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05/02/2009 | FRANCE | N°07MA02117

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 05 février 2009, 07MA02117


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 11 juin 2007 sous le n°07MA02117, présentée par Me Pons, avocat, pour la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE (SCI) LES BLAQUES, dont le siège social est domaine de Cantagrils à Argeliers (34380) ;

La SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE LES BLAQUES demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 0406430 du 16 mai 2007 par laquelle le président de la quatrième chambre du Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la lettre en date du 13 juillet 2004 par laqu

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 11 juin 2007 sous le n°07MA02117, présentée par Me Pons, avocat, pour la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE (SCI) LES BLAQUES, dont le siège social est domaine de Cantagrils à Argeliers (34380) ;

La SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE LES BLAQUES demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 0406430 du 16 mai 2007 par laquelle le président de la quatrième chambre du Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la lettre en date du 13 juillet 2004 par laquelle le préfet de l'Hérault l'a mise en demeure de déposer avant le 1er août 2004 une demande de permis de démolir et la décision du 28 septembre 2004 rejetant son recours gracieux ;

2°) d'annuler les décisions du préfet de l'Hérault des 13 juillet et 28 septembre 2004 susmentionnées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu l'ordonnance sur la marine du 3 août 1681 ;

Vu la loi du 29 floréal An X ;

Vu la loi n°63-1178 du 28 novembre 1963, relative au domaine public maritime ;

Vu le code de justice administrative ;

En application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, les parties ayant été informées que le jugement paraissait susceptible d'être fondé sur un moyen soulevé d'office ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 janvier 2009 :

- le rapport de Mme Chenal-Peter, rapporteur ;

- les conclusions de M. Dieu, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par arrêté préfectoral en date du 31 mai 1988, le préfet de l'Hérault a autorisé M. Bonnaure, gérant de la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE LES BLAQUES, à occuper temporairement une parcelle de 600 m2 du domaine public maritime sur la plage Ouest de Carnon, sur le territoire de la commune de Mauguio, afin d'y exploiter un établissement de restauration et une discothèque ; que cette autorisation a été reconduite une fois, et a pris fin le 31 décembre 1997 ; que par une lettre du 13 juillet 2004, le préfet de l'Hérault a mis en demeure la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE LES BLAQUES de déposer avant le 1er août 2004 une demande de permis de démolir son établissement, car elle ne disposait plus d'autorisation d'occupation temporaire de la parcelle; qu'à la suite de ce courrier, M. Bonnaure a effectué un recours en date du 24 août 2004, contestant cette demande de démolition, en demandant en outre à acheter la parcelle en question et, dans l'attente, le renouvellement de l'autorisation d'occupation temporaire qui lui avait été accordée par le passé ; que le préfet de l'Hérault a rejeté ses demandes par un courrier du 28 septembre 2004 ; que par une ordonnance du 16 mai 2007, le président de la quatrième chambre du Tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE LES BLAQUES tendant à l'annulation des lettres en date du 13 juillet 2004 et du 28 septembre 2004 du préfet de l'Hérault ; que la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE LES BLAQUES relève appel de cette ordonnance ;

Considérant, d'une part, que la lettre du 13 juillet 2004 du préfet de l'Hérault, après avoir rappelé à M. Bonnaure qu'il ne disposait plus d'autorisation d'occupation temporaire du domaine public, lui a demandé de déposer, avant le 1er août 2004, une demande de permis de démolir afin de restituer au domaine public son état initial, au plus tard le 1er octobre 2004 ; que, par le même courrier, le préfet lui a indiqué qu'à défaut pour lui de déférer à cette mise en demeure, il engagera des poursuites pour contravention de grande voirie à son encontre ; que cette lettre constitue , en elle-même, dans les termes où elle est rédigée, une décision susceptible de recours pour excès de pouvoir, que par suite, en estimant que cette lettre constituait un acte qui n'était pas détachable de la procédure de contravention de grande voirie , le président de la quatrième chambre du Tribunal administratif de Montpellier a donné aux faits une qualification juridique erronée ; qu'au surplus, contrairement à ce qu'a considéré le premier juge, ladite SCI ne lui avait pas demandé d'annuler un quelconque procès-verbal de contravention de grande voirie ;

