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08/06/2006 | FRANCE | N°05MA02843

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3eme chambre - formation a 3, 08 juin 2006, 05MA02843


Vu la requête, enregistrée le 10 novembre 2005, présentée pour M. et Mme X élisant domicile au ..., par Me Rinieri ; M. et Mme Mohamed X demandent à la Cour :

1°) de réformer le jugement n°050288 en date du 6 octobre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Bastia n'a que partiellement fait droit à leur demande tendant à ce que le tribunal condamne le centre hospitalier de Bastia à leur verser la somme de 488 752,29 euros en réparation des préjudices subis par leur enfant El Hocine lors de sa naissance dans cet établissement le 13 mai 1989 ;

2°) de porter le m

ontant de la condamnation du centre hospitalier de Bastia à la somme de 488...

Vu la requête, enregistrée le 10 novembre 2005, présentée pour M. et Mme X élisant domicile au ..., par Me Rinieri ; M. et Mme Mohamed X demandent à la Cour :

1°) de réformer le jugement n°050288 en date du 6 octobre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Bastia n'a que partiellement fait droit à leur demande tendant à ce que le tribunal condamne le centre hospitalier de Bastia à leur verser la somme de 488 752,29 euros en réparation des préjudices subis par leur enfant El Hocine lors de sa naissance dans cet établissement le 13 mai 1989 ;

2°) de porter le montant de la condamnation du centre hospitalier de Bastia à la somme de 488 752,29 euros avec intérêts de droit à compter du 28 février 1996 et capitalisation de ces intérêts année par année ;

3°) de condamner le centre hospitalier de Bastia à leur verser la somme de 3 000 euros en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

……………………………………………………………………………………………………..

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code civil ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 mai 2006 :

- le rapport de M. Bourrachot, rapporteur ;

- et les conclusions de M. Trottier, commissaire du gouvernement ;

Considérant que Mme Y épouse X a accouché le 13 mai 1989 de son deuxième enfant au centre hospitalier de Bastia, le jeune El Hocine ; que les difficultés rencontrées lors de l'accouchement de Mme X ont rendu nécessaire le recours à une manoeuvre particulière de technique obstétricale qui a consisté, pour la sage femme, à réaliser une expression utérine associée à une traction et à un abaissement de la tête de l'enfant ; que cette manoeuvre a causé au jeune garçon des lésions ayant entraîné une paralysie partielle de son bras droit ; que M. et Mme X, agissant en leur qualité de tuteur légal, ont demandé la condamnation du centre hospitalier de Bastia tandis que la mutualité sociale agricole appelée en cause n'a pas fait valoir ses débours ; que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Bastia, après avoir retenu l'existence d'une faute de nature à engager sa responsabilité, a condamné le centre hospitalier de Bastia à verser à M. et Mme X une somme de 93 000 euros et 1 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative et a décidé de mettre les frais d'expertise liquidés à 850 euros à la charge du centre hospitalier général de Bastia ; que le centre hospitalier de Bastia ne contestant pas sa responsabilité, le jugement attaqué est devenu définitif sur ce point ;

Sur le préjudice :

Considérant, en premier lieu, que régulièrement mise en cause devant les premiers juges et la Cour, la mutualité sociale agricole n'a pas produit l'état de ses débours ;

Considérant, en deuxième lieu, que ni le rapport de l'expert désigné par le Tribunal administratif, ni l'avis de son sapiteur ne se prononce sur la date de consolidation de l'état du jeune El Hocine ; qu'une telle date de consolidation ne résulte pas davantage des autres éléments de l'instruction ; qu'aucune date de consolidation n'a été retenue par les premiers juges ; que, dès lors, c'est à bon droit que les premiers juges ont implicitement mais nécessairement statué à titre provisoire sur le préjudice du jeune El Hocine ;

