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20/12/2007 | FRANCE | N°05MA02285

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 20 décembre 2007, 05MA02285


Vu la requête, enregistrée le 31 août 2005, présentée pour M. et Mme Thierry X, par la SCP CALUDI-RAMAHANDRIARIVELO-BEAUREGARD, élisant domicile ... ; M. et Mme Thierry X demandent à la Cour :
1°/ de réformer le jugement du 12 mai 2005 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a condamné l'Etat à leur verser une indemnité de 1 000 euros chacun, qu'ils estiment insuffisante, en réparation du préjudice qu'ils ont subi ;

2°/ de condamner conjointement et solidairement l'Etat et la commune de Barjac à leur verser la somme de 53 358 euros au titre de la perte

vénale de leur bien et la somme de 8 000 euros au titre de leur préjudic...

Vu la requête, enregistrée le 31 août 2005, présentée pour M. et Mme Thierry X, par la SCP CALUDI-RAMAHANDRIARIVELO-BEAUREGARD, élisant domicile ... ; M. et Mme Thierry X demandent à la Cour :
1°/ de réformer le jugement du 12 mai 2005 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a condamné l'Etat à leur verser une indemnité de 1 000 euros chacun, qu'ils estiment insuffisante, en réparation du préjudice qu'ils ont subi ;

2°/ de condamner conjointement et solidairement l'Etat et la commune de Barjac à leur verser la somme de 53 358 euros au titre de la perte vénale de leur bien et la somme de 8 000 euros au titre de leur préjudice moral, du fait du trouble dans leurs conditions d'existence, ces sommes étant majorées des intérêts légaux à compter de la date d'enregistrement du recours de plein contentieux ;

3°/ de condamner conjointement et solidairement l'Etat et la commune de Barjac à leur payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;


Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 décembre 2007 :

- le rapport de M. Massin, rapporteur ;

- et les conclusions de M. Cherrier, commissaire du gouvernement ;




Considérant que le dimanche 8 octobre 1995, à 10 h 45, un rocher d'environ 150 tonnes, s'est détaché de la falaise ruiniforme calcaire ceinturant le Causse de Changefège, située en surplomb du village de Barjac sur une parcelle appartenant à une personne privée, a dévalé la pente en traversant des bois puis a éclaté en trois blocs principaux, dont l'un, estimé à 25 m3 et à 60 tonnes, après avoir roulé et rebondi dans des prés, est venu s'abattre sur la maison d'habitation de M. et Mme Itier, située dans le lotissement « Les Boutarottes », à la périphérie nord-est du village ; que Mme Marie Galière épouse Itier est décédée et que sa maison a été détruite ; que bien que leur maison, située beaucoup plus au nord du terrain de M. et Mme Itier, n'ait subi aucun dommage, M. et Mme Thierry X ont toutefois présenté une demande indemnitaire dirigée contre l'Etat et la commune de Barjac ; que par jugement en date du 12 mai 2005, le Tribunal administratif de Montpellier, après avoir retenu la responsabilité de l'Etat, a rejeté les conclusions présentées par M. et Mme Thierry X tendant à l'indemnisation du préjudice matériel allégué mais a condamné l'Etat à leur payer une somme de 1 000 euros chacun en indemnisation des troubles dans leurs conditions d'existence ; que M. et Mme Thierry X qui estiment insuffisantes les indemnités allouées relèvent appel de ce jugement ;


Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête :

Sur la responsabilité de l'Etat :

