Vu 1°) la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 26 juillet 2004, sous le n° 04MA01617, présentée pour la REGION PROVENCE, ALPES, COTE D'AZUR représentée par le président du conseil régional, dont le siège est 27 Place Jules Guesde à Marseille (13481 Cedex 20), par Me Artaud-Castillon, avocat ;
La REGION PROVENCE, ALPES, COTE D'AZUR demande à la Cour :
1°/ de réformer le jugement n° 98-2614 rendu par le Tribunal administratif de Nice le 11 mai 2004 en ce qu'il a retenu partiellement sa responsabilité à la suite du glissement de terrain intervenu le 12 janvier 1996, causant des désordres à la propriété sise en contrebas de la route départementale 2085 sur le territoire de la commune de Grasse ;
2°/ de dire que le caractère exceptionnel des pluies des 11 et 12 janvier 1996 aurait dû conduire le tribunal administratif à rejeter la requête des époux ;
3°/ de condamner ceux-ci à lui verser 1.500 € au titre des frais de procédure ;
4°/ à titre subsidiaire de constater qu'aucun ouvrage de la région n'est à l'origine des désordres, que l'expertise conduit à des responsabilités partagées entre l'APAVE, contrôleur technique, M. Y, maître d'oeuvre du lycée voisin de Croisset, les entreprises ETNAP, BET VRD, SOGEV, entreprise de VRD, ainsi que le maître d'ouvrage délégué du département la SEMADEV, lesquels doivent garantir la région en cas de condamnations prononcées contre elle ;
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Vu 2°) la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, le 2 août 2004, sous le n° 04MA01689, présentée pour le DEPARTEMENT DES ALPES MARITIMES, par Me Ponchardier, avocat ;
Le département demande à la Cour :
1°/ d'annuler le jugement n° 98-2614 du 11 mai 2004 par lequel le Tribunal administratif de Nice a retenu partiellement sa responsabilité dans les désordres ayant affecté la propriété des époux , à la suite du glissement de terrain du 11 janvier 1996 ;
2°/ de rejeter sinon réduire les demandes des époux ;
3°/ de condamner solidairement la REGION PROVENCE, ALPES, COTE D'AZUR et la commune de Grasse à le garantir de toute condamnation qui pourrait être mise à sa charge ;
4°/ de condamner tout succombant à lui verser 4.000 € au titre des frais de procédure ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la loi du 28 Pluviôse An VIII ;
Les parties ayant été régulièrement averties de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 décembre 2006 :
- le rapport de M. Chavant, rapporteur,
- les observations de Me Ponchardier pour le DEPARTEMENT DES ALPES MARITIMES, de Me Guy-Vienot pour le CETEN APAVE SUD EST et de Me Reina substituant Me Assus-Juttner pour la commune de Grasse ;
- et les conclusions de Mlle Josset, commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes susvisées sont dirigées contre le même jugement et ont trait au même sinistre ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par une seule décision ;
Considérant que par jugement en date du 11 mai 2004, le Tribunal administratif de Nice a retenu partiellement la responsabilité solidaire de la commune de Grasse, du DEPARTEMENT DES ALPES MARITIMES et de la REGION PROVENCE, ALPES, COTE D'AZUR dans les désordres affectant la propriété des époux , gravement endommagée par un glissement de terrain survenu le 12 janvier 1996 ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant que le DEPARTEMENT DES ALPES MARITIMES soutient que le jugement serait irrégulier en ce que les premiers juges auraient dû surseoir à statuer sur la demande des époux dès lors qu'une instance était pendante devant la Cour d'appel d'Aix-en-Provence, saisie par la SCI INTER AZUR, condamnée en première instance par le Tribunal de Grande Instance de Grasse, comme responsable des désordres dont s'agit ;
Considérant cependant qu'il n'y a pas identité des personnes dont la responsabilité est recherchée ; que celle-ci peut l'être devant la juridiction civile pour la SCI et devant le juge administratif pour les personnes publiques, dès lors que le dommage trouve son origine dans l'existence ou le fonctionnement d'ouvrages publics ; que la circonstance que le Tribunal de Grande Instance de Grasse ait retenu la responsabilité de la SCI INTER AZUR, n'exclut pas que les époux puissent, avant tout jugement définitif, rechercher aussi celles des personnes publiques dont ils estiment la responsabilité engagée comme co-auteurs ; qu'en l'absence de décision exécutoire du juge judiciaire, une condamnation de ces personnes publiques ne conduisait pas comme il est soutenu à tort à une seconde indemnisation des victimes pour les mêmes faits, mais à l'ouverture d'une action récursoire au profit des co ;auteurs ; que par suite le tribunal administratif n'était pas tenu de surseoir à statuer sur la demande des époux ;
Sur la responsabilité :
