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06/01/2009 | FRANCE | N°08MA03038

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, Juge des reconduites, 06 janvier 2009, 08MA03038


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 24 juin 2008 sous le n° 08MA03038, présentée pour M. Ibrahim X, élisant domicile ... par Me Huard, avocat ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0801672 du 27 mai 2008 par lequel le magistrat désigné du Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à annuler l'arrêté en date du 24 mai 2008 du préfet du Puy-de-Dôme décidant sa reconduite à la frontière, ainsi que la décision distincte du même jour fixant la Lybie comme pays de destination de la reco

nduite ;

2°) d'annuler lesdites décisions préfectorales ;

3°) de condamner...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 24 juin 2008 sous le n° 08MA03038, présentée pour M. Ibrahim X, élisant domicile ... par Me Huard, avocat ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0801672 du 27 mai 2008 par lequel le magistrat désigné du Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à annuler l'arrêté en date du 24 mai 2008 du préfet du Puy-de-Dôme décidant sa reconduite à la frontière, ainsi que la décision distincte du même jour fixant la Lybie comme pays de destination de la reconduite ;

2°) d'annuler lesdites décisions préfectorales ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 ;

...................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu l'ordonnance n°45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu la loi n°79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision n°2008/013498 en date du 20 octobre 2008 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Marseille admettant M. Ibrahim X au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale pour la présente procédure ;

Vu la décision en date du 1er septembre 2008 par laquelle le président de la Cour a notamment désigné M. André BONNET, président, pour statuer sur les appels formés devant la Cour contre les jugements rendus selon la procédure prévue à l'article L. 512-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 décembre 2008,

- le rapport de M. Bonnet, président désigné,

- et les conclusions de M. Emmanuelli, commissaire du gouvernement ;

Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être rentré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré ... » ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces versées au dossier que M. X puisse justifier de la régularité de son entrée sur le territoire français ; qu'interpellé par les services de gendarmerie le 24 mai 2008, il a fait l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière le même jour en application des dispositions précitées du 1°et du 2° de l'article L. 511-1 II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que n'établissant pas être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité, ni être entrée régulièrement en France, il entre ainsi dans le champ d'application du 1° de l'article L. 511-1 II précité ;

Considérant, en deuxième lieu, que si l'obligation de motiver les mesures portant reconduite à la frontière d'un étranger, qui résulte de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile , implique que ces décisions comportent l'énoncé des éléments de droit et de fait qui fondent la mise en oeuvre de la procédure d'éloignement, l'autorité administrative n'est pas tenue de préciser en quoi la situation particulière de l'intéressé ne fait pas obstacle à la mise en oeuvre de cette procédure ; que, par suite, et dés lors que l'arrêté susmentionné du 24 mai 2008 du préfet du Puy-de-Dôme contenait les indications de fait et de droit qui en constituaient le fondement, c'est à bon droit que le premier juge a estimé que ledit arrêté était suffisamment motivé ; que le préfet fait, au surplus, notamment mention, dans ledit arrêté, du 1° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, du caractère irrégulier tant de l'entrée de l'intéressé sur le territoire national que de son maintien en France ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ... » ;

Considérant que M. X, arrivé en France en mars 2007, soutient en particulier qu'il est, en tant qu'étudiant, parfaitement intégré, qu'il a en France un compagnon, qu'il n'a plus de liens avec les membres de sa famille vivant dans son pays d'origine et qu'il ne pourra vivre une vie sentimentale et sexuelle normale dans son pays d'origine dés lors que l'homosexualité y est réprimée ; qu'eu égard toutefois aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière et à la circonstance que l'intéressé, qui ne justifie pas être dénué de tout lien avec son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'age de 26 ans et où sa famille réside, ne démontre pas qu'il aurait établi en France le centre de ses intérêts personnels et familiaux faute notamment d'une quelconque ancienneté de communauté de vie avec son compagnon, avec lequel d'ailleurs il ne partage pas le même toit, la décision ordonnant sa reconduite à la frontière ne peut être regardée comme portant une atteinte excessive à son droit à mener une vie privée et familiale ; que ladite décision n'a donc pas été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'enfin, nonobstant les nombreuses attestations de proches du requérant alléguant sa parfaite intégration sociale, le préfet eu égard aux autres éléments du dossier, sus indiqués, n'a pas davantage commis d'erreur manifeste d'appréciation en prenant ladite décision de reconduite ;

Considérant, en quatrième et dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « I La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention «étudiant». En cas de nécessité liée au déroulement des études, et sous réserve d'une entrée régulière en France, l'autorité administrative peut accorder cette carte de séjour sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée et sous réserve d'une entrée régulière en France. (...) II Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte mentionnée au I est accordée de plein droit : (...) 2° A l'étranger ayant satisfait aux épreuves du concours d'entrée dans un établissement d'enseignement supérieur ayant signé une convention avec l'Etat ; (...) » ;

Considérant que si M. X soutient qu'il est inscrit à l'Université d'histoire de l'art et qu'il a réussi le concours d'entrée de l'école des beaux arts, il ne justifie ni d'une entrée régulière, ni de la possession d'un visa d'une durée supérieure à trois mois ; que, dans ces circonstances, M. X n'est pas fondé à soutenir qu'il relève de la catégorie d'étranger susceptible de bénéficier de plein droit d'une carte de séjour étudiant ou que l'arrêté attaqué a été pris en méconnaissance de l'article L. 313-7 II 2° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur la décision distincte fixant le pays de destination :

Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. »;

Considérant que si M. X fait état des risques de sanctions qu'il encourrait en cas de retour en Libye en raison tant de sa désertion que de son homosexualité, en mettant en avant, notamment, les dispositions de l'article 407 du code pénal libyen et un comportement hostile et violent de ses frères, il ne produit à l'appui de ses allégations aucune pièce probante de nature à établir la réalité des risques auxquels il serait personnellement exposé ; qu'en outre, il ressort des pièces du dossier que le requérant n'a jamais formé de demande d'asile territorial et qu'au cours de la période de deux ans durant laquelle il est retourné séjourner en Libye, en 2005, il n'y a subi aucun traitement dégradant alors que sa situation personnelle était déjà celle alléguée dans la présente instance ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que la décision fixant la Libye comme pays de destination, méconnaîtrait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut en tout état de cause qu'être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le magistrat désigné du Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à annuler l'arrêté en date du 24 mai 2008 du préfet du Puy-de-Dôme décidant sa reconduite à la frontière, ainsi que la décision distincte du même jour fixant la Libye comme pays de destination de la reconduite ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991:

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Ibrahim X et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

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N° 08MA03038


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : Juge des reconduites
Numéro d'arrêt : 08MA03038
Date de la décision : 06/01/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. André BONNET
Rapporteur public ?: M. EMMANUELLI
Avocat(s) : HUARD

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2009-01-06;08ma03038 ?
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