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19/10/2006 | FRANCE | N°05MA00261

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 19 octobre 2006, 05MA00261


Vu la requête sommaire et le mémoire ampliatif enregistrés respectivement le 7 février 2005 et le 29 mars 2005, présentés pour LE CENTRE HOSPITALIER D'ARLES, par Me Le Prado ; LE CENTRE HOSPITALIER D'ARLES demande à la Cour d'annuler les jugements n° 99-06199 du 30 novembre 2004 et du 28 janvier 2003 par lesquels le Tribunal administratif de Marseille l'a condamné à payer à Mlle Sophie la somme de 29 000 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 4 novembre 1998, à M. et Mme Jean la somme de 21 180,60 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 4

novembre 1998, à la Caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-d...

Vu la requête sommaire et le mémoire ampliatif enregistrés respectivement le 7 février 2005 et le 29 mars 2005, présentés pour LE CENTRE HOSPITALIER D'ARLES, par Me Le Prado ; LE CENTRE HOSPITALIER D'ARLES demande à la Cour d'annuler les jugements n° 99-06199 du 30 novembre 2004 et du 28 janvier 2003 par lesquels le Tribunal administratif de Marseille l'a condamné à payer à Mlle Sophie la somme de 29 000 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 4 novembre 1998, à M. et Mme Jean la somme de 21 180,60 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 4 novembre 1998, à la Caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône la somme de 25.534,10 euros, a mis à sa charge les frais d'expertise liquidés et taxés à la somme de 1.307,98 euros et l'a condamné à payer à M. et Mme YX la somme de 1 000 euros au titre l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

LE CENTRE HOSPITALIER D'ARLES soutient que c'est à tort que les premiers juges ont retenu l'existence d'une faute technique consistant dans le fait que l'ostéosynthèse réalisée du côté de la contusion constituait une faute de cette nature ; qu'à tout le moins une expertise complémentaire portant sur ce point aurait été utile ; que l'infection endogène dont a été victime Mlle YX, atteinte d'une fracture ouverte, ne peut engager la responsabilité du centre hospitalier sur le fondement de la présomption de faute dès lors que les éléments réunis par l'expert étaient insuffisants ; que les premiers juges ont procédé à une surévaluation du préjudice de M. et Mme YX en y incluant des frais kilométriques et des frais de consultation externe portant sur l'année 1998 et une diminution du bénéfice non commercial de Mme de 9.013,55 euros pendant l'année 1998 alors que la victime a regagné son domicile le 7 août 1998, qu'elle est partie en vacances en Espagne normalement, qu'elle n'a été hospitalisée à Nîmes que le 9 octobre et que, si la fracture dont Sophie YX avait été atteinte avait consolidé normalement, elle aurait été en situation d'incapacité totale de juillet 1998 janvier 1999 ; que le Tribunal aurait dû pratiquer un abattement de 30 % sur les demandes de remboursement pour tenir compte des conséquences normales du traumatisme ; que la demande de M. et Mme YX pour réparation d'un préjudice moral aurait due être rejetée purement et simplement ; que le niveau de gravité atteint par l'accident dont a été victime Mlle Sophie YX n'est pas suffisant pour entraîner une réparation ainsi que l'a prévu une résolution du 14 mars 1975 du Conseil de l'Europe ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense enregistré le 20 avril 2005, présenté par la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône, dont le siège est 56 chemin Joseph Aiguier à Marseille (13297), représentée son directeur en exercice, par Me Depieds ; la caisse primaire d'assurance maladie conclut au rejet de la requête et, par la voie de l'appel incident, demande que le montant de ses débours soit porté à la somme de 34 624,82 euros ; elle soutient que c'est à tort que les premiers juges ont cru devoir écarter les frais de transport et de massages alors que le lien de causalité résulte de la comparaison des dates des soins et des frais dommageables ;

Vu le mémoire en défense enregistré le 10 juillet 2005, présenté Mlle Sophie YX, M. et Mme YX, ..., par Me Le Guen ; ils concluent au rejet de la requête et, par la voie de l'appel incident, demandent à la Cour de porter la somme que le centre hospitalier a été condamné à payer à Mlle Sophie YX à 24.803 euros, celle que le centre hospitalier a été condamné à payer à M. et Mme à 24.803 euros et de condamner le Centre hospitalier d'Arles à leur verser la somme de 5.000 euros en remboursement de leur frais d'instance non compris dans les dépens ;

