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04/12/2008 | FRANCE | N°06MA01307

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 04 décembre 2008, 06MA01307


Vu la requête, enregistrée le 10 mai 2006, présentée pour la SARL AZUR TRADING, dont le siège est 19, allée Gabriel Faure à Martigues (13500), par Me Romero ; la SARL AZUR TRADING demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°0202174 du 6 mars 2006 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande, tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et à la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1996 et 1997 dans les rôles de la commune de

Marseille et des pénalités dont elles ont été assorties ;

2°) de prononcer l...

Vu la requête, enregistrée le 10 mai 2006, présentée pour la SARL AZUR TRADING, dont le siège est 19, allée Gabriel Faure à Martigues (13500), par Me Romero ; la SARL AZUR TRADING demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°0202174 du 6 mars 2006 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande, tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et à la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1996 et 1997 dans les rôles de la commune de Marseille et des pénalités dont elles ont été assorties ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.............................................................................................................

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 22 février 2007, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, qui conclut au rejet de la requête ;

.............................................................................................................

Vu le mémoire, enregistré le 5 mai 2008, présenté pour la SARL AZUR TRADING, qui maintient ses conclusions précédentes, par les mêmes moyens ;

.............................................................................................................

Vu la lettre en date du 6 octobre 2008, informant les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la décision à intervenir est susceptible d'être fondée sur un moyen soulevé d'office ;

Vu le mémoire, enregistré le 13 octobre 2008, présenté pour le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, qui maintient ses conclusions précédente, par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 novembre 2008

- le rapport de Mme Menasseyre, premier conseiller,

- les observations de Me Rostane, substituant Me Romero pour la SARL AZUR TRADING ;

- et les conclusions de M. Dubois, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la SARL AZUR TRADING, constituée le 1er septembre 1995 et qui a pour activité l'achat et la vente de composants informatiques s'est placée dans ses déclarations sous l'empire du régime de faveur institué par les dispositions de l'article 208 quinquies du code général des impôts ; qu'à l'issue d'une vérification de comptabilité, qui a porté sur les exercices clos en 1996 et 1997, le bénéfice de ce régime a été remis en cause par le service, qui a également refusé à la société le bénéfice du régime de faveur institué par les dispositions de l'article 44 sexies du même code ; que la SARL AZUR TRADING demande à la Cour d'annuler le jugement, en date du 6 mars 2006 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande, tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et à la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle estime avoir été assujettie au titre des exercices clos en 1996 et 1997 ;

Sur les conclusions relatives à l'exercice clos en 1997 :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la société requérante n'a été assujettie à aucune imposition supplémentaire à l'impôt sur les sociétés et à la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés au titre dudit exercice en raison du caractère déficitaire de ses résultats ; que, dès lors, les conclusions de la requête ne sont, sur ce point, pas recevables ;

Sur le surplus des conclusions :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales : « Avant l'engagement d'une des vérifications prévues aux articles L. 12 et L.13, l'administration des impôts remet au contribuable la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ; les dispositions contenues dans la charte sont opposables à l'administration » ; que le 5 du chapitre III de la charte remise au contribuable en l'espèce prévoit que : « Si le vérificateur a maintenu totalement ou partiellement les redressements envisagés, des éclaircissements supplémentaires peuvent vous être fournis si nécessaire par l'inspecteur principal. Si après ces contacts des divergences importantes subsistent, vous pouvez faire appel à l'interlocuteur départemental ou régional qui est un fonctionnaire de rang élevé spécialement désigné par le directeur dont dépend le vérificateur » ; que les demandes tendant au bénéfice des recours administratifs prévus par la charte ne peuvent être formulées par le contribuable qu'après qu'il a eu connaissance de la réponse faite par l'administration fiscale à ses observations ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le courrier du 17 mars 2000 adressé au chef de la 4ème brigade régionale de vérification, inspecteur principal, avait pour objet de récapituler les désaccords, et de « clarifier la situation de la société AZUR TRADING » en l'état d'« incompréhension » qui prévalait entre le vérificateur et le gérant », que la SARL AZUR TRADING a demandé par le même courrier de réexaminer sa situation à la lumière des informations qu'elle communiquait à l'inspecteur principal par le même pli et l'informait de ce que son conseil se tenait à sa disposition pour le rencontrer ; qu'en raison de ses termes, le courrier du 17 mars 2000 ouvrait à la société requérante le droit de prétendre au bénéfice de la garantie que constitue l'intervention de l'inspecteur principal, garantie dont elle a d'ailleurs bénéficié lors d'un entretien qui s'est tenu le 11 mai 2000 ;