Considérant, en troisième lieu, que si le jeune El Hocine ne peut prétendre à une indemnité pour perte de revenus au titre d'une incapacité temporaire totale qui ne ressort d'ailleurs pas du rapport d'expertise, il y a lieu de prendre en considération la gêne dont il fait état dans l'évaluation des troubles dans ses conditions d'existence résultant de la faute commise par le service hospitalier ; qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise ordonnée par le juge des référés que le taux d'incapacité résultant de la paralysie définitive du membre supérieur droit, en dépit d'une légère régression doit être évaluée à 35 % ; qu'il sera fait une juste appréciation des troubles dans les conditions d'existence résultant pour le jeune El Hocine X de son préjudice corporel en en fixant le montant à 55 000 euros, sans qu'il y ait lieu de distinguer la part sur laquelle pourrait s'imputer les droits de la mutualité sociale agricole qui n'a produit aucun état de frais de la part personnelle de la victime ; qu'il sera fait également une juste appréciation des souffrances physiques, du préjudice esthétique résultant de la paralysie ainsi que du préjudice d'agrément consécutif à cette infirmité en fixant ces chefs de préjudice à un montant global de 38 000 euros ; que par suite le préjudice subi par le jeune El Hocine X doit être fixé en l'état à 93 000 euros ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le jugement attaqué aurait fait du préjudice de leur enfant, dont l'étendue ne pourra être définitivement fixée qu'au moment où la victime aura atteint l'âge de 18 ans, une insuffisante évaluation ;

Sur les intérêts et les intérêts des intérêts :

Considérant, d'une part, que lorsqu'ils ont été demandés, et quelle que soit la date de cette demande, les intérêts moratoires dus en application de l'article 1153 du code civil courent à compter du jour où la demande de paiement du principal est parvenue au débiteur ou, en l'absence d'une telle demande préalablement à la saisine du juge, à compter du jour de cette saisine ; que, par suite, M. et Mme X ont droit aux intérêts au taux légal afférents à la somme de 93 000 euros à compter du 12 mars 2005, date à laquelle ils ont demandé réparation au centre hospitalier de Bastia devant le tribunal administratif, et non, contrairement à ce qu'ils soutiennent, à compter du 28 février 1996, la saisine du juge des référés en vue du prononcé d'une expertise ne constituant pas une sommation de payer ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 1154 du code civil : «Les intérêts échus des capitaux peuvent produire des intérêts, ou par une demande judiciaire, ou par une convention spéciale, pourvu que, soit dans la demande, soit dans la convention, il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière» ; que pour l'application des dispositions précitées la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond ; que cette demande prend toutefois effet au plus tôt à la date à laquelle elle est enregistrée et pourvu qu'à cette date il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière ; que, le cas échéant, la capitalisation s'accomplit à nouveau à l'expiration de chaque échéance annuelle ultérieure sans qu'il soit besoin de formuler une nouvelle demande ; que les époux X ont seulement demandé la capitalisation des intérêts pour la première fois en appel par leur requête enregistrée le 18 novembre 2005 ; qu'à cette date les intérêts n'étaient pas dus pour au moins une année entière ; qu'il y a toutefois lieu de faire droit à cette demande à compter du 13 mars 2006 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions des requérants tendant au remboursement des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1 : La somme de 93 000 euros que le centre hospitalier de Bastia a été condamné à payer à M. et Mme X est assortie des intérêts légaux à compter du 12 mars 2005. Les intérêts échus à la date du 13 mars 2006 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêt.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Bastia du 6 octobre 2005 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Mohamed X, au centre hospitalier de Bastia, à la mutualité sociale agricole de la Corse et au ministre de la santé et des solidarités.

Copie en sera adressée à Me Le Prado, à Me Rinieri et au préfet de la Haute-Corse.

N°05002843 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 05MA02843
Date de la décision : 08/06/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. DARRIEUTORT
Rapporteur ?: M. François BOURRACHOT
Rapporteur public ?: M. TROTTIER
Avocat(s) : RINIERI

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2006-06-08;05ma02843 ?
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