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14/05/2009 | FRANCE | N°06MA03172

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 14 mai 2009, 06MA03172


Vu l'arrêt avant dire droit en date du 24 avril 2008 par lequel la Cour administrative d'appel de Marseille a ordonné, avant de statuer sur la requête de M. Cyril X et sur le recours incident du centre hospitalier universitaire de Nice, une expertise aux fins notamment de décrire les interventions qui ont été pratiquées le 25 novembre 1998 et le 15 juillet 1999 dans cet établissement, leurs conditions de réalisation et leurs éventuelles conséquences sur l'état de santé du requérant ;

Vu le rapport d'expertise déposé au greffe de la Cour le 9 octobre 2008 ;

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Vu l'arrêt avant dire droit en date du 24 avril 2008 par lequel la Cour administrative d'appel de Marseille a ordonné, avant de statuer sur la requête de M. Cyril X et sur le recours incident du centre hospitalier universitaire de Nice, une expertise aux fins notamment de décrire les interventions qui ont été pratiquées le 25 novembre 1998 et le 15 juillet 1999 dans cet établissement, leurs conditions de réalisation et leurs éventuelles conséquences sur l'état de santé du requérant ;

Vu le rapport d'expertise déposé au greffe de la Cour le 9 octobre 2008 ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la sécurité sociale et de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 avril 2009 :

- le rapport de Mme Massé-Degois, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Dubois, rapporteur public ;

- et les observations de Me Demailly substituant Me Le Prado pour le centre hospitalier universitaire de Nice ;

Considérant que M. X, en vue de traiter l'obésité dont il souffrait, a subi le 25 novembre 1998 au centre hospitalier universitaire de Nice une gastroplastie de type Mason ; que le 15 juillet 1999, il a subi dans ce même établissement une intervention chirurgicale en vue de réduire une gynécomastie bilatérale ; que le Tribunal administratif de Nice, par un jugement du 22 septembre 2006, a condamné le centre hospitalier à verser à M. X la somme de 10 000 euros en réparation des préjudices consécutifs au défaut de consentement à la réalisation de la gastroplastie verticale selon la technique de Mason utilisée et rejeté le surplus de ses conclusions ; que, par le même jugement, le tribunal a condamné l'établissement hospitalier à rembourser à la caisse primaire d'assurance maladie les sommes de 5 102,81 euros et 760 euros au titre des prestations servies à M. X et de l'indemnité forfaitaire prévue à l'article L.376-1 du code de la sécurité sociale ;

Considérant que par un arrêt avant dire droit en date du 24 avril 2008, la Cour administrative d'appel de Marseille a ordonné, avant de statuer sur la requête de M. X et sur le recours incident du centre hospitalier universitaire de Nice, une expertise aux fins notamment de décrire les interventions qui ont été pratiquées le 25 novembre 1998 et le 15 juillet 1999 dans cet établissement, leurs conditions de réalisation et leurs éventuelles conséquences sur l'état de santé du requérant ;

Considérant que M. X, dans le dernier état de ses écritures, demande à la Cour de confirmer le jugement susvisé en tant que le tribunal a constaté une absence d'information préalablement à la gastroplastie réalisée au centre hospitalier universitaire de Nice et jugé que l'opération de gynécomastie s'est déroulée dans le secteur public dudit hôpital et de réformer le surplus du jugement en condamnant l'établissement hospitalier à lui verser, à titre de provision, les sommes de 144 000 euros et 1 200 euros au titre de ses préjudices patrimoniaux temporaires et les sommes de 50 000 euros, 20 000 euros et 10 000 euros au titre de ses préjudices extrapatrimoniaux ; que, par la voie de l'appel incident, le centre hospitalier universitaire de Nice demande l'annulation du jugement entrepris en tant qu'il a retenu à son encontre un défaut d'information fautif ;

Sur la gastroplastie :

