La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/10/2006 | FRANCE | N°05MA00381

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 05 octobre 2006, 05MA00381


Vu la requête, le mémoire ampliatif et la pièce produite, enregistrés les 17 février, 18 avril 2005 et 19 mai 2006, présentés pour le CENTRE HOSPITALIER DE GRASSE dont le siège est chemin de Clavary à Grasse (06335) par Me Le Prado ; le CENTRE HOSPITALIER demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°9805818 en date du 10 décembre 2004, par lequel le Tribunal administratif de Nice l'a condamné à rembourser à M. Soubielle et à la société d'assurances Le Sou médical les sommes indemnitaires qu'ils justifieront avoir payé à M. Ben Merzouk et à la Caisse primaire d'

assurance maladie des Alpes-Maritimes en exécution du jugement du Tribunal d...

Vu la requête, le mémoire ampliatif et la pièce produite, enregistrés les 17 février, 18 avril 2005 et 19 mai 2006, présentés pour le CENTRE HOSPITALIER DE GRASSE dont le siège est chemin de Clavary à Grasse (06335) par Me Le Prado ; le CENTRE HOSPITALIER demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°9805818 en date du 10 décembre 2004, par lequel le Tribunal administratif de Nice l'a condamné à rembourser à M. Soubielle et à la société d'assurances Le Sou médical les sommes indemnitaires qu'ils justifieront avoir payé à M. Ben Merzouk et à la Caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes en exécution du jugement du Tribunal de grande instance de Grasse du 12 janvier 2004 passé en chose de force jugée, ou le cas échéant, d'un arrêt de la juridiction judiciaire d'appel ;

2°) de rejeter les conclusions de M. Soubielle et de la société médicale d'assurances et de défense professionnelle Le Sou médical ;

3°) de condamner solidairement M. Soubielle et la société médicale d'assurances et de défense professionnelle Le Sou médical à lui payer la somme de 2 000 euros au titre des frais d'instance ;

……………………………………………………………………………………………………..

Vu la loi n°68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics ;

Vu le code civil ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

En application de l'article R.611-7 du code de justice administrative, les parties ayant été informées que le jugement paraissait susceptible d'être fondé sur un moyen soulevé d'office ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 septembre 2006 :

- le rapport de Mme Massé-Degois, rapporteur ;

- et les conclusions de M. Dubois, commissaire du gouvernement ;

Considérant que le CENTRE HOSPITALIER DE GRASSE fait appel du jugement n°9805818 en date du 10 décembre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Nice l'a condamné à rembourser à M. Soubielle et à la société d'assurances Le Sou médical les sommes indemnitaires qu'ils justifieront avoir payé à M. Ben Merzouk ainsi qu'à la Caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes en exécution du jugement du Tribunal de grande instance de Grasse du 12 janvier 2004 passé en chose de force jugée, ou le cas échéant, d'un arrêt de la juridiction judiciaire d'appel ;

Considérant que le Tribunal de grande instance de Grasse, par décision du

10 janvier 1995, a déclaré les Docteurs Cohen-Solal et Soubielle, respectivement médecins radiologue et neurologue, conjointement responsables du préjudice de M. Ben Merzouk, les a condamné à réparer le dommage subi par celui-ci consécutivement à la radiculographie réalisée en octobre 1978 à la clinique Saint-Jean de Cagnes sur Mer et a ordonné d'office une expertise complémentaire ; que ce jugement a été confirmé le 26 novembre 1997 par la Cour d'appel

d'Aix-en-Provence ; que par décision du 7 novembre 2000, le Tribunal de grande instance de Grasse a partagé par moitié la responsabilité des deux médecins susmentionnés et ordonné une expertise complémentaire en vue notamment de déterminer les éléments du préjudice de

M. Ben Merzouk ; que par jugement du 12 janvier 2004, ledit tribunal a condamné conjointement le Dr Soubielle d'une part, et le Dr Cohen-Solal et la compagnie d'assurances Axa France, d'autre part, à payer à la Caisse primaire d'assurance maladie des Alpes Maritimes la somme de 270 061,49 euros et à M. Ben Merzouk la somme de 59 320,39 euros ;

Considérant qu'il ressort du dossier de première instance que le Docteur Soubielle n'exerçait pas son activité de praticien au CENTRE HOSPITALIER DE GRASSE ; qu'il n'a d'ailleurs jamais fondé sa demande sur les dispositions du statut des fonctionnaires les garantissant de certaines condamnations ; que, par suite, le CENTRE HOSPITALIER DE GRASSE est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif l'a condamné en considérant que la faute commise par le Docteur Soubielle avait été commise dans l'exercice de ses fonctions à l'hôpital avec lequel il n'a aucun autre lien ;

