Vu la requête, enregistrée le 29 janvier 2007, présentée pour Mme Gisèle A, demeurant ...), par Me Maurel ;
Mme A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0424751 du 5 décembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à la décharge de l'obligation de payer la somme de 10 435,34 euros résultant du commandement de payer du 18 février 2004 ;
2°) de prononcer la décharge de l'obligation de payer les sommes de 89 447,48 euros et de 10 435,34 euros résultant respectivement des commandements de payer du 17 et du 18 février 2004 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'État du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisées à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n°2009-14 du 7 janvier 2009 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 décembre 2009 :
- le rapport de M. Iggert, conseiller ;
- et les conclusions de M. Dubois, rapporteur public ;
Considérant que deux commandements de payer ont été notifiés à Mme A pour avoir paiement des sommes de 10 435,34 euros et 89 447,48 euros correspondant à l'impôt sur le revenu au titre des années 1991 à 1994 du foyer fiscal qu'elle formait avec M. Deleuze, son époux, jusqu'au prononcé du divorce le 11 mai 1998 ; que Mme A interjette régulièrement appel du jugement en date du 5 décembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à la décharge de l'obligation de payer la somme de 10 435,34 euros résultant du commandement de payer du 18 février 2004 ;
Sur les conclusions de Mme A tendant à la décharge de l'obligation de payer la somme de 89 447,48 euros résultant du commandement de payer du 17 février 2004 :
Considérant que les conclusions de Mme A tendant à la décharge de l'obligation de payer la somme de 89 447,48 euros résultant du commandement de payer du 17 février 2004 sont nouvelles en appel ; qu'elles ne peuvent, par suite, qu'être rejetées comme irrecevables ;
Sur les conclusions tendant à la mainlevée et à l'annulation du commandement de payer du 18 février 2004 :
Considérant, ainsi que l'ont rappelé les premiers juges, qu'il n'appartient pas au juge administratif de statuer sur la demande d'annulation du commandement de payer litigieux ou sur sa mainlevée ; que, dès lors, les conclusions de la requérante à cette fin sont portées devant une juridiction incompétente pour en connaître ;
Sur l'application de la loi fiscale :
Considérant que par un acte du 18 février 2004, le trésorier d'Avignon a, compte tenu de la solidarité entre époux pour le paiement de l'impôt sur le revenu prévu par l'article 1685-2 du code général des impôts, délivré à Mme A un commandement d'avoir à payer la somme de 10 435,34 euros, montant des cotisations d'impôt sur le revenu afférentes aux années 1991 à 1993 établies au nom du foyer fiscal qu'elle composait avec M. Deleuze ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales : Les comptables du Trésor qui n'ont fait aucune poursuite contre un contribuable retardataire pendant quatre années consécutives, à partir du jour de la mise en recouvrement du rôle, perdent leurs recours et sont déchus de tous droits et de toute action contre ce redevable. Le délai de quatre ans mentionné au premier alinéa, par lequel se prescrit l'action en vue du recouvrement, est interrompu par tous actes comportant reconnaissance de la part des contribuables et par tous autres actes interruptifs de la prescription ; qu'aux termes du I. de l'article L. 621-40 du code de commerce Le jugement d'ouverture suspend ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance a son origine antérieurement audit jugement ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction, d'une part, que le trésorier d'Avignon, le 7 mai 1997, a produit à la liquidation des biens de M. Deleuze prononcée par jugement du tribunal de commerce d'Arles en date du 27 mars 1997, les créances comprenant les cotisations et compléments d'impôt sur le revenu auxquelles il avait été assujetti avec son épouse au titre des années 1991 et 1993, d'autre part, qu'à la date où le commandement de payer a été délivré à Mme A, la liquidation des biens de M. Deleuze n'avait pas fait l'objet d'un jugement de clôture et le trésorier n'avait pas adressé au syndic la sommation de régler sa créance ; qu'ainsi, le délai de prescription de la créance du Trésor, interrompu par sa production à la liquidation des biens de M. Deleuze, n'avait pas recommencé à courir à l'encontre de son épouse débitrice des dettes fiscales de son ex-mari, à la date où le commandement litigieux a été délivré à celle-ci ;
Considérant, en second lieu, que si le droit de poursuite individuel du comptable du Trésor était suspendu à l'égard de M. Deleuze à compter du jugement de liquidation de ses biens, en application des dispositions précitées du I. de l'article L. 621-40 du code de commerce, celles-ci ne faisaient pas légalement obstacle à ce que le comptable mette en jeu la responsabilité solidaire de l'ex-épouse dans le paiement des impositions dont s'agit, conformément aux dispositions de l'article 1685-2 du code général des impôts, tant que ces impositions n'étaient pas prescrites ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le jugement de liquidation des biens de M. Deleuze avait suspendu les poursuites à l'égard de son ex-épouse, Mme A, doit être écarté ;
Sur le bénéfice de la doctrine :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, sans sa rédaction issue de l'article 47 de la loi n° 2008-1443 du 30 décembre 2008, dont les contribuables peuvent se prévaloir devant le juge à compter du 1er janvier 2009, date de l'entrée en vigueur de la loi : (...) Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. Sont également opposables à l'administration, dans les mêmes conditions, les instructions ou circulaires publiées relatives au recouvrement de l'impôt et aux pénalités fiscales ;
Considérant que Mme A se prévaut d'une instruction du 23 mars 1998 publiée le 31 mars 1998 au bulletin officiel des impôts référencée 12-C-1-98 sous le numéro 152 aux termes de laquelle : le bénéfice de la suspension ne peut être invoqué que contre les personnes vis-à-vis desquelles la suspension est édictée. Ainsi, le créancier qui bénéficie d'une suspension de prescription parce qu'il est privé du droit d'agir contre son débiteur principal ou l'un de ses codébiteurs, même solidaire, ne peut invoquer la suspension de la prescription à l'égard de la caution ou des autres codébiteurs dès lors qu'il dispose de son droit de poursuite individuelle à leur égard ; qu'il est constant que l'administration, alors même qu'elle était privée du droit d'agir contre M. Deleuze et qu'à son égard, la prescription était suspendue, disposait d'un droit de poursuite individuelle à l'égard de Mme A ; qu'ainsi, le délai a commencé à courir à l'égard de Mme A à compter du 7 mai 1997, date à laquelle la créance du Trésor a été déclarée à la procédure collective de M. Deleuze, et s'est achevé le 7 mai 2001, avant l'envoi du commandement litigieux du 18 février 2004 ; que, par suite, le moyen tiré par Mme A de ce que la créance était prescrite à son égard sur le terrain de la doctrine précitée doit être accueilli et Mme A est fondée à demander la décharge de l'obligation de payer la somme de 10 435,34 euros résultant du commandement de payer du 18 février 2004 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande de décharge de l'obligation de payer résultant du commandement de payer du 18 février 2004 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D É C I D E :
Article 1er : Mme A est déchargée de l'obligation de payer la somme de 10 435,34 euros résultant du commandement de payer du 18 février 2004.
Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Nîmes en date du 5 décembre 2006 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à Mme A la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Gisèle A et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.
Copie en sera adressée à Me Maurel et au directeur de contrôle fiscal Sud-Est.
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N° 07MA00282