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27/11/2008 | FRANCE | N°06MA02255

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 27 novembre 2008, 06MA02255


Vu la requête, enregistrée le 31 juillet 2006, présentée par Me Fernand Bouyssou pour la SA SOCODAG, représentée par son président, dont le siège se trouve rue Marceau à Cogolin (83310), représentée par son président M. Faraco ; la SA SOCODAG demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0401128 rendu le 18 mai 2006 par le Tribunal administratif de Nice qui a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 27 février 2004, par laquelle le préfet du Var a confirmé l'interruption des travaux en vue de réaliser un hypermarché ordonnée par arrêté du maire de Cog

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Vu la requête, enregistrée le 31 juillet 2006, présentée par Me Fernand Bouyssou pour la SA SOCODAG, représentée par son président, dont le siège se trouve rue Marceau à Cogolin (83310), représentée par son président M. Faraco ; la SA SOCODAG demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0401128 rendu le 18 mai 2006 par le Tribunal administratif de Nice qui a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 27 février 2004, par laquelle le préfet du Var a confirmé l'interruption des travaux en vue de réaliser un hypermarché ordonnée par arrêté du maire de Cogolin et a assorti cette interruption de travaux d'injonctions afin d'assurer la sécurité du chantier ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision précitée ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 novembre 2008 :

- le rapport de Mme Busidan, rapporteur ;

- les observations de M. Lesage, de la direction départementale de l'équipement du Var, pour le ministre d'Etat, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire ;

- et les conclusions de M. Bachoffer, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par jugement n° 0401128 du 18 mai 2006, le Tribunal administratif de Nice a rejeté la demande présentée par la SA SOCODAG tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 février 2004, par lequel le préfet du Var a confirmé l'interruption des travaux en vue de réaliser un hypermarché Leclerc ordonnée par arrêté du maire de Cogolin et a assorti cette interruption de travaux d'injonctions de démontage des constructions réalisées et de gardiennage en vue d'assurer la sécurité du chantier ; que la SA SOCODAG relève appel de ce jugement ;

Sur la légalité de l'arrêté en litige en tant qu'il confirme l'interruption des travaux :

Considérant qu'aux termes du dixième alinéa de l'article L.480-2, alors applicable, du code de l'urbanisme : « Dans le cas de constructions sans permis de construire ou de constructions poursuivies malgré une décision de la juridiction administrative ordonnant qu'il soit sursis à l'exécution du permis de construire, le maire prescrira par arrêté l'interruption des travaux ainsi que, le cas échéant, l'exécution, aux frais du constructeur, des mesures nécessaires à la sécurité des personnes ou des biens ; copie de l'arrêté du maire est transmise sans délai au ministère public. Dans tous les cas où il n'y serait pas pourvu par le maire et après une mise en demeure adressée à celui-ci et restée sans résultat à l'expiration d'un délai de vingt-quatre heures, le représentant de l'Etat dans le département prescrira ces mesures et l'interruption des travaux par un arrêté dont copie sera transmise sans délai au ministère public. » ;

Considérant que, pour contester l'arrêté en litige en tant qu'il confirme l'interruption de travaux précédemment ordonnée par le maire de Cogolin, la SA SOCODAG soutient que les travaux poursuivis après réception par elle, le 26 janvier 2004, de la notification de l'ordonnance de référé suspendant le permis de construire délivré le 7 juillet 2003 par le même maire, étaient uniquement des travaux nécessaires à la mise en sécurité du chantier, dont la liste a été dressée par son maître d'oeuvre dans une lettre datée du 3 février 2004 adressée par ce dernier au maire de Cogolin ; que, cependant, alors qu'elle rappelle que ledit maître d'oeuvre avait obtenu, dès le 25 février 2004, du Tribunal de grande instance de Draguignan la nomination en référé d'un expert judiciaire chargé de « définir la nature et le coût des travaux conservatoires réalisés ou à réaliser pour sécuriser l'ouvrage », la SA SOCODAG n'a jamais indiqué, ni en première instance ni en appel, les conclusions de cette expertise judiciaire ; que, dans ces conditions, par la seule production de la lettre sus-évoquée de son maître d'oeuvre, laquelle dresse une liste à l'évidence excessive de travaux présentés comme indispensables à la sécurité du chantier, elle n'établit pas la nécessité, au regard de l'objectif avancé, de tous les travaux dont la poursuite a été constatée par les divers procès-verbaux dressés par les agents assermentés de la direction départementale de l'équipement entre le 2 et le 25 février 2004 ; qu'il ne ressort d'aucune disposition légale ou réglementaire que l'arrêté en cause eût dû être notifié au maître d'oeuvre de l'ouvrage ; que, par suite, elle n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté, tant sa demande d'annulation de l'arrêté préfectoral du 27 février 2004 en tant que ce dernier a renouvelé l'interruption des travaux ordonnée par le maire de Cogolin, que ses conclusions subsidiaires tendant à la nomination d'un expert en vue de déterminer les conditions de mise en sécurité du chantier ;

