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02/10/2007 | FRANCE | N°07MA00229

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre-formation à 3, 02 octobre 2007, 07MA00229


Vu le requête enregistré le 24 janvier 2007 en télécopie, confirmée par l'original le 25 janvier 2007, sous le n° 07MA00229, présenté par le PREFET DES ALPES-MARITIMES ; le PREFET DES ALPES-MARITIMES demande à la Cour :


111 d'annuler le jugement en date du 15 décembre 2006 par lequel le magistrat délégué du président du Tribunal administratif de Nice a, à la demande de M. Edgard X, annulé son arrêté du 8 décembre 2006 décidant la reconduite à la frontière de ce dernier ;


222 de rejeter les conclusions de M. Edgard X tendant à

l'annulation de son arrêté décidant la reconduite à la frontière de ce dernier ;

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Vu le requête enregistré le 24 janvier 2007 en télécopie, confirmée par l'original le 25 janvier 2007, sous le n° 07MA00229, présenté par le PREFET DES ALPES-MARITIMES ; le PREFET DES ALPES-MARITIMES demande à la Cour :


111 d'annuler le jugement en date du 15 décembre 2006 par lequel le magistrat délégué du président du Tribunal administratif de Nice a, à la demande de M. Edgard X, annulé son arrêté du 8 décembre 2006 décidant la reconduite à la frontière de ce dernier ;


222 de rejeter les conclusions de M. Edgard X tendant à l'annulation de son arrêté décidant la reconduite à la frontière de ce dernier ;

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Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;


Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;


Vu le code de justice administrative ;


Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;


Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 septembre 2007 :

- le rapport de Mme Fernandez, rapporteur ;

- les observations de Me Kuhn-Massot pour M. X ;

- et les conclusions de M. Emmanuelli, commissaire du gouvernement ;

Sur l'existence d'une décision fixant le pays de renvoi de M. X :

Considérant qu'à la suite de son interpellation à Nice le 7 décembre 2006, M. X, de nationalité arménienne, a fait l'objet d'un arrêté en date du 8 décembre 2006 par lequel le PREFET DES ALPES-MARITIMES a prononcé sa reconduite à la frontière et d'un arrêté du même jour et de la même autorité administrative le plaçant en rétention administrative ; que dans son premier arrêté, en se prononçant par la formulation ambiguë adoptée dans l'article 1er du dispositif, envisageant au conditionnel l'hypothèse d'une possible reconduite de l'étranger intéressé dans un autre pays que son pays d'origine, sans précision sur cette possibilité, le préfet doit être regardé comme ayant décidé, à défaut, que l'intéressé sera reconduit dans le pays dont il a la nationalité ; que de plus, et en tout état de cause, il ressort des pièces du dossier et notamment de l'ordonnance en date du 9 décembre 2006 du juge des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de Nice, que le motif de la requête du PREFET DES ALPES-MARITIMES, tendant à la prolongation de la rétention administrative de M. X avait pour motif, la circonstance qu'il n'y avait aucun moyen de transport disponible à destination du pays d'origine avant le 25 décembre 2006 ; que dans ces conditions, c'est à bon droit que le premier juge a pu estimer qu'à la date à laquelle il a statué le 15 décembre 2006, le PREFET DES ALPES-MARITIMES avait pris une décision fixant l'Arménie comme pays de renvoi à la reconduite à la frontière de M. X ;
Sur les risques encourus par M. X en cas de renvoi dans son pays d'origine :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X reconnaît être entré en France clandestinement en décembre 2004, en voiture, en compagnie de sa mère, de sa soeur et du fils de celle-ci, après avoir fui son pays l'Arménie, par l'Ukraine, en raison des persécutions politiques dont a fait l'objet sa famille ; qu'il explique que le mari de sa soeur, membre et président de la section locale d'un parti d'opposition au président de la république arménienne a été emprisonné pour s'être opposé aux fraudes électorales pour les élections présidentielles les 19 février et 5 mars 2003 et les avoir dénoncées puis a été assassiné le 28 août 2003 ; que sa soeur et son neveu sont venus se réfugier chez leurs parents avec lesquels il vivait ; qu'il a alors décidé de s'engager dans le combat politique d'opposition en adhérant comme ses parents à un parti politique d'opposition et la détention d'une cassette compromettante pour le pouvoir en place, leur a valu des coups de téléphone anonymes les menaçant de mort, chez les grands-parents maternels de M. X qui les a recueillis après l'incendie de leur maison ; que lors des manifestations d'avril 2004 devant le centre culturel d'Erevan, l'opéra et l'assemblée parlementaire, auxquelles il a participé avec ses parents à Erevan, il a été violemment battu, ainsi que sa mère et sa soeur et a dû être hospitalisé trois semaines, son foie ayant été atteint ; que ces manifestations se sont soldées par de nombreuses arrestations dont celle de son père et la condamnation de celui-ci à l'emprisonnement en avril 2004, pour une durée de deux ans ; que ce dernier a été de nouveau emprisonné en décembre 2005 ; que lui-même a eu son nom publié dans un journal gouvernemental et est sur la liste noire de ceux qui sont regardés comme dangereux pour le gouvernement et doivent être surveillés par la police, à vie ;

