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27/06/2006 | FRANCE | N°04MA02181

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4eme chambre-formation a 3, 27 juin 2006, 04MA02181


Vu la requête, enregistrée le 27 septembre 2004, présentée pour M. Bernard X, élisant domicile ..., par Me Chevillard ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0205829 du 30 juin 2004 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier, sur demande de la SARL Atelier Outremer, a annulé la décision en date du 3 octobre 2002 du ministre des affaires sociales, de l'emploi et de la solidarité refusant l'autorisation de le licencier ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 3000 € au titre de l'article L.761-1 du code de justice administ

rative ;

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Vu le code de justice administrat...

Vu la requête, enregistrée le 27 septembre 2004, présentée pour M. Bernard X, élisant domicile ..., par Me Chevillard ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0205829 du 30 juin 2004 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier, sur demande de la SARL Atelier Outremer, a annulé la décision en date du 3 octobre 2002 du ministre des affaires sociales, de l'emploi et de la solidarité refusant l'autorisation de le licencier ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 3000 € au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

………………………………………………………………………………………..

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 juin 2006 :

- le rapport de Mme Mariller, rapporteur ;

- les observations de Me Chevillard pour M. X et de Me Salgues de la SCP Mateu, Bourdin, Albisson pour la SARL Atelier Outremer ;

- et les conclusions de M. Bonnet, commissaire du gouvernement ;

Considérant que par le jugement attaqué du 30 juin 2004, le Tribunal administratif de Montpellier a, sur demande de la société Atelier Outremer, annulé la décision en date du 3 octobre 2002 par laquelle le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité a, d'une part annulé la décision de l'inspecteur du travail autorisant le licenciement de M. X, d'autre part refusé l'autorisation de le licencier au motif que les faits qui lui étaient reprochés étaient couverts par la loi n° 2002-1062 du 6 août 2002 portant amnistie ;

Sur les conclusions à fin de non-lieu à statuer présentées par la SARL Atelier Outremer :

Considérant que la circonstance que le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement a, en exécution du jugement du Tribunal administratif, statué à nouveau sur le recours hiérarchique de M. X et une nouvelle fois annulé la décision de l'inspecteur du travail autorisant son licenciement par une décision du 14 octobre 2004 ne rend pas sans objet la requête de M. X présentée à la Cour et tendant à l'annulation du jugement du Tribunal administratif du 30 juin 2004 annulant la première décision du ministre ; que, par suite, les conclusions à fin de non-lieu à statuer présentées par la société Atelier Outremer doivent être rejetées ;

Sur le bien fondé de la requête de M. X :

Considérant qu'aux termes de l'article R.436-6 du code du travail : Le ministre compétent peut annuler ou réformer la décision de l'inspecteur du travail sur le recours de l'employeur, du salarié ou du syndicat que ce salarié représente ou auquel il a donné mandat à cet effet. Ce recours doit être introduit dans les deux mois à compter de la notification de la décision de l'inspecteur ; qu'il résulte de cette disposition que la décision par laquelle l'inspecteur du travail autorise ou refuse d'autoriser le licenciement d'un salarié protégé est soumise au contrôle hiérarchique du ministre dans les conditions de droit commun ; que, lorsqu'il prononce l'annulation de la décision de l'inspecteur du travail pour un motif de légalité en tenant compte des circonstances de fait et de droit existant à la date à laquelle cette décision a été prise, le ministre se trouve saisi de la demande présentée par l'employeur, qu'il doit examiner en tenant compte des circonstances de fait et de droit existant à la date à laquelle il statue ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 12 de la loi du 6 août 2002 portant amnistie : Sont amnistiés, dans les conditions prévues à l'article 11, les faits retenus ou susceptibles d'être retenus comme motifs de sanctions prononcées par un employeur (…) ; que l'article 11 de la même loi dispose que Sont amnistiés les faits commis avant le 17 mai 2002 en tant qu'ils constituent des fautes passibles de sanctions disciplinaires ou professionnelles (…) Sauf mesure individuelle accordée par décret du Président de la République, sont exceptés du bénéfice de l'amnistie prévue par le présent article les faits constituant des manquements à l'honneur, à la probité ou aux bonnes moeurs (…) ;