Considérant que la SARL AZUR TRADING a conclu son courrier du 17 mars 2000, en indiquant que « S'il vous apparaissait impossible de répondre favorablement à cette demande, la société AZUR TRADING vous demanderait de lui ménager une entrevue avec Monsieur le Directeur divisionnaire pris en sa qualité d'interlocuteur ou de saisir de ce différend la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires territorialement compétente » ; que par lettre du 19 juin 2000, l'inspecteur principal a fait savoir à la société que, s'il abandonnait un rappel de taxe sur la valeur ajoutée relative à un véhicule de société, des redressements concernant des factures se rapportant à du matériel informatique, des redressements se rapportant à des dépenses téléphoniques, et des redressements liés à une écriture en compte courant de 719 473 francs, il maintenait le surplus des redressements, au nombre desquels figurait, pour 1 122 697 francs la remise en cause de l'exonération prévue à l'article 208 quinquies du code général des impôts, et l'invitait, puisqu'elle avait évoqué la possibilité de saisir l'interlocuteur départemental ou la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, à préciser son intention à ce sujet ; qu'en l'absence de réponse à ce courrier, il s'est abstenu de saisir l'un et l'autre ; qu'eu égard à la rédaction ambiguë du courrier du 17 mars 2000 quant à la garantie dont la société entendait faire usage, le service a pu à bon droit lui demander de préciser ses demandes ; qu'en s'abstenant de répondre au courrier du 19 juin et de lever ainsi l'ambiguïté qui pesait sur ses intentions, la société requérante s'est privée de la possibilité de se prévaloir de l'une ou l'autre des garanties auxquelles elle était en droit de prétendre ;

En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article 44 sexies du code général des impôts, dans sa rédaction applicable en l'espèce : « I. Les entreprises créées à compter du 1er octobre 1988 (...) soumises de plein droit ou sur option à un régime réel d'imposition de leurs résultats et qui exercent une activité industrielle, commerciale ou artisanale au sens de l'article 34 sont exonérées d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices réalisés jusqu'au terme du vingt-troisième mois suivant celui de leur création (...) Ces dispositions ne s'appliquent pas aux entreprises qui exercent une activité bancaire, financière, d'assurances, de gestion ou de location d'immeubles (...) » ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux préparatoires auxquels elles ont donné lieu, que le législateur n'a entendu exclure du champ de l'exonération les entreprises nouvelles dont les bénéfices proviennent en partie d'activités bancaires, financières, d'assurances, de gestion ou de location d'immeubles ou de toute activité d'une autre nature qu'industrielle, commerciale ou artisanale, que dans la mesure où ces activités ne constituent pas le complément indissociable d'une activité exonérée ; qu'en particulier, ne demeurent exonérés les bénéfices d'une entreprise nouvelle qui perçoit des produits financiers tout en exerçant, à titre principal, une ou plusieurs activités entrant dans le champ de l'exonération, qu'à la condition que ces produits résultent exclusivement de la gestion de la trésorerie courante nécessaire à l'exercice de cette activité ; que toutefois, lorsque les produits financiers proviennent d'une activité dont l'exercice est indissociable de celui de l'entreprise et est poursuivie à des fins autres que financières, notamment pour assurer son développement, ils ne sauraient par leur seule existence ou à raison de leur comparaison avec les besoins de financement de l'entreprise, qui n'ont pas motivé leur recherche, priver celle-ci du bénéfice des dispositions de l'article 44 sexies du code général des impôts ;

