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11/12/2008 | FRANCE | N°07MA01098

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 11 décembre 2008, 07MA01098


Vu la requête, enregistrée le 30 mars 2007, présentée pour la COMMUNE D'ALAIGNE, représentée par son maire, par la SCP Scheuer - Vernhet et associés ; la COMMUNE D'ALAIGNE demande à la cour :

1°/ d'annuler le jugement n° 0400612 du 21 décembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a, sur demande de la SCI S.N.G., annulé la décision du 28 août 2003 par laquelle la COMMUNE D'ALAIGNE a exercé son droit de préemption sur les parcelles référencées au cadastre à la section B sous les n° 257, 233, 234 et 235 ;

2°/ de rejeter la demande présenté

e par la SCI S.N.G. devant le tribunal administratif de Montpellier ;

3°/ de mett...

Vu la requête, enregistrée le 30 mars 2007, présentée pour la COMMUNE D'ALAIGNE, représentée par son maire, par la SCP Scheuer - Vernhet et associés ; la COMMUNE D'ALAIGNE demande à la cour :

1°/ d'annuler le jugement n° 0400612 du 21 décembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a, sur demande de la SCI S.N.G., annulé la décision du 28 août 2003 par laquelle la COMMUNE D'ALAIGNE a exercé son droit de préemption sur les parcelles référencées au cadastre à la section B sous les n° 257, 233, 234 et 235 ;

2°/ de rejeter la demande présentée par la SCI S.N.G. devant le tribunal administratif de Montpellier ;

3°/ de mettre à la charge de la SCI S.N.G. une somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

...........................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 novembre 2008 :

- le rapport de Mme Ségura, rapporteur ;

- les observations de Me Martinez de la SCP Scheuer - Vernhet et associés pour la COMMUNE D'ALAIGNE ;

- les observation de Me d'Albenas de la SCP Ferran Vinsonneau-Palies Noy Gauer pour la SCI S.N.G., M. X, M. Y et Mme Z ;

- et les conclusions de M. Bachoffer, commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes susvisées concernent le même jugement ; que, dès lors, il y a lieu de les joindre pour qu'il soit statué par un seul arrêt ;

Sur les conclusions à fin d'annulation du jugement susvisé

Considérant que, par le jugement attaqué susvisé, le tribunal administratif de Montpellier a, sur demande de la SCI S.N.G., annulé la décision du 28 août 2003 par laquelle la COMMUNE D'ALAIGNE a exercé son droit de préemption sur les parcelles référencées au cadastre à la section B sous les n° 257, 233, 234 et 235 ; que la COMMUNE D'ALAIGNE relève appel de ce jugement ;

En ce qui concerne la recevabilité de la demande

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, d'une part, la SCI S.N.G. était en cours de constitution à la date de la promesse de vente conclue le 28 mai 2003 et que, d'autre part, son inscription au registre des commerces et des sociétés a été réalisée le 31 mai 2005 ; que, dans ces conditions et nonobstant la forme de société prévue dans les statuts initiaux, la SCI S.N.G. ne peut être regardée, contrairement à ce que soutient la COMMUNE D'ALAIGNE, comme étant une société civile en participation ; qu'il suit de là que c'est à bon droit que les premiers juges ont écarté la fin de non-recevoir opposée par la COMMUNE D'ALAIGNE et tirée du défaut de capacité et d'intérêt à agir de ladite société ;

