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06/02/2007 | FRANCE | N°05MA02747

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre-formation à 3, 06 février 2007, 05MA02747


Vu la requête, enregistrée le 24 octobre 2005, sous le n° 05MA02747, présentée pour Mme Martine X, domiciliée ... par Me Erhard ;

Mme X, déléguée syndicale au sein de l'Association Centre Départemental pour l'Insertion Sociale, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0303851 en date du 5 juillet 2005 par lequel le Tribunal administratif de Nice a, à la demande de l'Association Centre Départemental pour l'Insertion Sociale, annulé la décision en date du 28 mai 2003 du ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité annulant la décision du

18 décembre 2002 de l'inspecteur du travail de la 4ème section de la directio...

Vu la requête, enregistrée le 24 octobre 2005, sous le n° 05MA02747, présentée pour Mme Martine X, domiciliée ... par Me Erhard ;

Mme X, déléguée syndicale au sein de l'Association Centre Départemental pour l'Insertion Sociale, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0303851 en date du 5 juillet 2005 par lequel le Tribunal administratif de Nice a, à la demande de l'Association Centre Départemental pour l'Insertion Sociale, annulé la décision en date du 28 mai 2003 du ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité annulant la décision du 18 décembre 2002 de l'inspecteur du travail de la 4ème section de la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle du Var autorisant son licenciement pour inaptitude à tout poste dans l'entreprise ;

2°) de rejeter la demande de l'Association Centre Départemental pour l'Insertion Sociale tendant à l'annulation de la décision en date du 28 mai 2003 du ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité annulant la décision du 18 décembre 2002 de l'inspecteur du travail de la 4ème section de la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle du Var autorisant son licenciement pour inaptitude à tout poste dans l'entreprise ;

3°) de condamner l'Association Centre Départemental pour l'Insertion Sociale à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

…………………………………………………………………………………………..

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 janvier 2007 :

- le rapport de Mme Fernandez, rapporteur ;

- les observations de Me Dupont de la SCP Lamy Lexel pour l'association CEDIS ;

- et les conclusions de M. Marcovici, commissaire du gouvernement ;

Sur le bien fondé du jugement :

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L.412-18 du code du travail, les salariés investis d'un mandat de délégué syndical bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées par l'intéressé ou avec son appartenance syndicale ; que le cas où la demande de licenciement est motivée par l'inaptitude physique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si cette inaptitude est telle qu'elle justifie le licenciement du salarié, compte tenu des caractéristiques de l'emploi exercé à la date à laquelle elle est constatée, de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé, des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi et de la possibilité d'assurer son reclassement dans l'entreprise ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.122-24-4 du code du travail : « A l'issue de périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident, si le salarié est déclaré par le médecin du travail inapte à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur est tenu de lui proposer un autre emploi approprié à ses capacités, compte tenu des conclusions écrites du médecin du travail et des indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise et aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles mutations ou transformations de postes de travail. Si le salarié n'est pas reclassé dans l'entreprise à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise du travail ou s'il n'est pas licencié, l'employeur est tenu de verser à l'intéressé, dès l'expiration de ce délai, le salaire correspondant à l'emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail. Les dispositions prévues à l'alinéa précédent s'appliquent également en cas d'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise constatée par le médecin du travail » ; qu'aux termes de l'article L.241-10-1 du même code : « Le médecin du travail est habilité à proposer des mesures individuelles telles que mutations ou transformations de postes, justifiées par des considérations relatives notamment à l'âge, à la résistance physique ou à l'état de santé des travailleurs. Le chef d'entreprise est tenu de prendre en considération ces propositions et, en cas de refus, de faire connaître les motifs qui s'opposent à ce qu'il y soit donné suite. En cas de difficulté ou de désaccord, la décision est prise par l'inspecteur du travail après avis du médecin-inspecteur du travail. » ; qu'aux termes de l'article R.241-51 dudit code : « Les salariés doivent bénéficier d'un examen par le médecin du travail (…) après une absence d'au moins vingt et un jours pour cause de maladie ou d'accident non professionnel (…). Cet examen a pour seul objet d'apprécier l'aptitude de l'intéressé à reprendre son ancien emploi, la nécessité d'une adaptation des conditions de travail ou d'une réadaptation du salarié ou éventuellement de l'une et de l'autre de ces mesures… » ; qu'aux termes de l'article R.241-51-1 de ce code : « Sauf dans le cas où le maintien du salarié à son poste de travail entraîne un danger immédiat pour la santé ou la sécurité de l'intéressé ou celles des tiers, le médecin du travail ne peut constater l'inaptitude du salarié à son poste de travail qu'après une étude de ce poste et des conditions de travail dans l'entreprise et deux examens médicaux de l'intéressé espacés de deux semaines … » ;

