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14/05/2009 | FRANCE | N°07MA02059

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 14 mai 2009, 07MA02059


Vu la requête, enregistrée le 6 juin 2007, présentée par Me Bilger pour M. et Mme Jean-Marie X élisant domicile les Hauts de Provence avenue Alfred Capus à Aix-en-Provence (13090) ; M. et Mme Jean-Marie X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0503769 en date du 13 avril 2007 en tant que le Tribunal administratif de Marseille a, d'une part, rejeté leur demande tendant à voir condamner le centre d'hospitalier d'Aix-en-Provence à réparer les fautes commises lors de l'hospitalisation de M. X dans cet établissement et d'autre part, limité le montant de la somme qu

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Vu la requête, enregistrée le 6 juin 2007, présentée par Me Bilger pour M. et Mme Jean-Marie X élisant domicile les Hauts de Provence avenue Alfred Capus à Aix-en-Provence (13090) ; M. et Mme Jean-Marie X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0503769 en date du 13 avril 2007 en tant que le Tribunal administratif de Marseille a, d'une part, rejeté leur demande tendant à voir condamner le centre d'hospitalier d'Aix-en-Provence à réparer les fautes commises lors de l'hospitalisation de M. X dans cet établissement et d'autre part, limité le montant de la somme que l'Assistance publique de Marseille a été condamnée à verser en réparation de la faute commise à 6 000 euros ;

2°) de condamner le centre hospitalier d'Aix-en-Provence à leur verser respectivement les sommes de 575 445,78 euros et 100 000 euros et l'Assistance publique de Marseille à leur verser respectivement les sommes de 15 000 euros et 5 000 euros ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier d'Aix-en-Provence et de l'Assistance publique de Marseille la somme de 20 000 euros au titre des frais d'instance ;

Vu le code de la sécurité sociale et de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre exceptionnel, les dispositions de l'article 2 du décret n°2009-14 du 7 janvier 2009 :

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 avril 2009 :

- le rapport de Mme Massé-Degois, rapporteur ;

- les conclusions de M. Dubois, rapporteur public;

- et les observations de Me Demailly, substituant Me Le Prado pour l'Assistance publique de Marseille et le centre hospitalier d'Aix-en-Provence ;

Considérant que M. et Mme X relèvent appel du jugement du 13 avril 2007 en tant que le Tribunal administratif de Marseille a, d'une part, rejeté leur demande tendant à voir condamner le centre d'hospitalier d'Aix-en-Provence à réparer les fautes commises lors de l'hospitalisation de M. X dans cet établissement et d'autre part, limité le montant de la somme que l'Assistance publique de Marseille a été condamnée à verser en réparation de la faute commise à 6 000 euros ; qu'ils sollicitent, dans le dernier état de leurs écritures, la condamnation du centre hospitalier d'Aix-en-Provence à leur verser respectivement les sommes de 575 445,78 euros et 100 000 euros et de l'Assistance publique de Marseille à leur verser respectivement les sommes de 15 000 euros et 5 000 euros ; que, par la voie de l'appel incident, l'Assistance publique de Marseille demande l'annulation du jugement entrepris en tant qu'il l'a déclarée responsable des préjudices subis par M. X consécutivement à l'intervention chirurgicale inutile réalisée le 29 mai 2001 à l'hôpital de la Timone ;

Sur la responsabilité du centre hospitalier d'Aix-en-Provence :

Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expertise diligentée devant le Tribunal administratif de Marseille que l'histoire de la maladie, objet du litige opposant M. X au centre hospitalier d'Aix-en-Provence, a débuté en septembre 2000 par un épisode fébrile ; qu'en raison de la persistance de la fièvre et de l'apparition de vomissements, M. X a été admis au centre hospitalier d'Aix-en-Provence le 3 novembre 2000 dans le service hépato-gastro-entérologie et d'endoscopie digestives ; que le bilan infectieux alors réalisé s'est révélé négatif ; que les examens biologiques pratiqués le 4 novembre suivant ont cependant permis d'objectiver un état inflammatoire important et une éosinophilie élevée ; que, malgré le caractère négatif des hémocultures, d'autres examens ont été prescrits tels une échographie abdominale, un scanner du corps et une échographie cardiaque qui se sont révélés normaux ; que la consultation auprès du chef du service de néphrologie de médecine interne du 14 novembre 2000 a permis de constater la disparition de l'éruption cutanée atypique et la normalisation en cours du syndrome inflammatoire ; qu'en l'absence de diagnostic certain, à l'issue de cette consultation, a été prévue, dans un délai de huit jours, une biologie de contrôle ; que M. X, après avoir quitté le centre hospitalier dans l'après-midi du 14 novembre, a commencé à ressentir rapidement une gêne dans l'oeil droit ainsi qu'une vision trouble au niveau de l'oeil gauche qui ont motivé la consultation d'un ophtalmologiste le 16 novembre suivant ; que l'intéressé a été à nouveau hospitalisé dans le service de médecine interne et rhumatologie au centre hospitalier d'Aix-en-Provence du 16 au 30 novembre 2000 ; que, malgré le résultat négatif du nouveau bilan infectieux réalisé et l'absence d'images spécifiques révélées par l'imagerie par résonance magnétique (IRM), un traitement anti-inflammatoire, anti-coagulant et par antivitamines K a été administré à M. X dès le 16 novembre 2000 qui a permis la forte régression du syndrome inflammatoire et la disparition de l'éosinophilie autorisant le patient à retourner à son domicile le 30 novembre 2000 où il a poursuivi son traitement ; qu'au cours d'un nouveau séjour au centre hospitalier du 12 au 19 décembre 2000, une biopsie a été réalisée et une étiologie embolique d'origine cardiaque a été évoquée ; que l'intéressé, après avoir quitté le centre hospitalier d'Aix-en-Provence le 19 décembre 2000, du fait de la persistance de la gêne visuelle, a consulté à l'hôpital de la Timone le 22 février 2001 ; qu'après la réalisation de nombreux examens biologiques recherchant une origine infectieuse, qui ne sont tous révélés négatifs, une recherche du germe Bartonella dans le sang et dans le liquide céphalo-rachidien de M. X a été effectuée ; qu'alors que les cultures du sang et du liquide céphalo-rachidien se sont révélées négatives, les sérologies à Bartonella ont permis de montrer un taux d'immunoglobuline G huit fois supérieur à la normale ; que le diagnostic d'infection à Bartonella Grahamii a été posé et le cas de M. X considéré par le spécialiste de cette pathologie à germe rare, comme une observation exceptionnelle ; que M. X présente, à ce jour, des séquelles ophtalmologiques consécutives à la survenue d'embolies ou de thromboses survenues dans les branches de l'artère centrale de la rétine ;

Considérant que M. et Mme X soutiennent qu'un manquement fautif a été commis par le centre hospitalier d'Aix-en-Provence dans la prise en charge de M. X lors de son séjour du 4 au 14 novembre 2000 dès lors que la gravité de la symptomatologie clinique et biologique n'a pas été suffisamment prise en compte par cet établissement et que le syndrome inflammatoire comme l'augmentation régulière de l'hyperéosinophilie aurait dû conduire les médecins de l'hôpital à diagnostiquer une infection bactérienne ;

Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expertise diligentée devant le tribunal administratif que M. X a fait l'objet, dès sa première admission au centre hospitalier d'Aix-en-Provence en novembre 2000, de nombreux examens médicaux et biologiques et que de nombreux avis ont été demandés à des médecins spécialisés en dermatologie, urologie, cardiologie et médecine interne ; qu'il résulte également de ce rapport étayé et circonstancié que l'absence de prescription de traitement antibiotique en novembre 2000 était exempt de reproches et que la pathologie dont souffrait M. X était d'une extraordinaire complexité ; qu'enfin, aux termes du rapport d'expertise rédigé par le sapiteur spécialisé en ophtalmologie, il n'est pas certain que l'administration d'un traitement antibiotique précoce aurait été de nature à empêcher la survenue d'emboles oculaires ; que le sapiteur a au demeurant regardé comme possible, même sous traitement antibiotique, la survenue d'un infarctus rétinien bilatéral ;

Considérant, d'autre part, que s'il est contant que la recherche de germes rares, type Bartonella par envoi de sérum n'a pas été demandée lors de la première hospitalisation au laboratoire spécialisé à Marseille, en l'occurrence le centre de référence des Ricketties , il ne résulte toutefois pas de l'instruction que cette recherche devait, à la date des faits en litige, être effectuée de manière systématique en cas de suspicion d'une endocardite infectieuse, l'homme de l'art s'étant borné sur ce point à préciser qu'à la date de son rapport, soit en 2004, cette recherche était devenue systématique ; qu'en tout état de cause, les résultats des prélèvements sanguins du 4 novembre 2000 et du 13 décembre 2000 effectués au centre hospitalier d'Aix-en-Provence, prélèvements qui ont été adressés le 28 novembre 2001 dans ce laboratoire spécialisé, ne permettaient pas, à ce stade de la maladie, de suspecter une infection à Bartonella Grahamii ;

Considérant que, dans ces circonstances et eu égard à l'ensemble des éléments médicaux ci-dessus rappelés, ainsi que l'a jugé le tribunal, il ne saurait être reproché au centre hospitalier d'Aix-en-Provence ni de ne pas avoir mis en oeuvre les moyens dont il disposait pour rechercher la nature de la pathologie dont souffrait M. X ni d'avoir sous-estimé la gravité de la symptomatologie clinique de ce dernier ;

