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21/09/2006 | FRANCE | N°03MA00071

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 21 septembre 2006, 03MA00071


Vu la requête, enregistrée le 16 janvier 2003, présentée pour la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE (SCI) DE GESTION IMMOBILIERE LA PROVENCALE, représentée par son gérant en exercice, dont le siège social est Rond Point de l'Hélicoptère à Marignane (13700), par Me Cohen, avocat ;

La SOCIETE DE GESTION IMMOBILIERE LA PROVENCALE demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement n° 98-5989 en date du 28 novembre 2002 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune d'Allauch à lui verser une somme de 2.955.030 F, avec

intérêts capitalisés, en réparation du préjudice consécutif au refus de lui...

Vu la requête, enregistrée le 16 janvier 2003, présentée pour la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE (SCI) DE GESTION IMMOBILIERE LA PROVENCALE, représentée par son gérant en exercice, dont le siège social est Rond Point de l'Hélicoptère à Marignane (13700), par Me Cohen, avocat ;

La SOCIETE DE GESTION IMMOBILIERE LA PROVENCALE demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement n° 98-5989 en date du 28 novembre 2002 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune d'Allauch à lui verser une somme de 2.955.030 F, avec intérêts capitalisés, en réparation du préjudice consécutif au refus de lui délivrer un permis de construire;

2°/ de condamner la commune d'Allauch à lui payer une indemnité de 451.445,42 euros ;

3°/ de condamner la commune d'Allauch à lui verser une somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative;

……………………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code civil ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 septembre 2006,

- le rapport de Mme Buccafurri, rapporteur ;

- les observations de Me Cohen pour Me X Dominique, ès-qualité de mandataire-liquidateur de la SOCIETE DE GESTION IMMOBILIRE LA PROVENCALE, et de Me Garnier substituant Me Xoual pour la commune d'Allauch ;

- et les conclusions de M. Cherrier, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la SOCIETE DE GESTION IMMOBILIERE LA PROVENCALE, désormais représentée par Me X, ès-qualité de mandataire liquidateur de ladite société, a relevé appel du jugement n° 98-5989 en date du 28 novembre 2002 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune d'Allauch à lui verser une somme de 2.955.030 F, avec intérêts capitalisés, en réparation du préjudice consécutif au refus de lui délivrer un permis de construire opposé par le maire de la commune d'Allauch par un arrêté en date du 11 juillet 1997 ;

Sur la fin de non recevoir opposée à la requête d'appel par la commune d'Allauch :

Considérant que, contrairement à ce que soutient la commune d'Allauch, la SOCIETE DE GESTION IMMOBILIERE LA PROVENCALE critique les motifs de rejet de sa demande indemnitaire retenus par les premiers juges dans le jugement ici contesté ; que, par suite, cette requête, qui comprend des moyens d'appel et ne se borne pas à reprendre l'argumentation invoquée en première instance par ladite société, est suffisamment motivée ; que, dès lors, la fin de non recevoir susvisée doit être écartée ;

Sur la responsabilité de la commune :

Considérant que, par un arrêt de ce jour, la Cour de céans a confirmé le jugement n° 98 ;1802 en date du 28 novembre 2002 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a annulé, comme entaché d'erreur d'appréciation, l'arrêté en date du 11 juillet 1997 par lequel le maire de la commune d'Allauch a opposé un refus à la demande de permis de construire déposée par la SOCIETE DE GESTION IMMOBILIERE LA PROVENCALE pour la réalisation d'un immeuble à usage professionnel et de bureaux, sur une parcelle cadastrée AC n° 368 sise au lieu ;dit «Gayadon» à Allauch ; que cette illégalité constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la commune d'Allauch ; qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'en engageant des dépenses en vue de la réalisation de son projet de construction, au vu du certificat d'urbanisme positif qui lui avait été délivré le 14 janvier 1996, la société ait commis une imprudence présentant le caractère d'une faute de nature à atténuer la responsabilité de la commune d'Allauch ;

Sur le lien de causalité et le préjudice :

Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que le refus de permis de construire aurait pu être légalement fondé sur un autre motif que ceux fondant l'arrêté du 11 juillet 1997 et qui ont été jugés illégaux par le jugement précité du tribunal administratif de Marseille confirmé par la cour ; que, si la SOCIETE DE GESTION IMMOBILIERE LA PROVENCALE a cédé le 13 février 1998 le terrain d'assiette du projet, il ne résulte pas de l'instruction qu'elle n'aurait pas entrepris les travaux initialement prévus si l'autorisation sollicitée lui avait été accordée dans un délai normal ; que, dès lors, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, dans le jugement attaqué dans la présente instance, l'abandon du projet de construction par ladite société est la conséquence directe de l'illégalité du refus qui lui a été opposé ; que la SOCIETE DE GESTION IMMOBILIERE LA PROVENCALE a droit, par suite, à la réparation du préjudice direct et certain qui en est résulté pour elle ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que la parcelle d'assiette était classée dans le plan d'occupation des sols (POS) alors applicable en zone NAE 2 dans laquelle les constructions pouvaient être admises sous réserves de la production par le pétitionnaire d'une étude géologique ; qu'il résulte également de l'instruction que la société requérante a exposé des frais d'études de sols, qui, bien que menées en 1994 et 1995, ont été engagées pour la réalisation de son projet immobilier ; qu'alors même que les études en cause ont été menées avant le refus contesté, les frais induits par ces études, d'un montant de 315 030 F (48.026 euros) ont été exposés inutilement du fait du refus illégal de la demande de permis de construire et constituent, par suite, un préjudice directement imputable à la faute commise par le maire en opposant un refus ;

