La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/10/2009 | FRANCE | N°08MA04195

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 22 octobre 2009, 08MA04195


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille les 12 septembre 2008 et 10 décembre 2008, sous le n° 08MA04195, présentés pour M. Guy X demeurant ..., par Me Descriaux ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0604075, 0703518 du 20 juin 2008 par lequel le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Trélans à lui verser les sommes de 359 449 euros avec intérêts au taux légal à compter du 24 mars 2006, et de 209 071 euros avec int

érêts au taux légal à compter du 24 janvier 2007, les intérêts sur ces de...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille les 12 septembre 2008 et 10 décembre 2008, sous le n° 08MA04195, présentés pour M. Guy X demeurant ..., par Me Descriaux ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0604075, 0703518 du 20 juin 2008 par lequel le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Trélans à lui verser les sommes de 359 449 euros avec intérêts au taux légal à compter du 24 mars 2006, et de 209 071 euros avec intérêts au taux légal à compter du 24 janvier 2007, les intérêts sur ces deux sommes étant capitalisés pour produire eux-mêmes intérêts, en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi du chef de l'illégalité des décisions par lesquelles le conseil municipal de Trélans l'a privé des terres qu'il exploitait sur le territoire de la section de commune de Montfalgoux et lui a illégalement refusé l'attribution de lots appartenant à ladite section de commune du 1er janvier 2003 jusqu'au 31 décembre 2006, subsidiairement à ce qu'il soit ordonné une expertise en vue de déterminer le montant de ses préjudices, et à la condamnation de la commune de Trélans à lui verser au total la somme de 9 267,24 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

2°) de condamner la commune de Trélans à lui verser, pour la période allant du 1er janvier 2003 au 3 mai 2005, la somme de 359 449 euros avec intérêts au taux légal à compter de la demande préalable formée le 24 mars 2006 et capitalisation des intérêts échus à la date d'enregistrement de la demande de capitalisation, et, pour la période du 3 mai 2005 au 31 décembre 2006, la somme de 209 071 euros avec intérêts de droit à compter de la demande préalable formée le 24 janvier 2007 et capitalisation des intérêts échus à la date d'enregistrement de la demande de capitalisation ;

3°) subsidiairement d'ordonner une expertise en vue de déterminer le montant total du préjudice qu'il estime avoir subi ;

4°) de condamner la commune de Trélans à lui verser une somme de 9 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code civil ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu l'article 1er du décret du 27 janvier 2009 qui autorise la Cour administrative d'appel de Marseille à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret du 7 janvier 2009, situant l'intervention du rapporteur public avant les observations des parties ou de leurs mandataires ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 septembre 2009 :

- le rapport de M. Pocheron, premier conseiller ;

- les conclusions de Mme Paix, rapporteur public ;

- les observations de Me Descriaux, avocat de M. X ;

- et les observations de Me Accaries, avocat de la commune de Trélans ;

Après avoir pris connaissance de la note en délibéré enregistrée le 26 septembre 2009 au greffe de la Cour, présentée pour la commune de Trélans par la SELAFA Fidal ;

Considérant que M. X relève appel du jugement en date du 20 juin 2008 par lequel le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Trélans (Lozère) à lui verser la somme de 359 449 euros à parfaire avec intérêts au taux légal, et capitalisation desdits intérêts, en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi du 1er janvier 2003 au 3 mai 2005 du chef de l'illégalité de la décision en date du 16 novembre 2002 par laquelle le conseil municipal de Trélans l'a privé à compter du 1er janvier 2003 des cinquante hectares de terres agricoles qu'il exploitait sur la section de commune de Montfalgoux, ainsi que des délibérations en date des 24 avril 2003, 28 avril 2004, de la décision implicite de rejet de sa demande en date du 6 juillet 2004 et de la délibération confirmative en date du 13 octobre 2004 par lesquelles ce même conseil municipal a refusé de lui attribuer un lot demeuré vacant appartenant à la même section de commune, et la somme de 209 071 euros à parfaire avec intérêts au taux légal à compter du 24 janvier 2007 et capitalisation desdits intérêts, en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi du 3 mai 2005 au 31 décembre 2006 du chef de l'illégalité des délibérations du conseil municipal de Trélans en date des 13 octobre 2004, 3 mai 2005 et 29 mars 2006 lui refusant l'attribution de terres appartenant à la section de commune de Montfalgoux ;