Vu la lettre en date du 24 mars 2006 par laquelle le président de la formation de jugement a informé les parties de ce que la Cour est susceptible de soulever d'office l'irrecevabilité des conclusions incidentes des requérants dès lors qu'ils se sont bornés, dans leur mémoire d'appel, à reproduire intégralement et exclusivement le texte de leur mémoire de première instance ;

Vu le mémoire enregistré le 15 septembre 2006 présenté comme ci-dessus pour le Centre hospitalier d'Arles tendant aux mêmes fins que la requête susvisée par les mêmes moyens ; le centre hospitalier fait valoir en outre que l'appel incident de M. et Mme doit être rejeté comme irrecevable ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 septembre 2006,

- le rapport de M. Bourrachot, rapporteur ;

- les observations de Me Borgel substituant Me Le Guen pour les consorts YX ;

- et les conclusions de M. Dubois, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'à la suite d'un accident de la circulation, Mlle Sophie a présenté notamment une fracture ouverte de la jambe gauche ; qu'elle a été en conséquence hospitalisée au CENTRE HOSPITALIER D'ARLES et qu'elle a subi en urgence une ostéosynthèse interne le 19 juillet 1998 ; que secondairement s'est produite une nécrose cutanée dans la zone de contusion après quoi s'est développée une infection qui a entraîné de multiples hospitalisations et opérations ultérieures ; que par jugement en date du 28 janvier 2003, le Tribunal administratif de Marseille a déclaré le CENTRE HOSPITALIER D'ARLES entièrement responsable des conséquences dommageables de l'intervention chirurgicale réalisée le 19 juillet 1998 sur Mlle Sophie et de ses suites infectieuses et a ordonné une expertise complémentaire ; que par un second jugement du 30 novembre 2004 le CENTRE HOSPITALIER D'ARLES a été condamné à payer à Mlle Sophie la somme de 29.000 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 4 novembre 1998, à payer à M. et Mme Jean la somme de 21.180,60 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 4 novembre 1998, à payer à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône la somme de 25 534, 10 euros, ; que le même jugement a mis à la charge du CENTRE HOSPITALIER D'ARLES les frais d'expertise liquidés et taxés à la somme de 1 307,98 euros et l'a condamné à payer à M. et Mme YX la somme de 1 000 euros au titre l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Sur la responsabilité :

Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du premier rapport d'expertise déposé le 21 janvier 2000 que, contrairement aux règles de l'art médical, l'ostéosynthèse a été réalisée du côté de la contusion, ce qui a entraîné un décollement à l'origine de l'infection qui s'est ensuite développée ; que les nombreuses interventions chirurgicales réalisées postérieurement à l'opération initiale et l'état actuel de l'intéressée sont en relation directe et certaine avec ce défaut technique et l'infection contractée secondairement au CENTRE HOSPITALIER D'ARLES ; que pour contester les conclusions de ce premier rapport d'expertise, le centre hospitalier ne peut utilement se prévaloir des conclusions partiellement irrégulières d'un troisième rapport déposé le 1er octobre 2003 par un second expert qui était seulement désigné pour éclairer le tribunal sur l'étendue du préjudice et non pour remettre en cause la chose jugée par le jugement du 28 janvier 2003 ; que, pris comme un élément du dossier, ce rapport ne contredit pas sérieusement les conclusions du premier expert en écartant le caractère fautif du traitement de l'infection alors que la faute médicale relevée par le premier expert et retenue par les premiers juges lui est antérieure ; que les avis médicaux du 23 mars 2000 et du 21 juin 2003 et l'avis du médecin-conseil de l'assureur du centre hospitalier du 11 juin 2002 ne suffisent pas à remettre en cause les conclusions de l'expert ; que les mêmes éléments ne sont pas davantage de nature à justifier que soit ordonnée une nouvelle expertise ; qu'il résulte de ce qui précède que le CENTRE HOSPITALIER D'ARLES n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 28 janvier 2003, le Tribunal administratif de Marseille l'a déclaré responsable des conséquences dommageables de l'intervention chirurgicale réalisée le 19 juillet 1998 sur Mlle Sophie YX du fait d'une faute médicale;

Sur le préjudice :

En ce qui concerne l'appel principal du CENTRE HOSPITALIER D'ARLES :

