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23/10/2008 | FRANCE | N°08MA00494

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 23 octobre 2008, 08MA00494


Vu la requête, enregistrée le 4 février 2008 sous le n° 08MA00494, présentée pour M. Badri X, élisant domicile ..., par Me Donati, avocat ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 080075 du 24 janvier 2008 par lequel le Tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du 21 janvier 2008, par lesquels le préfet de la Haute Corse a d'une part décidé sa reconduite à la frontière à destination de son pays d'origine, et a ordonné d'autre part son placement en rétention ;

2°) d'annuler lesdites décisio

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3°) d'enjoindre à l'Etat de l'autoriser à revenir sur le territoire français dans u...

Vu la requête, enregistrée le 4 février 2008 sous le n° 08MA00494, présentée pour M. Badri X, élisant domicile ..., par Me Donati, avocat ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 080075 du 24 janvier 2008 par lequel le Tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du 21 janvier 2008, par lesquels le préfet de la Haute Corse a d'une part décidé sa reconduite à la frontière à destination de son pays d'origine, et a ordonné d'autre part son placement en rétention ;

2°) d'annuler lesdites décisions ;

3°) d'enjoindre à l'Etat de l'autoriser à revenir sur le territoire français dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative à Me Donati, par application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, ou subsidiairement, à lui même ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision du 18 février 2008 accordant l'aide juridictionnelle totale à M. X ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 octobre 2008 :

- le rapport de M. d'Hervé, président - rapporteur ;

- et les conclusions de M. Bachoffer, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. X fait appel du jugement du 24 janvier 2008 par lequel le Tribunal administratif de Bastia a d'une part rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du 22 janvier 2008, par lesquels le préfet de la Haute Corse a décidé sa reconduite à la frontière à destination de son pays d'origine, et d'autre part a considéré que la demande d'annulation de la décision du même jour ordonnant son placement en rétention était devenue sans objet ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant , en premier lieu, que la circonstance qu'à la date à laquelle le tribunal administratif a statué sur les conclusions de M. X, ressortissant algérien, tendant à l'annulation de la décision du préfet de la Haute-Corse du 21 janvier 2008 de le placer en rétention administrative, il était retenu au centre de rétention du Canet par application de l'ordonnance en date du 22 janvier 2008 par laquelle le juge des libertés et la détention avait décidé la prolongation de cette mesure n'a pas pour effet de priver d'objet sa demande d'annulation de la décision administrative initiale par laquelle il a été privé de liberté ; que si cette décision avait épuisé ses effets, M. X était cependant recevable à en contester la légalité ; que c'est en conséquence à tort que par le jugement attaqué qui doit être annulé sur ce point, le tribunal administratif a prononcé un non lieu à statuer sur cette partie de ses conclusions ;

Considérant, en second lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 21 janvier 2008 décidant la reconduite à la frontière de M. X lui a été notifié par la gendarmerie de Cervione le même jour ; que M. X, qui a obtenu l'aide juridictionnelle, a été assisté par un avocat qui a déposé une requête d'annulation le 23 janvier 2008 ; qu'il ressort des mentions du jugement, qui ne sont pas contestées, que cet avocat assistait à l'audience et y a présenté des observations orales pour le requérant ; qu'eu égard aux exigences d'une procédure d'urgence, ni la circonstance que ledit avocat a pris connaissance du dossier le jour de l'audience du 24 janvier 2008 ni celle que M. X qui n'était pas lui-même présent à l'audience n'a pu rencontrer personnellement son conseil avant la tenue de cette audience n'entachent le jugement d'irrégularité ; qu'enfin, il ressort des pièces du dossier que si l'heure de l'audience a été avancée pour tenir compte des dispositions prises pour, le cas échéant, mettre à exécution la mesure d'éloignement, cette modification n'a pas, eu égard à ce qui vient d'être dit, porté atteinte au respect des droits de la défense ; que le jugement du tribunal administratif est ainsi intervenu au terme d'une procédure régulière ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y lieu pour la Cour, statuant dans le cadre de l'évocation , de se prononcer sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision plaçant M. X en rétention, et de statuer dans le cadre de l'effet dévolutif pour le surplus de ses conclusions ;

