Vu, I, sous le n° 04MA00451, la requête enregistrée le 1er mars 2004 présentée pour la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES ALPES MARITIMES, dont le siège est ..., représentée par son directeur en exercice, par Me Y... ; la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES ALPES MARITIMES demande à la Cour :
1°) d'annuler l'article 2 du jugement n° 0103691 en date du 17 décembre 2003 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier d'Antibes à lui verser la somme de 21 608,02 euros au titre des débours qu'elle a exposés pour les soins de M. F... décédé le 27 août 1998, la somme de 760 euros au titre de l'indemnité forfaitaire prévue par les articles 9 et 10 de l'ordonnance du 24 janvier 1996 ;
2°) de condamner le centre hospitalier d'Antibes à lui verser la somme de
18 376,84 euros au titre de ses débours, la somme de la somme de 760 euros au titre de l'indemnité forfaitaire prévue par les articles 9 et 10 de l'ordonnance du 24 janvier 1996 ;
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Vu, II, sous le n° 04MA00719, la requête enregistrée le 31 mars 2004, présentée pour Mme A... , élisant domicile ...,
Mme C... , élisant domicile ..., Mme X... , élisant domicile ..., par Me Z... ; elles demandent à la Cour :
1°) de réformer le jugement n° 0103691 en date du 17 décembre 2003 par lequel le Tribunal administratif de Nice a condamné le centre hospitalier d'Antibes a leur verser la somme de 4 500 euros, somme portant intérêts au taux légal à compter du 12 mars 2001, somme qu'elles jugent insuffisante en réparation d'un surcroît de souffrances physiques dû à un retard de diagnostic ;
2°) de condamner le centre hospitalier d'Antibes à leur verser la somme de 20 000 euros chacune en réparation du préjudice moral subi du fait du décès de leur père, la somme de
61 000 euros au titre de ses souffrances endurées et la somme de 45 000 euros en réparation de la perte de chance de survie ;
3°) de condamner le centre hospitalier d'Antibes à leur verser la somme de 2 500 euros en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code civil ;
Vu le code monétaire et financier ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 novembre 2005 :
- le rapport de M. Bourrachot, rapporteur ;
- les observations de Me D... substituant la SCP Cohen Y... ;
- et les conclusions de M. Trottier, commissaire du gouvernement ;
Sur la jonction :
Considérant que les requêtes susvisées sont dirigées contre un même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant qu'alors même que le défendeur à l'instance aurait admis, d'ailleurs à titre subsidiaire, l'existence d'un préjudice moral résultant pour les requérantes du décès de leur père, les premiers juges ont pu régulièrement écarter la réparation d'un tel préjudice en estimant qu'il ne présentait pas un lien de causalité direct et certain avec la faute médicale dont le service hospitalier a été déclaré responsable ;
Sur la responsabilité :
Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport de l'expertise ordonnée en première instance par le juge des référés, que M. , victime d'une chute, présentait à son admission au Centre hospitalier d'Antibes un traumatisme crânien, un traumatisme facial avec un hématome en lunettes et des cervicalgies qui nécessitaient un examen neurologique au vu de clichés d'un examen radiographique dont le blessé n 'a pas bénéficié ; que ce manquement est susceptible de mettre enjeu la responsabilité hospitalière sur le fondement de la faute médicale ;
Considérant, d'une part, qu'une compression médullaire a pris place au niveau de la dislocation du rachis cervical en provoquant une tétraparésie puis une tétraplégie pendant que le patient était en centre de moyen séjour ; qu'un diagnostic plus précoce, avant l'installation de la tétraplégie, aurait permis au blessé d'éviter les conséquences neurologiques du traumatisme ; que parmi celles-ci figure la paralysie des muscles respiratoires dont le déficit a entraîné l'encombrement pulmonaire vers une septicémie avec un choc septique ; qu 'il existe un lien de causalité direct et certain entre la réalisation d'un risque de paralysie qui pouvait être évité par un traitement plus précoce de la lésion du rachis cervical, s'il n 'y avait pas eu de manquement aux soins médicaux donnés au centre hospitalier d'Antibes et cette faute médicale imputable à l'établissement public hospitalier ; que M. a enduré, en conséquence, un surcroît de souffrances dont la réparation doit être mise à la charge du centre hospitalier d'Antibes ;
Considérant, d'autre part, qu'il résulte du même rapport d'expertise, que le décès de
