Vu la requête, enregistrée le 1er mars 2006, présentée pour M. Jean X, Mme Françoise X et Mlle Liza X, demeurant ..., par Me Dumont ;
M. Jean X et autres demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0101522 du 21 décembre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande tendant à la condamnation de l'Etat à leur verser les sommes de 27.821,95 euros au titre des préjudices résultant de l'exécution des travaux de la rocade nord de Béziers, de 208.664,60 euros au titre des préjudices résultant de l'exploitation future de la rocade nord de Béziers et de 141.777,50 euros au titre de la perte de valeur vénale de leur propriété ;
2°) de condamner l'Etat à leur verser les sommes de 20.000 euros au titre du préjudice moral, des troubles de jouissance ainsi que des troubles de toute nature dans leurs conditions d'existence en raison de l'exécution des travaux de réalisation de la rocade nord de Béziers, 150.000 euros au titre du préjudice moral ainsi que des troubles de toute nature dans leurs conditions d'existence en raison de l'existence et du fonctionnement de ladite rocade et 156.000 euros au titre de la perte de la valeur vénale de leur propriété, assorties des intérêts au taux légal à compter du 21 mars 2001, avec capitalisation des intérêts ;
3°) de condamner l'Etat à leur verser la somme de 8.145,01 euros en paiement des frais d'expertise ;
4°) de condamner l'Etat à leur verser la somme de 4.000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi qu'aux entiers dépens ;
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Vu le jugement attaqué ;
Vu la mise en demeure adressée le 16 janvier 2007 au ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, et l'avis de réception de cette mise en demeure ;
Vu le mémoire, enregistré le 13 février 2007, présenté par le ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire qui conclut au rejet de la requête de M. X et autres ;
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Vu le mémoire, enregistré le 21 mai 2007, présenté pour M. X, Mme X et Mlle X qui concluent aux mêmes fins et par les mêmes moyens que leur requête ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'environnement ;
Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;
Vu le décret nl95-22 du 9 janvier 1995, relatif à la limitation du bruit des aménagements et infrastructures des transports terrestres ainsi que l'arrêté du 5 mai 1995 relatif au bruit des infrastructures routières ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 juin 2008 :
- le rapport de Mme Carotenuto,
- les observations de Me Maillot représentant M. Jean X et autres,
- et les conclusions de Mme Buccafurri, commissaire du gouvernement ;
Considérant que M. et Mme X et Mlle X, propriétaires d'une maison d'habitation sise sur le territoire de la commune de Maraussan, relèvent appel du jugement en date du 21 décembre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande tendant à la condamnation de l'Etat à les indemniser du préjudice résultant des nuisances sonores et atmosphériques subies du fait du chantier de construction de la rocade nord de Béziers et de la mise en service de ladite rocade située à proximité de leur propriété ;
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
Considérant que si la demande introductive d'instance au Tribunal administratif a été signée que par deux des trois requérants, cette irrégularité a été régularisée en cours d'instance par la production d'un exemplaire de la requête comportant la signature des trois requérants ;
Sur la responsabilité :
Considérant que les requérants demandent à être indemnisés des nuisances engendrées par la réalisation des travaux de construction de la rocade nord de Béziers ainsi que des graves nuisances, tenant tout particulièrement à l'importance du trafic routier, résultant de la mise en service de ladite rocade nord de Béziers ; que les requérants, tiers par rapport à l'ouvrage public en cause, ne peuvent mettre en jeu la responsabilité sans faute de l'Etat qu'en raison du dommage anormal et spécial qu'ils auraient subi ;
En ce qui concerne les nuisances de chantier :
Considérant que les requérants font valoir que le chantier de construction de ladite rocade se situe à proximité immédiate de leur maison d'habitation et qu'ils ont subi d'importantes nuisances de ce fait, sonores en particulier, mais aussi tenant aux émanations de poussière ; qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert, que les mesures réalisées en cours de chantier au droit de la propriété des requérants n'ont pas fait ressortir une nuisance excédant les sujétions normales d'un chantier, ce même rapport précisant que l'émergence sonore du chantier n'excède pas le seuil réglementaire ; que la circonstance alléguée que la faible activité du chantier constatée lors des opérations d'expertise serait la conséquence de consignes données par les services de l'équipement chargés dudit chantier n'est pas établie ; que par suite, le préjudice subi ne revêt pas un caractère spécial et anormal ;