Sur la décision d'éloignement :

Considérant qu'il ressort des visas de la décision attaquée que le préfet a décidé la reconduite à la frontière de M. X sur le seul fondement des dispositions de l'article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui dispose : « II. L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants :...: 2º Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré (...) » ; que le moyen avancé par M. X, qui ne conteste pas que ces dispositions lui sont applicables, mais soutient que l'arrêté qu'il attaque serait illégalement intervenu sur le 3° du dit article manque donc en fait ;

Considérant, en second lieu, que l'intéressé fait valoir, comme il l'avait fait dans les mêmes termes devant le tribunal administratif, que l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges d'écarter ledit moyen ; que M. X n'est en conséquence pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté ses conclusions contre l'arrêté du 21 janvier 2008 décidant sa reconduite à la frontière ;

Sur le placement en rétention :

Considérant qu'aux termes de l'article L.551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Le placement en rétention d'un étranger dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire peut être ordonné lorsque cet étranger : (...) 3º (...) faisant l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière pris en application des articles L.511-1 à L.511-3 et édicté moins d'un an auparavant, ne peut quitter immédiatement le territoire français ; (...) » ; qu'aux termes de l'article L.551-2 du même code : « La décision de placement (...) est écrite et motivée. (...) » ;

Considérant que la décision de placement en rétention est motivée par la circonstance que la personne qui en est l'objet n'est pas en mesure de quitter immédiatement le territoire français ; qu'une telle formulation, qui désigne l'un des six cas énoncés par l'article L.551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précité, satisfait à l'exigence de motivation prévue par l'article L.551-2 du même code ;

Considérant que d'une part M. X ne conteste pas l'absence de possibilité de transport immédiat qui empêchait son départ vers l'Algérie ; que, d'autre part, il ressort des pièces du dossier qu'au moment de son interpellation par les services de police il n'a pu présenter son passeport ni justifier d'un domicile fixe ou d'une source de revenus ; qu'ainsi la décision de placement en rétention administrative contestée n'est pas entachée d'illégalité ;

Considérant enfin que M. X soutient que les conditions dans lesquelles il aurait été retenu dans un local à Bastia, avant d'être transféré au centre de rétention du Canet, ne permettaient pas au préfet de prendre une telle décision ; que toutefois, ces circonstances à les supposer en tout état de cause établies se rattachent aux modalité d'exécution de cette décision et sont par suite sans effet sur la légalité même du placement de l'intéressé en rétention, sous le contrôle notamment par le juge des libertés et de la détention des conditions de l'exécution de cette décision ;

Considérant qu'il résulte de qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par la décision attaquée, le préfet a décidé sa mise en rétention ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt qui rejette les conclusions à fin d'annulation des décisions administratives en litige n'entraîne aucune mesure d'exécution que la Cour puisse utilement prescrire ; que ces conclusions doivent être en conséquence rejetées ;

Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article précité font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante soit condamnée à verser une quelconque somme à M. X ou à son conseil ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 080075 du 24 janvier 2008 du Tribunal administratif de Bastia est annulé en tant qu'il a prononcé un non lieu à statuer sur les conclusions dirigées contre l'arrêté 22 janvier 2008, par lequel le préfet de la Haute Corse a décidé le placement en rétention de M. X.

Article 2 : Les conclusions dirigées contre l'arrêté du 22 janvier 2008 ordonnant le placement en rétention de M. X et le surplus des conclusions de sa requêtes sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. X, au préfet de Haute-Corse et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du co-développement.

N° 08MA00494

2

RP


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08MA00494
Date de la décision : 23/10/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. D'HERVE
Rapporteur ?: M. Jean-Louis D'HERVE
Rapporteur public ?: M. BACHOFFER
Avocat(s) : DONATI

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2008-10-23;08ma00494 ?
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