En ce qui concerne la légalité de la décision susvisée du 28 août 2003

Considérant qu'aux termes de l'article L.210-1 du code de l'urbanisme : « Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L.300-1, à l'exception de ceux visant à sauvegarder ou à mettre en valeur les espaces naturels, ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d'aménagement./ Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé (...) » ; qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de la délibération du 8 juillet 2000 du conseil municipal d'Alaigne demandant la création d'une zone d'aménagement différé sur une partie du territoire de la commune et visée par l'arrêté du préfet de l'Aude en date du 10 octobre 2000 portant création de ladite zone, que celle-ci a été créée pour constituer des réserves foncières en vue de permettre à la commune, notamment, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme et de réaliser des équipements collectifs ; que la décision litigieuse en date du 28 août 2003 rappelle ces objectifs et précise que l'A.S.M. de Limoux, dès 2004, doit concrétiser le projet de construction d'un centre médico-social avec 27 emplois à temps plein et que la commune, ayant besoin d'une réserve foncière supplémentaire pour faire face à ce développement, souhaite, à ce titre, réaliser un lotissement communal sur la parcelle B 257 et des équipements de loisirs sur les autres parcelles concernées ; que la réalité du projet que la COMMUNE D'ALAIGNE entendait mener et qui a motivé l'exercice du droit de préemption doit être regardée comme étant ainsi établie ; que c'est donc à tort que les premiers juges ont subordonné la légalité de la décision attaquée à la condition que la commune justifie d'un projet précis à la date de cette décision ;

Considérant, toutefois, qu'aux termes de l'article R.213-21 du code de l'urbanisme : « (...) Dans les zones d'aménagement différé (...) le service des domaines doit être consulté, quel que soit le prix figurant dans la déclaration d'intention d'aliéner. L'avis du service des domaines doit être formulé dans le délai d'un mois à compter de la date de réception de la demande d'avis. Passé ce délai, il peut être procédé librement à l'acquisition. » ; qu'il ressort des pièces du dossier que, si le service des Domaines a été consulté par la COMMUNE D'ALAIGNE par lettre du 25 octobre 2002, cette consultation est intervenue au titre d'une précédente déclaration d'intention d'aliéner émanant de Mme Pellissier et concernant un ensemble de quinze immeubles bâtis et non bâtis comprenant les parcelles B 233, B 234, B 235 et B 257 concernées par le présent litige et que l'avis dudit service a porté sur la valeur vénale globale de cet ensemble immobilier, laquelle a été fixée à la somme globale de 75650 euros ; qu'en n'ayant pas consulté à nouveau le service des Domaines en vue de recueillir son estimation de la valeur vénale des seules parcelles susmentionnées qui avaient fait l'objet, de la part de Me Lamarque agissant au nom de la Safer Languedoc-Roussillon, d'une nouvelle déclaration d'intention d'aliéner en date du 28 juillet 2003 et alors que cette valeur vénale ne pouvait se déduire de l'avis du 3 mars 2003, le maire de la COMMUNE D'ALAIGNE a méconnu l'obligation prévue par l'article R.213-21 précité ; que, par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que la méconnaissance de cette formalité substantielle avait entaché d'illégalité la décision litigieuse susvisée ; que ce motif est de nature, à lui seul, à entraîner l'annulation de la décision de préemption en date du 28 août 2003 ; que, dès lors, la COMMUNE D'ALAIGNE n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a, sur demande de la SCI S.N.G., annulé la décision du 28 août 2003 susvisée ;

Sur les conclusions d'exécution du jugement susvisé

Considérant qu'aux termes de l'article L.911-4 du code de justice administrative : « En cas d'inexécution d'un jugement (...), la partie intéressée peut demander au tribunal administratif (...) d'en assurer l'exécution. Toutefois, en cas d'inexécution d'un jugement frappé d'appel, la demande d'exécution est adressée à la juridiction d'appel. Si le jugement (...) n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte (...) » ;

