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28/11/2005 | FRANCE | N°02MA01346

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5eme chambre - formation a 3, 28 novembre 2005, 02MA01346


Vu la requête, enregistrée le 15 juillet 2002 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 02MA01346, présentée par Me Richard Grau, avocat, pour la Société Civile Immobilière BLEU MARINE, élisant domicile ..., représentée par sa gérante statutaire ; laquelle demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°9700910 en date du 18 avril 2002 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation d'une décision implicite de la Société d'économie mixte SEMAF, aménageur, lui refusant le remboursement des participat

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Vu la requête, enregistrée le 15 juillet 2002 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 02MA01346, présentée par Me Richard Grau, avocat, pour la Société Civile Immobilière BLEU MARINE, élisant domicile ..., représentée par sa gérante statutaire ; laquelle demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°9700910 en date du 18 avril 2002 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation d'une décision implicite de la Société d'économie mixte SEMAF, aménageur, lui refusant le remboursement des participations versées par elle au titre du lot n° 9 qu'elle a acquis dans la zone d'aménagement concerté de Port Fréjus ;

2°) de condamner la Commune de Fréjus, subrogée dans les droits de la SEMAF, au remboursement en principal des sommes de

- 236 295,97 euros au titre de la participation aux équipements publics ;

- 154 135,86 euros au titre de la participation à la communication et à la publicité ;

- 34 069,90 euros au titre de l'aménagement de dallages complémentaires ;

Les dites sommes étant assorties des intérêts au taux légal majoré de cinq points à compter du 16 décembre 1996 ;

3°) de lui allouer la capitalisation des intérêts pour chacune de ces sommes au taux légal majoré de cinq points ;

4°) de condamner la Commune de Fréjus au versement de la somme de 228 673.52 euros au titre du préjudice subi ;

5°) de condamner la Commune de Fréjus au versement de la somme de 10 000 euros hors taxe sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 septembre 2005 :

- le rapport de M. Francoz, premier conseiller ;

- les observations de Me Grau, avocat de la SCI BLEU MARINE ;

- et les conclusions de M. Louis, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par délibération en date du 9 juin 1986, le conseil municipal de la Commune de Fréjus a décidé la création de la zone d'aménagement concerté de Port Fréjus dont la réalisation a été confiée à la Société d'économie mixte de l'aire de Fréjus (SEMAF) par un traité de concession approuvé par délibération du 27 septembre 1986 ; que selon acte de vente intervenu le 20 juillet 1990 entre la SEMAF et la SCI BLEU MARINE, cette dernière a acquis dans le périmètre de la ZAC susmentionnée, un ensemble de parcelles formant l'îlot n° 9 destiné à la réalisation d'un programme de construction de 92 logements autorisé par un permis de construire délivré le 12 novembre 1990 et s'est engagée à verser à la SEMAF une participation pour la réalisation des équipements publics nécessaires à la ZAC, d'un montant de 250 F par m² de surface hors oeuvre nette, ainsi qu'une participation aux frais de communication et de publicité engagés par la SEMAF dans l'intérêt collectif et général de l'image de Port Fréjus dont le montant était fixé à 5 % HT du montant TTC du prix du terrain ; que la société requérante se pourvoit en appel du jugement en date du 18 avril 2002 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande en décharge de ces participations ; que la Commune de Fréjus subrogée dans les droits et obligations de la SEMAF à la suite de la dissolution de celle-ci et de la résiliation du contrat de concession, demande le rejet de cette requête ;

Considérant, que contrairement à ce que soutient la requérante, aucun texte ni aucun principe n'imposait, à la date à laquelle le permis de construire a été délivré, que les participations exigées des constructeurs y fussent mentionnées ; qu'il était seulement exigé que, dans la mesure où une telle mention avait été portée au permis de construire aucune participation d'autre sorte, ne puisse être demandée au constructeur ; que, dans ces conditions, la circonstance que le permis de construire litigieux ait été annulé par un jugement devenu définitif n'est pas, par elle-même de nature à priver de base légale les participations en cause ;

