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26/06/2007 | FRANCE | N°04MA01979

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre-formation à 3, 26 juin 2007, 04MA01979


Vu la requête, enregistrée le 6 septembre 2004, présentée pour la SOCIETE CIVILE DU PORT DE CAP D'AIL, dont le siège social est 3 bis avenue du Général de Gaulle Cap d'Ail (06320), par Me Sauzey ;

La SOCIETE CIVILE DU PORT DE CAP D'AIL demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0002158 en date du 3 juin 2004 du Tribunal administratif de Nice rejetant partiellement sa demande de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, en droits et pénalités, auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice 1992 ;

2°) à titre p

rincipal, de la décharger des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, en ...

Vu la requête, enregistrée le 6 septembre 2004, présentée pour la SOCIETE CIVILE DU PORT DE CAP D'AIL, dont le siège social est 3 bis avenue du Général de Gaulle Cap d'Ail (06320), par Me Sauzey ;

La SOCIETE CIVILE DU PORT DE CAP D'AIL demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0002158 en date du 3 juin 2004 du Tribunal administratif de Nice rejetant partiellement sa demande de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, en droits et pénalités, auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice 1992 ;

2°) à titre principal, de la décharger des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, en droits, auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice 1992 résultant de la remise en cause de provisions ;

A titre subsidiaire, de la décharger de la partie de ces cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, en droits, résultant des parties de ces provisions déjà dotées à l'ouverture de la période non prescrite, soit à hauteur d'un montant global de 1 987 727,85 euros (13 038 640 F) ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

…………………………………………………………………………………………….

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu la loi n°2004-1485 du 30 décembre 2004 de finances rectificative pour 2004 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 juin 2007,

- le rapport de Mme Fernandez, rapporteur ;

- les observations de Maître Philip substituant Maître Sauzey pour la SOCIETE CIVILE DU PORT DE CAP D'AIL ;

- et les conclusions de M. Marcovici, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la SOCIETE CIVILE DU PORT DE CAP D'AIL a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre des exercices 1992 à 1994 ; que des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés lui ont été notifiés selon la procédure contradictoire ; que la société requérante demande la décharge, au titre de l'exercice 1992, à titre principal, de l'intégralité des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés résultant de la remise en cause par le service d'une provision d'un montant de 5 000 000 F (762 245,08 euros) pour indemnité à verser à la Principauté de Monaco et d'une provision d'un montant de 8 165 567 F (1 244 832,60 euros) à verser à la commune de Cap d'ail pour frais de construction de route ; qu'elle demande, à titre subsidiaire, la décharge partielle de ces cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés dans la mesure où elles résultent des parties de ces provisions ayant déjà été dotées à l'ouverture de l'exercice 1985 ;

Sur le caractère déductible des provisions au titre de l'exercice 1992 :

Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts : « 1. Le bénéficie net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprennent (…) notamment : (…) 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice … » ; qu'il résulte de ces dispositions qu'une entreprise ne peut valablement porter en provision et déduire des bénéfices imposables d'un exercice, les sommes correspondant à des pertes ou charges qui ne seront supportées qu'ultérieurement par elle qu'à la condition que ces pertes ou charges soient nettement précisées quant à leur nature et susceptibles d'être évaluées avec une approximation suffisante, que le mode de calcul de la provision soit propre à exprimer avec une approximation suffisante le montant probable des dites pertes ou charges, qu'elles apparaissent comme probables eu égard aux circonstances constatées à la date de la clôture de l'exercice et qu'elles se rattachent aux opérations de toute nature déjà effectuées à cette date par l'entreprise ;

En ce qui concerne la provision pour indemnité à verser à la principauté de Monaco :

