Vu la requête, enregistrée le 6 décembre 2006, présentée pour M. René X, demeurant ..., par Me Moulinier ; M. X demande à la Cour :
1°) d'annuler l'article 1er du jugement n°0200018 du 2 octobre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1995 et 1996, et des pénalités y afférentes ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 12 juillet 2007, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, qui conclut au rejet de la requête ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
près avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 avril 2009 :
- le rapport de Mme Menasseyre, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Dubois, rapporteur public,
Considérant que M. X a acquis le 30 décembre 1995 quarante parts de copropriété d'un navire de pêche dénommé Viking Gladius , destiné à être exploité à partir de l'île de la Réunion ; qu'il a déduit de son revenu global les déficits industriels et commerciaux résultant, d'une part, pour l'année 1995, de la quote-part de l'investissement réalisé pour l'acquisition de ce navire sur le fondement de l'article 238 bis HA du code général des impôts, et, d'autre part, pour l'année 1996, de la quote-part du résultat d'exploitation de ce navire, sur le fondement du 1° du I de l'article 156 du même code ; que la copropriété a fait l'objet d'une vérification de comptabilité en 1998 ; qu'à la suite de ce contrôle, l'administration a remis en cause pour l'année 1995 la déduction par M. X de l'investissement réalisé, et, pour l'année 1996, la déduction du déficit d'exploitation ; que M. X relève appel du jugement en date du 2 octobre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1995 et 1996, en conséquence de ces redressements ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L.57 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction alors applicable : L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable, sa réponse doit également être motivée ; qu'ainsi que l'ont relevé à bon droit les premiers juges, par un jugement qui est suffisamment motivé sur ce point, la notification de redressement datée du 18 novembre 1998 adressée à M. X, qui informe l'intéressé de la remise en cause de la déduction de l'investissement qu'il a réalisé outre-mer et de l'imputabilité sur leur revenu global du déficit industriel et commercial qu'il a exposé indique le motif de droit du redressement tiré de l'application des articles 238 bis HA du code général des impôts et du 1° bis du I de l'article 156 du code général des impôts ; que, s'agissant des motifs de fait, elle indique également avec suffisamment de précisions les raisons pour lesquelles l'administration estime que l'investissement litigieux n'est pas éligible au dispositif prévu à l'article 238 bis HA du code général des impôts et l'ensemble des conditions que ne remplit pas le contribuable pour pouvoir pratiquer l'imputation d'un déficit sur son revenu global ; qu'enfin, le requérants ne peut utilement soutenir, au titre de la procédure d'imposition, que le vérificateur a notifié les redressements en procédant par simples affirmations dès lors que le caractère suffisant de la motivation d'une notification de redressement s'apprécie indépendamment de la pertinence des motifs exposés ;
Considérant, en deuxième lieu, que s'il incombe à l'administration d'informer les contribuables dont elle envisage de rehausser les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements recueillis auprès de tiers afin que les intéressés soient mis à même de demander, avant la mise en recouvrement des impositions, que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à leur disposition, et à supposer que l'administration fiscale ait obtenu certaines des informations ayant concouru à l'établissement des impositions dans le cadre de l'exercice de son droit de communication, il résulte des propres écrits du requérant que la réponse à ses observations que lui a adressée l'administration était accompagnée des documents utilisés par le vérificateur pour notifier les redressements tels qu'un extrait de comptabilité de la copropriété de navires, des copies de factures établies par le constructeur du navire et des documents établis entre l'armateur et la copropriété au sujet du transfert du même navire ; que cette production indiquait, par elle-même, l'origine et la teneur des documents ayant concouru à l'établissement des impositions ; que le requérant ne soutient pas qu'il aurait demandé à l'administration fiscale la communication d'autres documents que ceux qui ont été ainsi portés à sa connaissance ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance par l'administration fiscale de son obligation d'information ne peut qu'être écarté ;
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne la déduction de l'investissement au titre de l'année 1995 :
Considérant qu'aux termes de l'article 6 de la loi susmentionnée du 3 janvier 1967 portant statut des navires et autres bâtiments de mer : Sauf convention contraire, le constructeur est propriétaire du navire en construction jusqu'au transfert de propriété au client. Ce transfert se réalise avec la recette du navire après essais ; qu'aux termes de l'article 238 bis HA du code général des impôts dans sa rédaction applicable à l'époque des faits : I. Les entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés ou assujetties à un régime réel d'imposition peuvent déduire de leurs résultats imposables une somme égale au montant total des investissements productifs réalisés dans les départements de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique et de la Réunion à l'occasion de la création ou de l'extension d 'exploitations appartenant aux secteurs d'activité de l'industrie, de la pêche, de l'hôtellerie, du tourisme, des énergies nouvelles, de l'agriculture, du bâtiment