel, l'impôt sur le revenu dû en raison des bénéfices réalisés dans cette entreprise ou exploitation et qui n'ont pas encore été imposés est immédiatement établi ; qu'aux termes de l'article 151 octies du même code, dans sa rédaction alors applicable : I. Les plus-values soumises au régime des articles 39 duodecies à 39 quindecies et réalisées par une personne physique à l'occasion de l'apport à une société soumise à un régime réel d'imposition de l'ensemble des éléments de l'actif immobilisé affectés à l'exercice d'une activité professionnelle ou de l'apport d'une branche complète d'activité peuvent bénéficier des dispositions suivantes : (...) Sous les conditions fixées au a du 3 de l'article 210 A, les provisions afférentes aux éléments transférés ne sont rapportées au résultat imposable de l'entreprise apporteuse que si elles deviennent sans objet. (...) II. Le régime défini au I s'applique : a. Sur simple option exercée dans l'acte constatant la constitution de la société (...) ; qu'il résulte de ces dispositions qu'en cas de cession ou de cessation d'activité, les provisions antérieurement constituées en raison de circonstances propres à l'entreprise doivent, en principe, être rapportées aux bénéfices imposables du dernier exercice d'exploitation lorsque, du fait même de la cession ou de la cessation, elles deviennent sans objet ;

Considérant que, pour l'exploitation de l'activité de l'entreprise individuelle de pharmacie de Mme A, cette dernière a notamment contracté un prêt auprès du Crédit lyonnais cautionné par la société Interfimo ; que la caution a été actionnée en l'absence de paiement par Mme A des mensualités de remboursement du crédit ; qu'à la suite du placement, le 11 octobre 1996, de l'entreprise individuelle de Mme A en redressement judiciaire, la société Interfimo a concédé une modification des modalités de remboursement de la somme qu'elle avait été amenée à régler au profit du Crédit lyonnais en qualité de caution selon les termes posés par le jugement du Tribunal de grande instance de Carpentras du 23 juillet 1998 en application duquel Mme A lui réglait la somme de trois millions de francs si elle poursuivait l'exploitation de la pharmacie pendant quinze ans au moins ou lui versait la seule somme d'un million de francs si elle cédait ou cessait son activité dans les deux ans à compter du jugement susmentionné ; que Mme A a, dans les deux ans suivant le jugement précité, constitué une EURL dont elle était seule associée au profit de laquelle elle a apporté le fonds de commerce de son entreprise individuelle et a constitué, au bilan de fin d'activité de cette dernière entreprise, une provision d'un million de francs du fait de la charge future qui pesait sur elle de verser à la société Interfimo ladite somme en application du jugement du 23 juillet 1998, ce que l'administration n'a pas remis en cause ; que, pour faire face au risque de devoir verser la somme de 3 millions de francs au terme de 15 ans d'exploitation à la société Interfimo dans l'hypothèse où cette dernière société estimerait qu'elle continuait l'exploitation de la pharmacie malgré le changement de structure sociale, elle a également constitué une provision complémentaire de deux millions de francs ; que l'administration a estimé que cette dernière provision aurait été constituée à tort dès lors que le risque n'aurait pas été transmis avec le fonds de commerce à l'EURL, que cette dernière société n'aurait pas inscrit ladite provision et qu'aucune option pour l'application des dispositions de l'article 151 octies du code général des impôts n'aurait été constatée ; que Mme A soutient en revanche que le risque lui étant personnel dès lors qu'elle est seule obligée envers la société Interfimo, la provision ne pourrait être transmise à l'EURL et que l'obligation ne s'éteignant pas avec la cessation d'activité de son entreprise individuelle, la provision ne perdrait pas son objet et pourrait être régulièrement inscrite en application du 5° de l'article 39 du code général des impôts au bilan constatant la cessation de l'activité ;

Considérant, en l'espèce, que l'existence de l'obligation envers la société Interfimo s'éteint avec la cession ou cessation de l'exploitation par Mme A de la pharmacie et qu'ainsi, en cas de cession ou cessation de l'activité, la provision devient sans objet et doit être rapportée au bénéfice imposable du dernier exercice ; qu'au contraire, cette obligation demeure si l'exploitation par Mme A de la pharmacie se poursuit après l'apport à l'EURL dont elle est associée, l'obligation devant alors être regardée comme couvrant un risque lié à l'exploitation du fonds de commerce lui-même et transmis avec celui-ci à la société bénéficiaire de l'apport ; qu'il est toutefois constant que Mme A n'a pas opté pour le bénéfice de l'article 151 octies du code général des impôts lui permettant dans ce cas d'inscrire la provision en cause dans les écritures du bilan de cessation d'activité ; qu'ainsi, et sans qu'il y ait lieu de porter une appréciation sur l'existence ou non de la poursuite de l'activité d'exploitante de la pharmacie par Mme A à travers l'EURL, la requérante ne pouvait, ni dans le premier, ni dans le second cas, constituer une provision pour le risque lié au versement éventuel d'une somme complémentaire de deux millions de francs à la société Interfimo au terme de quinze années ;

Considérant, enfin, que l'instruction référencée 4 A 633 en date du 9 mars 2001 est postérieure à l'année d'imposition et que la requérante ne peut ainsi s'en prévaloir ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à demander la décharge des impositions litigieuses ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme que Mme A demande en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Nîmes du 20 février 2007 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme A devant le Tribunal administratif de Nîmes et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la Mme Marcelle A et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.

Copie en sera adressée à Me Luherne et au directeur de contrôle fiscal Sud-Est.

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N° 07MA01263


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07MA01263
Date de la décision : 25/02/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DARRIEUTORT
Rapporteur ?: M. Julien IGGERT
Rapporteur public ?: M. DUBOIS
Avocat(s) : LUHERNE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2010-02-25;07ma01263 ?
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