Considérant que la SOCIETE CIVILE DU PORT DE CAP D'AIL soutient que la provision pour indemnité à verser à la Principauté de Monaco a été comptabilisée régulièrement dès lors que le risque de devoir payer celle-ci est constitué depuis un engagement irrévocable qu'elle a pris en 1973 au profit de la Principauté de Monaco et rappelé ultérieurement notamment en 1976 et 1985 par le gouvernement monégasque et que ce risque qui persiste tant qu'aucune convention nouvelle n'a été signée entre les deux parties, rendait très probable la charge en cause et était de nature à justifier la provision dotée au titre de l'exercice 1992 ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, dans le cadre de travaux de construction d'un port de plaisance, d'une plage et d'un terre-plein sur le territoire de la commune de Cap d'Ail effectués par la requérante avec la Société de développement immobilier de Monaco, la SOCIETE CIVILE DU PORT DE CAP D'AIL a consenti, par lettre du 28 juin 1973, un droit d'option au gouvernement monégasque en vue de l'aménagement d'installations sportives et récréatives sur l'achat par ce dernier d'une parcelle sur le territoire de la commune de Cap d'Ail et qu'en cas de non levée d'option par le gouvernement princier, comme dans le cas où la levée d'option faite sous conditions suspensives ne deviendrait pas effective et si le projet de ZAC de la commune de Cap d'Ail ne comportait pas la construction d'un viaduc destiné à relier le terre-plein de Cap d'Ail à la basse corniche, la SOCIETE CIVILE DU PORT DE CAP D'AIL s'est engagée, solidairement avec la Société de développement immobilier de Monaco, au financement forfaitaire des voies à établir ou à améliorer pour assurer les liaisons indispensables, par le versement d'une somme variant entre 5 000 000 F et 10 000 000 F selon l'importance des superficies de plancher des constructions autorisées par le plan de ZAC ; que toutefois, alors que la réalisation probable à la fin de l'exercice 1992, des conditions de sa mise en oeuvre, ne résulte pas des éléments et pièces du dossier, l'obligation pour la SOCIETE CIVILE DU PORT DE CAP D'AIL de remplir son engagement vis-à-vis de la Principauté de Monaco de lui verser une indemnité forfaitaire ne pouvait être regardée comme suffisamment probable pour justifier la provision remise en cause par le service ; que la SOCIETE CIVILE DU PORT DE CAP D'AIL ne peut utilement invoquer des circonstances postérieures à l'exercice en cause ;

En ce qui concerne la provision pour frais de construction de route :

Considérant que la SOCIETE CIVILE DU PORT DE CAP D'AIL soutient que la comptabilisation dont s'agit résulte de l'engagement qu'elle a pris envers la commune de Cap d'Ail de réaliser une voie d'accès, dans la cadre de la convention de ZAC du 10 avril 1984 et dont elle est restée redevable en qualité d'aménageur initial, après la signature, le 14 décembre 1992, de l'avènement de celle-ci ;

Considérant toutefois que d'une part, le tracé de la voie en cause n'étant pas déterminé avec certitude, son coût n'était pas connu de façon suffisamment précise pour permettre, notamment en 1992, de déterminer la somme à provisionner ; que d'autre part, il résulte de l'instruction et notamment du descriptif général des ouvrages, joint au projet de ZAC, que l'obligation de verser l'indemnité dont s'agit était conditionnée par la maitrise foncière des terrains servant de support à la route devant être réalisée, par la commune de Cap d'Ail et de l'accord de la Principauté de Monaco sur le montage financier de l'opération et sur le tracé de la route ; que l'administration soutient, sans être contredite ni par la requérante, ni par les pièces du dossier, que ces deux conditions n'étaient pas réalisées ; que par suite, alors qu'il n'est pas soutenu, ni même allégué que les événements en cours d'exercice 1992 auraient pu rendre leur réalisation comme probable, c'est à bon droit que la provision litigieuse a été remise en cause par le service ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE CIVILE DU PORT DE CAP D'AIL n'est pas fondée à soutenir, à titre principal, que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la décharge totale des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice 1992 résultant de la remise en cause des provisions sus mentionnées ;

Sur le droit à correction symétrique des bilans et l'application de l'article 38-4 bis alinéa 2 du code général des impôts :