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que dans sa demande d'autorisation de licenciement adressée à l'inspecteur du travail le 11 mars 2002, la société Atelier Outremer s'est exclusivement fondée sur le comportement fautif de M. X en invoquant les propos désobligeants qu'il aurait tenus envers la direction de l'entreprise, de nature à compromettre les intérêts et le développement de la société et sur des erreurs commises dans l'établissement de la paye et des plannings, ainsi qu'une incompétence grave en informatique ; que par la décision du 4 avril 2002 l'inspecteur du travail a autorisé la société Atelier Outremer à licencier M. X au motif que la perte de confiance de la société en son salarié s'appuyait sur des faits suffisamment graves ; que contrairement à ce que soutient la société Atelier Outremer dans son mémoire en défense, le ministre, usant de son pouvoir hiérarchique, a légalement pu annuler cette décision en raison de l'erreur de droit commise par l'inspecteur du travail, qui s'était ainsi mépris sur le motif de la demande d'autorisation de licenciement dont il était saisi, et par voie de conséquence, sur la nature du contrôle qui lui appartenait d'exercer ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'en raison de l'annulation de l'autorisation délivrée par l'inspecteur du travail, le ministre était lui-même saisi de la demande d'autorisation de licenciement de la société Atelier Outremer, qu'il devait examiner en tenant compte des circonstances de fait et de droit existant à la date à laquelle il a statué ; que, par suite, et contrairement à ce qu'affirme la société Atelier Outremer en défense, il devait prendre en compte l'intervention, postérieurement à la décision de l'inspecteur du travail, de la loi d'amnistie du 6 août 2002, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que le licenciement avait été exécuté ;

Considérant, en dernier lieu, que l'autorisation de licencier M. X a été exclusivement demandée pour des motifs disciplinaires et non en raison de son insuffisance professionnelle ; qu'il en résulte que les erreurs commises dans l'établissement de la paye et des plannings, ainsi que son incompétence en informatique lui sont reprochées par la société comme étant constitutives d'un comportement fautif et non comme des faits non fautifs caractérisant une insuffisance professionnelle ; que dès lors, l'ensemble des faits reprochés à M. X entre par nature dans le champ d'application des dispositions des articles 11 et 12 de la loi d'amnistie ; qu'aucun de ces faits ne constitue des manquements à la probité, aux bonnes moeurs ou à l'honneur ; qu'en conséquence, à la date du 3 octobre 2002 à laquelle le ministre a statué sur la demande d'autorisation de licenciement de M. X, ces faits étaient amnistiés ; que, par suite, c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur le motif tiré de ce que l'ensemble des faits reprochés à M. X n'étaient pas amnistiés pour annuler la décision du ministre ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour administrative d'appel saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la société Atelier Outremer devant le Tribunal administratif ;

Considérant que les faits reprochés à M. X étant amnistiés, le ministre était tenu de rejeter l'autorisation de licenciement de la société Atelier Outremer ; qu'en conséquence les autres moyens soulevés par ladite société devant le Tribunal sont inopérants ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. Bernard X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montpellier a, sur demande de la SARL Atelier Outremer, annulé la décision en date du 3 octobre 2002 du ministre des affaires sociales, de l'emploi et de la solidarité refusant l'autorisation de le licencier ;

Sur les conclusions de M. X et de la société Atelier Outremer tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui non compris dans les dépens ; que les conclusions présentées sur le même fondement par la société Atelier Outremer dirigées contre M. X doivent pour le même motif être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Montpellier du 30 juin 2004 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par la société Atelier Outremer devant le Tribunal Administratif de Montpellier est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de la société Atelier Outremer tendant à ce que la Cour prononce un non-lieu à statuer et tendant à la condamnation de M. X sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Les conclusions de M. X présentées sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Bernard X, à la société Atelier Outremer et au ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement.

4

04MA02181


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4eme chambre-formation a 3
Numéro d'arrêt : 04MA02181
Date de la décision : 27/06/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. RICHER
Rapporteur ?: Mme Cécile MARILLER
Rapporteur public ?: M. BONNET
Avocat(s) : CHEVILLARD

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2006-06-27;04ma02181 ?
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