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18/11/2005 | FRANCE | N°03MA01780

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6eme chambre - formation a 3, 18 novembre 2005, 03MA01780


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 2 septembre 2003, sous le n° 03MA01780, présentée pour la société OMNIUM DE TRAITEMENT ET DE VALORISATION (OTV), prise en la personne de son représentant légal en exercice et dont le siège est situé 1 place Montgolfier à Saint Maurice (94417), par Me J. Aubignat, avocat ;

La société OMNIUM DE TRAITEMENT ET DE VALORISATION demande à la Cour :

A titre principal :

1°/ d'annuler le jugement du 19 juin 2003 par lequel le Tribunal administratif de Bastia a rejeté sa requête t

endant à la condamnation de la commune de Lumio à lui verser la somme de 618.840 F,...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 2 septembre 2003, sous le n° 03MA01780, présentée pour la société OMNIUM DE TRAITEMENT ET DE VALORISATION (OTV), prise en la personne de son représentant légal en exercice et dont le siège est situé 1 place Montgolfier à Saint Maurice (94417), par Me J. Aubignat, avocat ;

La société OMNIUM DE TRAITEMENT ET DE VALORISATION demande à la Cour :

A titre principal :

1°/ d'annuler le jugement du 19 juin 2003 par lequel le Tribunal administratif de Bastia a rejeté sa requête tendant à la condamnation de la commune de Lumio à lui verser la somme de 618.840 F, ainsi que 100.000 F au titre des préjudices subis ;

2°/ de condamner la commune de Lumio à lui verser la somme de 94.350 euros TTC en exécution de la transaction conclue entre elles le 7 mars 2000 ;

A titre subsidiaire, en cas d'annulation de la transaction :

3°) de dire que les travaux exécutés présentent un caractère indispensable devant donner lieu à paiement ;

4°) de dire que le défaut de paiement des travaux est dû à une faute de la commune, qui a causé un préjudice d'un montant de 94.350 euros TTC ;

5°) de dire que la commune de Lumio doit lui verser une indemnité de 83.463 euros HT en compensation de l'enrichissement sans cause dont elle bénéficie ;

6°) dans tous les cas, de condamner la commune de Lumio à lui verser une indemnité de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la mise en demeure adressée le 27 juillet 2004 à la commune de Lumio en application de l'article R.612-3 du code de justice administrative et l'avis de réception de cette mise en demeure ;

Vu l'ordonnance prise par le président de la 6ème chambre de la Cour le 2 décembre 2004, fixant la date de clôture de l'instruction au 3 janvier 2005 ;

Vu la lettre du président de la 6ème chambre de la Cour en date du 19 septembre 2005, informant les parties en litige que la décision à intervenir était susceptible d'être fondée sur un moyen d'ordre public soulevé d'office ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 octobre 2005 :

- le rapport de M. Gonzales, président assesseur,

- et les conclusions de M. Dubois, commissaire du gouvernement.

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que la société requérante fait grief au jugement attaqué d'avoir méconnu le principe du contradictoire en annulant la convention déférée par le préfet sur le fondement d'un moyen d'ordre public soulevé d'office dont elle n'a été informée par télécopie que trois jours francs avant l'audience du 5 juin 2003 ;

Considérant que selon les dispositions de l'article R.611-7 du code de justice administrative : « Lorsque la décision lui paraît susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office, le président de la formation de jugement, ou, au Conseil d'Etat, la sous-section chargée de l'instruction, en informe les parties avant la séance de jugement et fixe le délai dans lequel elles peuvent, sans qu'y fasse obstacle la clôture éventuelle de l'instruction, présenter leurs observations sur le moyen communiqué » ; que les dispositions précitées sont destinées à provoquer un débat contradictoire sur les moyens que le juge doit relever de sa propre initiative ; qu'en conséquence, le président de la formation de jugement doit veiller à ce que les parties au litige disposent d'un délai raisonnable, avant l'audience publique, pour discuter de manière contradictoire la pertinence du moyen relevé d'office qui leur est notifié ; qu'au besoin, il y a lieu de reporter la date de l'audience publique et de rouvrir l'instruction ;

Considérant que la société requérante a été informée par télécopie le 27 mai 2003, soit le jour même de son envoi, des moyens soulevés d'office tirés, d'une part, de la nullité de la transaction signée le 7 mars 2000 entre la SA OTV et la commune de Lumio, d'autre part, du fait qu'une personne publique ne peut être condamnée à payer une somme qu'elle ne doit pas ; que la société OTV a adressé par télécopie ses observations en réponse à ces moyens le 2 juin 2003 ; que, contrairement à ce qu'elle soutient, l'article R.611-7 du code de justice administrative n'exige pas que la communication d'un moyen soulevé d'office doive se faire par lettre recommandée avec accusé de réception, ou doive mentionner que les observations ne peuvent contenir de conclusions nouvelles ; que, par suite, la SA OTV n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué a été rendu sur une procédure irrégulière et à en demander l'annulation ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