Sur la légalité de l'arrêté en litige en tant qu'il ordonne des mesures nécessaires à la sécurité des personnes et des biens :

Considérant qu'aux termes de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 : « Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix. L'autorité administrative n'est pas tenue de satisfaire les demandes d'audition abusives, notamment par leur nombre, leur caractère répétitif ou systématique.//Les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables : 1° En cas d'urgence ou de circonstances exceptionnelles ; 2° Lorsque leur mise en oeuvre serait de nature à compromettre l'ordre public ou la conduite des relations internationales ; 3° Aux décisions pour lesquelles des dispositions législatives ont instauré une procédure contradictoire particulière.// Les modalités d'application du présent article sont fixées en tant que de besoin par décret en Conseil d'Etat. » ;

Considérant, en premier lieu, que les mesures prises en application du dixième alinéa précité de l'article L. 480-2 du code de l'urbanisme, que l'administration peut être amenée à prescrire pour assurer la sécurité des personnes et des biens sur un chantier dont elle interrompt les travaux, sont des mesures distinctes et détachables de l'ordre même d'interruption des travaux ; que ces mesures, pour lesquelles l'article L. 480-2 précité ne prévoit aucune procédure contradictoire particulière, constituent des mesures de police administrative qui doivent être motivées en application de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ; que l'arrêté en litige, en tant qu'il édicte les mesures en cause, entre donc dans le champ d'application de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, qui fait notamment obligation à l'autorité administrative, avant l'intervention d'une telle mesure, de mettre à même la personne intéressée de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales ;

Considérant, en second lieu, que s'il ressort des pièces du dossier que la SA SOCODAG a attiré l'attention de l'administration sur la nécessité de poursuivre des travaux sur le chantier interrompu pour assurer la sécurité des personnes et des biens, les mesures de police dont l'administration a assorti le prononcé de l'interruption de travaux ne peuvent être regardées comme résultant d'une demande de la SA SOCODAG au sens de l'article 24 précité de la loi du 12 avril 2000 ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, et que d'ailleurs l'administration ne soutient ni même n'allègue, que la procédure contradictoire aurait été respectée et que les injonctions de démontage de constructions réalisées et de gardiennage du chantier n'auraient été prononcées qu'après que l'appelante aurait été informée au préalable par le préfet que de telles décisions étaient susceptibles d'intervenir ; que, par ailleurs, l'administration n'invoque aucune urgence ou circonstance qui auraient pu justifier que la procédure contradictoire ne soit pas appliquée ; que, dans ces conditions, la SA SOCODAG est fondée à soutenir que l'arrêté préfectoral, en tant qu'il lui a enjoint diverses mesures relatives à la sécurité des personnes et des biens, a été pris en méconnaissance de la procédure contradictoire prévue par l'article 24 précité de la loi du 12 avril 2000 ; que, par suite, elle est fondée à en obtenir l'annulation relativement aux injonctions qui y sont prescrites ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SA SOCODAG est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en cause en tant que, par l'article 2 de cet acte, l'administration lui a enjoint diverses mesures tendant à la sécurité des personnes et des biens ;

Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de condamner l'Etat à payer à la SA SOCODAG une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement rendu le 18 mai 2006 par le Tribunal administratif de Nice est annulé en tant qu'il a rejeté la demande d'annulation de l'article 2 de l'arrêté pris par le préfet du Var le 27 février 2004.

Article 2 : L'article 2 de l'arrêté pris par le préfet du Var le 27 février 2004 est annulé.

Article 3: L'Etat (ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire) versera à la SA SOCODAG la somme de 1 500 (mille cinq cents) euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SA SOCODAG, à la commune de Cogolin et au ministre d'Etat, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.

Copie en sera adressée au préfet du Var.

N° 06MA02255

2

RP


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 06MA02255
Date de la décision : 27/11/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. COUSIN
Rapporteur ?: Mme Hélène BUSIDAN
Rapporteur public ?: M. BACHOFFER
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS BOUYSSOU et ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2008-11-27;06ma02255 ?
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