Considérant qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens et exceptions soulevés devant le tribunal administratif et devant elle par les parties ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la demande de M. Soubielle :

Considérant que lorsque le responsable d'un dommage, condamné par l'autorité judiciaire à indemniser la victime, saisit la juridiction administrative d'un recours en vue de faire supporter la charge de la réparation par la collectivité publique coauteur de ce dommage, sa demande n'a pas le caractère d'une action récursoire par laquelle il ferait valoir des droits propres à l'encontre de cette collectivité, mais d'une action subrogatoire fondée, conformément au principe posé par l'article 1251 du code civil, sur les droits de la victime à l'égard de ladite collectivité en l'absence de tout lien de droit avec la collectivité publique co-auteur du dommage ; qu'ainsi subrogé, il ne saurait avoir, vis-à-vis de la personne publique, plus de droits que la victime ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi n°68-1250 susvisée du

31 décembre 1968 : « Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis. Sont prescrites, dans le même délai et sous la même réserve, les créances sur les établissements publics dotés d'un comptable public. » ; que l'article 3 de la même loi dispose : « La prescription ne court ni contre le créancier qui ne peut agir, soit par lui-même ou par l'intermédiaire de son représentant légal, soit pour une cause de force majeure, ni contre celui qui ne peut être légitimement regardé comme ignorant l'existence de sa créance ou de la créance de celui qu'il représente légalement. » ; qu'aux termes de l'article 7 de cette même loi : « L'administration doit, pour pouvoir se prévaloir, à propos d'une créance litigieuse, de la prescription prévue par la présente loi, l'invoquer avant que la juridiction saisie du litige au premier degré se soit prononcée sur le fond. » ;

Considérant que la prescription a commencé à courir à l'égard de M. Ben Merzouk, dont le dommage était susceptible d'être imputable ou en partie imputable à son hospitalisation en service psychiatrique du CENTRE HOSPITALIER DE GRASSE à compter du début de l'exercice qui suit celui au cours duquel il a pu avoir connaissance de l'origine du dommage ; qu'il résulte des conclusions du rapport d'expertise déposé le 15 mai 1986 par les professeurs Abbes et Ollier désignés par une ordonnance du 21 janvier 1986, conclusions citées dans le jugement du Tribunal de grande instance du 7 novembre 2000 que le diagnostic tardif de la fracture bilatérale des deux cols fémoraux de M. Ben Merzouk ainsi que les inattention et négligence dont il a fait l'objet sont imputables au médecin radiologue, au médecin psychiatre mais également aux médecins du service de psychiatrie du CENTRE HOSPITALIER DE GRASSE ; qu'ainsi, les informations relatives à la responsabilité du CENTRE HOSPITALIER DE GRASSE ont été mises à la disposition de M. Ben Merzouk courant de l'année 1986 et que l'existence de la créance contre l'établissement hospitalier était ainsi connue dans son principe au cours de cette année 1986 ; que, par suite, le délai de la prescription a commencé à courir à compter du 1er janvier 1987 et celui-ci était expiré le 31 décembre 1998 date d'enregistrement de la requête présentée par le Docteur Soubielle et son assureur devant le Tribunal administratif de Nice ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le CENTRE HOSPITALIER DE GRASSE, qui a régulièrement opposé la prescription quadriennale, est fondé à demander l'annulation du jugement par lequel le Tribunal administratif de Nice l'a condamné à rembourser à M. Soubielle et à la société d'assurances Le Sou médical les sommes indemnitaires payées à M. Ben Merzouk et à la Caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le CENTRE HOSPITALIER DE GRASSE, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. Soubielle et à la société d'assurances Le Sou médical la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, de condamner conjointement et solidairement M. Soubielle et la société d'assurances Le Sou médical à payer au CENTRE HOSPITALIER DE GRASSE la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1 : Le jugement n°9805818 en date du 10 décembre 2004 du Tribunal administratif de Nice est annulé.

Article 2 : Les demandes de M. Soubielle et de la société d'assurances Le Sou médical sont rejetées.

Article 3 : M. Soubielle et la société d'assurances Le Sou médical sont condamnés conjointement et solidairement à verser au CENTRE HOSPITALIER DE GRASSE une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au CENTRE HOSPITALIER DE GRASSE, à M. Philippe Soubielle, à la société médicale d'assurances et de défense professionnelle Le Sou médical et au ministre de la santé et des solidarités.

Copie en sera adressée à Me Le Prado, à Me Richard et au préfet des Alpes-Maritimes.

N°05MA00381 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 05MA00381
Date de la décision : 05/10/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Christine MASSE-DEGOIS
Rapporteur public ?: M. DUBOIS
Avocat(s) : LE PRADO

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2006-10-05;05ma00381 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award