et des travaux publics, des transports et de l'artisanat. La déduction est opérée sur le résultat de l'exercice au cours duquel l'investissement est réalisé, le déficit éventuel de l'exercice étant reporté dans les conditions prévues au I des articles 156 et 209 (...) ; qu'aux termes de l'article 46 quaterdecies D de l'annexe III au même code : La déduction est pratiquée par l'entreprise propriétaire. Elle est opérée sur les résultats imposables, déterminés avant toute autre déduction ou abattement, de l'exercice au cours duquel l'immobilisation a été livrée à l'entreprise ou créée par elle ; enfin, qu'aux termes de l'article 1604 du code civil : La délivrance est le transport de la chose vendue en la puissance et possession de l'acheteur ; qu'il résulte de ces dispositions que le fait générateur de la déduction pour investissement prévue à l'article 238 bis HA du code général des impôts est la date de la livraison effective de l'immobilisation ou de sa création dans le département d'outre-mer ; que, dans ce dernier cas, la date à retenir est celle à laquelle l'entreprise dispose matériellement de l'investissement productif et peut commencer son exploitation effective ;
Considérant que, s'il résulte de l'instruction qu'un permis provisoire de navigation a été délivré le 26 décembre 1995 pour le Viking Gladius , la validité de ce document, qui a été accordé au chantier naval Océa et non à la copropriété elle-même, est limitée à la seule journée du 26 décembre 1995 sous réserve de la mise en place sur le navire d'une drome de sauvetage réglementaire et ne permet pas de retenir cette date du 26 décembre 1995 comme celle de la livraison du navire à la copropriété dès lors que celle-ci n'est pas la bénéficiaire du permis et qu'il n'est pas contesté que le permis de navigation définitif n'a été accordé qu'au printemps de l'année 1996 ; que, s'il résulte également de l'instruction qu'un procès-verbal de recette du navire, établi le 26 décembre 1995 entre le constructeur et l'armateur, la SA Compagnie Viking, mentionne que le navire est considéré comme livré à la même date à 18 heures, ce document a été suivi d'un second procès-verbal de recette, établi en 1996 ; que, contrairement à ce que soutient le contribuable, la circonstance que la cession de parts de copropriété entre la SA Compagnie Viking et M. X a été réalisée le 30 décembre 1995 ne permet pas de retenir que la livraison du navire auquel étaient attachées ces parts aurait été effectuée avant le 31 décembre 1995 ; qu'enfin, il n'est pas contesté par le requérant que le navire n'a été assuré par la copropriété qu'en juin 1996 et se trouvait donc, jusqu'à cette date, sous la responsabilité du constructeur ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments, et sans qu'il y ait lieu de se référer aux modalités de paiement du navire qui sont indépendantes de sa date de livraison, que le navire ne peut être regardé comme ayant été livré à la copropriété avant le 31 décembre 1995 et que l'investissement, dont la déduction a été opérée par le requérant pour sa quote-part en 1995, ne peut être regardé comme réalisé au cours de l'exercice 1995 ; que, par suite, l'administration a pu à bon droit réintégrer la somme déduite par M. X dans les revenus perçus par l'intéressé au titre de l'année 1995 ;
En ce qui concerne l'imputation des déficits sur le revenu global de l'année 1996 :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 156 du code général des impôts dans sa rédaction issue de l'article 72 de la loi de finances pour 1996 : L'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal. Ce revenu net est déterminé (...) sous déduction : 1. du déficit constaté pour une année dans une catégorie de revenus ; si le revenu global n'est pas suffisant pour que l'imputation puisse être intégralement opérée, l'excédent du déficit est reporté successivement sur le revenu global des années suivantes jusqu'à la cinquième année inclusivement. Toutefois, n'est pas autorisée l'imputation : (...) 1° bis. Des déficits provenant, directement ou indirectement, des activités relevant des bénéfices industriels et commerciaux lorsque ces activités ne comportent pas la participation personnelle continue et directe de l'un des membres du foyer fiscal à l'accomplissement des actes nécessaires à l'activité. (...) Les dispositions du premier alinéa ne sont pas applicables au déficit ou à la fraction du déficit provenant de l'exploitation de biens meubles corporels acquis à l'état neuf, non encore livrés au 1er janvier 1996 et ayant donné lieu avant cette date à une commande accompagnée du versement d'acomptes au moins égaux à 50 % de leur prix (...) ;
Considérant que, pour l'application des dispositions précitées du 1° bis du 1. de l'article 156 du code général des impôts, seul l'investisseur, bénéficiaire de la déduction, ou un intermédiaire mandaté par l'investisseur peuvent passer commande du bien objet de l'investissement et s'acquitter du paiement des acomptes ;
Considérant que M. X soutient que l'entité constituée par l'ensemble des quirataires se serait acquittée avant le 1er janvier 1996 de plus de 50 % du montant des acomptes auprès d'un notaire chargé de la rédaction des actes d'acquisition des quirats ; que, toutefois, il ne justifie par aucun document que la copropriété du navire Viking Gladius ou un intermédiaire mandaté par celle-ci aurait antérieurement au 1er janvier 1996 passé une commande accompagnée du versement d'acomptes au moins égaux à 50 % du prix du navire ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à M. X une quelconque somme au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. X est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. René X et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
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N° 06MA03374