La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/01/2006 | FRANCE | N°05MA02026

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, Juge des reconduites, 19 janvier 2006, 05MA02026


Vu la requête enregistrée le 4 août 2005, présentée pour M. Morad X élisant domicile ..., par Me Vancraeyenest ;

M. X demande à la Cour

1°) d'annuler l'ordonnance n°0504500 en date du 18 juillet 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 mai 2005 par lequel le préfet du Vaucluse a prononcé sa reconduite à la frontière

2°) d'annuler ledit arrêté ;

-----------------------------------------------------------------------------------

-----------------------------------

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'...

Vu la requête enregistrée le 4 août 2005, présentée pour M. Morad X élisant domicile ..., par Me Vancraeyenest ;

M. X demande à la Cour

1°) d'annuler l'ordonnance n°0504500 en date du 18 juillet 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 mai 2005 par lequel le préfet du Vaucluse a prononcé sa reconduite à la frontière

2°) d'annuler ledit arrêté ;

----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision en date du 27 décembre 2004 par laquelle le président de la Cour a notamment délégué M. François Bourrachot, président, pour statuer sur l'appel des jugements rendus en matière de reconduite à la frontière ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 décembre 2005 :

- le rapport de M. Bourrachot, Président rapporteur ;

- les observations de Me Vancraeyenest ;

- et les conclusions de M.Trottier, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 111-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile :Lorsqu'il est prévu aux livres II et V du présent code qu'une décision ou qu'une information doit être communiquée à un étranger dans une langue qu'il comprend, cette information peut se faire soit au moyen de formulaires écrits, soit par l'intermédiaire d'un interprète. L'assistance de l'interprète est obligatoire si l'étranger ne parle pas le français et qu'il ne sait pas lire. En cas de nécessité, l'assistance de l'interprète peut se faire par l'intermédiaire de moyens de télécommunication. Dans une telle hypothèse, il ne peut être fait appel qu'à un interprète inscrit sur l'une des listes prévues à l'alinéa suivant ou à un organisme d'interprétariat et de traduction agréé par l'administration. Le nom et les coordonnées de l'interprète ainsi que le jour et la langue utilisée sont indiqués par écrit à l'étranger. ; qu'aux termes de l'article L. 512-1 du même code :Dès notification de l'arrêté de reconduite à la frontière, l'étranger est mis en mesure, dans les meilleurs délais, d'avertir un conseil, son consulat ou une personne de son choix. ; qu'aux termes des dispositions de l'article L. 512-2 du même code : L'étranger qui fait l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière peut, dans les quarante-huit heures suivant sa notification, lorsque l'arrêté est notifié par voie administrative, ou dans les sept jours, lorsqu'il est notifié par voie postale, demander l'annulation de cet arrêté au président du tribunal administratif (…) ;

Considérant qu'il résulte de la combinaison des dispositions précitées que, dans le cas où l'étranger est placé en rétention administrative, les voies et délais de recours prévus par l'article L.512-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne sont opposables qu'à la condition que l'étranger ait été mis en mesure d'en prendre connaissance dans les conditions prévues par les articles L.111-8 et L.512-1 du même code ;

Considérant qu'il n'est pas contesté que M. X, placé en garde à vue puis en rétention administrative à compter du 4 mars 2005, maîtrise mal le français et qu'il ne sait ni le lire, ni l'écrire ; qu'il n'est pas non plus contesté qu'il n'a pas été informé dans une langue qu'il comprend de la possibilité d'obtenir un interprète susceptible de l'instruire des voies et délais de recours contre la décision qui lui était notifiée ; que, dès lors que la présence d'un interprète était nécessaire pour le mettre en mesure de prendre connaissance de ces voies et délais de recours, le délai prévu par l'article L.512-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne lui était pas opposable ; qu'il suit de là que M. X est fondé à soutenir que c'est irrégulièrement que le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande comme tardive ; qu'ainsi, l'ordonnance du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Marseille du 18 juillet 2005 doit être annulée ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Marseille ;

Considérant, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 : 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;

Considérant que M. X, ressortissant de nationalité marocaine entré irrégulièrement en France en 2002, se borne à soutenir que l'exécution de l'arrêté porterait atteinte à ses droits à la vie familiale au regard de l'article précité de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales sans apporter d'autres précisions

à la Cour et qu'il ne démontre pas être dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine ; que, dans ces circonstances, l'arrêté du préfet du Vaucluse en date du 25 mai 2005 n'a pas porté au droit de M. X au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels a été pris ledit arrêté ; que le préfet n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant que les dispositions précitées de l'article L. 111-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont sans influence sur la légalité d'une mesure de reconduite à la frontière ;

Considérant que M. X ne saurait se prévaloir des stipulations de l'article 5 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui sont inapplicables au contentieux de la reconduite à la frontière

Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article L.522-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile - Sauf en cas d'urgence absolue, l'expulsion ne peut être prononcée que dans les conditions suivantes : 1° L'étranger doit être préalablement avisé dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat ; 2° L'étranger est convoqué pour être entendu par une commission qui se réunit à la demande de l'autorité administrative et qui est composée a)Du président du tribunal de grande instance du chef-lieu du département, ou d'un juge délégué par lui, président ; b) D'un magistrat désigné par l'assemblée générale du tribunal de grande instance du chef-lieu du département ; c) D'un conseiller de tribunal administratif. ; que selon l'article L.522-2 du même code : La convocation prévue au 2º de l'article L.522-1 doit être remise à l'étranger quinze jours au moins avant la réunion de la commission. Elle précise que l'intéressé a le droit d'être assisté d'un conseil ou de toute personne de son choix et d'être entendu avec un interprète. L'étranger peut demander le bénéfice de l'aide juridictionnelle dans les conditions prévues par la loi nº 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Cette faculté est indiquée dans la convocation. L'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée par le président de la commission. Les débats de la commission sont publics. Le président veille à l'ordre de la séance. Tout ce qu'il ordonne pour l'assurer doit être immédiatement exécuté. Devant la commission, l'étranger peut faire valoir toutes les raisons qui militent contre son expulsion. Un procès-verbal enregistrant les explications de l'étranger est transmis, avec l'avis motivé de la commission, à l'autorité administrative compétente pour statuer. L'avis de la commission est également communiqué à l'intéressé ;

Considérant, que le moyen tiré de la méconnaissance des articles L. 522-1 et L.522-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est inopérant à l'égard d'une décision portant reconduite à la frontière dès lors que ces articles concernent l'expulsion ;

Considérant qu'il résulte de toute de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté décidant de sa reconduite à la frontière pris le 25 mai 2005 par le préfet du Vaucluse ;

D E C I D E

Article 1er : L'ordonnance du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Marseille en date du 18 juillet 2005 est annulée.

Article 2 : La demande de M. X devant le Tribunal administratif de Marseille et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Morad X, au préfet du Vaucluse et au ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

Copie en sera adressée à Me Vancraeyenest.

2

0502026


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : Juge des reconduites
Numéro d'arrêt : 05MA02026
Date de la décision : 19/01/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. François BOURRACHOT
Rapporteur public ?: M. TROTTIER
Avocat(s) : VANCRAEYENEST

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2006-01-19;05ma02026 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award