Considérant que l'étude effectuée pour le compte de l'Etat à la demande de la direction départementale de l'équipement de Lozère avec pour objet de déterminer plusieurs zones selon leur degré de dangerosité au regard notamment du risque d'éboulement en application des dispositions de l'article R.111-3 du code de l'urbanisme alors applicables et dont les travaux ont été remis en janvier 1989 est marquée par des erreurs méthodologiques grossières ; que ses résultats n'ont pas été correctement analysés ; qu'elle n'a pas été suivie des études complémentaires qu'elle appelait pourtant et qui auraient permis de mettre en place des moyens matériels et juridiques de prévention ; qu'en l'état de ses connaissances, l'Etat aurait dû refuser les demandes de permis de construire sur le fondement de l'article R.111-2 du code de l'urbanisme ; que M. et Mme Thierry X sont dès lors fondés à soutenir que l'Etat a commis une faute en leur délivrant le permis de construire dont ils ont bénéficié le 19 janvier 1994 ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que les requérants, qui ont construit leur maison à un emplacement situé dans la zone non exposée au risque selon la carte communale, aient commis une faute d'imprudence, de nature à exonérer l'Etat de sa responsabilité pour les préjudices résultant de la délivrance de ce permis de construire ;


Sur la responsabilité de la commune de Barjac :

Considérant que si les résultats de l'étude de 1989 appelaient des études complémentaires, la commune de Barjac, dont la population s'élevait à 557 habitants en 1990, ne disposait pas des moyens techniques pour analyser ce document et prendre la mesure de sa portée réelle ; qu'elle ne peut ainsi pas être tenue pour responsable de ne pas avoir pris antérieurement à 1995 les mesures de police qu'exigeait le risque présenté par l'état de la falaise dont elle n'avait pas connaissance ; que les conclusions M. et Mme Thierry X dirigées contre la commune de Barjac doivent dès lors être rejetées ;


Sur les préjudices :

Sur le préjudice matériel :

Considérant que M. et Mme Thierry X soutiennent avoir subi un préjudice matériel résultant de la perte de valeur vénale de leur maison en raison des risques d'éboulement ; que s'ils produisent une estimation de la valeur de leur maison et une attestation de leur assureur indiquant qu'ils craignent en cas d'évolution dans leur vie professionnelle d'être obligés de déménager et de céder leur bien, ils n'allèguent toutefois ni avoir tenté de vendre leur maison, ni avoir l'intention de le faire ; que la perte de valeur vénale invoquée ne saurait dès lors, en raison de son caractère purement éventuel, donner lieu à indemnisation, alors qu'au surplus, en raison des travaux réalisés pour protéger les habitations, il n'est pas établi que celles-ci aient perdu de la valeur à la suite des événements survenus en 1995 ; que, dès lors, les conclusions indemnitaires fondées sur ce chef de préjudice doivent être rejetées ;


Sur les troubles dans les conditions d'existence :

Considérant que les premiers juges se sont livrés à une juste évaluation des divers troubles dans les conditions d'existence subis par M. et Mme Thierry X en lien direct et certain avec la délivrance fautive du permis de construire en les fixant à la somme de 1 000 euros tous intérêts compris pour chacun des époux ; que si M. et Mme Thierry X reprochent au jugement d'avoir borné dans le temps leur préjudice jusqu'à la construction de l'ouvrage de protection alors que d'une part la construction de cet ouvrage n'est pas de nature à limiter dans le temps le préjudice dans les troubles dans les conditions d'existence et que d'autre part ils émettent toute réserve sur l'efficacité de ce dispositif, la circonstance qu'ils n'aient pas quitté les lieux révèle que M. et Mme Thierry X regardent cet ouvrage comme leur offrant suffisamment de sécurité ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme Thierry X ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montpellier a condamné l'État à leur verser une indemnité dont le montant est limité à 1 000 euros pour chacun d'eux ; que, par suite, leur requête doit être rejetée ;


Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions susmentionnées de la commune de Barjac ;

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par M. et Mme Thierry X doivent dès lors être rejetées ;



D E C I D E :


Article 1er : La requête de M. et Mme Thierry X est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Barjac tendant à l'application des dispositions de l'article L.761- 1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Thierry X, au ministre d'Etat, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables et à la commune de Barjac.
N° 05MA02285
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RP


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 05MA02285
Date de la décision : 20/12/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LAFFET
Rapporteur ?: M. Olivier MASSIN
Rapporteur public ?: M. CHERRIER
Avocat(s) : SCP CAULADI RAMAHANDRIARIVELO BEAUREGARD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2007-12-20;05ma02285 ?
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