Considérant, en deuxième lieu, que s'il résulte de l'instruction que la société requérante a eu recours à un architecte pour présenter sa demande de permis de construire et si ladite société a versé au dossier une note d'honoraires d'un montant de 240.000 F, elle n'a pas justifié avoir effectivement versé lesdits honoraires alors que le paiement effectif de ces frais est contesté par la commune d'Allauch ; que, par suite, la SOCIETE DE GESTION IMMOBILIERE LA PROVENCALE ne peut être regardée comme établissant le caractère certain dudit préjudice ;

Considérant, en troisième lieu, que la SOCIETE DE GESTION IMMOBILIERE LA PROVENCALE n'établit pas davantage le caractère direct et certain du préjudice lié à des honoraires de montage et de commercialisation en produisant un récapitulatif desdites dépenses et des factures relatives à des prestations s'échelonnant de 1992 à 1997 et portant, sans autre précision, la mention «Allauch» sans que lesdits documents permettent d'établir que les frais en cause se rattachaient effectivement à l'opération immobilière ayant fait l'objet du refus illégal ;

Considérant, en quatrième lieu, que la SOCIETE DE GESTION IMMOBILIERE LA PROVENCALE, en se bornant à produire la balance prévisionnelle de l'opération, dressée par ses soins, n'établit pas le caractère certain du manque à gagner invoqué ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'en décidant de céder en 1998 le terrain d'assiette du projet de construction, la société appelante a pris une décision de gestion ; que, par suite, la circonstance qu'elle aurait revendu à perte ledit terrain est sans lien direct avec le comportement fautif de l'administration ;

Considérant, enfin, que si, en appel, Me X invoque des pertes de loyers qui auraient dû être versés à la société requérante par la Société Sopradis en exécution d'un bail à construction, le lien de causalité entre le refus fautif intervenu le 11 juillet 1997 et le chef de préjudice invoqué résultant d'un bail à construction conclu plus de cinq ans auparavant, n'est pas établi ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner l'expertise sollicitée par Me X, que ce dernier, qui s'est approprié les conclusions formulées par la SOCIETE DE GESTION IMMOBILIERE LA PROVENCALE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande présentée par ladite société ; qu'il est, toutefois, seulement fondé à demander la condamnation de la commune d'Allauch à lui verser, ès-qualité de mandataire liquidateur de la SOCIETE DE GESTION IMMOBILIERE LA PROVENCALE, une somme de 48.026 euros au titre des frais d'études de sols ;

Sur les intérêts :

Considérant que Me X, ès-qualité de mandataire liquidateur de la SOCIETE DE GESTION IMMOBILIERE LA PROVENCALE, a droit aux intérêts au taux légal de la somme de 48.026 euros, à compter de la date de la réception de la réclamation préalable formée le 18 février 1998 par ladite société;

Sur les intérêts des intérêts :

Considérant qu'aux termes de l'article 1154 du code civil : «Les intérêts échus des capitaux peuvent produire des intérêts, ou par une demande judiciaire, ou par une convention spéciale, pourvu que, soit dans la demande, soit dans la convention, il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière» ; que pour l'application des dispositions précitées la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond ; que cette demande prend toutefois effet au plus tôt à la date à laquelle elle est enregistrée et pourvu qu'à cette date il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière ; que, le cas échéant, la capitalisation s'accomplit à nouveau à l'expiration de chaque échéance annuelle ultérieure sans qu'il soit besoin de formuler une nouvelle demande ; que la SOCIETE DE GESTION IMMOBILIERE LA PROVENCALE a demandé la capitalisation des intérêts dans sa requête introductive d'instance enregistrée au greffe du tribunal administratif le 13 août 1998 ; qu'à cette date les intérêts n'étaient pas dus pour au moins une année entière ; que, toutefois, la SOCIETE DE GESTION IMMOBILIERE LA PROVENCALE a demandé la capitalisation des intérêts dans un mémoire, enregistré le 19 avril 2002 ; qu'à cette date les intérêts étaient dus pour au moins une année entière ; qu'il y a lieu dès lors de faire droit à cette demande tant à cette date qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;

Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la SOCIETE DE GESTION IMMOBILIERE LA PROVENCALE, représentée par Me X, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser à la commune d'Allauch une somme au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de condamner la commune d'Allauch à verser à Me X, ès-qualités de mandataire-liquidateur de la SOCIETE DE GESTION IMMOBILIERE LA PROVENCALE, la somme de 1.500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 98-5989 en date du 28 novembre 2002 du Tribunal administratif de Marseille est annulé.

Article 2 : La commune d'Allauch versera à Me X, ès-qualité de mandataire-liquidateur de la SOCIETE DE GESTION IMMOBILIERE LA PROVENCALE, une indemnité de 48.026 euros (quarante-huit mille vingt six euros). Cette somme portera intérêts au taux légal à compter de la réception de la demande préalable du 18 février 1998. Les intérêts échus à la date du 19 avril 2002 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 3 : La commune d'Allauch versera à Me X, ès-qualité de mandataire-liquidateur de la SOCIETE DE GESTION IMMOBILIERE LA PROVENCALE, une somme de 1.500 euros (mille cinq cents euros) sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Les conclusions formulées par la commune d'Allauch sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE DE GESTION IMMOBILIERE LA PROVENCALE, représentée par Me X, à la commune d'Allauch et au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.

N° 03MA00071 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 03MA00071
Date de la décision : 21/09/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. ROUSTAN
Rapporteur ?: Mme Isabelle BUCCAFURRI
Rapporteur public ?: M. CHERRIER
Avocat(s) : XOUAL

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2006-09-21;03ma00071 ?
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