Sur la responsabilité de l'Assistance publique de Marseille :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les échographies trans-oesophagiennes ETO réalisées à l'hôpital de la Timone les 27 décembre 2000, 21 février 2001 et 9 avril 2001 ont montré la persistance d'une image flottante appendue au versant aortique évocatrice d'une petite tumeur bénigne de la valvule ; que l'ablation du fibro-élastome présumé a été décidée par le service de chirurgie cardiaque de l'hôpital ; qu'alors que l'échographie réalisée la veille de l'intervention a confirmé la présence de cette image suspecte, le chirurgien n'a pu que constater, en ouvrant l'aorte, l'absence de toute tumeur ; que l'échographie trans-oesophagienne effectuée le lendemain a confirmé la disparition de l'image ;

Considérant que, par la voie de l'appel incident, l'Assistance publique de Marseille dont dépend l'hôpital de la Timone soutient que les arguments échographiques justifiaient le recours à l'opération chirurgicale ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les praticiens spécialisés dont l'avis a été sollicité par l'homme de l'art dans le cadre des opérations d'expertise ont eu des interprétations différentes de l'image révélée par les échographies trans-oesophagiennes, les uns la regardant comme un artéfact c'est-à-dire une fausse image simulant une pathologie, les autres ayant une position plus nuancée sans indiquer cependant d'opération au vu de cette simple image ; qu'alors que l'Assistance publique ne soutient pas que le service de cardiologie de l'hôpital de la Timone ne disposait d'aucun autre moyen plus précis et performant que la réalisation d'une échographie trans-oesophagienne pour confirmer le diagnostic de fibro-élastome présumé, malgré la persistance de l'image flottante sur les quatre échographies réalisées à l'hôpital de la Timone, ainsi que l'a jugé le tribunal, leur lecture restait insuffisante au vu des éléments de l'expertise pour entreprendre une opération aussi délicate qu'une intervention à coeur ouvert ;

Considérant que M. et Mme X soutiennent, dans le dernier état de leurs écritures, que la somme de 6 000 euros allouée par les premiers juges à M. X répare insuffisamment les préjudices qu'il a subis ; qu'ils demandent à la Cour, du fait de cette intervention chirurgicale inutile, pour M. X, au titre de la période d'interruption de travail de six mois et des souffrances physiques et morales subies, les sommes respectives de 13 656 euros et 15 000 euros et pour Mme X, au titre du préjudice d'affection subi, la somme de 5 000 euros ; que, d'une part, M. X s'abstient d'apporter à l'appui de ses allégations le moindre élément de nature à établir le caractère insuffisant de la somme allouée par le tribunal ; que, d'autre part, les conclusions indemnitaires présentées pour l'épouse de M. X tendant à obtenir la somme de 5 000 euros sont, ainsi que le fait valoir l'Assistance publique de Marseille, nouvelles en appel et, par conséquent, irrecevables ; que la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône n'établit pas, par les seuls éléments qu'elle produit, notamment un relevé de ses débours de 2005, que la somme de 15 349,93 euros qui lui a été allouée par le tribunal ne correspond pas au montant des débours engagés au titre de l'intervention chirurgicale inutile du 29 mai 2001 ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme X ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Marseille a rejeté leurs demandes tendant à voir condamner le centre d'hospitalier d'Aix-en-Provence à réparer les fautes commises lors de l'hospitalisation de M. X dans cet établissement et d'autre part, fixé le montant de la somme que l'Assistance publique de Marseille a été condamnée à verser en réparation de la faute commise à 6 000 euros ; que l'Assistance publique de Marseille n'est pas plus fondée à soutenir que c'est à tort que, par le même jugement, le tribunal l'a déclarée responsable des préjudices subis par M. X consécutivement à l'intervention chirurgicale inutile réalisée le 29 mai 2001 à l'hôpital de la Timone ; que les conclusions présentées par la caisse d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône ne peuvent, dès lors qu'être rejetées de même que les conclusions présentées par M. et Mme X au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme X est rejetée.

Article 2 : L'appel incident de l'Assistance publique de Marseille et les conclusions présentées par la caisse d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Jean-Marie X, au centre hospitalier d'Aix-en-Provence, à l'Assistance publique de Marseille, à la caisse d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône et au ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative.

Copie en sera adressée à Me Bilger, à Me Le Prado et au préfet des Bouches-du Rhône.

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N° 07MA02059 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07MA02059
Date de la décision : 14/05/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DARRIEUTORT
Rapporteur ?: Mme Christine MASSE-DEGOIS
Rapporteur public ?: M. DUBOIS
Avocat(s) : DEPIEDS

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2009-05-14;07ma02059 ?
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