Considérant que, par un avis en date du 8 octobre 2002 du médecin du travail, Mme X, déléguée syndicale depuis 1999, a été déclarée inapte temporaire au poste de travail qu'elle occupait au sein de l'Association Centre Départemental pour l'Insertion Sociale et par un avis du même médecin, en date du 22 octobre 2002, inapte définitivement à tout poste de l'entreprise ; que, saisie par l'employeur d'une demande d'autorisation de licenciement de l'intéressée en date du 4 novembre 2002, l'inspectrice du travail a rejeté celle-ci par une décision en date du 13 novembre 2002 au motif que la procédure préalable au licenciement était irrégulière ; que, par un courrier en date du 13 décembre 2002, l'Association Centre Départemental pour l'Insertion Sociale a demandé une nouvelle autorisation de licenciement de Mme X pour inaptitude physique ; que, par une décision en date du 18 décembre 2002, l'inspectrice du travail a accordé ladite autorisation ; que, sur recours hiérarchique de Mme X, le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité a annulé cette autorisation par une décision en date du 28 mai 2003 au motif du lien du licenciement avec le mandat représentatif des travailleurs exercé par Mme X ; qu'à la demande de l'Association Centre Départemental pour l'Insertion Sociale, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice a annulé cette décision ministérielle ;

Considérant qu'il ressort des pièces versées au dossier avant le 29 décembre 2006, que si Mme X a été embauchée en 1989 en qualité de secrétaire par l'Association Centre Départemental pour l'Insertion Sociale, à compter d'octobre 1997, elle a été affectée à des fonctions de documentaliste en bénéficiant, à ce titre, d'un reclassement et d'un indice de rémunération afférents à la grille de technicien qualifié ; qu'après sa désignation en qualité de déléguée syndicale et notamment à compter de sa demande, début 2001, d'amélioration du fonctionnement et des conditions de travail dans l'antenne où elle assurait ses fonctions, d'une part, elle a été confrontée à des difficultés pour obtenir la rémunération et les primes qui lui étaient dues et pour la prise en compte ou le calcul par son employeur des jours de formation et d'autre part, elle a fait l'objet de mesures nombreuses et systématiques visant à l'utiliser comme remplaçante des salariés d'accueil ou de secrétariat absents, emplois correspondant à une déqualification de l'intéressée, ou à l'affecter, selon des ordres donnés très tardivement et même quelquefois contradictoires, dans les différentes antennes de l'Association Centre Départemental pour l'Insertion Sociale, sans qu'elle ne dispose plus d'aucune affectation précise et durable et sans que l'intérêt du service allégué par l'employeur ne soit établi ; que la seule circonstance que Mme X ait eue, avant 1999, des mandats représentatifs en qualité de déléguée du personnel puis de membre suppléant du comité d'entreprise, ne saurait suffire à ôter tout lien de causalité et de concomitance entre l'exercice de ses fonctions en qualité de déléguée syndicale par Mme X et les mesures discriminatoires susmentionnées prises à son encontre par son employeur ; que, dès lors, le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité a pu légalement refuser l'autorisation de licenciement de Mme X au motif du lien entre celle-ci et son mandat représentatif ;

Considérant qu'à défaut de tout autre moyen présenté par l'Association Centre Départemental pour l'Insertion Sociale tant devant le Tribunal administratif de Nice que devant la présente Cour qu'il appartiendrait à cette dernière par effet dévolutif, il résulte de ce qui précède que Mme X est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a annulé, à la demande de l'Association Centre Départemental pour l'Insertion Sociale, la décision ministérielle en date du 28 mai 2003 refusant d'autoriser son employeur à la licencier ;

Sur les conclusions de plein contentieux de Mme X :

Considérant que les conclusions de Mme X, qui sont nouvelles en appel, visant à obtenir de son employeur, l'Association Centre Départemental pour l'Insertion Sociale, avec les intérêts de droit, le versement de salaires, des indemnités de licenciement en application du code du travail et en réparation du préjudice moral, professionnel et financier, ne sont pas, en tout état de cause, en lien de causalité direct avec le litige en légalité en cause et doivent être présentées, si la requérante s'y croit recevable et fondée, au juge prud'homal ;

Sur les conclusions de Mme X tendant à l'exécution provisoire du présent arrêt :

Considérant que le présent arrêt est exécutoire à compter de sa notification aux parties devant le mettre à exécution ; que les conclusions susmentionnées de Mme X doivent, dès lors, être rejetées ; que, toutefois, si effectivement, le présent arrêt emporte l'illégalité du licenciement de Mme VAIILLANT, à défaut d'autorisation administrative, il n'appartient au juge administratif ni d'enjoindre à l'employeur de Mme X de procéder à la réintégration de celle-ci dans l'entreprise, ni, ainsi qu'il a été déjà vu, de le condamner à réparer les conséquences de ce licenciement illégalement intervenu, ni de prononcer une astreinte à l'encontre de l'employeur de l'intéressée ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la partie perdante puisse obtenir, à la charge de son adversaire, le remboursement des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que les conclusions présentées à ce titre par l'Association Centre Départemental pour l'Insertion Sociale doivent, dès lors, être rejetées ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Association Centre Départemental pour l'Insertion Sociale à payer à Mme X la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Nice du 5 juillet 2005 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par l'Association Centre Départemental pour l'Insertion Sociale présentée devant le Tribunal administratif de Nice est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de l'Association Centre Départemental pour l'Insertion Sociale tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : L'Association Centre Départemental pour l'Insertion Sociale versera à Mme X la somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de Mme X est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme X, à l'Association Centre Départemental pour l'Insertion Sociale et au ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement.

N° 05MA02747 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre-formation à 3
Numéro d'arrêt : 05MA02747
Date de la décision : 06/02/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme FELMY
Rapporteur ?: Mme Elydia FERNANDEZ
Rapporteur public ?: M. MARCOVICI
Avocat(s) : ERHARD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2007-02-06;05ma02747 ?
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