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04/02/2010 | FRANCE | N°08MA01751

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 04 février 2010, 08MA01751


Vu la requête, enregistrée le 31 mars 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 08MA01751, présentée par Me Balat, avocat, pour la SOCIETE D'EXPLOITATION NOUVELLE DU SOLEIL D'OR , dont le siège se situe au 1 bd Jean Hibert à Cannes (06400) ;

La SOCIETE D'EXPLOITATION NOUVELLE DU SOLEIL D'OR demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0500543 du 24 janvier 2008 par lequel le Tribunal administratif de Nice a annulé la décision du ministre de l'emploi et de la solidarité en date du 26 novembre 2004 autorisant le licenciement de Mme N

adine A ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme A devant le Tribu...

Vu la requête, enregistrée le 31 mars 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 08MA01751, présentée par Me Balat, avocat, pour la SOCIETE D'EXPLOITATION NOUVELLE DU SOLEIL D'OR , dont le siège se situe au 1 bd Jean Hibert à Cannes (06400) ;

La SOCIETE D'EXPLOITATION NOUVELLE DU SOLEIL D'OR demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0500543 du 24 janvier 2008 par lequel le Tribunal administratif de Nice a annulé la décision du ministre de l'emploi et de la solidarité en date du 26 novembre 2004 autorisant le licenciement de Mme Nadine A ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme A devant le Tribunal administratif de Nice ;

3°) de mettre à la charge de Mme A une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu l'arrêté du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 janvier 2010 :

- le rapport de Mme Chenal-Peter, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Dieu, rapporteur public ;

- les observations de Me Borge, substituant Me Damiano, avocat, pour Mme A ;

Considérant que, par courrier du 2 juillet 2004, la SOCIETE D'EXPLOITATION NOUVELLE DU SOLEIL D'OR a demandé à l'inspecteur du travail de la 4ème section des Alpes-Maritimes l'autorisation de procéder au licenciement pour faute de Mme Nadine A, déléguée syndicale et représentante syndicale au comité d'entreprise, qui exerçait les fonctions de maître d'hôtel dans le restaurant de l'hôtel Sofitel Méditerrannée dénommé Le Panisse ; que, par une décision du 15 juillet 2004, l'inspecteur du travail a refusé l'autorisation de licenciement sollicitée ; qu'à la suite du recours hiérarchique formé par l'employeur, le ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité a annulé la décision de l'inspecteur et accordé à la SOCIETE D'EXPLOITATION NOUVELLE DU SOLEIL D'OR l'autorisation de licencier Mme A, par une décision du 26 novembre 2004 ; que par jugement en date du 24 janvier 2008, le Tribunal administratif de Nice a annulé la décision du ministre précitée, sur recours de Mme A ; que la SOCIETE D'EXPLOITATION NOUVELLE DU SOLEIL D'OR, qui exploite l'hôtel Sofitel Méditerrannée, relève appel de ce jugement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens invoqués à ce titre :

Considérant qu'il ressort de l'examen du jugement attaqué que le Tribunal administratif, pour annuler la décision ministérielle, s'est borné à indiquer qu'il apparaît, dès lors, que les faits invoqués à l'encontre de Mme FREVILLE , s'ils sont constitutifs d'une faute, ne peuvent , dans les circonstances de l'espèce, être considérés comme étant d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement sans citer précisément lesdits faits et sans les replacer dans leur contexte, eu égard aux fonctions occupées par l'intéressée dans un établissement haut de gamme ; qu'une telle motivation ne saurait être regardée comme étant suffisante et ne permet pas à la SOCIETE D'EXPLOITATION NOUVELLE DU SOLEIL D'OR de contester utilement ledit jugement ; que par suite, la société requérante est fondée à demander pour ce motif l'annulation du jugement attaqué ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme A devant le Tribunal administratif de Nice tendant à l'annulation de la décision du ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité du 26 novembre 2004 ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la décision du ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité du 26 novembre 2004 a été notifiée à Mme A par courrier daté du 1er décembre 2004 et que la requête a été enregistrée au greffe du Tribunal administratif de Nice le 31 janvier 2005, dans le délai de deux mois fixé à l'article R. 421-1 du code de justice administrative ; que la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de la demande de première instance présentée par Mme Fréville doit dès lors être écartée ;

Sur la légalité de la décision du ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité du 26 novembre 2004:

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la demande :

