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23/11/2006 | FRANCE | N°01MA02501

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 23 novembre 2006, 01MA02501


Vu la requête, enregistrée le 26 novembre 2001, présentée pour

M. Jacques X, ..., par Me Calandra ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 97-2921 en date du 24 septembre 2001 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1989 et 1990, sous les articles n°s 88058 et 88059 dans les rôles de la commune d'Aubagne, mises en recouvrement le 30 septembre 1993, et des pénalités dont elles ont ét

é assorties ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;

3°) de condamner l'E...

Vu la requête, enregistrée le 26 novembre 2001, présentée pour

M. Jacques X, ..., par Me Calandra ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 97-2921 en date du 24 septembre 2001 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1989 et 1990, sous les articles n°s 88058 et 88059 dans les rôles de la commune d'Aubagne, mises en recouvrement le 30 septembre 1993, et des pénalités dont elles ont été assorties ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 15 000 francs en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense enregistré le 20 juin 2002, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre conclut au rejet de la requête ; il fait valoir que les observations du contribuable ont fait l'objet d'une réponse adressée le 9 octobre 1992, distribuée le 12 octobre 1992 comme en atteste l'avis de réception joint ; que le défaut de mention du délai imparti à la société pour désigner le bénéficiaire des distributions a seulement pour effet de priver l'administration de la possibilité de lui infliger la pénalité prévue à l'article 1763 A du code général des impôts mais reste sans influence sur la procédure d'imposition des bénéficiaires ; qu'en désignant comme bénéficiaires des distributions, Messieurs Jacques, Jacques et Jean X, la société a fourni une réponse claire, permettant l'identification des bénéficiaires et ne présentant aucun caractère d'invraisemblance, s'agissant des principaux associés de la société, à l'origine de sa création, travaillant dans l'établissement et y disposant des pouvoirs les plus étendus ; qu'en tout état de cause la procédure peut être poursuivie concomitamment avec la recherche des véritables bénéficiaires ; que si l'administration supporte la charge de prouver l'appréhension des sommes dès lors qu'elle établit l'existence de prélèvement de marchandise et de repas, par le générant, et les associés, pour leurs besoins personnes et que le requérant possède dans la société une part importante du capital, détient la signature sur les comptes bancaires, exerce un contrôle sur la trésorerie de l'entreprise ainsi que sur les clients et les fournisseurs, occupe au sein de l'entreprise en sa qualité de directeur des fonctions de responsabilité et, à ce titre perçoit une rémunération sensiblement égale à celle du gérant et dispose des pouvoirs les plus étendus pour effectuer toutes opérations sur les fonds et à ce titre apparaît comme un des maîtres de l'affaire ; qu'elle apporte également la preuve de l'existence et du montant des distributions par le bien-fondé du rejet de la comptabilité et par le bien-fondé de la reconstitution des recettes ; que le rejet de la comptabilité est justifié dès lors que les coefficients de bénéfice brut étaient très inférieurs à ceux résultant d'une étude de la marge réalisée à partir de la méthode dite « méthode des vins » ; que les recettes n'étaient justifiées que par des notes clients non enliassées, dans des carnets à souches eux-mêmes non numérotés, que les notes relatives aux banquets, séminaires étaient enliassées à part, avec la même absence de numérotation ; que l'administration est en droit d'écarter comme non probante une comptabilité qui enregistre mensuellement et globalement les recettes et ne comporte comme pièces justificatives de ces recettes que des doubles de fiches clients non datées et non numérotées ; que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; que la méthode des vins n'est ni viciée, ni sommaire ; que le caractère représentatif de l'échantillonnage ne peut être contesté ; que l'utilisation de vins en cuisine a été largement retenue par le vérificateur dans le cadre du débat oral et contradictoire et par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; que, s'agissant de la consommation moyenne de vin par personne dans les repas de groupe ou l'appréciation du caractère de repas de groupe pour les tables de moins de dix personnes, certains paramètres, à défaut d'élément matériel tel que mention particulière sur les notes en cause, la preuve n'est pas apportée du caractère erroné des estimations faites par le vérificateur ; que l'application des pénalités de mauvaise foi est justifié par le caractère grave et répété des infractions dont M. X, en raison de sa position dans la société, ne pouvait ignorer l'existence ; que les dispositions de l'article L. 761-1 font obstacle à ce que l'Etat soit condamné au remboursement des frais non compris dans les dépens dès lors qu'il n'est pas partie perdante ;

Vu le mémoire enregistré le 31 octobre 2002, enregistré comme ci-dessus pour

M. X tendant aux mêmes fins que la requête susvisée par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 octobre 2006,

- le rapport de M. Bourrachot, rapporteur ;

- les observations de Me Calandra, pour M. X ;

- et les conclusions de M. Dubois, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, dans la mesure où M. X les a contestées, les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre de chacune des années 1989 et 1990 procèdent de l'imposition, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers et sur le fondement des dispositions de l'article 109-1-1° du code général des impôts, de sommes correspondant à des recettes que l'administration a tenues pour dissimulées par la société à responsabilité limitée Le King, dont M. X était le gérant, qu'elle a rapportées aux bases de l'impôt sur les sociétés dû par cette dernière, et qu'interrogée par application des dispositions de l'article 117 du code général des impôts, celle-ci a déclaré devoir être réputées distribuées à M. X ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X n'a pas accepté les redressements qui lui ont été notifiés, et qu'il a, notamment, contesté l'existence même des bénéfices regardés comme dissimulés par la société à responsabilité limitée Le King et qui lui auraient été distribués ; que, par suite, il incombe à l'administration d'apporter la preuve de l'existence et du montant des bénéfices dont s'agit sans que le ministre puisse utilement opposer au requérant les dispositions de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales ;

