Vu la requête, enregistrée le 25 avril 2006, présentée pour Mme , demeurant ..., élisant domicile au cabinet de Maître Hancy, par Maître Hancy, avocat ;
Mme demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0200426 du 2 mars 2006, par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la décharge du complément d'impôt sur le revenu et des pénalités qui lui ont été assignés au titre des années 1993 et 1994 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions en litige et de condamner l'Etat à lui régler une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ainsi que l'arrêté d'expérimentation du Vice-Président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 mai 2009 :
- le rapport de M. Bonnet, rapporteur,
- et les conclusions de M. Emmanuelli, rapporteur public ;
Considérant que Mme relève appel du jugement du 2 mars 2006, par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la décharge du complément d'impôt sur le revenu et des pénalités qui lui ont été assignés au titre des années 1993 et 1994 ;
Sur l'étendue du litige :
Considérant que, par décision du 16 septembre 2002, le ministre a prononcé le dégrèvement des compléments d'impôt sur le revenu assignés à la requérante au titre de l'année 1993 ; que le tribunal administratif a constaté que les conclusions de la demande étaient, dans cette mesure, devenues sans objet ; qu'il suit de là que les conclusions de Mme présentées devant la Cour et relatives à l'année 1993 sont irrecevables ;
Sur la domiciliation fiscale en France de Mme :
Considérant qu'aux termes de l'article 4 A du code général des impôts : Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leur revenu ; qu'aux termes du 4 B du même code 1. Sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A : a) Les personnes qui ont en France... le lieu de leur séjour principal ; b) Celles qui exercent en France une activité professionnelle, salariée ou non... ; c) Celles qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques ; et qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention du 28 mai 1973 conclue entre la France et la Tunisie : 1. Au sens de la présente convention, l'expression résident d'un Etat contractant désigne toute personne qui, en vertu de la législation dudit Etat, est assujettie à l'impôt dans cet Etat, en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction ou de tout autre critère de nature analogue.
Considérant, en premier lieu, que les premiers juges, pour mettre à la charge de Mme la preuve de sa domiciliation fiscale hors de France, ont relevé d'une part que la requérante avait déposé spontanément à Nice, au titre des années 1993 à 1995, ses déclarations d'ensemble de ses revenus en mentionnant comme adresse le ... dans cette ville, adresse qui correspondait également au domicile de ses parents, d'autre part que le passeport tunisien de la requérante portait, s'agissant du lieu de résidence de son titulaire, la mention Nice-France, et enfin qu'elle avait également mentionné dans l'acte d'achat d'un appartement d'une valeur de 1 700 000 F à Saint Laurent du Var, en date du 19 octobre 1994, une unique adresse au même ... à Nice ; que la requérante n'est par suite pas fondée à soutenir qu'ils auraient indûment renversé à son détriment la charge de la preuve en lui opposant les dites déclarations ;
Considérant en deuxième lieu, que pour écarter les allégations de Mme selon lesquelles cette dernière aurait résidé en fait en Tunisie au cours de la période en litige, les premiers juges ont relevé qu'elle ne justifiait d'aucune imposition, ni même d'aucune déclaration de revenus dans ce pays, que les documents produits, relatifs à une taxe foncière au titre des années litigieuses pour un appartement situé ..., ainsi qu'au paiement de factures d'électricité et de téléphone, s'ils justifiaient de ce que la requérante était propriétaire d'un appartement en Tunisie, n'établissaient pas la réalité de son occupation par ses soins, que le certificat de résidence établi par le ministre de l'intérieur tunisien produit par l'intéressée avait été établi seulement le 16 octobre 1996 et enfin qu'elle ne pouvait utilement se prévaloir du suivi d'une formation en qualité de chef de rayon de coupe pendant la période du 12 janvier 1993 au 20 décembre 1994, laquelle n'était justifiée que par une attestation d'une société de confection établie à Ariana, le 27 février 1997, soit plus de 2 ans après le terme de ladite formation ; que Mme reprenant simplement en appel ses moyens de première instance, il y a lieu pour la cour d'adopter purement et simplement ces motifs, sans que puisse y faire obstacle la production, dans le dernier état de l'instruction, de deux attestations
établies en 2002 et 2006 selon lesquelles leurs signataires auraient travaillé ou résidé entre 1993 et 1996 dans l'appartement tunisien de la requérante, ni la circonstance que cette dernière aurait épousé le 13 novembre 1993 un ressortissant libyen, cet élément étant d'ailleurs, dès lors qu'il est constant que l'intéressé était par ailleurs déjà marié à une autre femme, sans incidence à lui seul sur la détermination de la résidence fiscale effective de Mme ;
Considérant enfin que Mme n'établissant pas, ainsi qu'il vient d'être dit, être assujettie à l'impôt en Tunisie, elle ne saurait utilement se prévaloir des stipulations susmentionnées de la convention du 28 mai 1973 signée entre la France et la Tunisie et visant à éviter les doubles impositions ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'administration a considéré à bon droit que Mme était, en 1994, fiscalement domiciliée en France ;
Sur le bien fondé des impositions :
Considérant qu'aux termes de l'article 1649 quater A du code général des impôts : Les personnes physiques qui transfèrent vers l'étranger ou en provenance de l'étranger des sommes, titres ou valeurs, sans l'intermédiaire d'un organisme soumis à la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 relative à l'activité et au contrôle des établissements de crédit, ou d'un organisme cité par l'article 8 de ladite loi, doivent faire la déclaration dans les conditions fixées par décret. Une déclaration est établie pour chaque transfert à l'exclusion des transferts dont le montant est inférieur à 50 000 francs. Les sommes, titres ou valeurs transférés vers l'étranger ou en provenance de l'étranger constituent, sauf preuve contraire, des revenus imposables lorsque le contribuable n'a pas rempli les obligations prévues aux alinéas précédents. ; qu'il résulte de l'instruction qu'une somme de 1 700 000 F a été transférée le 20 octobre 1994 sur le compte bancaire en France de Mme ; que si, en l'absence de toute déclaration de transfert régulière, cette somme est présumée constituer une somme imposable, il n'est pas contesté qu'elle provient d'un compte ouvert au nom de M. , ressortissant libyen ainsi qu'indiqué ci-dessus, domicilié hors de France, et époux de la requérante selon le droit en vigueur en Libye ; que la requérante a également versé au dossier une attestation de la Société de Banque Suisse à Monaco du 17 avril 1996, confirmant avoir émis un chèque de 1 700 000 F à l'ordre de Mme tiré sur la Société Générale le 20 octobre 1994 ; que l'administration, face à ces éléments de preuve, n'invoque devant la cour aucune circonstance, de nature à laisser penser que M. pourrait disposer de revenus imposables en France ; qu'ainsi, et dans les circonstances de l'espèce, Mme doit être regardée comme établissant le caractère non imposable des sommes en litige ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande en tant qu'elle portait sur l'année 1994 ; qu'il y a lieu pour la cour, dans cette mesure, d'annuler ce jugement et de prononcer la décharge des impositions contestées ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à payer à Mme une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés devant la cour et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Nice en date du 2 mars 2006 est annulé en tant qu'il rejette les conclusions de Mme relatives à l'année 1994.
Article 2 : Mme est déchargée du complément d'impôt sur le revenu qui lui a été assigné au titre de l'année 1994.
Article 3 : L'Etat est condamné à payer une somme de 1 500 euros à Mme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de Mme est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
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N° 06MA01182
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