Considérant que s'il est soutenu que l'origine des désordres proviendrait des pluies exceptionnelles qui se sont abattues sur la région de Grasse le 11 janvier 1996, il ressort du rapport d'expertise que celles-ci dont au demeurant l'intensité n'est pas précisée, ne sont pas à l'origine du glissement de terrain, lequel a été provoqué, d'une part, par le stockage, pendant des mois, de matériaux du chantier de la SCI INTER AZUR, d'autre part, par la route départementale 2085, ainsi que l'insuffisance du réseau communal d'évacuation des eaux pluviales ; que ces écoulement, aggravés par l'enrochement défectueux du chemin conduisant au parking du L.E.P. voisin, réalisé en 1995, ont déstabilisé un terrain d'assiette instable et provoqué la ruine du bâtiment appartenant aux époux ; que par suite les premiers juges ont écarté à juste titre la force majeure comme cause des désordres et ont retenu la responsabilité des personnes publiques à concurrence de 80 % ; que ce pourcentage est contesté à la fois à la hausse par le département et à la baisse par les époux qui estiment n'avoir aucune part de responsabilité dans les désordres ; que cependant l'instabilité naturelle du terrain, constatée par l'expert, justifie que soit saisie à la charge des époux 20 % de la responsabilité ;
Sur les autres conclusions des parties :
Considérant que si le département et la région contestent le montant des sommes allouées par les premiers juges aux époux , il est constant que ceux-ci restent propriétaires de leur terrain, qui est frappé d'un arrêté de péril, et que leur maison n'est pas réparable ; que par ailleurs l'indemnisation de la privation de jouissance résultant de ce que les époux ont été obligés de se reloger avant de percevoir une indemnité de leur assureur, constitue un préjudice distinct de la perte de valeur vénale de leur bien ; qu'en outre, les conclusions des époux et de la MACIF tendant à une réévaluation des indemnités ne sont assortis d'aucune justification ; qu'il en résulte que les premiers juges n'ont pas fait une évaluation inexacte du préjudice indemnisable ;
Considérant que la REGION PROVENCE, ALPES, COTE D'AZUR soutient qu'une erreur matérielle s'est glissée dans le jugement du tribunal administratif, compte tenu des sommes allouées et du partage de responsabilité entre les personnes publiques condamnées solidairement et les époux ; que le total des préjudices tels que retenues par le tribunal administratif s'élève effectivement à 297.275,56 €, que, compte tenu des 20 % restant à la charge des demandeurs c'est une somme de 237.820,47 € qui est due, se décomposant en 132.752,60 € pour la MACIF et 105.067,87 € pour les époux et non 110.190,15 € pour les époux comme indiqué à tort dans le jugement ;
Sur les conclusions en garantie :
Considérant que si la région demande à être garantie à 100 % des condamnations prononcées contre elle, par l'architecte et le BET du LEP, elle n'apporte aucun élément nouveau susceptible de remettre en cause la répartition retenue par le tribunal administratif ; que, de même, le DEPARTEMENT DES ALPES MARITIMES n'apporte en appel aucun élément utile à l'appui de ses conclusions tendant à être garanti par la région et par la commune de Grasse ;
Considérant que si M. Y, architecte, et le BET ETNAP demandent à être mis hors de cause au motif que les travaux qu'ils ont réalisés pour le chemin d'accès au parking du LEP Le Croisset, seraient dérisoires et n'auraient pu concourir à l'origine des désordres, ils ne critiquent pas précisément les conclusions expertales reprises par le tribunal administratif, ayant conduit celui-ci à laisser à leur charge 40 % des condamnations supportées par la région ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le DEPARTEMENT DES ALPES MARITIMES et la REGION PROVENCE ALPES, COTE D'AZUR sont seulement fondés à demander que le montant de la somme qu'ils ont été condamnés à verser à M. et Mme soit ramener à 105.067,87 euros ; qu'il y a lieu de réformer en ce sens le jugement attaqué, de rejeter le surplus des conclusions des registres ainsi que les conclusions de la commune de Grasse, du CETEN APAVE, de M. Y et du BET ETNAP ;
Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de laisser à chacune des parties, ses propres frais de procédure ;
D E C I D E :
Article 1er : La somme que le Tribunal administratif de Nice a allouée aux époux est ramenée à 105.067,87 € (cent cinq mille soixante-sept euros quatre-vingt sept centimes).
Article 2 : Le surplus des conclusions des requêtes du DEPARTEMENT DES ALPES MARITIMES et de la REGION PROVENCE ALPES, COTE D'AZUR est rejeté.
Article 3 : Les conclusions de la commune de Grasse et les appels prorogés du CETEN APAVE et de M. Y et du BET ETNAP et sont rejetés.
Article 4 : Les conclusions incidentes des époux et de la MACIF sont rejetées.
Article 5 : Les conclusions tendant à la condamnation des parties au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié au DEPARTEMENT DES ALPES MARITIMES, à la REGION PACA, à la commune de Grasse, aux époux , à M. Y, à l'ETNAP, au CETEN APAVE, à la SOGEV, à la MACIF, à la SCI Inter Azur et au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.
N°s 04MA01617 - 04MA01689 2