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23/06/2008 | FRANCE | N°06MA01447

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 23 juin 2008, 06MA01447


Vu la requête enregistrée le 29 mai 2006, sous le n° 06MA01447, présentée pour M. Joseph Y demeurant ..., par Me Gilles Y, et le mémoire complémentaire en date du 13 août 2007 ; M. Joseph Y demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0400069 en date du 30 mars 2006 par lequel le Tribunal administratif de Bastia a, notamment, condamné la commune de Bastia à lui verser la somme de 837 euros en réparation des conséquences dommageables de la chute sur la voie publique dont il a été victime le 27 février 2002 ;

2°) de condamner la commune de Bastia et M. X

à lui verser une somme totale de 21 538,08 euros en réparation des conséquences...

Vu la requête enregistrée le 29 mai 2006, sous le n° 06MA01447, présentée pour M. Joseph Y demeurant ..., par Me Gilles Y, et le mémoire complémentaire en date du 13 août 2007 ; M. Joseph Y demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0400069 en date du 30 mars 2006 par lequel le Tribunal administratif de Bastia a, notamment, condamné la commune de Bastia à lui verser la somme de 837 euros en réparation des conséquences dommageables de la chute sur la voie publique dont il a été victime le 27 février 2002 ;

2°) de condamner la commune de Bastia et M. X à lui verser une somme totale de 21 538,08 euros en réparation des conséquences dommageables de la chute sur la voie publique dont il a été victime le 27 février 2002 ;

3°) de condamner la commune de Bastia à lui verser une somme de 1 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens ;

.............

Vu le mémoire enregistré le 5 avril 2007 présenté pour la commune de Bastia, Hôtel de ville, Rond-point Noguès, 20200 Bastia, par la Selarl Abeille ; la commune de Bastia conclut au rejet de la requête, à la confirmation du jugement, à titre subsidiaire à ce que M. X soit condamné à la garantir des éventuelles condamnations prononcées à son encontre, à titre encore subsidiaire à ce que l'indemnisation de M. Y soit réduite et à la condamnation de M. Y à lui verser une somme de 2 500 euros au titre des frais non compris dans les dépens ;

Vu le mémoire enregistré le 20 mai 2008, présenté pour M. Alain X, demeurant Lot 1, 68, La Maraninca, 20290 Lucciana, par Me Marielle Plantavin ; M. Alain X conclut à titre principal à l'annulation du jugement attaqué, à titre subsidiaire à la confirmation du jugement en ce qu'il a retenu la faute de la victime à hauteur des ¾ des conséquences dommageables, au rejet de la demande de M. Y et à la condamnation de M. Y à lui verser une somme de 2000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; .............

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 mai 2008,

- le rapport de M. Marcovici, premier conseiller,

- les observations de Me Dejardin pour M. Y et de Me Mery pour M. X,

- et les conclusions de Mme Buccafurri, commissaire du gouvernement ;

Sur la responsabilité :

Considérant que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Bastia a condamné la seule commune de Bastia à réparer le quart des conséquences dommageables de la chute survenue le 27 février 2002 ; que M. Y demande que la commune de Bastia et M. X, artisan maçon, soient solidairement condamnés à réparer l'intégralité du préjudice qu'il a subi ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, comme l'a jugé le Tribunal administratif de Bastia, l'accident dont a été victime M. Y le 27 février 2002 à 21 heures lorsqu'il a trébuché à l'angle du boulevard Paoli et de la rue Fontaine-Neuve à Bastia est directement imputable à la présence d'une barre de fer provenant d'un chantier de travaux publics confié par la commune de Bastia à M. Alain X, artisan maçon, et ayant pour objet la réalisation de passages pour personnes à mobilité réduite en centre ville sur les trottoirs ; que ni la commune de Bastia, ni M. X, n'apportent la preuve qui leur incombe d'une signalisation suffisante du chantier et donc d'un entretien normal du trottoir en cause à l'égard duquel M. Y avait la qualité d'usager, dès lors que M. Alain X, artisan maçon chargé de réaliser les travaux, se contente d'affirmer que le « chantier était parfaitement balisé » ; qu'ainsi la commune de Bastia et M. X sont responsables de l'accident survenu à M. Y ;

Considérant toutefois, et ainsi que l'a jugé le Tribunal administratif de Bastia, que cette responsabilité est largement atténuée par l'inattention dont a fait preuve la victime, qui aurait dû se montrer, surtout de nuit, particulièrement vigilante à l'approche du périmètre du chantier, qui était visible ; que, dans les circonstances de l'espèce il sera fait une exacte appréciation des circonstances de fait en mettant à la charge solidaire de la commune de Bastia et de M. X le quart des conséquences dommageables de l'accident survenu à M. Y ; qu'il y a lieu de réformer le jugement du Tribunal administratif de Bastia dans cette mesure et de rejeter les conclusions de M. X tendant à l'annulation du jugement attaqué et au rejet de la demande qu'a formulée M. Y devant le Tribunal administratif de Bastia ;

Sur le préjudice :

Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment de l'expertise ordonnée par les premiers juges, que M. Y a été victime d'un traumatisme de l'épaule droite ; qu'il a subi une incapacité temporaire totale de trois mois et demi, du 27 février 2002 au 16 juin 2002, qu'il reste atteint d'une incapacité permanente partielle de 7 % et que ses souffrances physiques qui peuvent être qualifiées de modérées ont été estimées à 3 sur une échelle de 7 ; qu'il ne justifie en revanche d'aucun préjudice moral ou d'agrément en lien direct et certain avec l'accident dont il a été victime ; que les frais médicaux ne sont pas restés à sa charge ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction résultant du III de l'article 25 de la loi du 21 décembre 2006 applicable aux évènements ayant occasionné des dommages survenus antérieurement à son entrée en vigueur et n'ayant pas donné lieu à une décision passée en force de la chose jugée : « Lorsque, sans entrer dans les cas régis par les dispositions législatives applicables aux accidents du travail, la lésion dont l'assuré social ou son ayant droit est atteint est imputable à un tiers, l'assuré ou ses ayants droit conserve contre l'auteur de l'accident le droit de demander la réparation du préjudice causé, conformément aux règles du droit commun, dans la mesure où ce préjudice n'est pas réparé par application du présent livre. / Les caisses de sécurité sociale sont tenues de servir à l'assuré ou à ses ayants droit les prestations prévues par le présent livre, sauf recours de leur part contre l'auteur responsable de l'accident dans les conditions ci-après. / Les recours subrogatoires des caisses contre les tiers s'exercent poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'elles ont pris en charge, à l'exclusion des préjudices à caractère personnel. / Conformément à l'article 1252 du code civil, la subrogation ne peut nuire à la victime subrogeante, créancière de l'indemnisation, lorsqu'elle n'a été prise en charge que partiellement par les prestations sociales ; en ce cas, l'assuré social peut exercer ses droits contre le responsable, par préférence à la caisse subrogée. / Cependant, si le tiers payeur établit qu'il a effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un poste de préjudice personnel, son recours peut s'exercer sur ce poste de préjudice » ;

Considérant qu'en application de ces dispositions le juge, saisi d'un recours de la victime d'un dommage corporel et d'un recours subrogatoire d'un organisme de sécurité sociale doit, pour chacun des postes de préjudices patrimoniaux et personnels, déterminer le montant du préjudice en précisant la part qui a été réparée par des prestations de sécurité sociale et celle qui est demeurée à la charge de la victime ; qu'il lui appartient ensuite de fixer l'indemnité mise à la charge de l'auteur du dommage au titre du poste de préjudice en tenant compte, s'il a été décidé, du partage de responsabilité avec la victime ; que le juge doit allouer cette indemnité à la victime dans la limite de la part du poste de préjudice qui n'a pas été réparée par des prestations, le solde, s'il existe, étant alloué à l'organisme de sécurité sociale ;

Considérant qu'en l'absence de dispositions réglementaires définissant les postes de préjudice, il y a lieu, pour mettre en oeuvre la méthode sus-décrite, de distinguer, parmi les préjudices de nature patrimoniale, les dépenses de santé, les frais liés au handicap, les pertes de revenus, l'incidence professionnelle et scolaire et les autres dépenses liées à ce dommage ; que parmi les préjudices personnels, sur lesquels l'organisme de sécurité sociale ne peut exercer son recours que s'il établit avoir effectivement et préalablement versé à la victime une prestation réparant de manière incontestable un tel préjudice, il y a lieu de distinguer, pour la victime directe, les souffrances physiques et morales, le préjudice esthétique et les troubles dans les conditions d'existence, envisagés indépendamment de leurs conséquences pécuniaires ;

Considérant que dans les circonstances de l'espèce il sera fait une juste appréciation des troubles de toute nature dans les conditions d'existence de M. Y en les fixant à une somme de 10 000 euros ; que M. Y est par suite fondé à soutenir que le Tribunal administratif de Bastia a fait une estimation insuffisante des préjudices qu'il a subis ; que, compte tenu du partage de responsabilité, il y a lieu de porter la somme à laquelle la commune de Bastia a été condamnée à verser à M. Y, fixé à 837 euros par le Tribunal administratif de Bastia, à la somme de 2 500 euros ;

Sur les droits de la CMR :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le montant des débours de la CMR en relation directe et certaine avec l'accident survenu à Y s'élève à 884 euros ; que, compte tenu du partage de responsabilité, il y a lieu de ramener à la somme de 221 euros le montant de la somme que devra verser la commune de Bastia, qui sera garantie, ainsi qu'en a jugé le Tribunal administratif de Bastia par M. X, à M. Y ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de la commune de Bastia les sommes que M. Y demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; que les dispositions dudit article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que soit mise à la charge de M. Y, qui n'a pas la qualité de partie perdante à la présente instance, une somme au titre des frais non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La commune de Bastia et M. X sont condamnés solidairement à verser une somme de 2 500 euros (deux mille cinq cents euros) à M. Y et une somme de 221 euros (deux cent vingt et un euros) à la CMR.

Article 2 : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Bastia est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Les conclusions de l'appel incident de M. X sont rejetées.

Article 5 : Les conclusions de la commune de Bastia et de M. X fondées sur les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. Joseph Y, à la commune de Bastia, à M. Alain X, à la CMR et au ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.

N° 06MA01447 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 06MA01447
Date de la décision : 23/06/2008
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : M. GUERRIVE
Rapporteur ?: M. Laurent MARCOVICI
Rapporteur public ?: Mme BUCCAFURRI
Avocat(s) : SIMEONI

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2008-06-23;06ma01447 ?
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