Considérant, en premier lieu, que si comme le relève M. X, le tribunal a mentionné dans le jugement entrepris le risque de perforation de l'intestin au lieu du risque de perforation de l'estomac avec la méthode de l'anneau, cette erreur n'a toutefois pas eu d'incidence sur le sens dudit jugement dès lors que les premiers juges ont admis la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Nice en raison de l'absence de consentement donné pour la technique de gastroplastie pratiquée ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction que M. X a subi une gastroplastie verticale de type Mason calibrée à l'aide d'une bandelette qui consiste en une trans-section d'une partie de l'estomac en le scindant en deux compartiments qui, contrairement à la pose d'un anneau péri-gastrique modulable, ne présente aucun caractère ajustable du diamètre de la restriction alimentaire ; qu'il résulte également de l'instruction que la gastroplastie de type Mason ne constitue pas une technique totalement irréversible mais une technique qui rend plus difficile la réfection de l'estomac que l'ablation de l'anneau gastrique modulable et que la réversibilité de ces deux procédés suppose, en tout état de cause, une nouvelle intervention chirurgicale sous anesthésie ; qu'il résulte également du rapport de l'expertise diligentée devant la Cour et notamment des réponses aux dires du conseil de M. X que la prise en charge médicale de l'intervention litigieuse a été conforme aux données de la science médicale à la date des faits et qu'à cette date, soit en 1998, l'indication de la technique utilisée était laissée au libre arbitre du praticien ; que si le rapport indique que M. X présentait, au vu des documents de son dossier médical, un indice de masse corporelle de 36,5 alors qu'un indice de masse corporelle de 40 est habituellement retenu pour réaliser une intervention de type Mason , l'homme de l'art a cependant précisé que cette dernière référence est seulement opposable depuis le rapport de l'ANAES de l'année 2000 et que l'indication technique retenue après consultation de spécialistes en gastro-entérologie, en nutrition et en psychiatrie était adaptée à la situation de M. X qui, en outre, présentait une hernie hiatale justifiant le recours à cette méthode plutôt qu'à celle de l'anneau ajustable ; que si le requérant invoque l'existence de recommandations de l'association française d'étude et de recherche sur l'obésité dès l'année 1998, il s'abstient toutefois de les produire et de préciser celles qui auraient été méconnues par le centre hospitalier ; qu'il résulte, par ailleurs, de l'instruction que l'appréciation psychiatrique pré-opératoire a été réalisée ; qu'aux termes des conclusions expertales, qui ne sont remises en cause par aucun document d'ordre médical, il est probable qu'une chirurgie par anneau aurait eu pour M. X le même risque de complication à type de reflux, la proportion statistique de ces complications étant identique chez les patients opérés par anneau gastrique que chez les patients opérés par la méthode de type Mason , le cas de M. X relevant de l'aléa thérapeutique ; qu'il s'ensuit que, dans ces circonstances, M. X ne peut soutenir ni que le centre hospitalier a commis une faute médicale en pratiquant une intervention de gastroplastie ni qu'il a commis une erreur en utilisant la technique de type Mason ;

Considérant, en troisième lieu, ainsi que les premiers juges l'ont admis, que le centre hospitalier universitaire de Nice ne rapporte pas la preuve qui lui incombe, contrairement à ce qu'il allègue, de l'information donnée à M. X concernant la réalisation de la gastroplastie verticale calibrée de type Mason pratiquée le 25 novembre 1998 alors que ce dernier soutient avoir donné son consentement pour la seule pose d'un anneau péri-gastrique modulable ; qu'il s'ensuit que le centre hospitalier universitaire de Nice a commis une faute de nature à engager sa responsabilité en ayant pratiqué une intervention de gastroplastie verticale de type Mason alors que le patient avait donné son consentement pour une intervention consistant en la pose d'un anneau gastrique ajustable au vu du document qu'il a signé le 7 juillet 1998 intitulé CONSENTEMENT ECLAIRE Gastroplastie par Bande de Silicone Réglable sous laparoscopie ;