Considérant que la SOCIETE CIVILE DU PORT DE CAP D'AIL soutient qu'elle a provisionné une somme de 5 000 000 F pour indemnité à verser à la Principauté de Monaco dès 1973 dans sa totalité ; que s'agissant de l'indemnité afférente à l'engagement pris envers la commune de Cap d'Ail relatif à la réalisation d'une voie d'accès dans le cadre de la convention de ZAC du 10 avril 1984, elle a provisionné, eu égard à l'évaluation du coût de cette réalisation en 1981, une somme de 4 215 751 F au titre de cet exercice, puis, compte tenu des nouvelles solutions envisagées et de leurs coûts de réalisation afférents ainsi que l'indice du coût de la construction, elle a porté progressivement cette provision à la somme de 7 866 427 F au titre de l'exercice 1991 ; que la requérante soutient en appel que le principe d'intangibilité du bilan d'ouverture du premier exercice non prescrit ne saurait s'appliquer en tout état de cause aux provisions dotées de manière erronée résultant de la déduction d'exercices prescrits en vertu des dispositions de l'article 38 4 bis 2ème alinéa du code général des impôts issues de l'article IV de l'article 43 de la loi de finances rectificative pour 2004 du 30 décembre 2004 ;

Considérant qu'aux termes du 4 bis de l'article 38 du code général des impôts issu de l'article 43 I de la loi susvisée de finances rectificative pour 2004 : « Pour l'application des dispositions du 2 (détermination du bénéficie imposable), pour le calcul de la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de l'exercice, l'actif net d'ouverture du premier exercice non prescrit déterminé, sauf dispositions particulières, conformément aux premier et deuxième alinéas de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales ne peut être corrigé des omissions ou erreurs entraînant une sous-estimation ou surestimation de celui-ci les dispositions du premier alinéa ne s'appliquent pas lorsque l'entreprise apporte la preuve que ces omissions ou erreurs sont intervenus plus de sept ans avant l'ouverture du premier exercice non prescrit … » ; qu'en vertu du III de l'article 43 de la loi de finances rectificative pour 2004, sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée et de l'application des dispositions notamment du deuxième alinéa du 4 bis de l'article 38 du code général des impôts, les impositions établies avant le 1er janvier 2005 ou les décisions prises sur les réclamations contentieuses présentées sur le fondement du deuxième alinéa de l'article L.190 du livre des procédures fiscales, sont réputées régulière en tant qu'elles seraient contestées par le moyen tiré de ce que le contribuable avait la faculté de demander la correction des écritures du bilan d'ouverture du premier exercice non prescrit ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, lors de la dotation des provisions litigieuses, d'une part, en 1973 pour celle relative à l'engagement de la SOCIETE CIVILE DU PORT DE CAP D'AIL envers la Principauté de Monaco et d'autre part, dès 1980 puis les années suivantes jusqu'à l'exercice 1992 non prescrit pour celle relative à l'engagement de la requérante envers la commune de Cap d'Ail, les conditions de déductibilité exigées par l'article 39 précité du code général des impôts, n'étaient manifestement pas remplies pour les exercices concernés ; qu'ainsi leur comptabilisation ayant un caractère délibérément irrégulier, leur inscription aux bilans successifs de la SOCIETE CIVILE DU PORT DE CAP D'AIL ne peut être regardée comme une simple erreur comptable pouvant ultérieurement faire l'objet d'une correction et n'entre pas dans le champ d'application du principe d'intangibilité du bilan d'ouverture du premier exercice non prescrit; que par suite, la SOCIETE CIVILE DU PORT DE CAP D'AIL ne saurait utilement invoquer les dispositions précitées de l'article 38 bis 2ème alinéa du code général des impôts pour demander, à titre subsidiaire, la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice 1992 dans la mesure où elles résultent de provisions dotées antérieurement au 1er janvier 1985 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la partie perdante puisse obtenir, à la charge de son adversaire, le remboursement des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que les conclusions présentées à ce titre par la SOCIETE CIVILE DU PORT DE CAP D'AIL doivent dès lors être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SOCIETE CIVILE DU PORT DE CAP D'AIL est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE CIVILE DU PORT DE CAP D'AIL et au ministre de l'économie, des finances et de l'emploi.

N° 04MA01979 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre-formation à 3
Numéro d'arrêt : 04MA01979
Date de la décision : 26/06/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : Mme FELMY
Rapporteur ?: Mme Elydia FERNANDEZ
Rapporteur public ?: M. MARCOVICI
Avocat(s) : SAUZEY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2007-06-26;04ma01979 ?
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