Vu la requête, enregistrée le 23 janvier 2001, présentée pour M. Vincent X, élisant domicile ... par Me FERRAN LECOQ, avocat ; M. X demande à la Cour :
11/ d'annuler le jugement n° 0002544/0002545/0003184/0003186/0003433/0003434 en date du 16 novembre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté ses demandes tendant à l'annulation d'une part de l'arrêté en date du 22 mars 2000 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône l'a mis en demeure de procéder à une étude diagnostic du site « Le Mentaure » à LA CIOTAT, d'autre part de l'arrêté en date du 21 avril 2000 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a engagé une procédure de consignation d'une somme de 400 000 F à son encontre correspondant au coût des études nécessaires à la définition des travaux de réhabilitation du site « Le Mentaure » et enfin de l'arrêté en date du 9 juin 2000 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a engagé une procédure de consignation d'une somme de 100 000 F à son encontre correspondant au coût des études nécessaires à la définition des travaux de réhabilitation du site « Le Mentaure » ;
22/ d'annuler lesdits arrêtés et, en tant que de besoin, surseoir à leur exécution ;
33/ de condamner l'Etat au paiement d'une somme de 10 000 F en application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
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Vu le jugement et les décisions attaquées ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'environnement ;
Vu la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 ;
Vu le décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 mai 2006 :
- le rapport de Mme Buccafurri, rapporteur ;
- et les conclusions de M. Cherrier, commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par la requête susvisée, M. X a relevé appel du jugement en date du 16 novembre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté ses demandes tendant à l'annulation d'une part de l'arrêté en date du 22 mars 2000 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône l'a mis en demeure de procéder à une étude diagnostic du site « Le Mentaure » à LA CIOTAT, d'autre part de l'arrêté en date du 21 avril 2000 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a engagé une procédure de consignation d'une somme de 400 000 F à son encontre correspondant au coût des études nécessaires à la définition des travaux de réhabilitation du site « Le Mentaure » et enfin de l'arrêté en date du 9 juin 2000 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a engagé une procédure de consignation à son encontre et a rendu immédiatement exécutoire un titre de perception d'un montant de 100 000 F correspondant au coût des travaux de terrassement et d'extinction des foyers de combustion ; que, M. X étant décédé en cours d'instance, ses héritiers ont entendu, par le mémoire susvisé, reprendre ladite instance en leurs noms ;
Sur la légalité des arrêtés des 22 mars, 21 avril et 9 juin 2000 :
Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L.511-1 du code de l'environnement : Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers, et d'une manière générale les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients, soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature et de l'environnement ... ; que, suivant le premier alinéa de l'article L.514-1 de ce code : I. - Indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées et lorsqu'un inspecteur des installations classées ou un expert désigné par le ministre chargé des installations classées a constaté l'inobservation des conditions imposées à l'exploitant d'une installation classée, le préfet met en demeure ce dernier de satisfaire à ces conditions dans un délai déterminé. Si, à l'expiration du délai fixé pour l'exécution, l'exploitant n'a pas obtempéré à cette injonction, le préfet peut : 1°) Obliger l'exploitant à consigner entre les mains d'un comptable public une somme répondant du montant des travaux à réaliser, laquelle sera restituée à l'exploitant au fur et à mesure de l'exécution des mesures prescrites ; il est procédé au recouvrement de cette somme comme en matière de créances étrangères à l'impôt et au domaine. Pour le recouvrement de cette somme, l'Etat bénéficie d'un privilège de même rang que celui prévu à l'article 1920 du code général des impôts ; 2°) Faire procéder d'office aux frais de l'exploitant, à l'exécution des mesures prescrites... ; qu'aux termes de l'article L. 514-2 dudit code : « Lorsqu'une installation classée est exploitée sans avoir fait l'objet … de l 'autorisation requise par le présent titre, le préfet met l'exploitant en demeure de régulariser sa situation dans un délai déterminé en déposant … une demande d'autorisation. Il peut, par arrêté motivé, suspendre l'exploitation de l' installation … jusqu'à la décision relative à la demande d'autorisation. Si l'exploitant ne défère pas à la mise en demeure de régulariser sa situation ou si sa demande d'autorisation est rejetée, le préfet peut, en cas de nécessité, ordonner la fermeture de l'installation. …Si l'exploitant n'a pas obtempéré dans le délai fixé, le préfet peut faire application des procédures prévues aux 1° et 2° du I de l'article L. 514-1. Le préfet peut faire procéder par un agent de la force publique à l'apposition des scellés sur une installation qui est maintenue en fonctionnement soit en infraction à une mesure de suppression, de fermeture ou de suspension prise en application de l'article L. 514-1, de l'article L. 514-7, ou des deux premiers alinéas du présent article, soit en dépit d'un refus d'autorisation. » ; qu'aux termes de l'article 34-1 du décret du 21 septembre 1977 modifié pris pour l'application de ces dispositions : I. -Lorsqu'une installation classée est mise à l'arrêt définitif, son exploitant remet son site dans un état tel qu'il ne s'y manifeste aucun des dangers ou inconvénients mentionnés à l'article 1er de la loi du 19 juillet 1976 susvisée. Le préfet peut à tout moment imposer à l'exploitant les prescriptions relatives à la remise en état du site, par arrêté pris dans les formes prévues à l'article 18 ci-dessus ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, le 6 juin 1997, l'inspecteur des Installations classées a dressé un procès-verbal d'infraction à la législation des installations classées à l'encontre de la société X, dont M. X était le gérant, qui exploitait