Considérant que la circonstance également invoquée, tirée de ce qu'en l'absence de mention au permis de construire, lesdites participations n'auraient fait l'objet d'aucune mesure de publicité, est en tout état de cause, sans incidence sur la régularité ou le bien-fondé des dites participations dès lors qu'il n'est pas contesté qu'elles ont été régulièrement imposées et portées à la connaissance de la société requérante à l'occasion de la signature de l'acte authentique par lequel celle-ci a acquis le terrain d'assiette du programme immobilier qu'elle envisageait d'édifier ;

Considérant qu'en s'en tenant à soutenir d'une manière générale et sans autre justification notamment quant aux actes en cause ou à l'influence déterminante que les élus incriminés auraient eu sur le vote de l'assemblée délibérante ou encore à l'intérêt personnel et direct qu'ils étaient censés en retirer, que l'ensemble des actes constitutifs de la ZAC de Port Fréjus auraient été approuvés par le conseil municipal de la Commune de Fréjus alors que le maire et l'un de ses adjoints qui assuraient également les fonctions de président et de vice-président de la SEMAF, étaient intéressés à l'affaire et en se limitant à se prévaloir sans autre démonstration propre à l'espèce de la théorie des actes complexes, la société requérante ne met la Cour en mesure d'apprécier utilement ni la portée ni le bien-fondé du moyen qu'elle invoque à l'encontre les participations financières qui ont été exigées d'elle ;

Considérant qu'à le supposer établi, le défaut de transmission au contrôle de légalité de la délibération du conseil municipal de Fréjus en date du 27 septembre 1986 approuvant le traité de concession signé pour la réalisation de la ZAC de Port Fréjus reste sans influence sur la légalité d'un tel acte ainsi que sur celle des participations réclamées ;

Considérant que la SCI BLEU MARINE relève que, par un arrêt en date du 27 février 1995, le Conseil d'Etat a retenu, par la voie de l'exception, l'illégalité de la délibération du conseil municipal de Fréjus en date du 26 octobre 1987 approuvant le plan d'aménagement de zone de Port Fréjus, ainsi que de l'arrêté du 7 décembre 1989 déclarant d'utilité publique les travaux et acquisitions nécessaires à la réalisation de la zone ; que toutefois, comme l'ont estimé à bon droit les premiers juges, cette décision qui, eu égard à ses motifs, affecte essentiellement le périmètre de la ZAC, est, en tant que telle, sans incidence sur la régularité des participations financières exigées des constructeurs à l'occasion de la réalisation d'une opération immobilière ;

Considérant que si la SCI BLEU MARINE soutient encore que les participations seraient également dépourvues de base légale dès lors que, eu égard à la décision susmentionnée du Conseil d'Etat en date du 27 février 1995, le permis de construire qui lui a été délivré le 12 novembre 1990 était lui-même illégal et a d'ailleurs fait l'objet d'une annulation contentieuse passée en force de chose jugée, cette circonstance s'avère comme il vient d'être dit, inopérante ; qu'au surplus, il est constant que, pour sa part, la société requérante n'a elle-même, nullement renoncé, de ce seul fait, ni à la poursuite de l'exécution d'un permis de construire dont elle relève elle-même l'illégalité ni à la commercialisation de son programme immobilier ;

Considérant que l'obligation faite au constructeur de s'acquitter des participations en litige bien qu'incluse, au cas d'espèce, dans les stipulations d'un acte de vente, présente, en ce qui la concerne, le caractère d'une mention réglementaire traduisant une décision unilatérale de la puissance publique et non pas celui d'une clause contractuelle à caractère synallagmatique ; qu'il en résulte que la légalité des participations en litige doit, comme l'ont relevé à bon droit les premiers juges, s'apprécier au regard des dispositions des articles L.332-6 du code de l'urbanisme, 1585C du code général des impôts et 317 quater de l'annexe II du code général des impôts alors applicables ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que lorsque, comme en l'espèce, les zones d'aménagement concerté ont été exclues du champ d'application de la taxe locale d'équipement, les participations susceptibles d'être exigées des constructeurs sont celles prévues aux 2° et 3° de l'article L.332-6 du code de l'urbanisme et celles visées à l'article 317 quater de l'annexe II au code général des impôts lequel n'en dresse pas une liste limitative ;