Considérant, en premier lieu, que si l'article 49 J de l'annexe III au code général des impôts, issu de l'article 2 du décret 89-170 du 14 mars 1989 pris pour l'application de l'article 14 A de la loi 88-1149 du 23 décembre 1988, codifié sous l'article 44 sexies, dispose que « les entreprises nouvelles qui bénéficient de l'exonération d'impôt... doivent joindre à la déclaration de leurs résultats de chaque exercice un état de leur situation et, s'il s'agit de sociétés, de celles de leurs associés, au regard des conditions mentionnées à cet article », le respect de cette obligation déclarative ne saurait, aux termes mêmes de l'article 49 J, être regardé, contrairement à ce que soutient l'administration, comme un préalable conditionnant le bénéfice de la mesure ;

Considérant, en deuxième lieu que la double circonstance que la SARL AZUR TRADING s'est initialement placée, dans ses déclarations, sous l'empire du régime de faveur institué par les dispositions de l'article 208 quinquies du code général des impôts et qu'elle a soumis ses produits financiers à l'impôt dans les conditions du droit commun, sans les faire apparaître dans le bénéfice qu'elle estimait exonéré ne saurait être regardée comme une décision de gestion qui lui serait opposable, dès lors qu'elle n'a, ce faisant, effectué aucun choix comptable ;

Considérant en troisième lieu qu'il résulte de l'instruction que la société requérante a perçu, au cours de l'exercice clos en 1996, des produits financiers qui se sont élevés à la somme de 440 000 francs ; que si elle fait valoir que seule la décision de son gérant de renoncer à percevoir des intérêts sur les avances en compte courant qu'il a lui consenties est à l'origine de l'absence de frais financiers, cette décision de gestion lui est opposable ; qu'elle fait toutefois également valoir que les produits financiers en cause n'excédaient pas la gestion de trésorerie nécessaire à l'entreprise et qu'ils étaient proportionnés au fonds de roulement nécessaire à l'exploitation courante au cours de l'exercice, son activité de négoce de composants électroniques nécessitant une trésorerie importante ; qu'elle souligne également que le montant de ses achats de composants électroniques au cours de l'exercice s'est élevé à plus de 16 millions de francs ; que ces éléments ne sont pas valablement contredits par l'administration qui se borne à faire valoir que la société requérante a enregistré des résultats financiers non négligeables ; que dans ces conditions, les produits financiers perçus par la SARL AZUR TRADING doivent être regardés comme procédant de la simple gestion de ses besoins de trésorerie, et ne sauraient être regardés comme révélateurs de la nature financière de son activité ; qu'il en résulte qu'elle est fondée à soutenir que c'est à tort que le service et les premiers juges ont estimé que la perception de tels produits l'excluaient du régime de faveur institué par les dispositions susmentionnées ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL AZUR TRADING est seulement fondée à demander la réduction des compléments d'impôt sur les sociétés et de contribution à l'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 1996, à raison du refus, par l'administration de lui reconnaître le bénéfice du régime de faveur institué par les dispositions de l'article 44 sexies du code général des impôts ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les bases de l'impôt sur les sociétés et de la contribution à l'impôt sur les sociétés assignée à la SARL AZUR TRADING au titre de l'exercice clos en 1996 sont réduites d'une somme de 171 154,05 euros (1 122 697 francs).

Article 2 : La SARL AZUR TRADING est déchargée des droits et majorations correspondant à la réduction de base d'imposition définie à l'article 1er.

Article 3 : Le jugement du Tribunal administratif de Marseille en date du 6 mars 2006 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à la SARL AZUR TRADING une somme de 1 500 euros au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de la SARL AZUR TRADING est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL AZUR TRADING et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

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N°06MA01307


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 06MA01307
Date de la décision : 04/12/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DARRIEUTORT
Rapporteur ?: Mme Anne MENASSEYRE
Rapporteur public ?: M. DUBOIS
Avocat(s) : ROMERO

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2008-12-04;06ma01307 ?
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