Considérant, en quatrième lieu, que M. X soutient que la somme de 10 000 euros allouée par le tribunal répare de manière insuffisante ses préjudices personnels ; qu'il demande en réparation de la faute commise par le centre hospitalier une somme de 144 000 euros pour une période de dix ans correspondant à la perte de revenus eu égard à sa qualification professionnelle, une somme 1 200 euros en remboursement des frais exposés pour être assisté par un médecin conseil dans le cadre des opérations de l'expertise, une somme de 50 000 euros eu égard au taux d'incapacité de 20% dont il est atteint et une somme de 20 000 euros en compensation des souffrances physiques arrêtées à 4 sur une échelle de 1 à 7 et de son préjudice moral ; que toutefois, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, il résulte de l'expertise diligentée devant la Cour dont les conclusions ne sont remises en cause par aucun élément d'ordre médical que la même proportion de patients opérés par anneau péri-gastrique présente le même type de complication : sur ce terrain particulier, il est possible qu'une chirurgie par anneau ait eu le même risque de complication à type de reflux ; qu'il s'ensuit, que contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, M. X est fondé à obtenir la réparation du seul préjudice consécutif à l'absence de consentement donné à l'intervention qui a été réalisée lequel préjudice consiste en le respect de recommandations hygiéno-diététiques particulières et en des difficultés accrues pour permettre la réversibilité de l'opération ; qu'il sera fait une juste appréciation de ce poste de préjudice en lui allouant une somme forfaitaire de 5 000 euros ; que, par suite, en l'absence de lien établi entre la faute commise par le centre hospitalier universitaire de Nice et les débours invoqués par la caisse d'assurance maladie des Alpes-Maritimes, il y a lieu de réformer le jugement en tant que le centre hospitalier a été condamné à verser à ladite caisse la somme de 5 102 ,81 euros au titre de frais médicaux et d'hospitalisation à l'hôpital Mondor en vue de l'ablation de la bandelette ainsi que la somme de 760 euros au titre de l'indemnité prévue à l'article L. 376-1 au code de la sécurité sociale ;

Sur la gynécomastie :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X a été opéré le 15 juillet 1999 au centre hospitalier universitaire de Nice d'une gynécomastie bilatérale qu'il présentait depuis l'adolescence et pour laquelle il avait subi antérieurement au Liban une lipo-aspiration du tissu graisseux mammaire sous anesthésie générale avec un résultat non satisfaisant ; qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise diligentée devant la Cour que l'acte chirurgical de correction de gynécomastie, qui constitue une intervention courante ne nécessitant aucune spécialisation particulière, a été réalisée par un praticien compétent en chirurgie générale dans le secteur public du centre hospitalier universitaire de Nice selon la technique habituelle par voie péri-aréolaire sans qu'aucun manquement ou faute puisse être relevé au cours du geste opératoire ; que si M. X, en indiquant dans le dernier état de ses dernières écritures qu'aucun formulaire de consentement n'a été trouvé , entend invoquer l'absence de consentement à cette opération, il ne précise toutefois pas les risques dont il n'a pas été informé et qui se seraient réalisés ; qu'au vu des conclusions expertales qui, contrairement à ce qui est soutenu ne sont pas inexploitables, nonobstant la discordance de poids de tissu graisseux prélevé à droite et à gauche, l'absence de résultat cosmétique satisfaisant, qui ne peut être imputée à une faute chirurgicale, résulte de complications post-opératoires à type d'épanchement sous-cutané ayant nécessité une ré-intervention sous anesthésie locale pour drainage ; que, par suite, en l'absence de faute, M. X n'est pas fondé à demander la condamnation du centre hospitalier universitaire de Nice à lui verser la somme de 10 000 euros au titre des préjudices esthétique et moral ;

Sur les frais d'expertise :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de laisser à la charge définitive du centre hospitalier universitaire de Nice les frais de l'expertise diligentée en première instance liquidés et taxés à la somme de 1 242,52 euros et de mettre à la charge définitive dudit centre les frais de l'expertise diligentée en appel liquidés et taxés à la somme de 1 600 euros ;

DECIDE

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : La somme de 10 000 euros que le centre hospitalier universitaire de Nice a été condamné à payer à M. X par l'article 1er du jugement n°0204354 du Tribunal administratif de Nice du 22 septembre 2006 est ramenée à la somme de 5 000 euros.

Article 3 : Les articles 3 et 4 du jugement n°0204354 du Tribunal administratif de Nice du 22 septembre 2006 sont annulés.

Article 4 : Les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes sont rejetées.

Article 5 : Le surplus des conclusions présentées par le centre hospitalier universitaire de Nice est rejeté.

Article 6 : Les frais de l'expertise diligentée en appel liquidés et taxés à la somme de 1 600 euros sont mis à la charge définitive du centre hospitalier universitaire de Nice.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. Cyril X, au centre hospitalier universitaire de Nice, à la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes et au ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 06MA03172
Date de la décision : 14/05/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. DARRIEUTORT
Rapporteur ?: Mme Christine MASSE-DEGOIS
Rapporteur public ?: M. DUBOIS
Avocat(s) : DIDIER

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2009-05-14;06ma03172 ?
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