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19/11/2009 | FRANCE | N°07MA00125

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 19 novembre 2009, 07MA00125


Vu la requête, enregistrée le 15 janvier 2007, présentée pour M. Michel A, demeurant ..., par Me Fleurentdidier ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°0504691 du 20 novembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge des droits supplémentaires des taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 1994 au 31 décembre 1996, et des majorations y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;
>3°) de mettre à la charge de l'Etat les dépens et les frais irrépétibles au titre de l'a...

Vu la requête, enregistrée le 15 janvier 2007, présentée pour M. Michel A, demeurant ..., par Me Fleurentdidier ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°0504691 du 20 novembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge des droits supplémentaires des taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 1994 au 31 décembre 1996, et des majorations y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat les dépens et les frais irrépétibles au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

...............................................

Vu le jugement attaqué ;

................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 octobre 2009 :

- le rapport de Mme Menasseyre,

- et les conclusions de M. Dubois, rapporteur public,

Considérant que M. A exerce une activité d'artisan taxi et qu'il a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les années 1994, 1995 et 1996 ; qu'à l'issue des opérations de contrôle, le vérificateur, estimant que sa comptabilité était dépourvue de valeur probante, a reconstitué son chiffre d'affaires ; que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée consécutifs à cette reconstitution ont été notifiés à M. A selon la procédure contradictoire, et assortis des pénalités de mauvaise foi, les impositions ayant été mises en recouvrement conformément à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; qu'il demande à la Cour d'annuler le jugement du 20 novembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 1994 au 31 décembre 1996, et des majorations y afférentes ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant tout d'abord que le moyen invoqué par le requérant devant les premiers juges, et tiré de l'insuffisance de motivation de la notification de redressement qui lui a été adressée à l'issue de l'examen de situation fiscale personnelle dont il a, par ailleurs, fait l'objet était inopérant à l'appui de sa contestation des rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige ; que, par suite, en s'abstenant d'écarter par des motifs explicites ce moyen qui était inopérant, le Tribunal administratif de Marseille n'a pas entaché son jugement d'un vice de nature à en entraîner l'annulation ;

Considérant ensuite que si le requérant soutient que c'est à tort que l'administration a engagé une examen de sa situation fiscale personnelle alors que, dit-il, elle connaissait avec certitude le caractère professionnel des revenus non déclarés par lui avant l'engagement du contrôle, la portée de ce moyen est, là encore, limitée au seuls redressements notifiés à l'issue de l'examen de situation fiscale personnelle ; que, dès lors que seuls étaient en litige devant les permiers juges les rappels de taxe sur la valeur ajoutée consécutifs à la vérification de sa comptabilité, les premiers juges n'étaient pas davantage tenus de répondre à ce moyent inopérant ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que le jugement contesté serait entaché d'une insuffisance de motivation ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'il n'est pas contesté que les photocopies de la demande effectuée le 17 septembre 1997 par la brigade de contrôle et de recherches auprès du service des douanes, de la réponse obtenue le 19 septembre et de l'attestation de remise au vérificateur des documents, ainsi que de toutes les pièces obtenues ont été transmises au requérant par le vérificateur, le 4 décembre 1997 ; que M. A, qui se borne à indiquer que l'administration n'apporte pas la preuve de ce que la demande de communication était régulière ne critique pas, ce faisant, de manière pertinente l'exercice par le service de son droit de communication auprès du service des douanes ;

Considérant, en deuxième lieu que, ainsi qu'il a été exposé ci-dessus, la contestation du recours à l'examen de situation fiscale personnelle auquel s'est livré l'administration est inopérante dans le cadre d'un litige qui porte sur des rappels qui ne procèdent pas de ce contrôle ; qu'est également inopérante, comme il a été dit, la critique de la motivation des documents adressés à M. A dans le cadre de l'examen de sa situation fiscale personnelle ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne la valeur probante de la comptabilité :

Considérant que pour écarter la valeur probante de la comptabilité produite par M. A, l'administration s'est fondée sur l'absence de livre détaillé des recettes journalières, l'intéressé s'étant borné à fournir, pour justifier de ses recettes, des relevés globalisant les remises mensuelles de chacun des chauffeurs qu'il employait ; que, pour critiquer la position de l'administration, le requérant allègue l'existence d'une tolérance administrative opposable au service sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, sans justifier de la nature ni du contenu de cette prétendue tolérance ; qu'eu égard à l'absence avérée de justificatif exhaustif des recettes journalières, l'administration était fondée à remettre en cause la sincérité de la comptabilité qui lui était soumise ;