Considérant que le maire de Lumio a donné, le 20 mai 1997, son accord écrit pour l'installation d'une tour de désodorisation et d'un système d'autocontrôle, ainsi que pour la fourniture d'une benne à boues, aux conditions de livraison, de prix et de paiement qu'il avait préalablement définies avec la société OTV, ce qui peut être assimilé à un avenant au marché initial, lequel ne prévoyait pas ces équipements ; que, par nature, un tel avenant doit faire l'objet d'une transmission au représentant de l'Etat dans le département en vue du contrôle de sa légalité ; qu'il résulte de l'instruction que cette formalité n'a pas été respectée, entachant ainsi cet acte de nullité ;

Considérant qu'en l'absence d'un marché régulier, l'entrepreneur dont le contrat est nul est fondé, en tout état de cause, à réclamer le remboursement de celles de ses dépenses qui ont été utiles à la collectivité envers laquelle il s'était engagé ; qu'il peut en outre, dans le cas où, comme en l'espèce, la nullité du contrat résulte d'une faute de l'administration, prétendre à la réparation du dommage imputable à cette faute et, le cas échéant, demander à ce titre le paiement du bénéfice dont il a été privé par la nullité de ce contrat ; qu'à cette fin, une convention de transaction peut être légalement passée entre les parties pour permettre l'indemnisation de l'entrepreneur, à condition que l'indemnité soit établie sur la base des principes ainsi définis ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Lumio pouvait légalement décider de compenser les conséquences de la nullité de l'accord du 20 mai 1997 en concluant, ainsi qu'elle l'a fait le 7 mars 2000, une transaction avec la société OTV ; que contrairement à ce qu'a retenu le tribunal administratif, une telle transaction pouvait non seulement déterminer l'indemnité attribuée à la société OTV sur la base des dépenses utiles exposées par cette société au profit de la commune de Lumio, mais également inclure, eu égard à l'illégalité fautive pouvant être reprochée à la commune, la réparation de la perte du bénéfice escompté de la réalisation des prestations commandées ; qu'il n'est pas allégué à cet égard, et qu'il ne résulte pas de l'instruction que l'indemnité de 573.000 F hors taxes fixée par la convention, excèderait les sommes dues à la société OTV en application des considérations qui précèdent ; qu'ainsi, c'est à tort que le tribunal a estimé que cette convention était entachée de nullité au motif qu'elle allait au-delà de l'indemnisation des dépenses utiles ; que la société requérante est donc fondée à demander la condamnation de la commune à lui verser 87.353, 29 euros (573.000 F) hors taxes, ladite somme devant être assortie des intérêts au taux légal à compter du 14 mars 2000, date de la requête de la société OTV présentée devant le tribunal administratif ; que la demande de capitalisation des intérêts présentée à cette date, à laquelle il n'était pas dû au moins une année d'intérêts, ne peut être accueillie ; qu'il y a lieu, en revanche, de faire droit à la demande aux mêmes fins présentée par la société devant le tribunal le 3 août 2002, et ce à cette date ainsi qu'à chaque échéance annuelle postérieure ;

Considérant, par ailleurs, que les conclusions indemnitaires présentées devant le tribunal administratif par la société OTV et tendant à la réparation de la résistance abusive de la commune de Lumio à lui régler les sommes dues ne sont pas assorties de justifications suffisantes permettant de les tenir pour établies ; que cette société n'est donc pas fondée à soutenir que c'est à tort que ce tribunal les a rejetées ;

Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'allouer à la société OTV la somme de 1.000 euros à la charge de la commune de Lumio, sur le fondement des dispositions de cet article ;

D E C I D E :

Article 1er : La commune de Lumio est condamnée à verser 87.353, 29 euros (quatre-vingt-sept mille trois cent cinquante trois euros et vingt-neuf centimes) hors taxes à la société OMNIUM DE TRAITEMENT ET DE VALORISATION.

Article 2 : La somme mentionnée à l'article 1 portera intérêts au taux légal à compter du 14 mars 2000 ; les intérêts seront capitalisés pour produire eux-mêmes intérêts le 3 août 2002 et à chaque échéance annuelle à compter de cette date.

Article 3 : La commune de Lumio versera 1.000 euros (mille euros) à la société OMNIUM DE TRAITEMENT ET DE VALORISATION en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Bastia est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la société OMNIUM DE TRAITEMENT ET DE VALORISATION est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la société OMNIUM DE TRAITEMENT ET DE VALORISATION, à la commune de Lumio, au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.

N° 03MA01780 4


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 03MA01780
Date de la décision : 18/11/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GANDREAU
Rapporteur ?: M. Serge GONZALES
Rapporteur public ?: M. DUBOIS
Avocat(s) : AUBIGNAT

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2005-11-18;03ma01780 ?
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