Considérant, d'une part, que si le CENTRE HOSPITALIER D'ARLES soutient que les premiers juges ont procédé à une surévaluation du préjudice de Mme YX et de la caisse primaire d'assurance maladie en ne prenant pas en considération le délai normal de consolidation de la fracture dont était atteinte Mlle Sophie YX évalué à six mois, il résulte de l'instruction que l'état de Mlle YX a nécessité une seconde hospitalisation à compter du 7 octobre 1998 ; qu'à compter de cette date, correspondant à la période indemnisée par les premiers juges, l'état de santé de la victime et ses conséquences ne pouvaient plus être regardés comme se rattachant à une consolidation normale ;

Considérant, d'autre part, qu'il appartient au juge, saisi de conclusions pécuniaires fondées sur une faute de nature à engager la responsabilité d'une personne publique de faire du dommage une évaluation telle qu'elle assure à la victime, à la date où intervient la décision, l'entière réparation du préjudice ; que le principe de la réparation du préjudice moral résultant d'une faute n'est pas subordonnée à l'exigence d'une particulière gravité de sa cause ou de son étendue ; que la résolution du 14 mars 1975 du Conseil de l'Europe n'a pas valeur d'engagement international régulièrement ratifié pris par la France ; que, par suite, le CENTRE HOSPITALIER D'ARLES n'est pas fondé à soutenir que la demande de M. et Mme YX pour réparation d'un préjudice moral aurait due être rejetée purement et simplement dès lors que le niveau de gravité atteint par l'accident dont a été victime leur fille n'est pas suffisant pour entraîner une réparation ;

En ce qui concerne l'appel incident de Mlle YX et de M. et Mme YX :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 631-1 du code de justice administrative : Les demandes incidentes sont introduites et instruites dans les mêmes formes que la requête. Elles sont jointes au principal pour y être statué par la même décision. ; qu' en vertu des dispositions de l'article R. 411-1 du même code, la requête doit, à peine d'irrecevabilité, contenir l'exposé des fais et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge ; que ces dispositions s'appliquent également aux conclusions incidentes d'un intimé ;

Considérant Mlle YX, M. et Mme YX se sont bornés, dans leur mémoire d'appel, à reproduire intégralement et exclusivement le texte de leur mémoire de première instance ; dès lors cet appel incident ne satisfait pas aux prescriptions précitées ne peut qu'être rejeté comme irrecevable ;

En ce qui concerne l'appel incident de la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône :

Considérant que pour rejeter le surplus de la demande de remboursement de la caisse primaire d'assurance maladie, les premiers juges ont estimé qu'alors que le CENTRE HOSPITALIER D'ARLES conteste le lien de causalité entre le fait générateur et la caisse n'a pas entrepris de le démontrer ; que toutefois, la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône a exclu de sa demande de remboursement les frais inhérents à l'intervention initiale et a limité en appel le montant des frais de transports demandés ; qu'ainsi qu'il a été dit plus haut l'état de santé de Mlle Sophie YX a nécessité une seconde hospitalisation à compter du 7 octobre 1998 ; qu'à compter de cette date l'état de santé de la victime et ses conséquences ne pouvaient plus être regardés comme se rattachant à une consolidation normale ; que, dès lors, la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône est fondée à demander le remboursement des frais engagés après cette date et à soutenir que la somme que le CENTRE HOSPITALIER D'ARLES a été condamné à lui verser par le jugement doit être portée à un montant de 34 624,82 euros ; que cette majoration du montant des droits de la caisse reste sans influence sur les droits des autres parties en l'absence de partage de responsabilité ou de réparation partielle du préjudice ;

Sur les frais non compris dans les dépens :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation » ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux demandes de Mlle YX, de M. et Mme YX tendant au remboursement de leurs frais d'instance non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La somme de 25 534, 10 euros que le CENTRE HOSPITALIER D'ARLES a été condamné à verser à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône par le jugement du tribunal administratif de Marseille du 30 novembre 2004 est portée à 34 624,82 euros.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Marseille du 30 novembre 2004 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : La requête du CENTRE HOSPITALIER D'ARLES, l'appel incident de Mlle YX, M. et Mme YX et le surplus des conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône sont rejetés.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au CENTRE HOSPITALIER D'ARLES, à Mlle Sophie YX, M. et Mme Jean YX, à la Caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône et au ministre de la santé et des solidarités.

Copie en sera adressée à Me Le Prado, Me Depieds, Me Le Guen et au préfet des

Bouches-du-Rhône.

N° 05MA000261 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 05MA00261
Date de la décision : 19/10/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. DARRIEUTORT
Rapporteur ?: M. François BOURRACHOT
Rapporteur public ?: M. DUBOIS
Avocat(s) : LE PRADO

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2006-10-19;05ma00261 ?
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