Considérant que, pour écarter comme non probante la comptabilité de la Société Le King qui exploite un hôtel-restaurant, la notification de redressements du 10 mars 1992 indique que

« … a/ Les pièces justificatives des recettes présentées (carnets de double de notes clients) ne sont pas numérotées et ne permettent pas d'apprécier la cohérence des recettes déclarées au regard de leur continuité ni de leur cohérence. b/ Les montants de recettes figurant sur les carnets de notes « restaurants » augmentés de ¼ des recettes « pensions » (repas) ne correspondent pas aux montants comptabilisés comme « recettes repas », c'est-à-dire taxable à la taxe sur la valeur ajoutée au taux normal. c / le rapport du montant des achats utilisés pour le restaurant (HT) à celui des recettes (HT) déclarées taxables au taux normal de taxe sur la valeur ajoutée (correspondant au montant des recettes « repas ») fait apparaître les coefficients suivants : …. Les rapports ainsi calculés connaissent des variations importantes d'un exercice par rapport à l'autre (coefficient 1988 : 2,19. 1987 : 1,98 sans explication vraisemblable telle que modification des conditions d'exploitation, baisse de clientèle, augmentation de la concurrence et autres …, et sont très largement inférieurs aux coefficients généralement constatés dans la profession.

Selon les monographies établies par l'administration en concertation avec les syndicats professionnels, lesdits coefficients sont compris entre 3 et 3,5, ces chiffres étant cités à titre indicatif d'une moyenne constatée dans des conditions d'exploitation normales. En outre, compte tenu de la situation de votre établissement sur le littoral de bord de mer de La Ciotat (avec accès direct à la mer et plage privée), lieu particulièrement touristique en été, il y a lieu de considérer que le coefficient de marge brute de votre établissement peut être situé à un chiffre supérieur à la moyenne. d/ La reconstitution des recettes « repas » dont la méthode retenue et le détail sont exposés ci-dessous ont permis de constater une incohérence des recettes déclarées par rapport aux recettes effectivement encaissées (reconstituées) et ce, dans une proportion très importante, en dépit des diverses réfactions dont il a été tenu compte. e / des constatations exposées

ci-dessus, aux paragraphes 2a à 2d, il ressort que la comptabilité ne peut pas être regardée quant au fond, ni comme probante, ni reflétant sincèrement la réalité de l'activité, tout au moins en ce qui concerne les recettes. » ;

Considérant, d'une part, que le vérificateur n'ayant formulé aucune observation sur le mode de comptabilisation des recettes, l'absence de numérotation des doubles des notes clients ne suffit pas à elle seule à établir le caractère irrégulier en la forme de la comptabilité d'un contribuable ; que si, devant la Cour, le ministre fait valoir que l'administration est en droit d'écarter comme non probante, une comptabilité qui enregistre mensuellement et globalement les recettes et ne comporte, comme pièces justificatives de ces recettes, que des doubles de fiches clients non datées et non numérotées, il n'apporte à l'appui de cette assertion aucun commencement de preuve ; qu'en l'espèce, l'enregistrement mensuel et global des recettes n'est corroboré ni par les mentions de la notification de redressement, ni par celles de la réponse aux observations du contribuable du 3 août 1992, ni par l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires du 11 février 1993, ni par les autres éléments de l'instruction ;

Considérant, d'autre part, que l'évaluation non démontrée faite par le vérificateur du quart des recettes pensions correspondant à des repas, la comparaison avec les monographies professionnelles, la seule localisation de l'établissement ne suffisent pas établir l'absence de sincérité de la comptabilité ; qu'à la supposer établie par référence à l'année 1987, prise en dehors de la période vérifiée, et à l'année 1988 qui n'a fait l'objet d'aucun redressement, la variation d'un exercice à l'autre du coefficient ventes/achats déterminé de manière

extra-comptable et son caractère anormalement bas ne suffisent pas à faire écarter une comptabilité régulière en la forme ; que, si l'administration fait également état de dissimulation de recettes, elle n'apporte aucun élément autre que ceux résultant de la reconstitution des recettes à laquelle a procédé le vérificateur ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'administration n'apporte pas la preuve qui lui incombe du caractère irrégulier et insincère de la comptabilité de la Société Le King et n'apporte pas non plus la preuve qui lui incombe du bien-fondé des impositions ;

Considérant que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande de décharge et à demander l'annulation de ce jugement ;

Sur les frais non compris dans les dépens :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de condamner l'Etat à payer à M. X une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par celle-ci et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : M. X est déchargé des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1989 et 1990 et des pénalités dont elles ont été assorties.

Article 2 : L'Etat est condamné à payer à M. X la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Jacques X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Copie en sera adressée à Me Calandra et à la direction du contrôle fiscal sud-est.

N° 01MA002501 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 01MA02501
Date de la décision : 23/11/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. DARRIEUTORT
Rapporteur ?: M. François BOURRACHOT
Rapporteur public ?: M. DUBOIS
Avocat(s) : CALANDRA

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2006-11-23;01ma02501 ?
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