Considérant, d'autre part, que la lettre du préfet de l'Hérault du 28 septembre 2004 rejetant la demande de M. Bonnaure du 24 août 2004, est, en tout état de cause, une décision faisant grief à l'interessé, dès lors qu'elle rejette à la fois son recours gracieux effectué contre la mise en demeure du 13 juillet 2004, sa demande tendant à acheter la parcelle en question et sa demande tendant au renouvellement de l'autorisation d'occupation temporaire dont il avait bénéficié ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'ordonnance du 16 mai 2007 du président de la 4ème chambre du Tribunal administratif de Montpellier est entachée d'irrégularité et doit être annulée ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE LES BLAQUES devant le Tribunal administratif de Montpellier ;

En ce qui concerne la légalité de la mise en demeure de procéder à la démolition de la construction de la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE LES BLAQUES :

Considérant qu'aux termes de l'article 1 du titre VII du livre IV de l'ordonnance d'août 1681 susvisée : Sera réputé bord et rivage de la mer, tout ce qu'elle couvre et découvre pendant les nouvelles et pleines lunes et jusqu'où le grand flot de mars se peut étendre sur les grèves ; que ces dispositions doivent être entendues comme fixant la limite du domaine public maritime, quel que soit le rivage, au point où les plus hautes mers peuvent s'étendre, en l'absence de perturbations météorologiques exceptionnelles ; qu'aux termes de l'article 2 des mêmes titre et livre de l'ordonnance : Faisons défense à toute personne de bâtir sur les rivages de la mer, d'y planter aucuns pieux, ni faire aucuns ouvrages qui puissent porter préjudice à la navigation, à peine de démolition des ouvrages, de confiscation de matériaux et d'amende arbitraire ; qu'aux termes de l'article 28 du code du domaine de l'Etat : Nul ne peut, sans autorisation délivrée par l'autorité compétente, occuper une dépendance du domaine public national ou l'utiliser dans des limites excédant le droit d'usage qui appartient à tous. Le service des domaines constate les infractions aux dispositions de l'alinéa précédent en vue de poursuivre, contre les occupants sans titre, le recouvrement des indemnités correspondant aux redevances dont le Trésor a été frustré, le tout sans préjudice de la répression des contraventions de grande voirie ; qu'aux termes de l'article 1 de la loi susvisée du 28 novembre 1963, relative au domaine public maritime : Sont incorporés, sous réserve des droits des tiers, au domaine public maritime : ... b) les lais et relais futurs de mer, et, sous réserve des dispositions contraires d'actes de concession, les terrains qui seront artificiellement soustraits à l'action du flot ; qu'aux termes de l'article 2 de ladite loi : Peuvent être incorporés au domaine public maritime, sous réserve du droit des tiers, ...les lais et relais de la mer faisant partie du domaine privé de l'Etat à la date de promulgation de la présente loi ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'un arrêté préfectoral en date du 5 décembre 1979, a incorporé au domaine public maritime les lais et relais de la mer situés sur le territoire de la commune de Mauguio ; que la parcelle en litige, située sur un lais de la mer a par suite été incorporée au domaine public maritime ; que le fait que des parcelles voisines auraient été déclassées puis cédées à des occupants en titre durant l'année 1943 est sans influence sur l'appartenance de ladite parcelle au domaine public ; que la société requérante ne saurait utilement se prévaloir des dispositions de l'article 26 de la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral imposant une notification aux riverains des actes administratifs portant délimitation du rivage, dès lors que l'acte du 5 décembre 1979 ne porte pas délimitation du rivage ; que, par suite, la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE LES BLAQUES n'est pas fondée à soutenir que la parcelle occupée n'appartient pas au domaine public maritime dès lors qu'elle serait soustraite à l'action des plus hauts flots ;

Considérant, en outre, qu'il résulte de l'instruction que M. Bonnaure a été titulaire, en vertu d'un arrêté préfectoral en date du 31 mai 1988, d'une autorisation d'occupation temporaire pour l'établissement de restauration et discothèque qu'il exploitait sur le domaine public, ladite autorisation ayant été prorogée par un arrêté du 29 avril 1993 jusqu'au 31 décembre 1997, et n'ayant plus été renouvelée par la suite ; que dès lors, la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE LES BLAQUES ne bénéficiait plus au 13 juillet 2004, date de la mise en demeure litigieuse, d'aucune autorisation d'occupation temporaire pour cette construction ; que le simple fait d'avoir maintenu illégalement sur le domaine public cette construction est constitutif d'une contravention de grande voirie, alors même que le domaine public n'a pas été dégradé ; que dès lors, l'occupation illégale du domaine public maritime était de nature à fonder ladite mise en demeure et les poursuites diligentées à l'encontre de la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE LES BLAQUES ;