En ce qui concerne la reconstitution de recettes :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : (...) la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. (...) ; que, par application de ces dispositions, M. A supporte la charge de la preuve en l'espèce ;

Considérant que le chiffre d'affaires reconstitué par l'administration correspond d'une part à la reconstitution des recettes générées par les véhicules dont la licence était détenue par M. A, et, d'autre part, à la reconstitution des recettes générées par des véhicules dont la licence était détenue par d'autres artisans, M. A exerçant, selon le service, et au vu de procès-verbaux communiqués par le service des douanes, une activité occulte de gérance non bénévole de ces taxis, encaissant personnellement une partie des recettes tirées de l'exploitation de ces véhicules ;

S'agissant des recettes générées par les licences dont M. A était titulaire :

Considérant que, pour reconstituer les recettes de M. A, l'administration a déterminé un kilométrage en se fondant sur des éléments obtenus dans l'exercice de son droit de communication auprès du service des douanes, des documents contresignés par M. A justifiant du kilométrage parcouru annuellement par chacun des véhicules pour lesquels il possédait une licence ; qu'elle a au stade de la réponse aux observations du contribuable, appliqué un abattement de 15 % à ce kilométrage, porté à 35 % par le directeur des services fiscaux lorsqu'il a statué sur la réclamation préalable dont il était saisi, pour tenir compte des retours à vide et de l'utilisation personnelle des véhicules par les chauffeurs ; qu'elle a déterminé un tarif kilométrique correspondant à une moyenne calculée en se fondant sur une prise en charge suivie d'une course de 7 kilomètres au tarif kilométrique dit C (de jour), 1 kilomètre au tarif kilométrique dit D (de nuit), avec retour à vide, et une attente de 6 minutes, et a appliqué ce tarif au kilométrage diminué de l'abattement ;

Considérant, en premier lieu, que si M. A fait valoir que la course moyenne retenue par l'INSEE se fonde sur l'application d'un tarif dit A, inférieur au tarif dit C retenu par l'administration, car correspondant à un tarif aller retour, l'administration n'était nullement tenue, dans le cadre de la reconstitution à laquelle elle se livrait, par les pratiques retenues par cet organisme pour mesurer des réalités différentes ; que M. A n'apporte pas, ce faisant, la preuve de l'exagération des impositions ; que la circonstance invoquée par M. A, et tirée de ce que la direction régionale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ne dispose d'aucune information sur la moyenne des courses effectuées par les taxis marseillais et ne soit pas en mesure de valider la notion de course moyenne retenue par l'administration ne saurait être de nature à disqualifier la reconstitution à laquelle s'est livrée cette dernière, alors que, pour la détermination du tarif kilométrique retenu, le vérificateur a fait abstraction des suppléments correspondant à la prise en charge en gare SNCF, à la prise en charge d'une quatrième personne, d'un animal ou de bagages ; qu'enfin si M. A soutient que les distances parcourues de jour et de nuit devraient être distinguées, il se borne à cette considération générale, sans même tenter d'indiquer les distances moyennes de jour ou de nuit susceptibles de rencontrer son adhésion ;

Considérant, en deuxième lieu, que si M. A soutient que la reconstitution ne respecterait pas la spécificité des exercices, et ferait abstraction des conditions d'exploitation, il n'établit pas qu'une modification serait apparue, durant la période vérifiée, dans les conditions d'exploitation de son activité ; qu'il ressort au contraire de la méthode de reconstitution adoptée par le vérificateur que le kilométrage retenu varie bien selon l'exercice, et est fondé sur des procès-verbaux cosignés par le contribuable lui-même ; que si ce dernier soutient avoir été malade durant plusieurs mois au cours de la période vérifiée, il ne l'établit pas, pas plus qu'il n'établit dans quelle mesure son incapacité, à la supposer établie, aurait influé sur le kilométrage ainsi retenu par le service ;

Considérant, en troisième lieu, que les critiques développées par le requérant contre l'abattement de 35 % appliqué au kilométrage retenu par l'administration pour tenir compte des retours à vide des véhicules, et de l'utilisation personnelle de ces derniers par les chauffeurs, et des trajets effectués pour se rendre à l'atelier de M. A à Marseille pour l'entretien des véhicules ne sont absolument pas étayées par un début de justification ; que dans ces conditions, M. A n'apporte pas la preuve de ce que cet abattement devrait être porté à 50 %, ni de la nécessité d'un abattement supplémentaire de 15 % ;