M. trouve d'abord son origine dans la conjonction d'une septicémie avec choc septique et d'une rupture de varice oesophagienne, l'état initial de la victime ayant seulement concouru à la réalisation du dommage ; que si le diagnostic avait été fait précocement et l'intervention pratiquée avant l'installation de la tétraplégie, M. aurait peut-être surmonté ce traumatisme mais qu'il est certain que l'installation et l'aggravation des signes neurologiques et en particulier la paralysie des muscles respiratoires associés aux antécédents du patient n'a pu que hâter l'issue fatale du patient ; qu'ainsi le retard de diagnostic a privé
M. de chances réelles de rétablissement ou de récupération même partielle alors même qu'eu égard au caractère extrêmement aigu de l'évolution des déficits neurologiques observés chez l'intéressé, ce dernier n'aurait eu que des chances limitées mais réelles de récupérer si le diagnostic avait été posé de manière plus précoce ; que, comme l'était
M. de son vivant, ses héritiers sont en droit de prétendre à la réparation intégrale de son préjudice ;
Sur le préjudice :
Considérant, en premier lieu, que le droit à la réparation d'un dommage, quelle que soit sa nature, s'ouvre à la date à laquelle se produit le fait qui en est directement la cause ; que si la victime du dommage décède avant d'avoir elle-même introduit une action en réparation, son droit, entré dans son patrimoine avant son décès, est transmis à ses héritiers ; qu'il sera fait une juste appréciation des très importantes souffrances endurées par M. en les fixant à la somme de 30 000 euros ; qu'en revanche, en application des mêmes principes, le préjudice résultant pour la victime de son décès, et que les requérantes désignent par une perte de chances de survie, ne peut faire l'objet d'une réparation distincte ; que, dès lors, il y a seulement lieu de condamner le centre hospitalier d'Antibes à payer une somme de 30 000 euros aux héritiers de M. au prorata de leurs droits dans la succession de la victime, lesdits droits étant rapportés à la somme des droits des héritiers présents dans l'instance d'appel ;
Considérant, en deuxième lieu, que le diagnostic tardif de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier d'Antibes n'a entraîné pour la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES ALPES MARITIMES aucun frais autre que ceux qu'elle aurait dû normalement prendre en charge si le diagnostic avait été posé plus tôt ; que la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES ALPES MARITIMES n'invoque aucune autre faute ; que, par suite, la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES ALPES MARITIMES n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'article 2 du jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ;
Considérant, en troisième lieu, qu'il sera fait une juste appréciation de la douleur morale éprouvée par les requérantes du fait du décès de leur père, M. , en évaluant ce chef de préjudice à 8 500 euros pour chacune ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A... ,
Mme C... et Mme X... sont fondées à demander la réformation du jugement du Tribunal administratif de Nice du 17 décembre 2003 ;
Sur les frais non compris dans les dépens :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de condamner le centre hospitalier d'Antibes à payer à Mme A... , Mme C... et Mme X... une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le centre hospitalier d'Antibes est condamné à verser une somme de 30 000 euros aux héritiers de M. E... au prorata de leurs droits dans la succession, lesdits droits étant rapportés à la somme des droits des héritiers présents dans l'instance d'appel.
Article 2 : Le centre hospitalier d'Antibes est condamné à payer à Mme A... , à Mme C... et à B... Anne-Laurence la somme de 8 500 euros chacune.
Article 3 : Le jugement du Tribunal administratif de Nice du 17 décembre 2003 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le centre hospitalier d'Antibes est condamné à payer à Mme A... , Mme C... , Mme X... , la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A... , de
Mme C... et de Mme X... est rejeté.
Article 6 : La requête de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES ALPES MARITIMES est rejetée.
Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... , à
Mme C... , à Mme X... , à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES ALPES MARITIMES, au centre hospitalier d'Antibes et au ministre de la santé et des solidarités.
Copie sera adressée à la SCP Cohen Y..., à Me Le Prado et au préfet des Alpes-Maritimes.
N° 04MA000451,04MA00719 2