Considérant que les autorités chargées de la police et de la conservation du domaine public maritime sont tenues, par application des principes régissant la domanialité publique, de veiller à l'utilisation normale des rivages de la mer et d'exercer à cet effet les pouvoirs qu'elles tiennent de la législation en vigueur, y compris celui de saisir le juge des contraventions de grande voirie pour faire cesser les occupations sans titre et enlever les obstacles créés de manière illicite qui s'opposent à l'exercice par le public de son droit à l'usage du domaine public maritime ; que, dans ces conditions, le préfet était en situation de compétence liée pour édicter cette mise en demeure de faire cesser cette occupation sans titre ; qu'en raison de cette compétence liée de l'administration, les moyens tirés du défaut de motivation de la mise en demeure, de l'absence de caractère contradictoire de la procédure et de consultation du service maritime, de l'impossibilité de solliciter un permis de démolir, dans la mesure où une telle demande ne préjuge pas de la possibilité d'obtenir ou non ledit permis, de l'atteinte à ses droits acquis attachés au permis de construire et à la liberté du commerce et de l'industrie sont inopérants à l'encontre de la décision attaquée ;

Considérant que la société requérante ne peut pas non plus utilement invoquer, à l'encontre de la mise en demeure du préfet de l'Hérault et ce, en tout état de cause, le moyen tiré de la nullité du procès-verbal de contravention de grande voirie, qui est postérieur à la mise en demeure et de la circonstance qu'elle s'est toujours acquittée de ses obligations ;

En ce qui concerne la légalité de la décision refusant de céder la parcelle litigieuse et refusant le renouvellement de l'autorisation d'occupation temporaire :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, à l'occasion du transfert de l'autorisation d'occupation temporaire de l'ancien occupant de cette parcelle à M. Bonnaure, le directeur du service maritime et de navigation du Languedoc-Roussillon a, dans un courrier en date du 8 août 1984 adressé aux services fiscaux, envisagé la possibilité de classer le terrain occupé par l'établissement litigieux dans le domaine privé de l'Etat, pour être vendu aux intéressés ; que toutefois, un tel courrier ne saurait être considéré comme une promesse de vente émanant de l'Etat, dès lors qu'il constitue un simple avis ;

Considérant que si la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE LES BLAQUES soutient que seul son terrain reste sur le domaine public alors que les terrains avoisinants ont été cédés durant l'année 1943 à des personnes privées, cette circonstance ne constitue pas en soi une méconnaissance du principe d'égalité de traitement, dès lors qu'elle ne peut prétendre à aucun droit à l'acquisition d'une parcelle située sur le domaine public maritime ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE LES BLAQUES n'est pas fondée à demander l'annulation des décisions du préfet de l'Hérault des 13 juillet et 28 septembre 2004 ;

En ce qui concerne les autres conclusions :

Considérant que, dans un mémoire enregistré le 15 mars 2005 devant le Tribunal administratif de Montpellier, la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE LES BLAQUES a présenté des conclusions tendant à ce que le tribunal constate l'irrégularité de la procédure de contravention de grande voirie et prononce sa relaxe des poursuites engagées à son encontre à ce titre ; que dans le dernier état de ses conclusions, la société requérante a précisé qu'elle limitait les conclusions de sa requête à la demande d'annulation des décisions du préfet de l'Hérault des 13 juillet et 28 septembre 2004 précitées ; que dans ces conditions, elle doit être regardée comme ayant renoncé aux autres conclusions présentées en première instance ; qu'il convient de donner acte de son désistement de telles conclusions ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE LES BLAQUES doivent dès lors être rejetées ;

D É C I D E :

Article 1er : Il est donné acte du désistement de la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE LES BLAQUES de ses conclusions tendant à ce que le tribunal constate l'irrégularité de la procédure de contravention de grande voirie et prononce sa relaxe des poursuites engagées à son encontre à ce titre.

Article 2 : L'ordonnance n° 0406430 du 16 mai 2007 du président de la 4ème chambre du Tribunal administratif de Montpellier est annulée.

Article 3 : La demande de la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE LES BLAQUES devant le Tribunal administratif de Montpellier est rejetée.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE LES BLAQUES et au ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire .

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

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N° 07MA02117 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07MA02117
Date de la décision : 05/02/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. FERULLA
Rapporteur ?: Mme Anne-Laure CHENAL-PETER
Rapporteur public ?: M. DIEU
Avocat(s) : PONS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2009-02-05;07ma02117 ?
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