Considérant qu'il ressort du dossier qu'eu égard à la nature et à l'objet des divers équipements concernés, les participations réclamées au titre des équipements publics y compris les dallages complémentaires, doivent, dans leur ensemble et contrairement à ce que soutient la société requérante, être regardées comme correspondant au financement d'équipements réalisés dans l'intérêt principal des habitants et usagers de la ZAC de Port Fréjus, laquelle constitue un nouveau quartier de la ville localisé autour d'un port de plaisance, qui en est le pôle d'attraction, et ayant vocation à l'habitat permanent comme au séjour saisonnier et à la navigation de plaisance ; que ces participations ont par suite une cause licite au regard des dispositions précitées du code de l'urbanisme ;

Considérant en revanche, que les participations réclamées au titre des frais de communication et de publicité, qui, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, ne sauraient être regardées comme ayant une nature juridique différente des précédentes, ne sont pas, eu égard à leur objet, au nombre de celles qui peuvent, en vertu des dispositions susmentionnées, être légalement réclamées aux constructeurs ; que la société requérante est, par suite, fondée à en demander la décharge ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SCI BLEU MARINE est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande en tant qu'elle était dirigée contre les participations financières qui lui étaient réclamées au titre des frais de communication et de publicité ;

Sur les conclusions présentées à fin de réparations d'un préjudice :

Considérant que de telles conclusions, présentées pour la première fois en appel, sont irrecevables ; qu'il y a lieu de les rejeter comme telles ;

Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :

Considérant qu'il résulte des motifs qui précèdent que la SCI BLEU MARINE a droit aux intérêts au taux légal sur la somme de 154 135,85 euros (1 011 065 F) dont elle s'est acquittée au titre des participations pour frais de communication et de publicité, à compter du 16 décembre 1996, date de sa réclamation ; qu'elle a demandé par sa requête enregistrée le 15 juillet 2002 puis par mémoire enregistré le 19 septembre 2003, la capitalisation des intérêts ; qu'à ces dates les intérêts étaient dus pour au moins une année entière ; qu'il y a lieu, dès lors, de faire droit également à cette demande à ces dates ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de ces dates ; qu'en revanche, il ne peut être fait droit à ses conclusions tendant à ce que le taux de l'intérêt légal soit majoré de cinq points, une telle majoration ayant le caractère d'une pénalité dont il n'est pas soutenu qu'elle ait été supportée par la requérante ;

Sur les frais engagés et non compris dans les dépens :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de laisser à la charge de chaque partie les frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Il est accordé à la SCI BLEU MARINE décharge de l'obligation de payer le montant des participations qui lui ont été réclamées par la Commune de Fréjus subrogée dans les droits et obligations de la SEMAF au titre des frais de communication et de publicité à raison de l'îlot n° 9 de la ZAC de Port Fréjus.

Article 2 : La Commune de Fréjus restituera à la SCI BLEU MARINE la somme de 154 135,86 euros. Ladite somme portera intérêts au taux légal à compter du 16 décembre 1996. Les intérêts échus à la date du 15 juillet 2002 et du 19 septembre 2003 seront capitalisés à ces dates puis à chaque échéance annuelle à compter de ces dates, pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 3 : Le jugement du Tribunal administratif de Nice en date du 18 avril 2002 est réformé en ce qu'il a de contraire aux articles 1 et 2 ci-dessus du présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la SCI BLEU MARINE et les conclusions présentées par la Commune de Fréjus sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative, sont rejetés.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI BLEU MARINE, à la Commune de Fréjus et à la Société d'économie mixte de l'Aire de Fréjus.

N° 02MA01346 4

n


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 02MA01346
Date de la décision : 28/11/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BONMATI
Rapporteur ?: M. Patrick FRANCOZ
Rapporteur public ?: M. LOUIS
Avocat(s) : GRAU

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2005-11-28;02ma01346 ?
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