En ce qui concerne les nuisances résultant de la mise en service de la rocade nord de Béziers :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la maison d'habitation appartenant à M. et Mme X qui a été construite dans un environnement calme et offrant une vue sur le massif du Carroux et sur la cathédrale Saint-Nazaire de Béziers, est dorénavant située à trente-quatre mètres environ de la rocade nord de Béziers, mise en service le 24 mai 2006 ; qu'il résulte du rapport de l'expert déposé le 22 avril 2004, qui avait alors effectué des simulations et qui n'est pas contesté, que la mise en circulation de la rocade constitue une réelle dégradation de l'environnement sonore des requérants ; que le trafic routier moyen journalier estimé est de 31.000 véhicules ; que la pression sonore est ainsi sans commune mesure avec celle que pouvait générer l'environnement sonore antérieur à la mise en service de la rocade ; que la mise en place de dispositifs anti-bruit n'aurait pas pour résultat de faire disparaître totalement les nuisances sonores ; que dès lors, les troubles de jouissance résultant de la proximité d'une voie à grand trafic et la diminution de la valeur subie de ce fait par la propriété, ont causé aux requérants un préjudice, qui eu égard, notamment à l'état antérieur des lieux, a revêtu un caractère spécial et anormal et dont ils sont fondés à demander réparation à l'Etat ;
Sur le montant du préjudice :
Considérant d'une part, que les nuisances sonores, visuelles et de pollution atmosphérique entraînent pour les requérants un préjudice moral et des troubles de jouissance ; qu'il sera fait une juste appréciation de ces préjudices subis en accordant aux intéressés une indemnité de 20.000 euros ;
Considérant d'autre part, que la construction de la rocade nord de Béziers a entraîné une perte de valeur vénale de la propriété appartenant à M. et Mme X ; que si les requérants produisent une expertise établie par un géomètre expert qui évalue leur propriété à 520.000 euros, il ne résulte pas de l'instruction qu'en proposant d'estimer à la somme de 400.000 euros la valeur de cette propriété avant l'implantation de l'ouvrage litigieux, l'expert se soit fondé sur des éléments matériellement erronés ; qu'il résulte de l'ensemble des faits de l'espèce, compte tenu notamment de l'état du marché et d'opérations immobilières de caractéristiques comparables réalisées, que la dépréciation de la propriété doit être évaluée à 20% ; qu'il sera fait une exacte appréciation de la dépréciation de la propriété des requérants en l'évaluant à la somme de 80.000 euros ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X et autres sont fondés à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif a rejeté leur demande tendant à la condamnation de l'Etat à leur verser une indemnité en réparation des préjudices subis du fait de la mise en service de la rocade nord de Béziers ; que l'Etat doit être condamné à leur verser une somme de 100.000 euros ;
Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :
Considérant que les requérants ont droit aux intérêts de la somme de 100.000 euros à compter du 21 mars 2001, jour de l'enregistrement de leur demande devant le Tribunal administratif de Montpellier ; que la capitalisation des intérêts a été demandée le 1er mars 2006 ; qu'à cette date il était dû au moins une année d'intérêts ; que dès lors, en application de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande à compter de cette date puis à chaque échéance annuelle ;
Sur les frais d'expertise :
Considérant que les frais d'expertise taxés et liquidés à la somme de 8.145,01 euros doivent être mis à la charge de l'Etat ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1.500 euros au titre des frais exposés par les requérants et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du 21 décembre 2005 du Tribunal administratif de Montpellier est annulé.
Article 2 : L'Etat est condamné à verser la somme de 100.000 euros à M. et Mme Jean X et à Mlle Liza X, avec intérêts au taux légal à compter du 21 mars 2001, capitalisés à compter du 1er mars 2006 puis à chaque échéance annuelle.
Article 3 : Les frais d'expertise taxés et liquidés à la somme de 8.145,01 euros sont mis à la charge de l'Etat.
Article 4 : L'Etat est condamné à verser une somme de 1.500 euros à M. et Mme Jean X et Mlle Liza X en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. Jean X, à Mme Françoise X, à Mlle Liza X et au ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.
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N° 06MA643