Considérant quaux termes de l'article L.2411-10 du code général des collectivités territoriales dans ses dispositions en vigueur aux dates des actes litigieux des 16 novembre 2002, 24 avril 2003, 28 avril 2004, et 11 septembre 2004 en ce qui concerne la décision implicite de rejet de la demande de M. X en date du 6 juillet 2004 : ...Les terres à vocation agricole ou pastorale propriétés de la section sont attribuées par bail à ferme, par convention pluriannuelle d'exploitation, ou de pâturage, conclue dans les conditions de l'article L.481-1 du code rural, au profit des exploitants agricoles ayant un domicile réel et fixe, ainsi que le siège d'exploitation sur la section et, le cas échéant, au profit des exploitants agricoles ayant un bâtiment d'exploitation hébergeant pendant la période hivernale leurs animaux sur la section ; à défaut, au profit des personnes exploitant des biens sur le territoire de la section et résidant sur le territoire de la commune ; à titre subsidiaire au profit des personnes exploitant seulement des biens sur le territoire de la section. Pour toutes les catégories précitées, les exploitants devront remplir les conditions prévues par les articles L 331-2 à L 331-5 du code rural. ... ; et qu'aux termes de ce même article dans sa rédaction en vigueur aux dates des actes litigieux des 3 mai 2005 et 29 mars 2006 : ... Les terres à vocation agricole ou pastorale propriétés de la section sont attribuées par bail rural ou par convention pluriannuelle de pâturage conclue dans les conditions prévues à l'article L 481-1 du code rural au profit des exploitants agricoles ayant un domicile réel et fixe, ainsi que le siège d'exploitation sur la section. L'autorité municipale peut attribuer, le cas échéant, le reliquat de ces biens au profit d'exploitants agricoles sur la section ayant un bâtiment d'exploitation hébergeant pendant la période hivernale leurs animaux sur la section, ou, à défaut au profit de personnes exploitant des biens sur le territoire de la section et résidant sur le territoire de la commune ; à titre subsidiaire, elle peut attribuer ce reliquat au profit de personnes exploitant seulement des biens sur le territoire de la section ou, à défaut, au profit des exploitants ayant un bâtiment d'exploitation sur le territoire de la commune. ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant en premier lieu que les premiers juges, en analysant les droits éventuels de M. X sur les lots de la section de commune de Montfalgoux, qu'il exploitait avant l'intervention de la décision du 16 novembre 2002 du conseil municipal de Trélans, au regard des dispositions de l'article L.2411-10 du code général des collectivités territoriales dans ses dispositions en vigueur avant l'intervention de la loi n° 99-574 du 9 juillet 1999, se sont bornés à vérifier si le conseil municipal de Trélans n'avait pas, par la dite décision, illégalement porté atteinte à un droit acquis par le requérant sur les cinquante hectares de terres en cause, et ainsi engagé la responsabilité de la commune en faveur de l'intéressé ; que le Tribunal n'a à aucun moment estimé que la décision du 16 novembre 2002 était fondée sur lesdites dispositions ; que, par suite, M. X n'est pas fondé à soutenir que les premiers juges auraient commis une erreur de droit ; qu'il ressort en revanche desdites dispositions que, ainsi que l'a estimé à bon droit le Tribunal, M. X n'est pas fondé à soutenir qu'il aurait été illégalement privé par ladite décision du 16 novembre 2002 du droit d'exploiter ces terres appartenant à la section de communes de Montfalgoux ;

Considérant en deuxième lieu que M. X soutient qu'il avait droit à l'attribution du lot resté vacant de la section de commune de Montfalgoux en qualité d'exploitant agricole sur ladite section ayant un bâtiment d'exploitation hébergeant pendant la période hivernale ses animaux sur cette section ; qu'il ressort du rapport d'expertise judiciaire en date du 7 juillet 2004 que l'intéressé était propriétaire d'un bâtiment d'exploitation sis sur le territoire de la section de Montfalgoux, que cet immeuble était susceptible d'accueillir une partie de ses animaux durant la période hivernale, et que compte tenu du volume et de la consistance du fumier subsistant, l'immeuble en cause avait été utilisé durant l'hiver 2003-2004 pour l'hébergement de bovins ; qu'aux dates auxquelles ont été prises les délibérations des 3 mai 2005 et 29 mars 2006, il résulte des dispositions précitées de l'article L.2411-10 du code général des collectivités territoriales que le conseil municipal de Trélans n'était pas tenu d' attribuer à M.X le reliquat de terres non attribuées aux ayants-droit prioritaires ; que, par suite, les circonstances que ces délibérations sont irrégulières et que M. X était le seul à demander l'attribution de ce lot demeuré vacant sont sans incidences sur un éventuel engagement de la responsabilité de la commune de Trélans à son égard ; qu'aux dates auxquelles ont été prises la décision du 16 novembre 2002 et la délibération du 24 avril 2003 du conseil municipal de Trélans, M. X ne justifiait pas avoir utilisé l'immeuble sus-évoqué pour héberger pendant la période hivernale ses animaux ; que, par suite, le requérant n'établit pas avoir relevé des dispositions de l'article L.2411-10 du code général des collectivités territoriales alors en vigueur pour prétendre à l'attribution de terres appartenant à la section de commune de Montgalgoux ; que la responsabilité de la commune de Trélans n'est en conséquence pas davantage engagée du chef de l'irrégularité de cette décision et de cette délibération ; que, cependant, le 11 septembre 2004, date à laquelle a été acquise la décision implicite de rejet par le conseil municipal de Trélans de la demande d'attribution du lot demeuré vacant de la section de commune de Montfalgoux présentée par M. X par courrier daté du 6 juillet précédent, confirmée par délibération de ce même conseil municipal en date du 13 octobre 2004, d'une part l'intéressé justifiait être exploitant agricole sur la section de Montfalgoux ayant un bâtiment d'exploitation hébergeant pendant la période hivernale ses animaux sur cette section, et, d'autre part, les dispositions sus-rappelées en vigueur de l'article L.2411-10 du code général des collectivités territoriales, si elles instituaient un ordre de priorité entre les différentes catégories d'ayants-droit, ne conféraient pas au conseil municipal la possibilité de réserver les lots restés vacants après attribution aux ayants-droit prioritaires ; que la circonstance, à la supposer même établie, que le bâtiment d'exploitation de M. X n'aurait pas été agréé par les services vétérinaires, alors que cet agrément relève d'une législation distincte de celle relative à l'attribution des biens sectionnaux, est en conséquence sans incidence dans le cas de l'espèce ; que, dés lors, la décision implicite de rejet née le 10 septembre 2004 et la délibération confirmative du 13 octobre 2004 du conseil municipal de Trélans, qui ont illégalement écarté M. X, dont il n'est pas contesté qu'il était le seul à revendiquer l'attribution du lot demeuré vacant de la section de commune de Montfalgoux, de cette attribution, constituent des fautes de nature à engager la responsabilité de la commune de Trélans ; que cette responsabilité est ainsi engagée du 10 septembre 2004 au 3 mai 2005, date à laquelle, ainsi qu'il a été dit plus haut, le conseil municipal de Trélans n'était plus tenu d'attribuer le lot resté vacant à M. X ;