Considérant que l'annulation par le juge de l'excès de pouvoir de l'acte par lequel le titulaire du droit de préemption décide d'exercer ce droit emporte pour conséquence que ce titulaire doit être regardé comme n'ayant jamais décidé de préempter ; qu'ainsi cette annulation implique nécessairement, sauf atteinte excessive à l'intérêt général appréciée au regard de l'ensemble des intérêts en présence, que le titulaire du droit de préemption, s'il n'a pas entre temps cédé le bien illégalement préempté, prenne toute mesure afin de mettre fin aux effets de la décision annulée ; qu'en application de ce principe, le tribunal administratif de Montpellier a, par le jugement susvisé n° 0400612 du 21 décembre 2006, enjoint à la COMMUNE D'ALAIGNE, sans assortir cette injonction d'une astreinte, d'une part, de s'abstenir de revendre à un tiers les parcelles préemptées en cause et, d'autre part, de proposer à la SCI S.N.G. d'acquérir ces biens au prix fixé dans la déclaration d'intention d'aliéner dans un délai de deux mois à compter de la notification dudit jugement ; qu'il a en outre mis à la charge de la commune la somme de 1 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ; que la SCI S.N.G. demande à la cour de prescrire les mesures d'exécution dudit jugement ;

Considérant qu'il est constant que ledit jugement n'a reçu aucune mesure d'exécution alors que la cour de céans, par le présent arrêt, rejette la requête de la COMMUNE D'ALAIGNE tendant à son annulation ; qu'il y a donc lieu, dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que la COMMUNE D'ALAIGNE n'a pas revendu à un tiers les parcelles susmentionnées, d'enjoindre à celle-ci de proposer à la SCI S.N.G. d'acquérir ces biens au prix fixé dans la déclaration d'intention d'aliéner dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il y a lieu, en outre, d'assortir ladite injonction d'une astreinte de 500 euros par jour de retard ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes du II de l'article 1er de la loi du 16 juillet 1980, demeurant applicable en vertu de l'article L.911-9 du même code : « Lorsqu'une décision juridictionnelle passée en force de chose jugée a condamné une collectivité locale ou un établissement public au paiement d'une somme d'argent dont le montant est fixé par la décision elle-même, cette somme doit être mandatée ou ordonnancée dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision de justice. A défaut de mandatement ou d'ordonnancement dans ce délai, le représentant de l'Etat dans le département ou l'autorité de tutelle procède au mandatement d'office. » ; que, par l'effet de l'arrêt susmentionné rendu ce jour par la cour de céans rejetant l'appel formé par la COMMUNE D'ALAIGNE contre le jugement susvisé, la condamnation de la commune à verser la somme de 1000 euros à la SCI S.N.G. au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative est passée en force de chose jugée ; que dès lors que le II de l'article 1er de la loi du 16 juillet 1980 susmentionnée permet à la SCI S.N.G. d'obtenir le mandatement d'office de ladite somme, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions aux fins d'exécution présentées par ladite société et concernant l'article 4 du dispositif de la décision des premiers juges ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L.761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. » ;

Considérant que les dispositions précitées font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions susmentionnées présentées par la COMMUNE D'ALAIGNE ; qu'en revanche, il y a lieu de mettre à sa charge une somme de 3 000 euros à verser à la SCI S.N.G. sur le fondement des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête n° 0701098 de la COMMUNE D'ALAIGNE est rejetée.

Article 2 : Il est enjoint à la COMMUNE D'ALAIGNE de proposer à la SCI S.N.G. d'acquérir les biens préemptés au prix fixé dans la déclaration d'intention d'aliéner dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 500 (cinq cents) euros par jour de retard.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête n° 0803962 est rejeté.

Article 4 : La COMMUNE D'ALAIGNE versera à la SCI S.N.G. une somme de 3 000 (trois mille) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE D'ALAIGNE, à M. Philippe Y, à la SCI S.N.G., à M. Louis X, à Mme Roselyne Z, à la société d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) et au ministre d'Etat, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.

N° 07MA01098, 08MA03962 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07MA01098
Date de la décision : 11/12/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. COUSIN
Rapporteur ?: Mme Françoise SEGURA-JEAN
Rapporteur public ?: M. BACHOFFER
Avocat(s) : SCP SCHEUER - VERNHET et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2008-12-11;07ma01098 ?
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