Considérant d'une part, que M. X produit un ensemble de documents dont l'authenticité n'est pas sérieusement contestée, à l'appui de ses allégations et d'autre part, un mandat d'amener au parquet général de la République d'Arménie en date du 29 septembre 2006 le concernant, ainsi que sa mère, produit pour la première fois devant le Tribunal administratif de Nice ; que pour contester l'authenticité d'un tel acte, qui ne constitue pas une convocation, le préfet ne peut utilement invoquer le défaut de date de comparution ; que, dans ces circonstances, eu égard au récit précis et circonstancié de M. X, ainsi qu'aux documents produits et nonobstant la circonstance que la demande de reconnaissance de réfugié a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Commission des recours des réfugiés, la réalité des risques allégués par M. X en cas de retour dans le pays dont il a la nationalité est établie ; que, par suite, le PREFET DES ALPES-MARITIMES n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le premier juge a retenu le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour annuler sa décision fixant l'Arménie comme destination de la reconduite à la frontière de M. X ;
Considérant toutefois, que ce moyen ne pouvait être utilement invoqué à l'appui de la mesure de reconduite à la frontière elle-même ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, que le PREFET DES ALPES-MARITIMES, qui ne peut utilement invoquer contre le jugement attaqué, le moyen d'ailleurs non soutenu par M. X en première instance, tiré de ce que l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'aurait pas été méconnu, n'est fondé à demander l'annulation dudit jugement, qu'en tant qu'il a prononcé l'annulation de la décision de reconduite à la frontière de M. X ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à payer à M. X la somme de 1.500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Nice en date du 15 décembre 2006 est annulé en tant qu'il a prononcé l'annulation de la mesure de reconduite à la frontière, prise le 8 décembre 2006 par le PREFET DES ALPES-MARITIMES à l'encontre de M. X.

Article 2 : La demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Nice est rejetée en tant qu'elle tendait à l'annulation de la mesure de reconduite prise à son encontre le 8 décembre 2006 par le PREFET DES ALPES-MARITIMES.
Article 3 : Le surplus des conclusions du PREFET DES ALPES-MARITIMES tendant à l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a annulé sa décision fixant l'Arménie comme pays de renvoi de M. X, est rejeté.
Article 4 : L'Etat versera à M. X la somme de 1.500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement et à M. Edgard X.
N° 07MA00229 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre-formation à 3
Numéro d'arrêt : 07MA00229
Date de la décision : 02/10/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme FELMY
Rapporteur ?: Mme Elydia FERNANDEZ
Rapporteur public ?: M. EMMANUELLI
Avocat(s) : KUHN-MASSOT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2007-10-02;07ma00229 ?
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