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21/01/2010 | FRANCE | N°08MA02475

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 21 janvier 2010, 08MA02475


Vu la requête, enregistrée le 15 mai 2008 au greffe de la Cour Administrative d'Appel de Marseille, sous le n° 08MA02475, présentée pour M. Yazid A, demeurant ..., par Me Campana, avocat ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0800171 du 17 avril 2008 par lequel le Tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Corse-du-Sud en date du 14 janvier 2008 portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler ledit arrêté

;

3°) d'enjoindre au préfet de la Corse-du-Sud de lui délivrer un titre de séjour ...

Vu la requête, enregistrée le 15 mai 2008 au greffe de la Cour Administrative d'Appel de Marseille, sous le n° 08MA02475, présentée pour M. Yazid A, demeurant ..., par Me Campana, avocat ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0800171 du 17 avril 2008 par lequel le Tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Corse-du-Sud en date du 14 janvier 2008 portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Corse-du-Sud de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 2007-1631 du 20 novembre 2007 relative à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu l'arrêté du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 décembre 2009 :

- le rapport de Mme Jorda-Lecroq, rapporteur,

- les conclusions de M. Dieu, rapporteur public ;

Considérant que M. A, de nationalité marocaine, relève appel du jugement en date du 17 avril 2008 par lequel le Tribunal administratif de Bastia a rejeté son recours contre l'arrêté en date du 14 janvier 2008 du préfet de la Corse-du-Sud refusant de lui délivrer un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens d'irrégularité invoqués par le requérant ;

Considérant que les premiers juges n'ont pas répondu au moyen, opérant, soulevé par M. A et tiré de ce que le refus de séjour contreviendrait aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le jugement du Tribunal administratif de Bastia en date du 17 avril 2008, entaché d'omission à statuer, doit dès lors être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Bastia ;

Sur la légalité de l'arrêté du 14 janvier 2008 :

En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :

Considérant, en premier lieu, que, par un arrêté en date du 9 juillet 2007, régulièrement publié au recueil des actes administratifs du département, le préfet de la Corse-du-Sud a donné délégation à M. Arnaud Cochet, secrétaire général de la préfecture, à l'effet de signer tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports, correspondances et documents, à l'exception des réquisitions de la force armée et des arrêtés de conflit ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que M. Cochet, lequel était le secrétaire général de la préfecture de la Corse-du-Sud à la date de l'arrêté contesté, n'aurait pas été compétent pour signer celui-ci manque en fait ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort de l'examen de la décision portant refus de titre de séjour que le préfet de la Corse-du-Sud a rappelé les considérations de droit, tant au regard des dispositions internes que des stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui en constituent le fondement, et en particulier mentionne expressément, contrairement à ce que soutient M. A, l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au titre duquel il avait formulé sa demande ; que la décision précise également les éléments concernant la vie personnelle de l'intéressé, relatifs, notamment, à la circonstance que sa mère et ses trois soeurs ne résident pas en France et à la durée de son séjour sur le territoire national, pour considérer qu'il ne pouvait pas bénéficier d'un titre de séjour ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté contesté doit être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, que M. A, s'il soutient être entré mineur sous couvert du passeport de son père, n'établit ni la réalité de cette allégation ni la date de son entrée en France ; que, s'il produit une attestation justifiant du suivi de cours d'alphabétisation entre le 22 octobre 2002 et le mois de juin 2003 au centre social de la CAF des Salines, il ne démontre toutefois pas sa présence sur le territoire national avant et après cette période ; qu'il n'est dès lors pas fondé à soutenir que c'est à tort que le préfet a retenu, eu égard à la mesure de reconduite à la frontière dont il a fait l'objet le 5 février 2005, le caractère récent de sa venue en France ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 7º A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;

Considérant que M. A, né en 1983, soutient qu'il est entré sur le territoire national alors qu'il était mineur sous couvert du passeport de son père, qu'il vit depuis plusieurs années en France aux côtés de ses trois frères, qui sont en situation régulière et dont l'un l'héberge, qu'il dispose d'une promesse d'embauche en qualité de mécanicien et conducteur d'engins, soit dans un secteur en tension en Corse, et qu'il est parfaitement intégré ; que cette dernière allégation n'est toutefois aucunement établie ; qu'il ressort par ailleurs des pièces du dossier qu'à la date de la décision contestée, M. A, âgé de 24 ans, célibataire et sans enfant, n'établit ni sa minorité lors de son entrée sur le territoire national, ni, par les pièces qu'il produit, l'ancienneté et le caractère habituel de son séjour en France, ni enfin être isolé au Maroc, où résident sa mère et ses trois soeurs ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la décision contestée n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise ; que, par suite, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'ont pas été méconnues ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier qu'en refusant d'admettre M. A au séjour, le préfet de la Corse-du-Sud, qui a bien examiné sa situation, ait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette mesure sur sa situation personnelle ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'il est constant que M. A, s'il fait valoir qu'il dispose d'une promesse d'embauche, ne justifie ni même n'allègue avoir formulé de demande de carte de séjour temporaire portant la mention salarié antérieurement à l'arrêté en litige ; que, par suite, et en tout état de cause, les moyens tirés de la violation des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives à l'introduction de la main d'oeuvre étrangère et de la circulaire du 20 décembre 2007, laquelle ne présente pas au demeurant un caractère réglementaire, doivent être écartés comme étant inopérants ; qu'est également sans influence sur la légalité de la décision contestée le moyen tiré de l'atteinte à la liberté du travail ;

Considérant, enfin, que les articles L. 312-1 et L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile disposent que : Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...). / La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12 (...) ; qu'il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles précités auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité, et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ;

Considérant que M. A n'étant pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour en application des dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'était pas tenu, en application de l'article L. 312-2 du même code, de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

Considérant qu'aux termes du premier alinéa in fine du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version issue de l'article 41 de la loi n° 2007-1631 du 20 novembre 2007 relative à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile : L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation ; que, dès lors, le moyen tiré de l'absence de motivation de l'obligation en cause est inopérant et doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Bastia doit être rejetée ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à M. A la somme qu'il réclame au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Bastia en date du 17 avril 2008 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Bastia est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Yazid A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Copie en sera transmise au préfet de la Corse-du-Sud.

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N° 08MA02475

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08MA02475
Date de la décision : 21/01/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BUCCAFURRI
Rapporteur ?: Mme Karine JORDA-LECROQ
Rapporteur public ?: M. DIEU
Avocat(s) : CAMPANA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2010-01-21;08ma02475 ?
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