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 412-18 du code du travail, dans sa rédaction alors en vigueur : Le licenciement d'un délégué syndical ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail ou l'autorité qui en tient lieu... ; qu'aux termes de l'article L. 436-1 du même code, tout licenciement envisagé par l'employeur d'un membre titulaire ou suppléant du comité d'entreprise ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement ;

Considérant qu'en vertu de ces dispositions, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail saisi, et, le cas échéant, au ministre compétent, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ;

Considérant que le directeur général de l'Hôtel Sofitel Méditerrannée a demandé l'autorisation de licencier Mme A au motif qu'elle avait formulé des insinuations diffamatoires à son encontre, qu'elle s'était rendue coupable de harcèlement moral à l'encontre d'un apprenti et d'un extra et que son comportement envers la clientèle n'était pas satisfaisant ; que le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité a considéré , d'une part, que les deux premiers griefs n'étaient pas établis mais qu'en revanche, il était établi que Mme A avait eu une attitude désobligeante vis à vis de deux clients du restaurant et que ce comportement constituait une faute d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement ;

Considérant que l'employeur de Mme A a produit les courriers de deux clients du restaurant Le Panisse , mécontents de l'accueil que leur aurait réservé Mme Fréville et lui reprochant notamment son manque d'amabilité ; que la valeur probante d'un de ces témoignages, qui ne cite pas de date précise, et qui est mise en cause par Mme A, n'est pas établie dès lors que l'employeur n'a pas produit le livre des réservations ou d'autres documents en vue de démontrer que le témoignage litigieux émane bien d'un véritable client ; qu'en appel , la SOCIETE D'EXPLOITATION NOUVELLE DU SOLEIL D'OR produit deux autres témoignages de clients, dont la valeur probante est également contestée, se plaignant de l'accueil qu'on leur a réservé dans ce restaurant, mais aussi de la qualité du repas servi ; qu'eu égard aux fonctions de maître d'hôtel exercées par l'intéressée dans un établissement de grand standing, offrant des prestations à un prix très élevé, le manque d'amabilité de Mme A envers lesdits clients constitue une faute dans le cadre de l'exécution de ses fonctions ; que, toutefois, contrairement à ce que soutient la SOCIETE D'EXPLOITATION NOUVELLE DU SOLEIL D'OR, la simple constatation d'une faute commise par un employé n'oblige pas l'inspecteur du travail à autoriser son licenciement, dès lors, ainsi qu'il a été précisé ci-dessus, que seuls des faits fautifs d'une gravité suffisante peuvent justifier son licenciement ; qu'à l'inverse, Mme A produit de nombreux témoignages de clients attestant de la qualité de son accueil; que l'employeur ne démontre pas que le manque d'amabilité qu'aurait eu Mme A était un comportement habituel de sa part, de nature à porter atteinte à l'image du restaurant et à entraîner une désaffectation de la clientèle ; que compte tenu de l'ensemble de ces éléments, les seuls faits rapportés par quelques clients, s'ils présentaient un caractère fautif eu égard aux responsabilités de l'intéressée en sa qualité de maître d'hôtel, ne constituaient pas une faute suffisamment grave pour justifier un licenciement ; qu'enfin, la société requérante ne peut utilement invoquer les circonstances, au demeurant non établies par les pièces du dossier, que Mme A a porté des insinuations diffamatoires à l'encontre du directeur général de l'Hôtel Sofitel Méditerrannée et a exercé du harcèlement moral à l'encontre d'autres employés de l'hôtel, dès lors que l'autorisation de licenciement n'est pas fondée sur de tels motifs ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A est fondée à demander l'annulation de la décision susmentionnée du ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par la SOCIETE D'EXPLOITATION NOUVELLE DU SOLEIL D'OR doivent dès lors être rejetées ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SOCIETE D'EXPLOITATION NOUVELLE DU SOLEIL D'OR la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par Mme A et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 0500543 du 24 janvier 2008 du Tribunal administratif de Nice est annulé.

Article 2 : La décision du ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité du 26 novembre 2004 autorisant le licenciement de Mme A est annulée.

Article 3 : La SOCIETE D'EXPLOITATION NOUVELLE DU SOLEIL D'OR versera à Mme A une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE D'EXPLOITATION NOUVELLE DU SOLEIL D'OR , au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville et à Mme Nadine A.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08MA01751
Date de la décision : 04/02/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. FERULLA
Rapporteur ?: Mme Anne-Laure CHENAL-PETER
Rapporteur public ?: M. DIEU
Avocat(s) : BALAT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2010-02-04;08ma01751 ?
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