Sur le préjudice :

Considérant en premier lieu qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que la responsabilité de la commune de Trélans ne saurait être engagée au titre des préjudices financier, et tirés de la perte de clôtures et de la perte de droits à paiement unique, allégués par M. X du chef de l'illégalité de son éviction à compter du 1er janvier 2003 des cinquante hectares de terres qu'il exploitait sur la section de commune de Montfalgoux ;

Considérant en second lieu que compte tenu des chiffres retenus par le rapport d'expertise en date du 31 octobre 2006 pour l'évaluation du préjudice de M. X, et des autres pièces produites à l'instruction, il sera fait, pour la période allant du 10 septembre 2004 au 3 mai 2005, une juste appréciation dudit préjudice en l'évaluant, s'agissant de la perte de revenus du requérant à 24 000 euros, de la perte sur fumures et arrières fumures à 1 700 euros, et du déséquilibre d'exploitation à 36 000 euros ; qu'ainsi, il y a lieu de condamner la commune de Trélans à verser la somme totale de 61 700 euros à M. X en réparation des préjudices qu'il a subis du 11 septembre 2004 au 3 mai 2005 du chef du refus illégal du conseil municipal de ladite commune de lui attribuer le lot demeuré vacant de la section de commune de Montfalgoux ;

Sur les intérêts, et les intérêts des intérêts :

Considérant, d'une part, que M. X a droit aux intérêts au taux légal afférents à la somme de 61 700 euros à compter du 27 mars 2006, date à laquelle il a demandé réparation de son préjudice à la commune de Trélans ;

Considérant d'autre part, que M. X a demandé par un mémoire du 4 juin 2007, la capitalisation des intérêts ; qu'à cette date les intérêts étaient dus pour au moins une année entière ; qu'il y a lieu de faire droit à cette demande tant à cette date que qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'expertise :

Considérant qu'une expertise aux fins de déterminer le montant exact du préjudice invoqué par M. X est inutile à la résolution du présent litige ; que, par suite, les conclusions du requérant tendant à la désignation d'un expert à cette fin ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L.761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions précitées de l'article L.761-1 du code de justice administrative, de condamner la commune de Trélans à payer à M. X une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Considérant que les dispositions précitées de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M. X qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à la commune de Trélans la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement en date du 20 juin 2008 du Tribunal administratif de Nîmes est annulé.

Article 2 : La commune de Trélans versera à M. X la somme de 61 700 (soixante et un mille sept cents) euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 27 mars 2006. Les intérêts échus à la date du 4 juin 2007 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 3 : La commune de Trélans versera à M. X, une somme de 3 000 (trois mille) euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.

Article 5 : Les conclusions de la commune de Trélans tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. Guy X et à la commune de Trélans.

''

''

''

''

N° 08MA04195 2

mp


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08MA04195
Date de la décision : 22/10/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PERRIER
Rapporteur ?: M. Michel POCHERON
Rapporteur public ?: Mme PAIX
Avocat(s) : DESCRIAUX

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2009-10-22;08ma04195 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award