Considérant, en quatrième lieu, que M. A n'apporte pas la preuve de ce qu'il ne conduirait le véhicule n° 506 B que de 22 heures à quatre heures du matin, ne contribuant qu'à hauteur de 30 % au kilométrage parcouru par ce véhicule, alors que l'administration a retenu un pourcentage de 50 % ;

Considérant enfin que les considérations générales développées par M. A sur les conditions économiques qui président, dans la région ou ailleurs, à l'exercice de la profession d'artisan taxi ne sont pas de nature à démontrer l'exagération des bases d'imposition retenues par le service en ce qui le concerne ;

S'agissant des recettes générées par l'exploitation de licences dont M. A n'était pas titulaire ;

Considérant, en premier lieu que, M. A se prévaut, à l'appui de sa contestation de la réintégration dans son chiffre d'affaires de recettes générées par cette activité qualifiée de gérance occulte par le service, d'un jugement du 30 avril 2001, devenu définitif, du Tribunal correctionnel de Marseille, saisi par l'administration fiscale d'une plainte visant les infractions relevées, en matière de taxe sur la valeur ajoutée, pour la période du 1er janvier au 31 décembre 1996 ; qu'aux termes de ce jugement, cité par l'administration fiscale, M. A doit être déclaré coupable de fraude fiscale par minoration des déclarations de TVA et d'impôt sur le revenu pour les années concernées ou relative à l'exploitation des licences de taxi dont il était titulaire ainsi que du délit d'omission de passation d'écritures comptables ; qu'en revanche les faits de fraude fiscale relative à une activité de gérance occulte de licences de taxi dont il n'était pas titulaire ne sont pas constitués ; que l'autorité de la chose jugée qui appartient aux décisions des juges répressifs devenues définitives et s'attache à la constatation des faits mentionnés dans le jugement, support nécessaire du dispositif, fait obstacle à ce que les faits de fraude fiscale relative à une activité de gérance occulte de licences de taxi dont M. A n'était pas titulaire puissent être regardés comme constitués, pour la période du 1er janvier au 31 décembre 1996 ; qu'en revanche s'agissant de la période antérieure, M. A ne saurait utilement se prévaloir de ce jugement ;

Considérant, en deuxième lieu, que, se fondant sur les déclarations de chauffeurs de taxis retracées par les procès-verbaux communiqués au vérificateur par le service des douanes, et qui indiquaient qu'ils remettaient périodiquement une somme correspondant à une recette journalière de 420 francs à M. A, l'administration a réintégré dans les recettes taxables de l'intéressé les sommes perçues, en se fondant sur le nombre de chauffeurs ainsi employés, et leur nombre de jours de travail dans l'année ; que, pour contester cette réintégration, M. A indique qu'il s'est borné à exercer l'activité d'un intermédiaire bénévole entre des chauffeurs et des artisans taxis qui, âgés ou malades, avaient des difficultés pour exploiter eux-mêmes leur licence ; que l'administration produit toutefois des documents circonstanciés qui ne mentionnent que le nom de M. A comme bénéficiaire des sommes versées par les conducteurs des véhicules ; qu'en l'absence de tout début de justification de nature à contrebalancer les documents ainsi produits, et à illustrer la dimension altruiste de sa démarche, M. A ne justifie pas de ses affirmations ; qu'il ne justifie pas davantage de la double imposition des sommes ainsi imposées ;

Sur l'application des pénalités :

Considérant que, contrairement à ce qu'affirme M. A, les manquements constatés dans la tenue de sa comptabilité et sa condamnation pour fraude fiscale sont de nature à fonder les pénalités de mauvaise foi, étant observé que l'administration s'est également fondée sur l'importance et la nature des redressements et l'existence d'une activité occulte ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande en tant qu'elle tendait à la réduction, à concurrence de la somme de 47 951,64 francs, des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée auxquels il avait été assujetti au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 1996 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que lesdites conclusions, qui ne sont pas chiffrées, sont, en tout état de cause, irrecevables ;

DÉCIDE :

Article 1er : M. A est déchargé des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée dont il a été déclaré redevable au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 1996 à concurrence de 7 310,18 euros (47 951,64 francs), et des pénalités y afférentes.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Marseille en date du 20 novembre 2006 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Michel A et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.

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N°07MA00125


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07MA00125
Date de la décision : 19/11/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DARRIEUTORT
Rapporteur ?: Mme Anne MENASSEYRE
Rapporteur public ?: M. DUBOIS
Avocat(s) : CABINET FLEURENTDIDIER SALASCA

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2009-11-19;07ma00125 ?
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