une déposante de matières de vidanges, sur un terrain sis à LA CIOTAT, au lieu-dit Le Mentaure, appartenant à M. X ; que, ce procès-verbal ayant constaté l'exercice par la société X d'une activité de stockage de déchets de classe II sans que ladite société ait obtenu l'autorisation préalable requise, le préfet des Bouches-du-Rhône a, par un arrêté en date du 8 juillet 1997, enjoint à cette société de cesser toute réception de déchets et de se mettre en conformité, dans un délai de trois mois, avec la législation des installations classées, soit en présentant une demande de régularisation administrative, soit en fermant le site en présentant un programme de réhabilitation ; que la société X n'ayant pas obtempéré notamment à la mise en demeure du 8 juillet 1997, le site en question a été fermé par apposition des scellés en vertu d'un arrêté préfectoral du 12 mai 1998 ; que, par un arrêté en date du 8 juillet 1999, le préfet, après avoir constaté que les prescriptions de son arrêté du 8 juillet 1997 n'avaient pas été exécutées, a mis en demeure la société X d'établir un programme d'études techniques permettant d'évaluer la nature des nuisances et risques encourus par l'environnement du fait de l'activité ancienne sur le site et destiné à déterminer les travaux nécessaires à sa réhabilitation ; que M. X ayant cédé, le 30 juin 1998, l'ensemble des parts sociales qu'il détenait dans la société X à M. Mayer, sans que la décharge en litige entre dans le cadre de cette transaction ou fasse l'objet d'un bail de location, le préfet a rapporté son arrêté de consignation pris le 22 novembre 1999 à l'encontre de la société X et a, par l'arrêté ici contesté du 22 mars 2000, mis en demeure M. X, lequel avait conservé la propriété du terrain d'assiette de la décharge en litige, d'engager le programmes d'études techniques permettant d'évaluer la nature des nuisances et risques encourus par l'environnement du fait de l'activité ancienne sur le site du Mentaure ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction, et notamment des procès-verbaux d'infraction dressés par l'inspecteur des installations classées les 6 juin 1997 et 8 avril 1998 à l'encontre de la société X présentée comme la contrevenante, que, jusqu'à l'arrêté en date du 12 mai 1998 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a apposé les scellés sur le site du Mentaure, l'activité de stockage de déchets de classe II était exercée par la Société X, entité juridique distincte, de M. X, personne physique et gérant de ladite société ; qu'il ne résulte pas, en revanche de l'instruction, que M. X, qui était resté propriétaire du terrain d'assiette de la décharge exploitée irrégulièrement par la Société X, ait, comme l'ont estimé à tort les premiers juges, personnellement continué, l'exploitation illégale de ladite décharge après l'apposition des scellés ; qu'en particulier, si un procès-verbal d'infraction dressé le 19 avril 2000 par l'inspecteur des installations classés mentionne que des dépôts récents ont été effectués sur le site, il ne résulte pas de ce document que M. X aurait participé au dépôt de ces déchets, dont la nature au demeurant n'est pas précisée, ou donné son accord à l'usage de son terrain comme lieu de décharge notamment contre rémunération ; que, dans ces conditions, M. X ne saurait être regardé, en sa seule qualité de propriétaire, comme ayant la qualité d'exploitant de ladite décharge au sens des dispositions susrappelées de l'article L. 514-1 par renvoi de l'article L. 514-2 du code de l'environnement ; que, par suite, le préfet des Bouches-du-Rhône ne pouvait légalement mettre en demeure M. X de réaliser une étude technique pour la réhabilitation du site en cause ni procéder à la consignation de la somme de 400 000 F à son encontre correspondant au coût des études nécessaires à la définition des travaux de réhabilitation du site « Le Mentaure » et de celle d'un montant de 100 000 F correspondant au coût des travaux de terrassement et d'extinction des foyers de combustion ;
que de la même façon, lesdites mesures étant seulement susceptibles d'être mises à la charge de l'exploitant de l'installation, les dispositions précitées font obstacle à ce que M. X, en sa qualité de détenteur de l'installation ou des déchets qui y seraient abandonnés, se trouve substitué dans les obligations de l'exploitant du fait de la conservation de la propriété du terrain d'assiette de la décharge en cause ; qu'il suit de là que L'HOIRIE X est fondée à soutenir que les arrêtés précités sont entachés d'illégalité au regard des dispositions précitées ;
Considérant, en deuxième lieu, que, si les arrêtés contestés sont également fondés sur les dispositions de l'article 3 de la loi du 15 juillet 1975, désormais codifiées à l'article L. 541-3 du code de l'environnement, lesdites dispositions ont créé un régime juridique distinct de celui des installations classées pour la protection de l'environnement, n'ont pas le même champ d'application et ne donnent pas compétence aux mêmes autorités ; que, dès lors, elles ne pouvaient constituer la base légale des arrêtés contestés ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement, que l'HOIRIE X est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté les demandes de M. X tendant à l'annulation des arrêtés susvisés des 22 mars, 21 avril et 9 juin 2000 ; qu'elle est, par suite, fondée à demander l'annulation du jugement attaqué ainsi que celle desdits arrêtés ;
Considérant, en revanche, que si L'HOIRIE X demande la restitution des sommes ayant fait l'objet des arrêtés de consignation, assorties des intérêts au taux légal, ces conclusions nouvelles en appel sont, pour ce motif, irrecevables ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner l'Etat à verser à L'HOIRIE X la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement susvisé du tribunal administratif de Marseille en date du 16 novembre 2000, ensemble les arrêtés du préfet des Bouches-du-Rhône en date des 22 mars, 21 avril et 9 juin 2000 sont annulés.
Article 2 : L'Etat (ministre de l'écologie et du développement durable) est condamné à verser à L'HOIRIE X une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Nicole Y, Mme Michèle -X, M. Gilbert -X, à M. Jean-Pierre -X et à la ministre de l'écologie et du développement durable.
Copie pour information en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
N° 01MA00163 2